C/26381/2016

ACJC/1454/2017 du 14.11.2017 sur JTPI/5215/2017 ( SML ) , CONFIRME

Recours TF déposé le 08.01.2018, rendu le 31.05.2018, IRRECEVABLE, 5A_38/2018
Descripteurs : MAINLEVÉE DÉFINITIVE ; AUTORITÉ FISCALE ; NOTIFICATION DE LA DÉCISION
Normes : LP.80; LPGIP.36.4;
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En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/26381/2016 ACJC/1454/2017

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du mardi 14 novembre 2017

 

Entre

A______, p.a. M. B______, administrateur, ______, recourante contre un jugement rendu par la 26ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 24 avril 2017, comparant par Me Romain Jordan, avocat, rue Général Dufour 15, case
postale 5556, 1211 Genève 11, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

et

ETAT DE GENEVE, SOIT POUR LUI LA PERCEPTION DE L'AFC, Service du contentieux, rue du Stand 26, case postale 3937, 1211 Genève 3, intimé, comparant en personne.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/5215/2017 du 24 avril 2017, reçu le 28 avril 2017 par A______, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal) a prononcé la mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer, poursuite
n° 1______, formée par A______ (chiffre 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 200 fr., compensés avec l'avance effectuée par l'ETAT DE GENEVE, soit pour lui LA PERCEPTION DE L'AFC, mis ceux-ci à la charge de A______ et condamné cette dernière à payer à l'ETAT DE GENEVE, soit pour lui
LA PERCEPTION DE L'AFC, la somme de 200 fr. (ch. 2), et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 3).

En substance, le Tribunal a retenu que, certes, l'ETAT DE GENEVE, soit pour lui LA PERCEPTION DE L'AFC, n'avait pas adressé par pli recommandé le bordereau de taxation sur la base duquel elle poursuivait A______, mais qu'il fallait toutefois retenir que celle-ci avait eu connaissance du bordereau étant donné qu'elle avait déposé une réclamation à son encontre. Par ailleurs, A______ n'avait pas réagi à la sommation envoyée par lettre recommandée et se référant clairement à ce bordereau, elle ne pouvait dès lors invoquer l'absence de notification de celui-ci pour s'opposer à la mainlevée.

B. a. Par acte du 4 mai 2017, A______ forme recours contre ce jugement, dont elle sollicite l'annulation. Cela fait, elle conclut au déboutement de l'ETAT DE GENEVE, soit pour lui LA PERCEPTION DE L'AFC, de toutes ses conclusions, sous suite de frais et dépens.

b. Par réponse du 9 juin 2017, l'ETAT DE GENEVE, soit pour lui LA PERCEPTION DE L'AFC, conclut à la confirmation du jugement entrepris, à ce qu'il soit dit que la poursuite ira sa voie, et au déboutement de A______ de toutes ses conclusions, sous suite de frais et dépens de première et seconde instance.

c. Par réplique du 26 juin 2017 et duplique du 7 juillet 2017, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

d. Elles ont été informées par courrier du greffe de la Cour du 18 juillet 2017 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits suivants ressortent du dossier soumis au Tribunal :

a. L'ETAT DE GENEVE, soit pour lui LA PERCEPTION DE L'AFC (ci-après : l'AFC), a allégué avoir adressé, le 16 juillet 2014, par pli simple, à A______ un bordereau de taxation d'office n° 2______concernant l'impôt fédéral direct de l'année 2013, d'un montant de 3'686 fr., y compris 1'000 fr. à titre d'amende.

A______ conteste avoir reçu ce bordereau.

Le 21 décembre 2016, la mention "bordereau valant jugement exécutoire, pas de réclamation dans les 30 jours" a été apposée sur ce bordereau par le service du contentieux de l'AFC.

b. Par acte du 25 septembre 2014, A______ a formé réclamation à l'encontre de ce bordereau de taxation.

c. Par décision du 16 octobre 2014, l'AFC a déclaré la réclamation de A______ irrecevable, au motif que celle-ci n'avait pas présenté sa réclamation dans le délai légal et impératif de trente jours dès la réception de la décision de taxation, conformément à l'art. 132 al. 1 de la Loi fédérale sur l'impôt fédéral direct (LIFD – RS 642.11).

