C/26384/2016

ACJC/1453/2017 du 14.11.2017 sur JTPI/5217/2017 ( SML ) , CONFIRME

Recours TF déposé le 08.01.2018, rendu le 11.05.2018, IRRECEVABLE, 5A_37/2018
Descripteurs : MAINLEVÉE DÉFINITIVE ; DÉCISION DE TAXATION ; COMMUNICATION
Normes : LP.80; LPGIP.36;
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En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/26384/2016 ACJC/1453/2017

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du MARDI 14 NOVEMBRE 2017

 

Entre

A_____, p.a. M. B_____, administrateur, ______, recourante contre un jugement rendu par la 26ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 24 avril 2017, comparant par Me Romain Jordan, avocat, rue Général Dufour 15, case postale 5556, 1211 Genève 11, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

et

ETAT DE GENEVE, SOIT POUR LUI LA PERCEPTION DE L'AFC, Service du contentieux, rue du Stand 26, case postale 3937, 1211 Genève 3, intimé, comparant en personne.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/5217/2017 du 24 avril 2017, reçu le 28 avril 2017 par A_____, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal) a prononcé la mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer, poursuite n° 1_____, formée par A_____ (chiffre 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 200 fr., compensés avec l'avance effectuée par l'ETAT DE GENEVE, soit pour lui LA PERCEPTION DE L'AFC, mis ceux-ci à la charge de A_____ et condamné cette dernière à payer à l'ETAT DE GENEVE, soit pour lui LA PERCEPTION DE L'AFC, la somme de 200 fr. (ch. 2) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 3).

En substance, le Tribunal a retenu que, certes, l'ETAT DE GENEVE, soit pour lui LA PERCEPTION DE L'AFC, n'avait pas adressé par pli recommandé le bordereau de taxation sur la base duquel elle poursuivait A_____, mais celle-ci n'ayant pas réagi à la sommation envoyée par lettre recommandée et se référant clairement à ce bordereau, elle ne pouvait invoquer l'absence de notification de celui-ci pour s'opposer à la mainlevée.

B. a. Par acte du 4 mai 2017, A_____ forme recours contre ce jugement, dont elle sollicite l'annulation. Cela fait, elle conclut au déboutement de l'ETAT DE GENEVE, soit pour lui LA PERCEPTION DE L'AFC, de toutes ses conclusions, sous suite de frais et dépens.

b. Par réponse du 9 juin 2017, l'ETAT DE GENEVE, soit pour lui LA PERCEPTION DE L'AFC, conclut à la confirmation du jugement entrepris, à ce qu'il soit dit que la poursuite ira sa voie, et au déboutement de A_____ de toutes ses conclusions, sous suite de frais et dépens de première et seconde instance.

c. Par réplique du 26 juin 2017 et duplique du 7 juillet 2017, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

d. Elles ont été informées par courrier du greffe de la Cour du 18 juillet 2017 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits suivants ressortent du dossier soumis au Tribunal :

a. L'ETAT DE GENEVE, soit pour lui LA PERCEPTION DE L'AFC (ci-après : l'AFC), a allégué avoir adressé, le 19 février 2014, par pli simple, à A_____ un bordereau de taxation d'office n° 2_____ concernant l'impôt fédéral direct de l'année 2012, d'un montant de 2'733 fr. 55, y compris 1'040 fr. à titre de frais et d'amende.

A_____ conteste avoir reçu ce bordereau.

Le 21 décembre 2016, la mention "bordereau valant jugement exécutoire, pas de réclamation dans les 30 jours" a été apposée sur ce bordereau par le service du contentieux de l'AFC.

b. Par sommation adressée par pli recommandé du 3 juin 2014, l'AFC a mis A_____ en demeure de s'acquitter de la somme de 2'885 fr. 30, correspondant au "bordereau Impôts Cantonaux et Communaux / 2012 / 1, notifié le 19.02.2014 sous le n° de compte : 2_____/ICC/2012/1, de CHF 2'733.55", plus 131 fr. 75 d'intérêts, et 20 fr. de frais de sommation.

Il était indiqué qu' "[à] défaut de paiement dans le délai de 30 jours, il sera procédé au recouvrement conformément à la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et faillites […]".

