C/12143/2015

ACJC/1406/2015 du 17.11.2015 sur JTPI/11553/2015 ( SFC ) , RENVOYE

Descripteurs : LIQUIDATION SOMMAIRE DE LA FAILLITE; SUSPENSION DE LA FAILLITE FAUTE D'ACTIFS
Normes : LP.230
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En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/12143/2015 ACJC/1406/2015

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du mardi 17 novembre 2015

 

A______, EN LIQUIDATION, représentée par l'Office des faillites, route de Chêne 54, case postale 115, 1211 Genève 17, recourante contre un jugement rendu par la 9ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 1er octobre 2015, comparant en personne.

 


EN FAIT

A. Par jugement du 27 août 2015, le Tribunal de première instance a prononcé la faillite de A______ qui avait notamment pour but l'exploitation et la gestion d'établissements publics en relation avec la restauration et l'alimentation.

B. a. Par requête du 30 septembre 2015, l'Office des faillites (ci-après : l'Office) a conclu à ce que soit ordonnée la suspension de la liquidation de la faillite de A______ dès lors que selon lui les actifs (soit 6'017 fr. 43 en partie gagés et revendiqués) n'étaient pas suffisants pour garantir les frais d'une liquidation sommaire, dont il n'a pas estimé le montant.

Etaient annexés à la requête le procès-verbal d'interrogatoire de l'associée-gérante et l'inventaire dressé par l'Office.

b. Par jugement du 1er octobre 2015, le Tribunal a rejeté la requête en suspension de la liquidation de la faillite (ch. 1 du dispositif), ordonné la liquidation sommaire de la faillite de A______ (ch. 2), renoncé à percevoir un émolument de décision (ch. 3) et débouté l'Office de toutes autres conclusions (ch. 4).

En substance, il a retenu que l'inventaire dressé par l'Office laissait apparaître 4'773 fr. 43 d'actifs - en espèces et en solde du compte de la faillie auprès de Postfinance - et que ce montant était suffisant pour couvrir "à tout le moins" les frais de la liquidation sommaire, de sorte qu'il n'y avait pas à suspendre ladite liquidation.

C. a. Par acte du 13 octobre 2015, l'Office, agissant comme représentant de la masse en faillite de A______ en liquidation, recourt contre ce jugement, dont il sollicite l'annulation, concluant à ce que soit ordonnée la suspension de la liquidation de la faillite de A______ en liquidation.

L'Office reproche au Tribunal de s'être substitué à lui-même pour arrêter le montant présumé des frais de liquidation - qu'il estime à 7'000 fr. - et avoir ainsi statué sur des éléments dont la cognition lui échappait.

b. L'effet suspensif de l'effet exécutoire attaché au jugement entrepris a été accordé par décision présidentielle du 16 octobre 2015.

c. Par courrier du même jour, l'Office a été informé de ce que la cause était gardée à juger.

 

 

EN DROIT

1. 1.1 L'appel étant irrecevable dans les affaires relevant de la compétence du tribunal de la faillite selon la LP (art. 309 let. b ch. 7 CPC), seule la voie du recours est ouverte.

Tant la décision du juge de suspendre la faillite faute d'actifs que celle ordonnant la liquidation sommaire ou ordinaire de la faillite sont des décisions finales, susceptibles de recours, au sens de l'art. 319 let. a CPC (Wyss, Kollektive Beteiligungsrechte der Gläubiger im Konkurs- und Nachlassverfahren unter besonderer Berücksichtigung der Revision im Sanierungsrecht, in Zürcher Studien zum Verfahrensrecht, 2013, p. 50).

Les décisions rendues en matière de faillite sont soumises à la procédure sommaire (art. 251 let. a CPC).

Le recours a été formé selon la forme et dans le délai prévus par la loi (art. 321 al. 1 et 2 CPC).

1.2.1 L'Office des faillites, en sa qualité de représentant de la masse en faillite, a, à côté du débiteur, qualité pour recourir contre la décision du juge de suspendre la faillite faute d'actifs, afin de préserver les intérêts de la communauté des créanciers (arrêt du Tribunal fédéral 5A_306/2014 du 17 octobre 2013 consid. 3.3.1).

