C/10599/2015

ACJC/447/2016 du 08.04.2016 sur JTPI/15365/2015 ( SML ) , CONFIRME

Descripteurs : MAINLEVÉE DÉFINITIVE; TITRE DE MAINLEVÉE
Normes : LP.80
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En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/10599/2015 ACJC/447/2016

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du vendredi 8 avril 2016

 

Entre

Monsieur A______, domicilié _______, Genève, recourant contre un jugement rendu par la 14ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 15 décembre 2015, comparant en personne,

et

Madame B______, domiciliée _______, Genève, intimée, comparant par Me Monica Bertholet, avocate, rue Marignac 14, case postale 504, 1211 Genève 12, en l'étude de laquelle elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. a. Par jugement du 14 janvier 2010, le Tribunal de première instance, statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale a, notamment, condamné A______ à verser à B______, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, à titre de contribution d'entretien, la somme de 3'500 fr. par mois dès le 13 juillet 2009, sous déduction des montants déjà versés à ce titre (ch. 4 du dispositif).

b. Le 1er mai 2015, l'Office des poursuites a notifié à A______, sur requête de B______, un commandement de payer, poursuite n° 1______ pour un montant de 24'500 fr. avec intérêts à 5% dès le 15 novembre 2014, réclamé à titre de contribution d'entretien pour les mois de septembre 2014 à mars 2015 selon le jugement du 14 janvier 2010.

A______ y a formé opposition.

c. Par requête formée le 28 mai 2015 devant le Tribunal de première instance, B______ a requis la mainlevée définitive de l'opposition.

d. Par réponse du 16 novembre 2015, A______ a expliqué qu'en raison de ses difficultés financières et de santé, il sollicitait l'indulgence du Tribunal et demandait sa libération d'une dette qu'il n'avait pas contractée mais qui était basée sur un jugement dont les fondements avaient désormais changé. Il avait assuré l'intégralité des dépenses médicales pour leurs enfants ainsi que les charges hypothécaires et fiscales relatives aux biens immobiliers qu'il possédait en commun avec son épouse. Il a déposé à cet égard un tableau établi par lui indiquant les sommes dont il se serait acquitté.

B. Par jugement du 15 décembre 2015, le Tribunal de première instance a prononcé la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 1______ (ch. 1 du dispositif), mis les frais judiciaires, arrêtés à 200 fr., à la charge de A______, qui a été condamné à rembourser ce montant à B______ qui en avait fait l'avance (ch. 2 et 3) ainsi qu'au paiement à cette dernière de la somme de 1'082 fr. à titre de dépens (ch. 4).

Le Tribunal a considéré que A______ ne faisait valoir aucun moyen libératoire prévu par l'art. 81 al. 1 LP. Le jugement du 14 janvier 2010 ne prévoyant pas la possibilité pour le débirentier de s'acquitter de sa dette d'une manière autre que par le paiement du montant de la contribution d'entretien en main du crédirentier, c'était en vain qu'il se prévalait de paiements en mains de tiers en faveur de la famille.

C. a. Par acte déposé au greffe de la Cour le 28 décembre 2015, A______ forme recours contre ce jugement, dont il sollicite l'annulation, avec suite de frais et dépens.

b. Dans sa réponse au recours, B______ conclut au déboutement de A______ des fins de son recours, avec suite de frais et dépens.

c. En l'absence de réplique, les parties ont été informées par avis de la Cour du 15 février 2016 de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. b et 309 let. b ch. 3 CPC). La procédure sommaire s'applique (art. 251 let. a CPC).

Aux termes de l'art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours doit, en procédure sommaire, être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée.

Interjeté dans le délai prescrit et selon la forme requise par la loi, le recours est recevable.

1.2 La maxime des débats s'applique et la preuve des faits allégués doit être apportée par titres (art. 55 al. 1, 255 let. a a contrario et 254 CPC).

2. Le recourant invoque que les changements imposés au secteur financier tant par les autorités que par l'évolution de la conjoncture économique et politique internationale ont entraîné une très importante baisse de ses revenus, en dépit de tous ses efforts. Le jugement entrepris violait au moins quatre dispositions, à savoir l'art. 2 al. 2 CC, l'art. 159 CC, l'art. 8 Cst. et l'art. 2 al. 1 CC. Il invoque également la théorie de l'imprévision et la clausula rebus sic standibus. L'application de la procédure sommaire était en outre critiquable en l'espèce dans la mesure où l'art. 257 CPC prévoit l'application d'une telle procédure lorsque l'état de fait n'est pas litigieux ou susceptible d'être immédiatement prouvé et que la situation juridique est claire.

2.1
2.1.1 Aux termes de l'art. 80 al. 1 LP, le créancier qui est au bénéfice d'un jugement exécutoire peut requérir du juge la mainlevée définitive de l'opposition.

La procédure de mainlevée est une pure procédure d'exécution forcée (ATF 94 I 365 consid. 6 p. 373; 72 II 52 p. 54), un incident de la poursuite. Dans la procédure de mainlevée définitive, le juge se limite à examiner le jugement exécutoire ou les titres y assimilés, ainsi que les trois identités - l'identité entre le poursuivant et le créancier désigné dans ce titre, l'identité entre le poursuivi et le débiteur désigné et l'identité entre la prétention déduite en poursuite et le titre qui lui est présenté - et à statuer sur le droit du créancier de poursuivre le débiteur, c'est-à-dire à décider si l'opposition doit ou ne doit pas être maintenue (ATF 140 III 372 consid. 3.1; 139 III 444 consid. 4.1.1).

