C/12772/2017

ACJC/88/2018 du 24.01.2018 sur JTPI/13758/2017 ( SML ) , CONFIRME

Descripteurs : MAINLEVÉE DÉFINITIVE ; TITRE DE MAINLEVÉE ; TITRE EXÉCUTOIRE
Normes : LP.80
Pdf
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/12772/2017 ACJC/88/2018

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du mercredi 24 janvier 2018

 

Entre

A______, domiciliée ______ (GE), recourante contre un jugement rendu par la 20ème Chambre du Tribunal de première instance le 25 octobre 2017, comparant par
Me Philippe Currat, avocat, rue de Saint-Jean 73, 1201 Genève, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

et

B______, domicilié ______ (GE), intimé, comparant en personne.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/13758/2017 du 25 octobre 2017, reçu par A______ le 31 octobre 2017, le Tribunal de première instance, statuant par voie de procédure sommaire, a prononcé la mainlevée définitive de l'opposition formée par celle-ci au commandement de payer, poursuite n° 1______, sous déduction de la somme de 20'447 fr. 82 (ch. 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 750 fr., compensés avec l'avance effectuée (ch. 2) et mis à la charge de A______, condamnée à verser ladite somme à B______ (ch. 3).

B. a. Par acte expédié le 10 novembre 2017 à la Cour de justice, A______ forme recours contre le jugement précité, dont elle requiert l'annulation. Elle conclut au rejet de la requête de mainlevée définitive formée par B______, avec suite de frais judiciaires et dépens.

b. Par réponse du 8 décembre 2017, B______ conclut au rejet du recours, avec suite de frais judiciaires et dépens.

Il forme des allégués nouveaux et dépose des pièces nouvelles.

c. Les parties ont été informées le 9 janvier 2018 de ce que la cause était gardée à juger, A______ n'ayant pas fait usage de son droit de réplique.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier de première instance.

a. Par jugement JTPI/12566/2015 du 27 octobre 2015, le Tribunal de première instance a notamment prononcé le divorce des époux B______ et A______ (ch. 1 du dispositif), attribué à A______ la pleine propriété du lot PPE n° 2______ (appartement avec balcon) de l'immeuble 3______ sis ______ (GE), ainsi que le mobilier le garnissant, moyennant reprise de tous les droits et de toutes les obligations de B______ liés au crédit hypothécaire attaché à ce bien immobilier, à charge pour elle de reprendre l'entier de la dette hypothécaire le grevant et d'assumer tous les frais, charges et impôts liés au transfert de propriété (ch. 9) et condamné A______ à verser 227'500 fr. à B______ à titre de soulte pour l'acquisition de sa part de copropriété visée sous chiffre 9 (ch. 10).

Par arrêt ACJC/1292/2016 du 9 septembre 2016, la Cour de justice a annulé le chiffre 10 du dispositif du jugement précité et, statuant à nouveau sur ce point, a condamné A______ à verser la somme de 206'735 fr. à B______ à titre de soulte pour l'acquisition de sa part de copropriété sur l'immeuble précité.

Le prononcé du divorce n'a pas été contesté.

b. Sur réquisition de poursuite de B______, l'Office des poursuites a notifié le 1er mai 2017 à A______ un commandement de payer, poursuite n° 1______, portant sur la somme de 206'735 fr. plus intérêts à 4% dès le 10 septembre 2016 en "exécution de l'arrêt de la Cour de justice Chambre civile 09 septembre 2016".

A______ y a formé opposition.

c. Par requête déposée le 29 mai 2017 au Tribunal, B______ a requis la mainlevée définitive de l'opposition précitée, en se référant à l'arrêt de la Cour du 9 septembre 2016, qu'il a produit avec le commandement de payer.

d. Lors de l'audience du Tribunal du 13 octobre 2017, A______, par l'intermédiaire de son conseil, a constaté que B______ n'avait pas produit de pièces attestant du caractère définitif de l'arrêt de la Cour, tout en déclarant qu'elle n'avait pas fait "appel" contre celui-ci. Elle a invoqué en compensation une créance de 20'447 fr. 82, laquelle a été admise par B______.

A______ a déposé un chargé de pièces et le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

e. Dans le jugement attaqué, le Tribunal a considéré que la pièce produite constituait un titre de mainlevée définitive au sens de l'art. 80 LP. Il a admis la compensation, suite aux conclusions concordantes des parties.

EN DROIT

1. 1.1 S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a et 309 let. b ch. 3 CPC). La procédure sommaire s'applique (art. 251 let. a CPC).

Aux termes de l'art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée, pour les décisions prises en procédure sommaire.

En l'espèce, le recours a été interjeté dans le délai et la forme prévus par la loi, de sorte qu'il est recevable.

1.2 Dans le cadre d'un recours, le pouvoir d'examen de la Cour est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits
(art. 320 CPC). L'autorité de recours a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant par ailleurs que les griefs formulés et motivés par la partie recourante (HOHL, Procédure civile, Tome II, 2ème éd., 2010 no 2307).

Les maximes des débats et de dispositions s'appliquent (art. 55 al. 1, 255 let. a
a contrario et 58 al. 1 CPC).

2. Les conclusions, allégations de fait et preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'un recours (art. 326 al. 1 CPC).

Ainsi, les allégations et pièces nouvelles de l'intimé sont irrecevables.

3. La recourante fait grief au Tribunal d'avoir prononcé la mainlevée définitive, alors que l'intimé n'avait pas établi par titre le caractère définitif et exécutoire de l'arrêt de la Cour du 9 septembre 2016, qui était un jugement constitutif relevant du droit de la famille. En outre, à son avis, "le titre mentionné dans le commandement de payer n'est pas celui qui est produit à l'appui de la requête en mainlevée".