1.2.2 Selon l'art. 169 LP, celui qui requiert la faillite répond des frais jusqu'à et y compris la suspension des opérations faute d'actifs (art. 230 LP) ou jusqu'à l'appel aux créanciers (art. 232 LP).

1.2.3 En l'espèce, la qualité pour recourir de l'Office contre le jugement ordonnant la liquidation ordinaire de la faillite doit être admise, en tant qu'il agit comme représentant de la masse. En effet, la liquidation ordonnée par le juge est de nature à engendrer des frais qui, s'ils ne sont pas couverts, pourront être mis à la charge du créancier ayant requis la faillite. Ces frais seront de moindre importance si la faillite est suspendue. L'Office agit donc dans l'intérêt du créancier ayant requis la faillite.

Le recours est donc recevable.

2. Le recours est ouvert pour violation du droit et constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC).

La maxime inquisitoire est applicable (art. 255 let. a CPC).

3. Les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables (art. 326 al. 1 CPC) de sorte que les allégués portant sur les frais de liquidation articulés pour la première fois par l'Office dans le cadre du présent recours sont irrecevables.

4. 4.1 Après la prise d'inventaire des biens du failli (art. 221 LP), l'Office des faillites examine si ceux-ci suffisent à couvrir les frais d'une éventuelle liquidation sommaire au sens de l'art. 231 LP.

Lorsqu'il est probable que la masse ne suffira pas à couvrir les frais de liquidation sommaire, le juge qui a ordonné la faillite prononce la suspension de celle-ci à la demande de l'Office (art. 230 al. 1 LP).

La décision n'est rendue qu'après vérification de la situation par le juge. Celui-ci apprécie les éventuelles revendications de tiers et les chances de succès des actions révocatoires. Directement ou par l'intermédiaire de l'office, le juge peut exiger du failli des renseignements complémentaires (Vouilloz, in Commentaire romand, Poursuite et faillites, 2005, n. 2 ad art. 230).

Si le juge ne partage pas l'avis de l'Office quant à la suspension de la faillite, il ordonne la liquidation sommaire ou ordinaire (Vouilloz, op. cit.).

4.2 En l'espèce, dès lors que les actifs admis par le Tribunal ne s'élèvent qu'à 4'773 fr. 43, il ne va pas de soi que ceux-ci seront suffisants à couvrir les frais d'une liquidation sommaire, que l'Office n'a pas estimés dans sa requête.

S'il était en droit de s'écarter de l'avis de l'Office, le Tribunal devait à tout le moins expliquer pourquoi, selon lui, les frais seraient couverts par les actifs. Or, il n'a procédé à aucune estimation des frais - calcul que seul l'Office était en mesure d'effectuer, notamment en fonction du nombre de créanciers - retenant sans aucune motivation que ceux-ci devraient être inférieurs aux actifs.

Dès lors qu'il ne disposait pas des informations nécessaires, il appartenait au premier juge, en application de la maxime inquisitoire de requérir des renseignements complémentaires de la part de l'Office s'agissant de l'ampleur des frais de la liquidation, avant de rendre sa décision.

Le jugement querellé sera en conséquence annulé et la cause renvoyée au Tribunal pour instruction dans le sens des considérants et nouvelle décision (art. 327
al. 3 CPC).

5. Il ne sera pas perçu d'émolument (art. 19 al. 5 LaCC et 7 al. 2 RFTMC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 13 octobre 2015 par A______, EN LIQUIDATION contre le jugement JTPI/11553/2015 rendu le 1er octobre 2015 par le Tribunal de première instance dans la cause C/12143/2015-9 SFC.

Au fond :

Annule le jugement entrepris.

Renvoie la cause au Tribunal pour instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants.

Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument.

Siégeant :

Madame Sylvie DROIN, présidente; Madame Nathalie LANDRY-BARTHE et Monsieur Ivo BUETTI, juges; Madame Céline FERREIRA, greffière.

 

La présidente :

Sylvie DROIN

 

La greffière :

Céline FERREIRA

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.