C/15645/2014

ACJC/354/2015 du 27.03.2015 sur JTPI/15458/2014 ( SML ) , CONFIRME

Descripteurs : POURSUITE POUR DETTES; CONTRAT D'ENTREPRISE; COMPENSATION DE CRÉANCES
Normes : LP.82; CO.363;
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En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/15645/2014 ACJC/354/2015

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du VENDREDI 27 MARS 2015

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______(GE), recourant contre un jugement rendu par la 9ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 2 décembre 2014, comparant en personne,

et

B______, sise ______(BE), intimée, comparant en personne.

 


EN FAIT

A. a. Par courrier du 8 octobre 2012, A______ s'est plaint auprès de B______ du retard pris dans la livraison d'une véranda, malgré ses mises en demeure qui étaient restées vaines. Il a considéré que la précitée avait ainsi manqué à ses obligations contractuelles, ce qui lui ouvrait la possibilité de résilier la commande, avec demande de restitution des acomptes versés. Il demeurait cependant envisageable qu'elle lui fournisse un calendrier de début et fin des travaux, assorti d'une clause prévoyant des pénalités de retard.

b. Le 3 décembre 2012, A______ a signé une confirmation de commande portant sur la livraison d'une véranda au prix de 85'101 fr. 75. En regard de la mention "délai de livraison", il est indiqué: "début de la pose Semaine 6/7 2012" [sic].

c. Le 12 novembre 2013, B______ a adressé une facture à A______, lui réclamant le solde du prix de la véranda, soit 15'257 fr. 75.

d. Le 17 décembre 2013, A______ a considéré que B______ devait lui accorder une réduction de prix à hauteur du montant précité en raison "du très important retard accumulé dans l'exécution des travaux de construction et de suivi de la véranda construite sur [sa] propriété" et il considérait dès lors avoir intégralement payé le prix desdits travaux.

e. Par courrier daté du 6 janvier 2013 [recte : 2014], B______ a maintenu sa demande de paiement du solde du prix de la commande de la véranda, relevant que les retards invoqués ne pouvaient lui être imputés et que le contrat conclu ne prévoyait pas d'intérêts, de pénalités ou de frais de retard.

A______, par courrier du 3 mars 2014, a rappelé que les travaux de la véranda, qui devaient débuter en février 2013, ne s'étaient achevés qu'en octobre 2013, soit avec un retard de plus de six mois, qui s'ajoutait à celui qu'il avait déjà relevé dans son courrier du 8 octobre 2012. Il a persisté à soutenir que le retard pris dans l'achèvement des travaux constituait une inexécution du contrat qui justifiait une réduction du prix de 15'275 fr. 75.

f. Le 17 juin 2014, un commandement de payer, poursuite n° 14 170931 N, a été notifié à A______, à la requête de B______, portant sur la somme de 15'275 fr. 75 avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2014, le titre de créance invoqué étant une facture impayée.

A______ y a formé opposition.

g. Par requête expédiée le 30 juillet 2014 au Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), B______ a requis la mainlevée de ladite opposition.

h. Lors de l'audience devant le Tribunal du 28 novembre 2014, B______ était ni présente, ni représentée.

A______ a déposé une réponse écrite à la requête ainsi que diverses pièces. Il a contesté devoir payer le solde de la facture de B______ au motif que la véranda avait été livrée avec retard et présentait des défauts.

B. Par jugement JTPI/15458/2014, le Tribunal a déclaré irrecevable la réponse écrite déposée par A______ à l'audience du 28 novembre 2014 (ch. 1 du disposif), prononcé la mainlevée de l'opposition au commandement de payer, poursuite n° 14 170931 N (ch. 2), arrêté les frais judiciaires à 400 fr., les compensant avec l'avance fournie qui restait acquise à l'Etat (ch. 3), condamné A______ à payer à B______ la somme de 400 fr. à titre de restitution de l'avance fournie (ch. 4) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5).

Il a considéré que les parties avaient conclu un contrat d'entreprise portant sur la construction d'une véranda, dont A______ ne contestait pas la livraison. Ce dernier n'excipait pas de compensation d'une créance en dommages et intérêts pour exécution tardive, de sorte que B______ était au bénéfice d'un titre de mainlevée provisoire et qu'il serait fait droit à la requête.

