C/2410/2017

ACJC/1037/2017 du 21.08.2017 sur JTPI/6994/2017 ( SML ) , JUGE

Descripteurs : MAINLEVÉE PROVISOIRE ; TITRE AUTHENTIQUE EXÉCUTOIRE ; RECONNAISSANCE DE DETTE
Normes : LP.82;
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En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/2410/2017 ACJC/1037/2017

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du lundi 21 aoÛt 2017

 

Entre

A______ Sàrl, sise______ à Genève, recourante contre un jugement rendu par la 18ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 29 mai 2017, représentée par Me Christophe Savoy, agent d'affaires breveté, case postale 218, 1401 Yverdon-les-bains, comparant en personne,

et

B______ SA, sise______ à Neuchâtel, intimée, comparant en personne.

 


EN FAIT

A.           Par jugement du 29 mai 2017, expédié pour notification aux parties le 2 juin 2017, le Tribunal de première instance a écarté l'écriture spontanée de A______ Sàrl, prononcé la mainlevée provisoire de l'opposition formée au commandement de payer poursuite n° 1______ et arrêté les frais judiciaires à 200 fr. compensés avec l'avance déjà opérée, et mis à la charge de A______ Sàrl, condamnée à les rembourser à B______ SA.![endif]>![if>

Le Tribunal a retenu qu'il résultait de l'échange de courriels produits que le matériel commandé avait été reçu, qu'une partie du montant dû avait été acquittée tandis que le solde avait été annoncé comme à verser à une date annoncée et qu'en conséquence les pièces produites valaient reconnaissance de dette.

B.            Par acte du 15 juin 2017, A______ Sàrl a formé recours contre le jugement précité, concluant à l'annulation de celui-ci, cela fait au déboutement
de B______ SA des fins de sa requête de mainlevée, avec suite de frais et dépens.![endif]>![if>

B______ SA n'a pas déposé de réponse.

Par avis du 14 juillet 2017, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

C.           Les faits pertinents suivants résultent de la procédure de première instance :![endif]>![if>

a. Par courrier électronique du 5 juin 2015, portant l'indication en pied "C______ GENEVE, Manufacture de haute horlogerie www.______", D______, "marketing director", s'est adressée à B______ SA pour confirmer une commande de 50 loupes à livrer à "C______, A______ chemin______ à Genève".

Par courrier électronique du 1er juillet 2015, D______ a indiqué, à la demande de B______, avoir bien reçu "les loupes et boites".

b. Le 30 juin 2015, B______ SA a établi, à l'adresse de A______ Sàrl, chemin______ à Genève" une facture n° 2______ en 3'101 fr. 20, portant sur 50 "loupes en bois de buis […] avec logo C______", 50 boîtes noires, un gravage laser et un logo autocollant C______. La facture était payable à trente jours nets.

Le 1er juillet 2015, B______ a établi une seconde facture,
n° 3______, à la même adresse, portant sur 50 boîtes noires pour loupe, en
66 fr. 15. La facture était payable à trente jours nets.

Entre le 8 octobre 2015 et le 8 février 2016, B______ SA a adressé trois courriers électroniques de relance, les factures précitées étant demeurées impayées. D______ a, par deux fois, répondu respectivement qu'elle transmettait au service comptabilité et qu'elle s'occuperait "de cette facture en souffrance dans les meilleurs délais".

Par courrier électronique du 11 mars 2016, portant l'indication en pied " C______ GENEVE, Manufacture de haute horlogerie www.______", E______ (directeur avec signature individuelle de A______ Sàrl, selon le Registre du commerce) s'est adressé à B______ SA dans les termes suivants : "Nous vous confirmons le paiement de Chf 1'500.- le 11/03/2016 ainsi que le versement du solde des factures 2______ et 3______ soit Chf 1'667.35 au 31 mars. En vous remerciant pour votre patience".

Par email du 20 juin 2016, B______ SA a rappelé qu'il restait un montant ouvert de 1'667 fr. 35. Par courrier électronique du 21 juin 2016, E______ a répondu attendre un versement important pour fin juin 2016 et remercié la société précitée pour sa patience.

c. Le 13 décembre 2016, B______ SA a fait notifier à
A______ Sàrl un commandement de payer poursuite n° 1______ portant sur le montant de 1'667 fr. 35. La rubrique "titre et date de la créance ou cause de l'obligation" était libellée ainsi : "Solde facture ouverte 2______ du 30.06.2015". La poursuivie a formé opposition.

d. Le 24 janvier 2017, B______ SA a saisi le Tribunal de première instance d'une requête de mainlevée provisoire de l'opposition précitée, dirigée contre A______ Sàrl.

Le 17 mai 2017, A______ Sàrl a déposé une écriture spontanée.

Aucune des parties n'était présente ou représentée à l'audience du Tribunal du 19 mai 2017.

EN DROIT

1. S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a et 309 let. b ch. 3 CPC). La procédure sommaire s'applique (art. 251 let. a CPC).

Aux termes de l'art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée, pour les décisions prises en procédure sommaire.

En l'espèce le recours a été interjeté dans le délai et selon les formes prévus par la loi, de sorte qu'il est recevable.

2. La recourante fait grief au Tribunal d'avoir retenu que les pièces produites par l'intimée valaient titre de mainlevée provisoire de l'opposition formée au commandement de payer.

