VPB 52.78
(Décision de la Comm. eur. DH du 8 mars 1988 déclarant irrecevable la req. No 11811/85, Spillmann c/Suisse)
Regeste Deutsch
Résumé Français
Regesto Italiano
Erwägungen
Erwägung 4.
Art. 13 EMRK. Recht auf wirksame Beschwerde bei einer nationalen Instanz.
Im Bereich der Telefonabhörung wird auf Bundesebene das Erfordernis der wirksamen Beschwerde durch die verschiedenen Rechtsbehelfe erfüllt, welche dem Rechtssuchenden zur Verfügung stehen, insbesondere durch die in diesem Bereich bei der Aufsichtsbeschwerde an das Eidgenössische Justiz- und Polizeidepartement angewendete Praxis.
Art. 13 CEDH. Droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale.
En matière d'écoutes téléphoniques, l'ensemble de moyens juridiques dont dispose le justiciable sur le plan fédéral, et en particulier la pratique appliquée dans ce domaine à la dénonciation au Département fédéral de justice et police, satisfont à l'exigence d'un recours effectif.
Art. 13 CEDU. Diritto a un ricorso effettivo davanti a un'istanza nazionale.
In materia di intercettazione telefonica, l'insieme di rimedi giuridici di cui la parte in giudizio dispone a livello federale, segnatamente la prassi applicata in questo campo alla denunzia al Dipartimento federale di giustizia e polizia, corrisponde all'esigenza del ricorso effettivo.
4. Le requérant [qui s'était vu refuser toute information sur la question de savoir s'il avait fait l'objet de mesures d'écoutes téléphoniques] dénonce également la violation de l'art. 13 CEDH, aux termes duquel:
«Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles.»
Le requérant fait valoir à cet égard qu'il n'existe, en Suisse, aucun recours effectif susceptible de remédier à la situation litigieuse. En particulier, la procédure de dénonciation (Aufsichtsbeschwerde) préconisée par le Gouvernement ne répond pas aux exigences de ladite disposition de la convention.
Dans ses observations, le Gouvernement relève de manière générale qu'en Suisse le particulier dispose, en matière de contrôle des écoutes téléphoniques, d'un ensemble de recours qui, envisagés globalement, répondent aux exigences de l'art. 13 CEDH. Il s'agit en l'occurrence du contrôle qui émane de l'instance judiciaire, à savoir le président de la chambre d'accusation du Tribunal fédéral, de l'intervention de l'autorité administrative, à savoir le Ministère public fédéral, doublé des recours administratifs devant le Département fédéral de justice et police (DFJP) et devant le Conseil fédéral, instances administratives qui exercent des compétences juridictionnelles dans ce cadre.
En particulier, le Gouvernement s'est référé à la procédure de dénonciation (Aufsichtsbeschwerde) et il a relevé que les dénonciations fondées sur l'art. 71 PA sont traitées comme des recours formels au sens des art. 44 et ss de ladite loi. La conséquence en est que l'intéressé jouit de tous les droits reconnus aux parties et bénéficie d'un droit à une décision formelle du DFJP elle-même sujette à un recours auprès du Conseil fédéral.
Le requérant a répliqué que les autorités auraient dû l'informer sur le point de savoir s'il avait en réalité fait l'objet d'écoutes téléphoniques. En outre, il estime que le DFJP étant le supérieur hiérarchique du Procureur général fédéral ne saurait être considéré comme un organe de recours indépendant.
La Commission rappelle ici que, conformément à sa jurisprudence constante, l'art. 13 CEDH vise l'octroi d'un recours contre une allégation de violation d'un des droits et libertés proclamés dans les autres articles de la convention. Elle souligne également que dans l'affaire Klass, elle a estimé que si la notification devait aller à l'encontre de l'objectif des ingérences nécessaires à la sécurité nationale et justifiées par la convention (art. 8 § 2), une interprétation de l'art. 13 ayant pour effet de créer un droit d'être informé ne serait pas en harmonie avec le système de la convention (voir rapport de la Commission du 9 mars 1977, Série B 26, § 71). Cette argumentation a été reprise par la Cour dans l'affaire Klass (arrêt du 6 septembre 1978, Série A 28, § 68).
La Commission relève que le système de recours en matière d'écoutes téléphoniques pose des problèmes particuliers par rapport à l'art. 13 CEDH pour autant qu'une notification, même a posteriori, de la mesure prise serait susceptible d'aller à l'encontre de l'objectif même de cette mesure. En conséquence, ainsi que la Cour l'a déclaré dans l'affaire Klass (ibidem § 69), un recours effectif selon l'art. 13, dans la situation spécifique de la surveillance secrète, doit s'entendre d'un recours aussi effectif qu'il peut l'être eu égard à sa portée limitée, inhérente à tout système de surveillance. Tandis que, selon le système allemand examiné dans l'affaire Klass, il y a l'obligation d'une notification a posteriori à l'intéressé dès que celle-ci peut s'opérer sans compromettre le but de la restriction, le système luxembourgeois, examiné par la Commission dans les affaires Mersch et autres (décision du 10 mai 1985 sur les requêtes No 10439/83, No 10440/83, No 10441/83, No 10452/83, No 10512/83 et No 10513/83, à paraître dans DR 43), se caractérisait par l'absence totale de telles notifications. Néanmoins la Commission a estimé que le droit de s'adresser au Conseil d'Etat luxembourgeois, tenu d'effectuer une enquête, ainsi que l'existence de certaines autres garanties, à savoir le droit d'intenter une action en responsabilité civile et le contrôle a priori de l'opportunité de la surveillance, étaient de nature à satisfaire aux exigences de l'art. 13.
