C/7987/2015

ACJC/789/2016 du 10.06.2016 sur OTPI/747/2015 ( SP ) , CONFIRME

Recours TF déposé le 14.07.2016, rendu le 17.10.2016, IRRECEVABLE, 4A_431/2016
Recours TF déposé le 14.07.2016, rendu le 17.10.2016, IRRECEVABLE, 4A_433/2016
Descripteurs : MESURE PROVISIONNELLE; INTERVENTION(PROCÉDURE); INTÉRÊT DIGNE DE PROTECTION
Normes : CPC.73; CPC.261
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En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/7987/2015 ACJC/789/2016

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du vendredi 10 juin 2016

 

Entre

1) Madame A______, domiciliée ______, (Russie), appelante et intimée d'une ordonnance rendue par la 4ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 18 décembre 2015, comparant par Me Serguei Lakoutine, avocat, quai Gustave-Ador 20, 1207 Genève, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

2) B______, sise ______, (Singapour), autre appelante et intimée, comparant par
Me Michel Amaudruz, avocat, rue de Hesse 8-10, case postale 5715, 1211 Genève 11, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

et

1) C______, sise ______, (Luxembourg), intimée, comparant par Me David Bitton, avocat, place du Molard 3, 1204 Genève, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

2) Monsieur D______, domicilié ______, Genève, autre intimé, comparant en personne,

3) Madame E______, domiciliée ______, Genève, autre intimée, comparant en personne.

 


EN FAIT

A. Par ordonnance OTPI/747/2015 du 18 décembre 2015, reçue par B______ (ci-après : B______) le 28 décembre 2015 et par A______ le 29 décembre 2015, le Tribunal de première instance a, statuant sur mesures provisionnelles, déclaré irrecevable la requête en intervention de A______ (chiffre 1 du dispositif), rejeté la demande de mesures provisionnelles formée par B______ (ch. 2) et révoqué en conséquence l'ordonnance de mesures superprovisionnelles du 22 avril 2015
(ch. 3).

S'agissant de la requête en intervention, le Tribunal a mis les frais y relatifs à la charge d'A______ (ch. 4), arrêté ceux-ci à 1'000 fr., en les compensant avec l'avance fournie par cette dernière (ch. 5) et condamné A______ à verser à titre de dépens les sommes de 150 fr. à Me D______, 200 fr. à Me E______, 300 fr. à C______ (ci-après : C______) et 300 fr. à B______(ch. 6). S'agissant de la requête en mesures provisionnelles, le Tribunal a mis les frais judiciaires à la charge de B______(ch. 7), arrêté ceux-ci à 3'000 fr., en les compensant avec l'avance fournie par cette dernière (ch. 8) et condamné B______à verser à titre de dépens les sommes de 600 fr. à C______, 100 fr. à Me D______ et 200 fr. à
Me E______ (ch. 9).

En outre, le Tribunal a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 10).

B. Par actes déposés le 7 janvier 2016 au greffe de la Cour de justice, A______ et B______ appellent toutes deux de cette ordonnance.

a.a. B______ sollicite l'annulation de l'ordonnance querellée. Cela fait, elle conclut à ce que la Cour interdise à Me E______ et Me D______, agissant individuellement ou conjointement, d'ordonner, de signer, d'instruire ou d'autoriser, de quelque manière que ce soit, le transfert de tout ou partie des 45'000'000 actions de la société F______ (ci-après : F______) en dépôt sur le compte séquestre ouvert auprès de la G______, portant la référence « Me H______ et Me D______ Escrow Account : 0301520 », dont la I______ est bénéficiaire (ci-après : le compte séquestre). En outre, B______ conclut à ce que la Cour ordonne ce blocage jusqu'à droit jugé sur le fond et lui impartisse un délai de 120 jours pour valider cette mesure provisionnelle par le dépôt d'une action devant la juridiction compétente, sous suite de frais et dépens.

Préalablement, B______ a conclu à l'octroi de l'effet suspensif à son appel, requête qui a été admise par décision présidentielle du 5 février 2016.