2.1 Le créancier dont la poursuite se fonde sur une reconnaissance de dette constatée par acte authentique ou sous seing privé peut requérir la mainlevée provisoire (art. 82 al. 1 LP).

Le juge de la mainlevée provisoire doit vérifier d'office notamment l'existence matérielle d'une reconnaissance de dette (ATF 139 III 444 consid. 4.1.1, et les références; arrêt du Tribunal fédéral 5A_40/2013 du 29 octobre 2013 consid. 2.2).

La procédure de mainlevée provisoire est une procédure sur pièces (Urkundenprozess), dont le but n'est pas de constater la réalité de la créance en poursuite, mais l'existence d'un titre exécutoire : le créancier peut ne motiver sa requête qu'en produisant le titre, et la production de cette pièce, considérée en vertu de son contenu, de son origine et des caractéristiques extérieures comme un tel titre, suffit pour que la mainlevée soit prononcée si le débiteur n'oppose pas et ne rend pas immédiatement vraisemblable des exceptions. Le juge de la mainlevée provisoire examine donc seulement la force probante du titre produit par le créancier, sa nature formelle - et non la validité de la créance - et lui attribue force exécutoire (ATF 139 III 444 précité; 136 III 583 consid. 2.3 et 132 III 140 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5D_195/2013 du 22 janvier 2014 consid. 3.1).

Par reconnaissance de dette au sens de l'art. 82 al. 1 LP, il faut entendre notamment l'acte sous seing privé, signé par le poursuivi, d'où ressort sa volonté de payer au poursuivant, sans réserve ni condition, une somme d'argent déterminée, ou aisément déterminable, et exigible (ATF 136 III 624 consid. 4.2.2; 136 III 627 consid. 2).

La reconnaissance de dette peut découler du rapprochement de plusieurs pièces, pour autant que les éléments nécessaires en résultent (ATF 122 II 126 = JdT 1998 II 82 consid. 2; SJ 2004 I 209 consid. 3.1; arrêts du Tribunal fédéral 5P.290/2006 du 12 octobre 2006 consid. 3.1.2 et 5A_652/2011 du 28 février 2012 consid. 3.21) et que celle qui est signée se réfère directement à celle qui comporte un montant déterminé (ATF 132 III 480 consid. 4.1); autrement dit, la signature doit figurer sur celui des documents qui impose une obligation au poursuivi et qui a un caractère décisif (GILLIERON, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, 1999, n. 33 ad art. 82 LP).

Un message électronique (e-mail) ne portant pas la signature électronique qualifiée ne vaut pas titre de mainlevée (ABBET/VEUILLET, La mainlevée de l'opposition, Commentaire des articles 79 à 84 LP, Berne 2017, n. 30 ad art. 82).

2.2 En l'occurrence, il est constant que l'intimée n'a produit à l'appui de sa requête, outre ses factures et le commandement de payer frappé d'opposition, que des courriers électroniques, dont aucun ne comporte de signature manuscrite ou électronique qualifiée.

Ainsi, le rapprochement de ces pièces, quoi qu'il en soit de leur contenu, ne permet pas de retenir que celles-ci vaudraient titre de mainlevée au sens de l'art. 82 LP.

Il s'ensuit que le grief est fondé.

La décision attaquée sera dès lors annulée.

Il sera statué à nouveau (art. 327 al. 3 let. b CPC) dans le sens où l'intimée sera déboutée des fins de sa requête.

La quotité des frais de première instance, qui n'est pas contestée et qui est conforme aux dispositions légales ne sera pas revue. Ces frais seront mis à la charge de l'intimée (art. 106 al. 1 CPC).

Il ne sera pas alloué de dépens de première instance, la recourante n'ayant pas comparu à l'audience convoquée par le Tribunal et ayant déposé inutilement une détermination écrite.

3. L'intimée, qui succombe, supportera les frais judiciaires du recours, arrêtés à 300 fr. (art. 48, 61 OELP), couverts par l'avance déjà opérée; elle en remboursera l'appelante.

Elle versera également à celle-ci 250 fr. de dépens du recours (art. 84, 85, 89,
90 RTFMC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ Sàrl contre le jugement JTPI/6994/2017 rendu le 29 mai 2017 par le Tribunal de première instance dans la cause C/2410/2017-18 SML.

Au fond :

Annule ce jugement, et statuant à nouveau :

Déboute B______ SA des fins de sa requête de mainlevée provisoire de l'opposition formée au commandement de payer poursuite n° 1______.

Met à la charge de B______ SA les frais judiciaires de première instance, en 200 fr., compensés avec l'avance déjà opérée, acquise à l'Etat de Genève.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais de recours :

Arrête les frais judiciaires du recours à 300 fr., les compense avec l'avance effectuée, acquise à l'Etat de Genève.

Les met à la charge de B______ SA.

Condamne en conséquence B______ SA à rembourser 300 fr. à
A______ Sàrl.

Condamne B______ SA à verser à A______ Sàrl 250 fr. à titre de dépens de recours.

Siégeant :

Madame Sylvie DROIN, présidente; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ et Monsieur Ivo BUETTI, juges; Monsieur David VAZQUEZ, commis-greffier.

 

La présidente :

Sylvie DROIN

 

Le commis-greffier :

David VAZQUEZ

 

 


 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.