C/1674/2014

ACJC/947/2015 du 28.08.2015 sur ACJC/1166/2014 ( SML ) , RENVOYE

Descripteurs : DÉCISION DE RENVOI; TRIBUNAL FÉDÉRAL
Normes : CPC.327.3.a
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En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/1674/2014 ACJC/947/2015

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du VENDREDI 28 AOÛT 2015

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, Genève, recourant contre un jugement rendu par la 18ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 19 août 2014, comparant par Me Nicola Meier, avocat, rue de la Fontaine 2, 1204 Genève, en l'étude duquel il fait élection de domicile aux fins des présentes,

et

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE (ÉTAT DE GENÈVE), agissant par le Département de la sécurité, sis place de la Taconnerie 7, case postale 3962, 1211
Genève 3, intimée, comparant par Me Christophe Emonet, avocat, Pestalozzi Avocats SA, cours de Rive 13, 1204 Genève, en l'étude duquel elle fait élection de domicile aux fins des présentes.

 

 

Cause renvoyée par arrêt du Tribunal fédéral du 28 mai 2015.

 


EN FAIT

A. a. Par ordonnance du 14 janvier 2013, le Tribunal de police du canton de Genève a classé la procédure pénale dirigée contre A______ du chef d'abus de confiance aggravés, pour le motif que celui-ci était dans l'incapacité durable de prendre part aux débats, et l'a condamné au paiement d'une créance compensatrice de
942'000 fr. en faveur de l'Etat de Genève. Il a alloué le produit de la créance compensatrice, sous imputation des frais de l'Etat, à B______ et donné acte à celle-ci de ce qu'elle cédait à l'ETAT DE GENEVE la part correspondante de sa créance. Le recours formé par A______ contre cette ordonnance a été rejeté par la Chambre pénale de recours de la Cour de justice le 21 mars 2013. Par arrêt du 27 août 2013 (6B_440/2013), le Tribunal fédéral a déclaré irrecevable le recours interjeté contre cet arrêt.

b. Le 2 janvier 2014, un commandement de payer (poursuite n° 1______) la somme de 942'000 fr., avec intérêts à 5% dès le 27 août 2008, a été notifié à A______, à la requête de l'ETAT DE GENEVE. Cet acte ayant été frappé d'opposition, le poursuivant en a requis du Tribunal de première instance la mainlevée définitive le 30 janvier 2014.

Lors de l'audience du Tribunal le 26 mai 2014, son avocat a "représenté" A______, a conclu, principalement, à ce que son mémoire de réponse soit déclaré recevable et à ce qu'il soit dit et constaté que A______ n'avait pas la capacité d'ester en justice, partant, à ce que la requête de mainlevée soit déclarée irrecevable. Subsidiairement, il a sollicité la suspension de la procédure et demandé qu'il soit ordonné à l'autorité de protection de l'adulte de désigner un représentant légal à A______; plus subsidiairement, il a conclu au rejet de la requête.

c. Par jugement du 19 août 2014, le Tribunal de première instance a levé définitivement l'opposition formée au commandement de payer précité. Par arrêt du 12 décembre 2014, la Cour de justice a rejeté le recours interjeté contre ce jugement.

Par arrêt 5A_81/2015 du 28 mai 2015, le Tribunal fédéral a admis le recours formé par A______ contre l'arrêt de la Cour susmentionné, annulé la décision attaquée et renvoyé la cause à la Cour pour instruction et nouvelle décision. Il a retenu que les éléments figurant au dossier conduisaient à mettre en doute la capacité de discernement de A______, de sorte que son incapacité de discernement devait être présumée. Il fallait dès lors vérifier si cette présomption pouvait être renversée. Il convenait d'instruire plus avant la question de la capacité de discernement, et, partant, celle de la capacité d'ester en justice de A______ et de rendre une nouvelle décision.

d. La cause a été réinscrite au rôle de la Cour. Par courrier du 29 juin 2015, l'ETAT DE GENEVE a conclu à la suspension de la procédure de mainlevée en application de l'art. 126 CPC et à ce que le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (TPAE) soit avisé pour qu'il statue sur la nécessité de mesures tutélaires (art. 69 al. 2 CPC). Subsidiairement, il a conclu au renvoi de la cause au Tribunal de première instance pour que celui-ci statue dans le sens de ce qui précède, afin d'assurer le respect du double degré de juridiction, et à la transmission à ce dernier de sa détermination et des quinze pièces qui y étaient jointes.

e. Par courrier du même jour, A______ a conclu au renvoi de la cause au Tribunal de première instance pour qu'il examine sa capacité de discernement et, cas échéant, suspende la procédure jusqu'à ce que le TPAE décide de la nomination ou non d'un représentant légal, à l'allocation de dépens pour la procédure de première et seconde instance et à la mise des frais à la charge de l'Etat.

f. Dans sa réplique du 7 juillet 2015, l'ETAT DE GENEVE a conclu au déboutement de A______ s'agissant de la mise des frais à la charge de l'Etat et de ses conclusions en allocation de dépens.

g. Les parties ont été informées par courrier du greffe de la Cour de justice du
7 juillet 2015 de ce que la cause était gardée à juger. A______ n'a pas dupliqué.