C. a. Par acte déposé le 19 décembre 2014 au greffe de la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ a formé recours contre ce jugement. Il a conclu à son annulation et au rejet de la requête de mainlevée, avec suite de frais et dépens.

Il a soutenu que la confirmation de commande sur laquelle se fondait B______ contenait une condition expresse de livraison à fin mars 2013. Il ne pouvait dès lors en être déduit sa volonté de payer sans réserve ni condition. Il avait en outre invoqué la compensation en raison de la mauvaise et tardive exécution du contrat d'entreprise.

b. Par courrier du 7 janvier 2015, B______ a relevé qu'aucune pénalité de retard n'avait été convenue et qu' A______ ne lui avait adressé aucune mise en demeure avant la réception de la facture finale. Par la suite, ce dernier n'avait pas signalé de problème lié à la pose de la véranda, mais uniquement un retard.

c. Les parties ont été informées par avis de la Cour du 2 février 2015 de ce que la cause était gardée à juger.

 

EN DROIT

1. 1.1. S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 309 let. b ch. 3 et 319 let. b CPC). La procédure sommaire s'applique (art. 251 let. a CPC).

Aux termes de l'art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours doit, en procédure sommaire, être introduit dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée.

Interjeté dans le délai prescrit et selon la forme requise, le recours est recevable.

1.2. Dans le cadre d'un recours, l'autorité a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant que les griefs formulés et motivés par le recourant (art. 320 CPC; Hohl, Procédure civile, Tome II, 2ème éd., 2010, n. 2307).

La maxime des débats (art. 55 al. 1 et 255 let. a CPC a contrario) et la maxime de disposition (art. 58 al. 1 CPC) s'appliquent. La preuve des faits allégués doit être apportée par titres (art. 254 al. 1 CPC).

2. Le recourant soutient ne pas être débiteur du solde du prix au motif que la véranda commandée a été livrée avec retard et qu'il est dès lors en droit d'invoquer la compensation découlant de la mauvaise et tardive exécution du contrat.

2.1. Selon l'art. 82 al. 1 LP, le créancier dont la poursuite se fonde sur une reconnaissance de dette constatée par acte authentique ou sous seing privé peut requérir la mainlevée provisoire.

2.1.1 Au sens de l'art. 82 al. 1 LP, constitue une reconnaissance de dette, en particulier, l'acte authentique ou sous seing privé signé par le poursuivi, d'où ressort sa volonté de payer au poursuivant, sans réserve ni condition, une somme d'argent déterminée, ou aisément déterminable, et exigible (ATF 136 III 624 consid. 4.2.2, 627 consid. 2 et les arrêts cités). S'agissant de l'exigibilité de la créance au moment de l'introduction de la poursuite, il appartient au créancier de l'établir (arrêts du Tribunal fédéral 5A_32/2011 du 16 février 2012 consid. 3 non publié aux ATF 138 III 182; 5A_845/2009 du 16 février 2010 consid. 7.1; 4A_223/2009 du 14 juillet 2009 consid. 3.2; Staehelin, in Basler Kommentar, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs I, 2ème éd. 2010, n. 77 et 79 ad art. 82 LP).

Le contrat d'entreprise constitue une reconnaissance de dette pour autant que l'entrepreneur établisse qu'il a exécuté sa prestation. Le solde du prix n'est pas exigible tant que la livraison n'est pas conforme au contrat (Krauskopf, La mainlevée provisoire: quelques jurisprudences récentes, JdT 2008 II 23, p. 34; Panchaud/Caprez, La mainlevée d'opposition, 2ème éd., 1980, par. 87 p. 213).

2.1.2 Conformément à l'art. 82 al. 2 LP, le poursuivi peut faire échec à la mainlevée en rendant immédiatement vraisemblable ses moyens libératoires (ATF 132 III 140 consid. 4.1.1 et les références citées; arrêt du Tribunal fédéral 5A_878/2011 du 5 mars 2012 consid. 2.1), ce que celui-ci doit établir en principe par titre (cf. art. 254 al. 1 CPC). Le poursuivi peut se prévaloir de tous les moyens de droit civil - exceptions ou objections - qui infirment la reconnaissance de dette (ATF 131 III 268 consid. 3.2), notamment de la compensation (art. 120 ss CO). S'agissant de ce dernier moyen, il doit rendre vraisemblable non seulement son droit d'opposer la compensation (cf. art. 125 CO), mais aussi la cause et le montant de la créance (arrêt du Tribunal fédéral 5D_147/2011 du 10 novembre 2011 consid. 3).

