C/4264/2016

ACJC/129/2017 du 10.02.2017 sur JTPI/11865/2016 ( SEX ) , MODIFIE

Descripteurs : DÉCISION D'EXÉCUTION
Normes : CPC.345;
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En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/4264/2016 ACJC/129/2017

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du VENDREDI 10 FEVRIER 2017

 

Entre

Monsieur A______ et Madame B______, domiciliés
______, recourants contre un jugement rendu par la 17ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 28 septembre 2016, comparant tous deux par Me Gilles Crettol, avocat, rue de Savièse 16, 1950 Sion, en l'étude duquel ils font élection de domicile,

et

C______, sans domicile ni résidence connus, intimée, non comparante.

 

 


EN FAIT

A. a. Par jugement JTPI/11865/2016 non motivé du 28 septembre 2016, le Tribunal de première instance a ordonné à C______ de restituer à ses frais le tapis perse E______ en soie de 3,50m x 2,45m dans un délai de 5 jours dès notification du jugement (ch. 1 du dispositif), prononcé cette injonction sous la menace de la peine prévue par l'article 292 du Code pénal (ch. 2), réservé à B______ et A______ le droit d'agir subséquemment sur la base de l'article 345 du Code de procédure civile (ch. 3), arrêté à 2'000 fr. les frais judiciaires, compensés avec l'avance versée par B______ et A______, condamné C______ à les payer à ces derniers, ainsi que 1'500 fr. à titre de dépens (ch. 4 et 5) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 6).

La motivation de ce jugement a été requise en temps utile par B______ et A______ et ils ont reçu le jugement motivé le 20 octobre 2016.

b. Par acte expédié à la Cour de justice le 31 octobre 2016, A______ et B______ ont formé recours contre le chiffre 3 du dispositif de ce jugement dont ils ont requis l'annulation. A titre principal, ils ont conclu à ce que la Cour atteste du caractère exécutoire du jugement JTPI/1______ du 20 novembre 2015 rendu dans la cause C/2______, condamne C______ à leur livrer dans un délai de 5 jours, le tapis perse "E______" en soie de 3,50m x 2,45m, dise qu'à défaut de restitution dans ce délai, la créance en restitution du tapis précité est convertie en une prestation en argent d'une valeur équivalente et condamne C______ à leur verser, à l'échéance de ces 5 jours, 45'000 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 26 novembre 2013, le tout avec suite de frais et dépens.

Subsidiairement, ils ont conclu à ce que C______ soit condamnée à leur livrer le tapis sous la menace d'une amende de 1'000 fr. pour chaque jour d'inexécution.

c. C______ étant sans domicile connu, un délai pour répondre au recours lui a été imparti par voie édictale. Aucune réponse n'a été déposée.

d. Les recourants ont été informés le 20 décembre 2016 de ce que la cause était gardée à juger.

B. Les faits pertinents suivants résultent du dossier.

a. Par jugement du 20 novembre 2015, actuellement définitif et exécutoire, le Tribunal a condamné C______ à restituer à B______ et A______ le tapis perse "E______" en soie de 3,50m x 2,45m et statué sur les frais.

b. Ce jugement n'a pas été exécuté par C______, de sorte que, le 2 mars 2016, A______ et B______ ont formé par devant le Tribunal une requête en exécution, prenant les mêmes conclusions que celles figurant dans leur recours.

Ils ont produit à l'appui de leur requête le certificat d'origine du tapis litigieux, indiquant un prix de 45'000 fr.

c. C______ n'a pas répondu à la requête dans le délai que le Tribunal lui a imparti pour ce faire par voie édictale.

EN DROIT

1. 1.1 Contre les décisions du Tribunal de l'exécution, seule est ouverte la voie du recours, écrit et motivé, introduit dans les dix jours à compter de la notification de la décision (art. 309 let. a, 319 let. a, 321 al. 1 et 2, et 339 al. 2 CPC).

En l'espèce, le recours respecte les dispositions précitées de sorte qu'il est recevable.

1.2 Selon l'art. 320 CPC, le recours est recevable pour violation du droit et constatation manifestement inexacte des faits.

L'autorité de recours a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant par ailleurs que les griefs formulés et motivés par le recourant (HOHL, Procédure civile, Tome II, 2ème éd., Berne 2010, n. 2307).

2. Le Tribunal a considéré qu'en application du principe de proportionnalité il n'y avait pas lieu d'emblée d'ordonner la conversion de la prestation due en prestation en argent comme le demandaient les recourants.

Ceux-ci font valoir que l'intimée n'a pas contesté le jugement du 20 novembre 2015 la condamnant à restituer le tapis et qu'elle ne l'a toujours pas exécuté, de sorte qu'il était disproportionné d'exiger de leur part qu'ils saisissent une seconde fois le Tribunal de l'exécution pour obtenir la conversion de la prestation due en prestation en argent.

2.1 Selon l'article 336 al. 1 let. a CPC, une décision est exécutoire lorsqu'elle est entrée en force et que le tribunal n'a pas suspendu l'exécution (art. 325 al. 2 et 333 al. 2 CPC). Le tribunal qui a rendu la décision à exécuter en atteste sur demande le caractère exécutoire.

Si la décision ne peut être exécutée directement, une requête est présentée au tribunal de l'exécution (art. 338 al. 1 CPC).