A l'appui de son écriture, elle produit de nouvelles pièces, soit un échange de courriels entre son conseil et celui d'A______ daté des 4 et 5 janvier 2016, dont il ressort que cette dernière souhaite déposer une requête en faillite à l'encontre de C______ au Luxembourg, ainsi qu'une requête en séquestre en Suisse, afin de réclamer les actions F______.

a.b. Dans sa réponse du 28 janvier 2016, C______ conclut, principalement, au rejet de cet appel et, subsidiairement, à la condamnation de B______ à fournir des sûretés à hauteur de 15'000'000 USD, sous suite de frais et dépens.

a.c. Par réplique du 10 mars 2016, B______ a persisté dans ses conclusions.

b.a. Aux termes de son appel, A______ sollicite également l'annulation de l'ordonnance entreprise. Cela fait, elle conclut à ce que la Cour déclare recevable sa requête en intervention, admette la requête de mesures provisionnelles formée par B______ et en conséquence interdise à Me E______ et Me D______ d'ordonner, de signer, d'instruire ou d'autoriser de quelque manière que ce soit, le transfert de tout ou partie des 45'000'000 actions F______ en dépôt sur le compte séquestre, et ce jusqu'à droit jugé sur le fond, sous suite de frais et dépens.

Préalablement, elle a conclu à l'octroi de l'effet suspensif à son appel, requête qui a été admise par décision présidentielle du 5 février 2016.

b.b. Dans sa réponse du 28 janvier 2016, C______ a conclu, principalement, à l'irrecevabilité de cet appel et, subsidiairement, au rejet de celui-ci, sous suite de frais et dépens. Plus subsidiairement, elle a conclu à la condamnation d'A______ à fournir des sûretés à hauteur de 15'000'000 USD.

b.c. Par courrier du 10 février 2016 adressé à la Cour, A______ a allégué que C______ tentait de vendre les actions F______ encore en sa possession. Elle a ainsi complété ses conclusions en sollicitant que la Cour interdise à C______ d'ordonner, de signer, d'instruire ou de d'autoriser de quelque manière que ce soit le transfert de tout ou partie des actions de F______ en dépôt sur le compte séquestre.

c. Dans sa détermination du 19 février 2016, C______ a conclu, principalement, à l'irrecevabilité de ce complément de requête et, subsidiairement, au rejet de celle-ci.

C. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. B______ est une société de droit singapourien dont le but est notamment la détention de participations dans d'autres sociétés.

C______ est une société de droit luxembourgeois dont le but est notamment la prise d'intérêts, sous quelle que forme que ce soit, dans d'autres entreprises et toutes autres formes de placement, l'acquisition par achat, la souscription ainsi que l'aliénation par vente, échange ou toute autre manière de valeurs mobilières, l'administration, la supervision et le développement de ses intérêts.

A______ est la bénéficiaire économique de la société J______ (ci-après : J______).

b. Le 5 décembre 2013, J______ et C______ ont signé un contrat de prêt, soumis au droit luxembourgeois, par lequel la première prêtait à la seconde une somme de 25'000'000 USD sous forme d'obligations convertibles de la société F______.

Ce prêt devait être utilisé comme capital d'investissement dans une structure africaine. Il était accordé pour une durée de 6 mois, renouvelable pour 6 autres mois, et des intérêts étaient dus au taux de 12% par an. En cas d'inexécution du paiement des intérêts, J______ avait la possibilité d'exiger le remboursement intégral du prêt, et les intérêts courus, à C______. Le remboursement devant intervenir d'ici trois ans, C______ ayant la possibilité de rembourser plus rapidement sans pénalité.

c. C______ ne s'est acquittée ni du montant du prêt, ni des intérêts afférents, de sorte que J______ a, par courrier du 5 mars 2015, mis celle-ci en demeure de lui rembourser la somme de 25'000'000 USD, avec intérêts. J______ lui a en outre interdit d'aliéner, grever, nantir ou restreindre d'une quelconque manière le pouvoir de disposer des obligations F______.

C______ n'a pas donné suite à ce courrier.

d. En mars 2014, une partie des obligations F______ a été convertie en actions, créant ainsi 45'000'000 nouvelles actions F______.

e. Le 24 juin 2014, C______ et B______ ont signé une lettre d'intention par laquelle la première s'engageait à vendre à la seconde les 45'000'000 actions F______ pour un prix de 20'000'000 USD.

f. Les 3 et 4 juillet 2014, ces deux sociétés ont conclu un contrat d'achat-vente, soumis au droit suisse, portant sur les 45'000'000 actions F______.

B______ devait s'acquitter du prix convenu par trois versements : un premier de 1'000'000 USD, un second de 4'000'000 USD et un troisième de 15'000'000 USD. Ces deux derniers versements devaient être effectués sur un compte séquestre (Escrow Account) et C______ devait transférer les actions F______ sur ledit compte (art. 7.1 et 7.3).

g. Un contrat de dépôt (« Escrow Agreement ») a également été conclu entre C______, B______, Me D______ et Me H______, désignant ces deux derniers comme agents séquestre.