Le juge de la mainlevée doit vérifier que la prétention déduite en poursuite ressort du jugement qui lui est présenté. Il ne lui appartient pas de se prononcer sur l'existence matérielle de la prétention ou sur le bien-fondé du jugement. Si ce jugement est peu clair ou incomplet, il appartient au juge du fond de l'interpréter (ATF 135 III 315 consid. 2.3; 134 III 656 consid. 5.3.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_217/2012 du 9 juillet 2012 consid. 6.1.1; 5A_487/2011 du 2 septembre 2011 consid. 3.1).

2.1.2 En vertu de l'art. 81 al. 1 LP, lorsque la poursuite est fondée sur un jugement de la Confédération ou du canton dans lequel la poursuite a lieu, le juge ordonne la mainlevée définitive de l'opposition, à moins que, notamment, le poursuivi ne prouve par titre que la dette a été éteinte postérieurement au jugement.

Par extinction de la dette, la loi ne vise pas seulement le paiement, mais aussi toute autre cause de droit civil, en particulier la compensation. Un tel moyen ne peut toutefois être retenu que si la créance compensante résulte elle-même d'un titre exécutoire ou qu'elle est admise sans réserve par le poursuivant (ATF 136 III 624 consid. 4.2.1; 115 III 97 consid. 4 et les références citées). Contrairement à ce qui vaut pour la mainlevée provisoire (art. 82 al. 2 LP), le poursuivi ne peut se borner à rendre sa libération vraisemblable; il doit, au contraire, en apporter la preuve stricte (ATF 125 III 42 consid. 2b in fine; ATF 124 III 501 consid. 3a et les références).

2.2 En l'espèce, l'intimée a fondé sa requête de mainlevée sur un jugement du Tribunal de première instance du 14 janvier 2010, dont il n'est pas allégué qu'il aurait été annulé par une décision de la Cour ou du Tribunal fédéral, le recourant indiquant d'ailleurs que le jugement est "entré en force". Il est ainsi exécutoire et constitue dès lors un titre de mainlevée définitive.

Le recourant ne soutient pas avoir effectué un quelconque paiement à l'intimée à titre de contribution d'entretien qui pourrait être imputé pour réduire le montant réclamé pour la période pour laquelle il fait l'objet de poursuites. Il invoque en revanche avoir effectué des paiements à d'autres titres, et donc, implicitement, la compensation. Il ne produit cependant pas à l'appui de ses allégations un titre exécutoire, mais uniquement un récapitulatif préparé par lui-même et qui, en tant que tel, ne présente pas de force probante particulière. En tout état de cause, le fait qu'il aurait payé des frais médicaux pour ses enfants ne permet pas de réduire le montant qu'il a été condamné à payer à l'intimée à titre de contribution d'entretien. Quant aux frais liés à des biens immobiliers dont il serait propriétaire avec son épouse, il ne fournit aucun élément permettant de considérer que le montant qu'il invoque avoir payé, quand bien même il serait avéré, représente effectivement la part qui aurait dû être assumée par l'intimée.

Le recourant invoque par ailleurs ses difficultés financières. Dans la mesure où la procédure de mainlevée est une pure procédure d'exécution forcée, elle ne peut permettre de revoir, au fond, la décision invoquée, et donc le montant de la contribution fixée par jugement sur mesures protectrices. Les difficultés financières et la baisse des revenus du recourant ne peuvent ainsi constituer un motif de refus de la mainlevée.

De plus, en réclamant par la voie de la poursuite le paiement d'une contribution d'entretien telle qu'elle a été prévue par un jugement exécutoire, l'intimée n'agit ni de manière contraire à la bonne foi (art. 2 al. 1 CC) ni de manière abusive (art. 2 al. 2 CC). La théorie de l'imprévision invoquée n'est pas davantage pertinente dans le cadre d'une procédure de mainlevée, la modification des circonstances ne pouvant être prise en compte, le cas échéant, que dans le cadre d'une demande de modification du jugement de mesures protectrices.

Enfin, c'est en vain que le recourant invoque une violation de l'art. 257 CPC relatif à la procédure de protection en cas clair dans la mesure où la procédure sommaire est applicable en l'espèce non en vertu de la disposition précitée, mais de l'art. 251 let. a CPC.

Au vu de ce qui précède, c'est à bon droit que le Tribunal a prononcé la mainlevée requise. Le recours sera donc rejeté.

3. Le recourant, qui succombe, sera condamné aux frais du recours (art. 106 al. 1 CPC), arrêtés à 600 fr. (art. 48 et 61 al. 1 OELP) et compensés avec l'avance de frais fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Le recourant sera également condamné aux dépens de l'intimée, arrêtés à 500 fr., la réponse au recours s'étant limitée à un bref courrier (art. 85, 89, 90 RTFMC; art. 20, 23, 25, 26 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 28 décembre 2015 par A______ contre le jugement JTPI/15365/2015 rendu le 15 décembre 2015 par le Tribunal de première instance dans la cause C/10599/2015-14 SML.

Au fond :

Rejette ce recours.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires à 600 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance de frais fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser à B______ la somme de 500 fr. à titre de dépens de recours.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Nathalie LANDRY-BARTHE et Madame Pauline ERARD, juges; Madame Céline FERREIRA, greffière.

 

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Céline FERREIRA

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.