3.1 Aux termes de l'art. 80 al. 1 LP, le créancier qui est au bénéfice d'un jugement exécutoire peut requérir du juge la mainlevée définitive de l'opposition.

Lorsque la poursuite est fondée sur un jugement exécutoire rendu par un Tribunal ou une autorité administrative suisse, le juge ordonne la mainlevée définitive de l'opposition, à moins que l'opposant ne prouve par titre que la dette a été éteinte ou qu'il a obtenu un sursis, postérieurement au jugement ou qu'il ne se prévale de la prescription (art. 81 al. 1 LP).

Le juge de la mainlevée doit examiner d'office l'existence d'un titre à la mainlevée définitive dans la poursuite pendante, notamment l'existence légale et le caractère exécutoire de la décision invoquée, ainsi que les trois identités : identité du poursuivi, qui doit être la personne désignée dans le titre comme débiteur, identité du poursuivant, qui doit être la personne désignée dans le titre comme créancier
- ou son ayant droit ou ayant cause -, identité de la prétention déduite en poursuite et de la créance retenue dans le titre (GILLIERON, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, Lausanne, 1999, no 22 ad art. 80 LP).

La mainlevée définitive de l'opposition n'est accordée que si le jugement condamne le poursuivi à payer une somme d'argent déterminée, c'est-à-dire chiffrée. Le juge de la mainlevée doit vérifier que la prétention déduite en poursuite ressort du jugement qui lui est présenté (ATF 135 III 315 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5D_171/2016 du 16 février 2017 consid. 5).

En règle générale, une décision acquiert force exécutoire au moment où elle entre en force de chose jugée, ce qui se produit au moment où elle ne peut plus être attaquée par une voie de recours qui, par la loi, a un effet suspensif. Tel est le cas de l'appel ordinaire (art. 315 al. 1 CPC), mais pas du recours cantonal (art. 325 al. 1 CPC), du recours au TF (sous réserve des jugements constitutifs: art. 103 al. 1 et 2 let. a LTF) ni de la révision (art. 331 al. 1 CPC) (ABBET, La mainlevée de l'opposition, Commentaire des art. 79 à 84 LP, 2017 no 49 ad art. 80 LP).

La preuve du caractère exécutoire doit être apportée par le poursuivant au moyen de l'attestation du caractère exécutoire délivrée par le tribunal qui a rendu la décision (ABBET, op. cit., nos 72 et 73 ad art. 80 LP).

L'attestation du caractère exécutoire est toutefois déclarative. Le caractère exécutoire d'une décision peut être prouvée d'une autre manière, par exemple par un extrait de procès-verbal, dont il ressort que les parties ont renoncé à recourir, par une décision du tribunal d'appel rejetant le recours ou n'entrant pas en matière sur celui-ci, par la preuve qu'aucun appel n'a été interjeté contre la décision, par le fait que la partie adverse ne conteste pas le caractère exécutoire de la décision ou que plusieurs années se sont écoulées depuis le prononcé de la décision et qu'il n'y a pas d'indice que celle-ci puisse être annulée (STAEHELIN, in Kommentar zur Schweizerische Zivilprozessordnung, 3ème éd., 2016 no 24 ad 336 CPC; STAEHELIN, in Basler Kommentar, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs I, 2ème éd., 2010, no 55 ad art. 80 LP).

3.2 En l'espèce, lors de l'audience du Tribunal, la recourante a expressément admis qu'elle n'avait pas recouru contre l'arrêt de la Cour invoqué comme titre de mainlevée définitive en relation avec la créance de 206'735 fr. Cette déclaration de la recourante - qui ne conteste d'ailleurs pas être débitrice à l'égard de l'intimé dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial - est suffisamment claire pour constituer une preuve du caractère exécutoire de l'arrêt litigieux.

En tout état de cause, il est vrai que, comme le relève la recourante, le recours en matière civile au Tribunal fédéral a effet suspensif dans la mesure des conclusions formulées s'il est dirigé contre un jugement constitutif. En l'espèce cependant, le prononcé du divorce n'a pas été contesté devant la Cour, de sorte que seules des dispositions condamnatoires de l'arrêt de la Cour auraient pu être portées devant le Tribunal fédéral, de sorte qu'un éventuel recours à cette autorité n'aurait pas eu d'effet suspensif.

En outre, contrairement à ce que soutient la recourante, tant le commandement de payer que la requête de mainlevée mentionnent l'arrêt de la Cour du 9 septembre 2016 comme titre de mainlevée.

En définitive, c'est à raison que le Tribunal a admis la requête, sous déduction du montant dû par l'intimé à la recourante, reconnu lors de l'audience.

Le recours sera donc rejeté.

4. La recourante, qui succombe, supportera les frais du recours (art. 106 al. 1 CPC).

Les frais judiciaires seront arrêtés à 1'125 fr. (art. 48 et 61 OLP). Ils seront compensés avec l'avance de frais effectuée, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

La recourante sera en outre condamnée aux dépens du recours, arrêtés à 1'200 fr., débours et TVA compris (art. 85 al. 1, 89 et 90 RTFMC; 25 et 26 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 10 novembre 2017 par A______ contre le jugement JTPI/13758/2017 rendu le 25 octobre 2017 par le Tribunal de première instance dans la cause C/12772/2017-20 SML.

Au fond :

Le rejette.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires du recours à 1'125 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance fournie, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser à B______ la somme de 1'200 fr. à titre de dépens du recours.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Ivo BUETTI, juges; Madame Céline FERREIRA, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Céline FERREIRA

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure à 30'000 fr.