Une fois le troisième acompte de 15'000'000 USD versé sur le compte séquestre, les agents séquestre devaient transférer les actions F______ sur le compte de B______ (art. 2.5). En cas d'inexécution du paiement total du troisième acompte, les agents séquestre devaient immédiatement transférer les actions F______ sur le compte de C______ et la transaction serait considérée comme nulle, le paiement des deux premiers acomptes serait toutefois valide et non-remboursable
(art. 3.1.2).

h. C______ a déposé sur le compte séquestre les actions F______ et B______ s'est acquittée des deux premiers acomptes.

i. Le 17 octobre 2014, B______ et C______ ont convenu que le délai de paiement du troisième acompte était reporté au 21 avril 2015, B______ devant toutefois s'acquitter d'une somme supplémentaire de 500'000 USD en mains de C______ et d'une autre de 2'000'000 USD en mains de Me D______.

j. Par courrier du 17 avril 2015, le conseiller de J______ et d'A______ a sollicité auprès de Me H______ le blocage des fonds déposés sur le compte séquestre en vue d'empêcher la vente en cours des actions F______ à B______.

k. Par acte déposé le 22 avril 2015, B______ a saisi le Tribunal d'une requête en mesures superprovisionnelles et provisionnelles, visant à interdire aux agents séquestre d'ordonner, de signer, d'instruire ou d'autoriser de quelque manière que ce soit le transfert de tout ou partie des 45'000'000 actions F______ en dépôt sur le compte séquestre.

Cette cause a été référencée sous n° C/7987/2015.

l. Par ordonnance de mesures superprovisionnelles du 22 avril 2015, le Tribunal a fait droit à la requête de B______ en ordonnant le blocage des actions F______ en dépôt sur le compte séquestre.

m. Par courriers des 27 et 28 mai 2015, les agents séquestre se sont rapportés à justice s'agissant de la requête en mesures provisionnelles requise par B______.

n. Par acte déposé le 18 juin 2015, A______ a saisi le Tribunal d'une requête en intervention principale dans la cause C/7987/2015 en sa qualité d'unique ayant-droit économique et propriétaire de J______. Elle se prévalait, sur la base du contrat du 5 décembre 2013, d'un droit préférentiel sur les actions F______.

o. Dans leurs déterminations des 8 et 17 juillet 2015, C______ et B______ ne se sont pas opposées à cette intervention, la première contestant toutefois le bien-fondé du droit préférentiel allégué par A______ et la seconde se rapportant à justice sur ce point.

p. Le 17 août 2015, conformément à leur contrat de prêt, J______ a soumis le litige l'opposant à C______ à l'arbitrage de la Chambre de commerce internationale de Paris.

Dans le cadre de cette procédure, J______ a conclu à la condamnation de C______ au paiement en sa faveur de la somme de 25'000'000 USD, plus 5'638'356 USD d'intérêts et 300'000 EUR de frais, ainsi que l'intégralité des dépens.

q. Par courrier du 7 septembre 2015, Me E______ a informé le Tribunal remplacer Me H______ en sa qualité d'agent séquestre.

r. Dans sa détermination du 30 septembre 2015, A______ a conclu à ce que le Tribunal interdise aux agents séquestre d'ordonner, de signer, d'instruire ou d'autoriser de quelque manière que ce soit le transfert de tout ou partie des 45'000'000 actions F______ en dépôt sur le compte séquestre, jusqu'à droit jugé sur le fond.

Selon elle, J______ était créancière de C______ en vertu du leur contrat de prêt. Cette dernière étant toutefois insolvable, J______ souhaitait récupérer les actions F______. Pour preuve de cette insolvabilité, A______ a produit une dénonciation de la « saisie-arrêt » avec assignation d'un huissier judiciaire luxembourgeois à l'encontre de C1______, C2______ et C3______, ayant toutes leur siège social à la même adresse au Luxembourg. Elle a également produit une assignation luxembourgeoise en faillite à l'encontre de C3______ datée du 9 septembre 2015.

s. Dans sa réplique du 16 octobre 2015, B______ a persisté dans ses conclusions visant au maintien du blocage des actions F______.

t. Lors de l'audience du 23 octobre 2015 du Tribunal, A______ et C______ ont expliqué que les obligations F______ avaient été remises par J______ à C______ à titre « de prêt » et qu'elles étaient censées représenter « des liquidités ».

C______ a conclu à la révocation de l'ordonnance de mesures superprovisionnelles du 22 avril 2015 ordonnant le blocage des titres, au rejet de la requête de mesures provisionnelles formulée par B______ et de l'intervention d'A______, sous suite de frais et dépens, ainsi qu'à la libération des actions F______ en sa faveur. Subsidiairement, elle a conclu à la fixation de sûretés à hauteur de 15'000'000 USD en cas de maintien dudit blocage.