A teneur du justificatif de distribution postale de cette sommation, l'envoi n'a pas été retiré par A_____ dans le délai imparti au 11 juin 2014.

c. Le 10 octobre 2016, l'AFC a fait notifier à A_____ un commandement de payer, poursuite n° 1_____, pour les sommes de 3'026 fr. 55, plus intérêts à 5% dès le 24 juin 2016, et 301 fr. 80, à titre d'intérêts moratoires au 24 juin 2016.

Les titres des créances et causes des obligations étaient ainsi libellées :
"1. 2_____/ICC/2012/1, Bordereau 3_____ exp. le 19.02.2014" et
"2. INTERETS MORATOIRES AU 24.06.2016".

La poursuivie y a formé opposition le 10 octobre 2016.

d. Par requête du 21 décembre 2016, l'AFC a requis le prononcé de la mainlevée définitive de l'opposition formée audit commandement de payer, avec suite de frais et dépens.

e. Lors de l'audience du 13 mars 2017 devant le Tribunal, A_____ a conclu au déboutement de l'AFC, sous suite de frais et dépens, au motif qu' "il n'exist[ait] pas de preuve de notification du bordereau de taxation, mais seulement des sommations, ce qui est insuffisant […]". Elle faisait opposition à chaque bordereau qui lui était notifié et une procédure pilote était en cours devant la Chambre administrative de la Cour de justice à ce sujet.

L'AFC a plaidé l'abus de droit et relevé que "[d]ans une première procédure, [A_____], représentée par le même avocat, avait soulevé l'irrégularité de la notification des sommations, sans parler de celle des bordereaux, alors qu'on parlait des mêmes années".

Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

 

EN DROIT

1. 1.1 S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. b et 309 let. b ch. 3 CPC). La procédure sommaire s'applique
(art. 251 let. a CPC).

Aux termes de l'art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée, pour les décisions prises en procédure sommaire.

Interjeté dans le délai légal et selon la forme prescrite, le recours est recevable en l'espèce.

1.2 Dans le cadre d'un recours, le pouvoir d'examen de la Cour est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits
(art. 320 CPC). L'autorité de recours a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant par ailleurs que les griefs formulés et motivés par la partie recourante (Hohl, Procédure civile, Tome II, 2ème édition, Berne, 2010, n. 2307).

Les maximes des débats et de disposition s'appliquent (art. 55 al. 1, 255 lit. a
a contrario et 58 al. 1 CPC).

2. La recourante fait grief au premier juge d'avoir considéré que le bordereau de taxation à l'origine de la créance en poursuite avait été notifié et qu'il valait dès lors titre de mainlevée.

2.1 Aux termes de l'art. 80 al. 1 LP, le créancier qui est au bénéfice d'un jugement exécutoire peut requérir du juge la mainlevée définitive de l'opposition.

2.1.1 Sont assimilées à des jugements les décisions des autorités administratives suisses (art. 80 al. 2 ch. 2 LP), soit une autorité de la Confédération ou une autorité cantonale.

Selon l'art. 36 al. 4 de la loi relative à la perception et aux garanties des impôts des personnes physiques et des personnes morales (LPGIP – D 3 18) (exécution forcée), dans la procédure de poursuite, les décisions et prononcés des autorités fiscales, qui sont entrés en force, sont assimilés à des jugements exécutoires au sens de l'article 80 LP.

Est exécutoire au sens de l'art. 80 LP le prononcé qui a non seulement force exécutoire, mais également force de chose jugée (formelle Rechtskraft; ATF 113 III 6 consid. 1b, p. 9; 105 III 43 consid. 2a, in JdT 1980 p. 117), c'est-à-dire qui est devenu définitif, parce qu'il ne peut plus être attaqué par voie de recours ordinaire qui, de par la loi, a un effet suspensif (arrêt du Tribunal fédéral 5P.405/2004 du 22 février 2005 consid. 3; Staehelin, in Kommentar zum Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, 2010, n° 7 ad art. 80 LP).

La force de chose jugée doit résulter du titre ou d'un document qui s'y réfère. Le jugement ne remplit pas cette condition s'il a été rendu avec effet suspensif, s'il est conditionnel, si la dette n'est pas exigible, s'il n'a pas été régulièrement notifié (Schmidt, Commentaire romand LP, Bâle, 2005, n° 3 ad art. 80 LP et jurisprudence citée).