Il n'a pas à apporter la preuve absolue (ou stricte) de ses moyens libératoires, mais seulement à les rendre vraisemblables (arrêt du Tribunal fédéral 5A_878/2011 du 5 mars 2012 consid. 2.2). Le juge n'a pas à être persuadé de l'existence des faits allégués; il doit, en se fondant sur des éléments objectifs, avoir l'impression qu'ils se sont produits, sans exclure pour autant la possibilité qu'ils se soient déroulés autrement (ATF 132 III 140 consid. 4.1.2).

2.1.3 L'art. 366 CO confère certains droits au maître lorsque l'entrepreneur, au cours des travaux, enfreint ses obligations relatives aux délais de livraison de l'ouvrage (al. 1) - retard dans le commencement de l'exécution, retard dans le rythme d'exécution ou non-respect du terme de livraison arrêté entre parties - ou à l'exécution sans défaut de l'ouvrage (al. 2). S'il y a un retard dans l'exécution de l'ouvrage au sens de l'une des trois hypothèses susrappelées de l'art. 366 al. 1 CO, le maître peut se départir du contrat de manière anticipée s'il en fait la déclaration immédiate et exercer le droit d'option que lui confère l'art. 107 al. 2 CO (ATF 126 III 230 consid. 7a/bb p. 234). Toutefois, le maître doit fixer à l'entrepreneur un délai supplémentaire convenable pour s'exécuter afin de lui donner une chance de livrer à temps l'ouvrage (art. 107 al. 1 CO), la fixation d'un tel délai n'étant pas nécessaire dans les cas prévus par l'art. 108 CO.

2.2. En l'espèce, le recourant ne conteste pas avoir signé la confirmation de commande portant sur la livraison d'une véranda pour un prix de 85'101 fr. 75 et que le solde du prix est de 15'257 fr. 75, après déduction des acomptes versés. Il ne soutient pas que l'ouvrage est inachevé. Il relève uniquement qu'aucun procès-verbal de chantier ne lui a été soumis, mais il est rappelé que la réception de l'ouvrage peut également intervenir par actes concluants (ATF 115 II 456 consid. 4). Il n'explique par ailleurs pas quel défaut matériel affecterait la véranda, indiquant au contraire que l'intimée avait remédié aux défauts rencontrés en cours d'exécution des travaux.

L'intimée ayant livré l'ouvrage commandé, la confirmation de commande constitue donc une reconnaissance de dette.

Le recourant invoque toutefois, en compensation, un prétendu dommage de 15'257 fr. 75 résultant du retard pris dans l'exécution des travaux. Cela étant, il n'explique d'aucune manière sur quel fondement il serait en droit de réclamer un tel montant à l'entrepreneur, quel type de dommage il aurait subi (gain manqué, dépenses engagées en raison du retard, dépenses inutilement engagées ou remplacement temporaire, par exemple), ni comment il a calculé ce montant.

Le recourant ne rend dès lors pas vraisemblable qu'il disposerait d'une créance en dommages-intérêts d'un montant de 15'257 fr. 75, ou d'un quelconque autre montant, qu'il pourrait opposer en compensation.

Au vu de ce qui précède, c'est à bon droit que le Tribunal a prononcé la mainlevée de l'opposition au commandement de payer. Le recours, infondé, sera rejeté.

3. Le recourant, qui succombe, sera condamné aux frais judiciaires, arrêtés à 600 fr. et compensés avec l'avance de frais qu'il a versée, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève (art. 106 al.1 et 111 al. 1 CPC; art 48 et 61 al. 1 OELP).

Il ne sera pas alloué de dépens à l'intimée, qui comparait en personne, a répondu au recours par un simple courrier et n'a pas réclamé qu'il lui en soit alloué (art. 95 al. 3 let. c CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté par A______ contre le jugement JTPI/15458/2014 rendu le 2 décembre 2014 par le Tribunal de première instance dans la cause C/15645/2014-9 SML.

Au fond :

Rejette ce recours.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Condamne A______ aux frais judiciaires du recours, fixés à 600 fr., lesquels sont compensés avec l'avance de frais fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Pauline ERARD et Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Céline FERREIRA, greffière.

 

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Céline FERREIRA

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF : RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.