A______ conteste avoir reçu cette décision.

d. Par sommation adressée par pli recommandé du 4 juillet 2016, l'AFC a mis A______ en demeure de s'acquitter de la somme de 3'893 fr. 65, correspondant au "bordereau Impôt fédéral direct / 2013 / 1, notifié le 16.07.2014 sous le n° de compte : 2______/IFD/2013/1, de CHF 3'686.00", plus 207 fr. 65 d'intérêts.

Il était indiqué qu' "[à] défaut de paiement dans le délai de 10 jours, il sera procédé au recouvrement conformément à la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et faillites […]".

A teneur du justificatif de distribution postale de cette sommation, l'envoi a été retiré le 5 juillet 2016 par A______ sous la signature de B______.

e. Le 14 novembre 2016, l'AFC a fait notifier à A______ un commandement de payer, poursuite n° 1______ pour les sommes de 3'686 fr., plus intérêts à 3% dès le 4 août 2016, et 216 fr. 55, à titre d'intérêts moratoires au 4 août 2016.

Les titres des créances et causes des obligations étaient ainsi libellées :
"1. 2______/IFD/2013/1, Bordereau 3______ exp. le 16.07.2014" et
"2. INTERETS MORATOIRES AU 04.08.2016".

La poursuivie y a formé opposition le 14 novembre 2016.

f. Par requête du 21 décembre 2016, l'AFC a requis le prononcé de la mainlevée définitive de l'opposition formée audit commandement de payer, avec suite de frais et dépens.

g. Lors de l'audience du 13 mars 2017 devant le Tribunal, A______ a conclu au déboutement de l'AFC, sous suite de frais et dépens, au motif qu' "il n'exist[ait] pas de preuve de notification du bordereau de taxation, mais seulement des sommations, ce qui est insuffisant […]". Elle faisait opposition à chaque bordereau qui lui était notifié et une procédure pilote était en cours devant la Chambre administrative de la Cour de justice à ce sujet.

L'AFC a plaidé l'abus de droit et relevé que "[d]ans une première procédure, [A______], représentée par le même avocat, avait soulevé l'irrégularité de la notification des sommations, sans parler de celle des bordereaux, alors qu'on parlait des mêmes années."

Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

EN DROIT

1. 1.1 S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. b et 309 let. b ch. 3 CPC). La procédure sommaire s'applique
(art. 251 let. a CPC).

Aux termes de l'art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée, pour les décisions prises en procédure sommaire.

Interjeté dans le délai légal et selon la forme prescrite, le recours est recevable en l'espèce.

1.2 Dans le cadre d'un recours, le pouvoir d'examen de la Cour est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits
(art. 320 CPC). L'autorité de recours a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant par ailleurs que les griefs formulés et motivés par la partie recourante (Hohl, Procédure civile, Tome II, 2ème édition, Berne, 2010, n. 2307).

Les maximes des débats et de disposition s'appliquent (art. 55 al. 1, 255 lit. a
a contrario et 58 al. 1 CPC).

2. La recourante fait grief au premier juge d'avoir considéré que le bordereau de taxation à l'origine de la créance en poursuite avait été notifié et qu'il valait dès lors titre de mainlevée.

2.1 Aux termes de l'art. 80 al. 1 LP, le créancier qui est au bénéfice d'un jugement exécutoire peut requérir du juge la mainlevée définitive de l'opposition.

2.1.1 Sont assimilées à des jugements les décisions des autorités administratives suisses (art. 80 al. 2 ch. 2 LP), soit une autorité de la Confédération ou une autorité cantonale.

Selon l'art. 36 al. 4 de la loi relative à la perception et aux garanties des impôts des personnes physiques et des personnes morales (LPGIP – D 3 18) (exécution forcée), dans la procédure de poursuite, les décisions et prononcés des autorités fiscales, qui sont entrés en force, sont assimilés à des jugements exécutoires au sens de l'article 80 LP.