EN DROIT

1. 1.1 En cas de renvoi de la cause par le Tribunal fédéral conformément à l'art.
107 al. 2 LTF, l'autorité inférieure doit fonder sa nouvelle décision sur les considérants en droit de l'arrêt de renvoi.

Le principe de l'autorité de l'arrêt de renvoi, que prévoyait l'art. 66 al. 1 OJ, demeure valable sous l'empire de la LTF (ATF 135 III 334 consid. 2). En vertu de ce principe, l'autorité cantonale à laquelle une affaire est renvoyée est tenue de fonder sa nouvelle décision sur les considérants de droit de l'arrêt du Tribunal fédéral; sa cognition est limitée par les motifs de l'arrêt de renvoi, en ce sens qu'elle est liée par ce qui a déjà été tranché définitivement par le Tribunal fédéral, ainsi que par les constatations de fait qui n'ont pas été critiquées devant lui
(ATF 131 III 91 consid. 5.2 et la jurisprudence citée).

1.2 Si elle admet le recours, l'instance de recours annule la décision ou l'ordonnance d'instruction et renvoie la cause à l'instance précédente (art. 327 al. 3 let. a CPC). Cette dernière devra statuer à nouveau, mais sera liée par les considérants de l'instance de recours (jeandin, in CPC, Code de procédure civile commenté, 2011, n° 5 ad art.327 CPC).

1.3 A teneur de l'art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours, pour les décisions prises en procédure sommaire, dans le délai de dix jours à compter de la notification de la décision motivée.

1.4 En l'espèce, il n'y a pas lieu de revenir sur la recevabilité du recours qui avait été admise par la Cour et qui n'a pas été critiquée devant le Tribunal fédéral. Le recours sera donc déclaré recevable.

Conformément aux considérants de renvoi de l'arrêt du Tribunal fédéral, il convient de compléter l'état de faits par l'état de santé actuel du recourant et de statuer sur la capacité de discernement de celui-ci au regard de la nature de la procédure.

Afin de respecter le principe du double de degré de juridiction, le jugement entrepris sera annulé et la cause renvoyée au Tribunal, pour instruction et décision dans le sens des considérants qui précèdent. Celui-ci se prononcera également sur la suspension éventuelle de la procédure et la dénonciation de la cause au TPAE pour que soient éventuellement prises les mesures tutélaires nécessaires.

2. 2.1 La cause étant renvoyée au Tribunal, aucune des parties n'obtient, en l'état, gain de cause. L'issue du litige ne pouvant être déterminée, les frais et dépens de première instance seront réservés, leur sort devant être tranché dans le jugement à prononcer après le présent arrêt de renvoi.

2.2 Les frais judiciaires de recours seront arrêtés à 1'500 fr. (art. 95 al. 1 let. a et al. 2, 96 et 105 al. 1 CPC; art. 35, 23 et 13 RTFMC). Ils seront partiellement compensés avec l'avance fournie par le recourant de 750 fr., qui restera acquise à l'Etat (art. 111 al. 1 CPC). Ces frais seront mis à la charge de l'intimé, celui-ci devant être considéré comme étant "la partie succombante" au sens de l'art. 106
al. 1 CPC, dans la mesure où il a conclu au rejet du recours et à la confirmation du jugement querellé.

En tenant compte de l'activité effectivement déployée par l'avocat du recourant, les dépens du recours, débours et TVA compris, seront fixés à 5'000 fr. (art. 95
al. 1 let. b et al. 3, 96 et 105 al. 2 CPC; art. 85, 87 et 90 RTFMC; art. 20 al. 1, 23, 25 et 26 LaCC; art. 25 al. 1 LTVA), et mis à la charge de l'intimé.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

Déclare recevable le recours interjeté par A______ contre le jugement JTPI/10141/2014 rendu le 19 août 2014 par le Tribunal de première instance dans la cause
C/1674/2014-18 SML.

Statuant sur renvoi du Tribunal fédéral :

Annule le jugement JTPI/10141/2014 rendu le 19 août 2014 par le Tribunal de première instance dans la cause C/1674/2014-18 SML.

Renvoie la cause au Tribunal pour instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires du recours à 1'500 fr., partiellement compensés par l'avance de frais fournie par A______, qui reste acquise à l'Etat.

Les met à la charge de l'ETAT DE GENEVE.

Condamne en conséquence l'ETAT DE GENEVE à verser aux Services financiers du Pouvoir judiciaire 750 fr. à ce titre.

Le condamne à verser à A______ 750 fr. au titre de remboursement de ces frais.

Condamne également l'ETAT DE GENEVE à verser à A______ 5'000 fr. à titre de dépens de recours.

Siégeant :

Madame Sylvie DROIN, présidente; Madame Pauline ERARD et Madame Fabienne GEISINGER-MARIÉTHOZ, juges; Madame Céline FERREIRA, greffière.

 

La présidente :

Sylvie DROIN

 

La greffière :

Céline FERREIRA

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.