La partie qui a obtenu gain de cause peut notamment exiger la conversion de la prestation due en une prestation en argent (art. 345 al. 1 let. b CPC). Le tribunal de l'exécution détermine le montant de la prestation en argent (art. 345 al. 2 CPC).

Selon le Message du Conseil fédéral relatif au Code de procédure civile, la partie créancière n'est pas tenue d'entreprendre des démarches préalables en vue de requérir une exécution en nature (manifestement vouée à l'échec). Au contraire, elle a la possibilité de solliciter la conversion en argent d'emblée. Chaque prétention non pécuniaire peut ainsi être facilement convertie en une prétention pécuniaire et être exécutée directement par voie de poursuite, avec peut-être davantage de chances de succès (la décision de conversion vaut titre de mainlevée définitive). Il est même possible que le tribunal compétent au fond fixe déjà lui-même la contrevaleur. La conversion n'est pas subsidiaire, ce qui épargne des procédures inutiles au créancier (Message du Conseil fédéral du 28 juin 2006,
FF 2006, p. 6993).

Le calcul de l'indemnisation se fait au jour de la requête de conversion, soit au jour de la requête déposée devant le tribunal de l'exécution forcée (Piotet, Dommages intérêts et exécution forcée selon l'art. 345 CPC; sens et limites de l'innovation, p. 223), étant précisé que l'indemnisation peut être assortie d'intérêts de retard (Zinsli, Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, 2013, n. 8, ad art. 345 CPC).

Le juge de l'exécution doit choisir la mesure la plus efficace, tout en respectant le principe de proportionnalité (Zinsli, op. cit., n. 4, ad art. 343 CPC).

2.2 En l'espèce, il ressort du dossier que l'intimée a été condamnée à restituer le tapis litigieux par jugement définitif et exécutoire du 20 novembre 2015, soit il y a plus d'un an, et qu'elle ne s'est toujours pas exécutée.

La conversion de la prestation due en argent est, compte tenu des circonstances du cas d'espèce, une mesure d'exécution adéquate, qui respecte le principe de proportionnalité. Celle-ci sera par conséquent ordonnée, à condition que le tapis n'ait pas été restitué dans un délai de 5 jours, conformément aux conclusions des recourants.

Le montant de la prestation en argent sera fixé à 45'000 fr., somme indiquée sur le certificat d'origine du tapis litigieux.

L'intimée sera condamnée à verser ce montant aux recourants, avec intérêts moratoires dès le 2 mars 2016, date du dépôt de la requête d'exécution du jugement du 20 novembre 2015.

Le jugement querellé sera dès lors modifié en ce sens.

Il ne sera par contre pas fait droit à la conclusion des recourants tendant à ce que la Cour atteste, dans le dispositif du présent arrêt, du caractère exécutoire du jugement du 20 novembre 2015. En effet, il n'incombe pas à la Cour de céans de délivrer de telles attestations dans le cadre d'un recours contre une décision du tribunal de l'exécution. L'article 336 al. 2 CPC prévoit d'ailleurs que l'attestation du caractère exécutoire d'un jugement doit être délivrée par le tribunal qui a rendu la décision concernée.

Le caractère exécutoire du jugement précité n'est au demeurant pas contesté et ressort des considérants de la présente décision.

3. Les frais seront mis à la charge de l'intimée qui succombe (art. 106 al. 1 CPC).

Le montant et la répartition des frais effectués par le Tribunal, qui ne sont pas contestés devant la Cour et sont conformes aux dispositions légales, seront confirmés.

Les frais judiciaires de recours seront arrêtés à 1'000 fr. et compensés à hauteur de ce montant avec l'avance de 2'000 fr. versée par les recourants, laquelle restera acquise à l'Etat de Genève à due concurrence, le solde leur étant restitué (art. 26 et 38 RTFMC; art. 111 CPC).

Un montant de 1'500 fr., débours et TVA compris, leur sera en outre alloué solidairement à titre de dépens de recours (art. 84, 85, 88 et 90 RTFMC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté par A______ et B______ contre le chiffre 3 du dispositif du jugement JTPI/11865/2016 rendu le 28 septembre 2016 par le Tribunal de première instance dans la cause C/4264/2016-17 SEX.

Au fond :

Annule le chiffre 3 du dispositif du jugement précité et, statuant à nouveau :

Dit qu'à défaut de restitution dans un délai de 5 jours dès la notification du présent arrêt du tapis perse "E______" en soie de 3,50m x 2,45m, la créance en restitution de ce tapis est convertie en une prestation en argent de 45'000 fr.

Condamne C______ à payer à A______ et B______, pris solidairement, à l'échéance de ces 5 jours, 45'000 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 2 mars 2016.

Confirme le jugement querellé pour le surplus.

Déboute les recourants de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête à 1'000 fr. les frais judiciaires du recours et les compense avec l'avance versée par les recourants laquelle reste acquise à due concurrence à l'Etat de Genève.

Invite les Services financiers du Pouvoir judiciaire à restituer à A______ et B______, pris solidairement, le solde en 1'000 fr. de l'avance versée.

Met les frais judiciaires à la charge de C______ et la condamne à payer 1'000 fr. à ce titre à A______ et B______, pris solidairement.

Condamne C______ à payer à A______ et B______, pris solidairement, 1'500 fr. à titre de dépens.

Siégeant :

Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, présidente; Monsieur Laurent RIEBEN et Monsieur Ivo BUETTI, juges; Madame Céline FERREIRA, greffière.

La présidente :

Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ

 

La greffière :

Céline FERREIRA

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.