Est exécutoire au sens de l'art. 80 LP le prononcé qui a non seulement force exécutoire, mais également force de chose jugée (formelle Rechtskraft; ATF 113 III 6 consid. 1b, p. 9; 105 III 43 consid. 2a, in JdT 1980 p. 117), c'est-à-dire qui est devenu définitif, parce qu'il ne peut plus être attaqué par voie de recours ordinaire qui, de par la loi, a un effet suspensif (arrêt du Tribunal fédéral 5P.405/2004 du 22 février 2005 consid. 3; Staehelin, in Kommentar zum Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, 2010, n° 7 ad art. 80 LP).

La force de chose jugée doit résulter du titre ou d'un document qui s'y réfère. Le jugement ne remplit pas cette condition s'il a été rendu avec effet suspensif, s'il est conditionnel, si la dette n'est pas exigible, s'il n'a pas été régulièrement notifié (Schmidt, Commentaire romand LP, Bâle, 2005, n° 3 ad art. 80 LP et jurisprudence citée).

2.1.2 Il appartient à l'administration de prouver que la notification a eu lieu
(ATF 105 III 43 précité, consid. 2a). En l'absence d'envoi recommandé, la preuve de la notification d'un acte peut résulter de l'ensemble des circonstances, en particulier de la correspondance échangée ou de l'absence de protestation de la part d'une personne qui reçoit des rappels (ATF 105 III 43 précité consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 5D_173/2008 du 20 février 2009 consid. 5.1).

2.2 En l'espèce, le bordereau de taxation du 16 juillet 2014, à l'origine de la créance en poursuite, a été notifié à la recourante par pli simple. La recourante admet avoir reçu ce bordereau de taxation et avoir formé réclamation contre celui-ci le 25 septembre 2014. La recourante conteste toutefois avoir reçu la décision déclarant sa réclamation irrecevable et allègue que l'intimé n'a pas démontré lui avoir notifié cette décision.

Toutefois, il ressort du dossier qu'à réception de la sommation adressée par lettre recommandée à la recourante le 4 juillet 2016 et mentionnant expressément le bordereau du 16 juillet 2014, ainsi que les montants dus à ce titre, la recourante n'a pas réagi.

Or, on peut partir du principe qu'un contribuable qui conteste son rappel d'impôt par le biais d'une réclamation va s'inquiéter de connaître le sort réservé à celle-ci par l'AFC, a fortiori après avoir reçu la sommation se référant expressément au bordereau contesté, et n'attend pas d'être poursuivi.

C'est donc à bon droit que le Tribunal a déduit de l'absence de réaction de la recourante après la réception de la sommation de payer qu'elle avait préalablement reçu le bordereau expédié en juillet 2014, ce que celle-ci admet.

Dès lors que le bordereau a été valablement notifié, contesté tardivement et que celui-ci porte la mention qu'il vaut jugement exécutoire, c'est également à juste titre que le Tribunal a considéré que l'intimé était au bénéfice d'un titre exécutoire au sens de l'art. 80 al. 2 LP justifiant le prononcé de la mainlevée définitive.

Le grief est infondé. Le recours sera rejeté.

3. La recourante, qui succombe, sera condamnée aux frais (art. 106 al. 1 et 3 CPC).

En vertu de l'art. 61 al. 1 OELP, la juridiction supérieure à laquelle sont déférées les décisions rendues dans une procédure sommaire en matière de poursuite
(art. 251 CPC) peut prélever un émolument n'excédant pas une fois et demie l'émolument que peut prélever l'autorité de première instance.

Le premier juge a fixé l'émolument de première instance - non contesté en tant que tel - à 200 fr. Partant, l'émolument de la présente décision sera fixé à 300 fr. et mis à la charge de la recourante, compensé avec l'avance de frais opérée par celle-ci, acquise à l'Etat (art. 111 al. 1 CPC).

Il ne sera pas alloué de dépens à l'intimé qui comparaît en personne et qui ne justifie d'aucune démarche particulière (art. 95 al. 3 let. c CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ le 4 mai 2017 contre le jugement JTPI/5215/2017 rendu le 24 avril 2017 par le Tribunal de première instance dans la cause C/26381/2016-26 SML.

Au fond :

Rejette ce recours.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais du recours à 300 fr., couverts par l'avance déjà opérée, acquise à l'Etat de Genève.

Les met à la charge de A______.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN et Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Monsieur David VAZQUEZ, commis-greffier.

 

La présidente :

Pauline ERARD

 

Le commis-greffier :

David VAZQUEZ

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.