2.1.2 Il appartient à l'administration de prouver que la notification a eu lieu
(ATF 105 III 43 précité, consid. 2a). En l'absence d'envoi recommandé, la preuve de la notification d'un acte peut résulter de l'ensemble des circonstances, en particulier de la correspondance échangée ou de l'absence de protestation de la part d'une personne qui reçoit des rappels (ATF 105 III 43 précité consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 5D_173/2008 du 20 février 2009 consid. 5.1).

2.1.3. Selon la jurisprudence constante, lorsqu'un courrier recommandé ne peut être remis à son destinataire et qu'un avis de retrait est déposé dans sa boîte aux lettres ou dans sa case postale, l'envoi est réputé notifié au moment où le courrier est retiré à la poste. Si ce retrait n'intervient pas durant le délai de garde de sept jours, l'envoi est considéré comme notifié le dernier jour de ce délai, pour autant que le destinataire pouvait s'attendre à un envoi (TF, SJ 2001 I 193, consid. 2/a/aa et réf. citées). Ainsi, la fiction de la notification supplée dans ce cas la connaissance effective du contenu de l'envoi.

2.2 En l'espèce, le bordereau de taxation du 19 février 2014, à l'origine de la créance en poursuite, a été notifié à la recourante par pli simple. La recourante admet avoir reçu la sommation du 3 avril 2014. A réception de celle-ci adressée par lettre recommandée et mentionnant expressément le bordereau du 19 février 2014, ainsi que les montants dus à ce titre, la recourante n'a pas réagi.

Ce n'est que lors de l'audience du 13 mars 2017 devant le Tribunal qu'elle a fait valoir que le bordereau était irrégulier car elle ne l'avait pas reçu. Or, on peut partir du principe qu'un contribuable qui reçoit un rappel d'impôt va chercher à se défendre et n'attend pas d'être poursuivi. Cela est d'autant plus vrai que la recourante affirme contester tous les bordereaux qui lui sont notifiés.

Le fait d'avoir attendu l'audience du 13 mars 2017 pour faire valoir qu'elle n'avait pas reçu le bordereau du 19 février 2014 rend ses affirmations peu crédibles.

C'est donc à bon droit que le Tribunal a déduit de l'absence de réaction de la recourante après la réception de la sommation de payer qu'elle avait préalablement reçu le bordereau expédié en février 2014.

Dès lors que le bordereau a été valablement notifié, c'est également à juste titre que le Tribunal a considéré que l'intimé était au bénéfice d'un titre exécutoire au sens de l'art. 80 al. 2 LP justifiant le prononcé de la mainlevée définitive. En effet, ce bordereau porte la mention qu'il vaut jugement exécutoire et aucun élément du dossier ne permet de retenir qu'il ne le serait pas.

Le grief est infondé. Le recours sera rejeté.

3. La recourante, qui succombe, sera condamnée aux frais (art. 106 al. 1 et 3 CPC).

En vertu de l'art. 61 al. 1 OELP, la juridiction supérieure à laquelle sont déférées les décisions rendues dans une procédure sommaire en matière de poursuite
(art. 251 CPC) peut prélever un émolument n'excédant pas une fois et demie l'émolument que peut prélever l'autorité de première instance.

Le premier juge a fixé l'émolument de première instance - non contesté en tant que tel - à 200 fr. Partant, l'émolument de la présente décision sera fixé à 300 fr. et mis à la charge de la recourante, compensé avec l'avance de frais opérée par celle-ci, acquise à l'Etat (art. 111 al. 1 CPC).

Il ne sera pas alloué de dépens à l'intimé qui comparaît en personne et qui ne justifie d'aucune démarche particulière (art. 95 al. 3 let. c CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A_____ le 4 mai 2017 contre le jugement JTPI/5217/2017 rendu le 24 avril 2017 par le Tribunal de première instance dans la cause C/26384/2016-26 SML.

Au fond :

Rejette ce recours.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais du recours à 300 fr., couverts par l'avance déjà opérée, acquise à l'Etat de Genève.

Les met à la charge de A_____.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN et Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Monsieur David VAZQUEZ, commis-greffier.

 

La présidente :

Pauline ERARD

 

Le commis-greffier :

David VAZQUEZ

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.