Dans la synthèse opérée par la Cour dans l'affaire Silver et autres (arrêt du 25 mars 1983, Série A 61, p. 42, § 111-113) dans le cadre d'un examen conjoint des art. 13 et 8 CEDH, celle-ci a rappelé un certain nombre de principes. Du dernier principe énoncé il découle que «le jeu de l'art. 13 dans un cas donné dépend de la manière dont l'Etat contractant intéressé a choisi de s'acquitter de l'obligation assumée par lui en vertu de l'art. 1: reconnaître directement à quiconque relève de sa juridiction les droits et libertés du Titre Ier».
Il appartient à présent à la Commission d'examiner les différentes voies de recours dont le requérant dispose en droit suisse en vue d'établir si elles sont «effectives» dans ce sens étroit.
Il faut souligner qu'il existe dans le système suisse un contrôle a priori de l'opportunité de la surveillance dans la mesure où l'autorité qui ordonne la mesure d'écoutes téléphoniques est tenue de demander, dans un délai de vingt-quatre heures, l'approbation du président de la chambre d'accusation du Tribunal fédéral.
La Commission relève d'autre part qu'un contrôle a posteriori paraît dans une certaine mesure possible.
Il est vrai qu'en l'espèce le requérant n'a pas, à ce jour, été informé par les autorités sur le point de savoir s'il a fait l'objet ou non d'une mesure d'écoutes téléphoniques. C'est dans le cadre d'un échange de lettres entre l'intéressé et le Ministère public fédéral et à la lumière de la réponse écrite donnée par ce dernier que s'est posée, en l'occurrence, la question de la mise en oeuvre d'un contrôle a posteriori.
En effet, dans sa lettre du 4 juin 1984, cette autorité, répondant à la demande de renseignements formulée par le requérant au sujet d'écoutes téléphoniques qui auraient pu être ordonnées à son encontre, a indiqué que «soit aucune mesure de surveillance n'avait eu lieu, soit la mesure de surveillance se prolongeait encore, soit la mesure de surveillance avait pris fin et n'avait pas ou pas encore été communiquée en raison du danger qu'une telle communication faisait courir au regard du but de la mesure». Il en ressort qu'après la mainlevée de la mesure, dans l'hypothèse où celle-ci a été ordonnée, le requérant en sera informé sauf si une telle information risque de compromettre le but et l'objet de la mesure en question.
Lorsque l'intérêt public justifie le maintien du secret, notamment lorsque la sûreté intérieure et extérieure de la Confédération est en jeu, le Ministère public fédéral doit obtenir l'approbation du président de la chambre d'accusation du Tribunal fédéral pour être dispensé de l'obligation d'informer d'office l'intéressé de la mesure d'écoutes téléphoniques.
Enfin, il convient de souligner que lorsque la procédure de dénonciation (Aufsichtsbeschwerde) est mise en oeuvre devant le DFJP pour contester le refus du Ministère public fédéral de donner des informations sur les motifs, les modalités et la durée d'une mesure d'écoutes, cette instance traite, selon une pratique récente, les dénonciations qui lui sont adressées en application de l'art. 71 PA en tant que recours au sens des art. 44 et ss de ladite loi.
L'intéressé jouit par conséquent de tous les droits reconnus aux parties et bénéficie notamment d'un droit à une décision formelle. En effet, la dénonciation donne lieu à des vérifications auprès du président de la chambre d'accusation du Tribunal fédéral et, sur la base des informations obtenues, le DFJP procède à une appréciation de la justification de la mesure d'écoutes et de celle de l'éventuelle renonciation à une notification a posteriori à l'intéressé. En outre, cette autorité prend une décision formelle contre laquelle il est possible d'introduire un recours devant le Conseil fédéral, dernière instance nationale.
La Commission relève que dans le cas d'espèce la procédure décrite ci-dessus a trouvé application, dans la mesure où le requérant a fait usage des voies de droit qui étaient à sa disposition à l'exception toutefois du recours au Conseil fédéral. Dès lors, la Commission estime que l'ensemble des recours prévus par le droit suisse répond, compte tenu du domaine particulier de la surveillance par écoutes téléphoniques et des circonstances spécifiques de l'affaire, aux exigences de l'art. 13 CEDH.
Il s'ensuit que cette partie de la requête est aussi manifestement mal fondée et doit être rejetée, en application de l'art. 27 § 2 CEDH.