C______ a notamment produit un avis de droit, selon lequel en vertu du droit luxembourgeois, la convention de prêt du 5 décembre 2013 n'affectait pas le transfert à C______ de la propriété des obligations convertibles F______ prêtées par J______, ni la propriété des actions attribuées à C______ par l'effet de la conversion des obligations, ni sa capacité à en disposer.

A l'issue de l'audience, le Tribunal a gardé la cause à juger.

u. Par courrier du 9 novembre 2015, B______ a requis du Tribunal que celui-ci se renseigne si C______ n'avait pas été dans l'intervalle assignée en faillite, au regard des grandes difficultés financières du groupe C______.

EN DROIT

1. 1.1 La cause présente des éléments d'extranéité en raison des domiciles étrangers des parties et de l'intervenante. Ces dernières ne contestent pas, à juste titre, la compétence internationale des juridictions suisses pour prononcer les mesures provisionnelles sollicitées [art. 113 LDIP; art. 13 let. b CPC (par renvoi de
l'art. 374 al. 1 CPC); art. 120 LOJ].

En outre, le droit suisse est applicable (art. 116 al. 1 LDIP).

1.2 Les appels sont dirigés contre une décision prise sur mesures provisionnelles (art. 308 al. 1 let. b CPC), dont la valeur litigieuse dépasse les 10'000 fr., compte tenu de la valeur des actions F______ et du montant des avoirs déposés sur le compte séquestre dont le blocage est requis (art. 91 al. 1 et 308 al. 2 CPC).

Interjetés dans le délai de dix jours (art. 248 let. d et 314 al. 1 CPC) et selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131 et 311 CPC), les appels sont recevables.

2. Les deux appels seront traités dans le même arrêt. B______ sera désignée ci-après comme l'appelante, C______ comme l'intimée et A______ comme l'intervenante.

3. La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

Sa cognition est cependant limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit, dans la mesure où les mesures provisionnelles sont soumises à la procédure sommaire, avec administration restreinte des moyens de preuve (art. 254 CPC; ATF 127 III 474 consid. 2b/bb; arrêt du Tribunal fédéral 5A_442/2013 du 24 juillet 2013 consid. 2.1 et 5.1).

Les moyens de preuve sont ainsi limités à ceux immédiatement disponibles (arrêt du Tribunal fédéral 5A_12/2013 du 8 mars 2013 consid. 2.2; Hohl, Procédure civile, Tome II, 2010, n. 1556 et 1900 et ss, p. 283 et 349). La preuve est généralement apportée par titres (art. 254 al. 1 et 177 CPC) et, sauf exception – non applicable en l'espèce – la maxime des débats s'applique (art. 55 al. 1 CPC; Bohnet, in Procédure civile suisse, Les grands thèmes pour les praticiens, 2010, p. 201 s.).

En l'espèce, bien que l'appelante ne conclut pas formellement au prononcé de mesures probatoires, il ressort dans son écriture qu'elle sollicite la production d'avis de droit luxembourgeois et anglais émanant d'experts indépendants, ainsi que la production de l'extrait du registre des actionnaires d'F______, afin d'établir les droits de propriété sur les actions F______.

Même si l'instance d'appel est habilitée à administrer des preuves (art. 316
al. 3 CPC), la présente cause est soumise à la procédure sommaire, de sorte qu'au regard des principes rappelés supra, la Cour statuera sur les pièces immédiatement disponibles pour établir sa propre conviction et ce, sous l'angle de la vraisemblable.

Par ailleurs, la Cour relève qu'au regard de la maxime des débats applicable en l'espèce, l'appelante ne peut faire grief au premier juge de ne pas avoir fait suite à son courrier du 9 novembre 2015, dès lors que les parties sont tenues d'apporter tous les faits pertinents à l'appui de leurs prétentions et de produire les preuves qui s'y rapportent.

L'appelante sera ainsi déboutée de ses demandes de mesures probatoires.

4. L'intervenante a produit des pièces nouvelles à l'appui de son écriture d'appel.

Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

En l'espèce, les trois nouvelles pièces produites par l'appelante sont des courriels datées des 4 et 5 janvier 2016. Cet échange de courriels fait suite à l'ordonnance querellée, de sorte qu'il se rapporte à des faits postérieurs au 23 octobre 2015, soit la date où le premier juge a gardé la cause à juger.

Partant, ces pièces sont recevables, ainsi que les allégués de fait s'y rapportant.

5. L'intervenante reproche au premier juge de ne pas avoir fait droit à sa requête en intervention dans la présente cause et d'avoir ainsi nié son intérêt digne de protection à voir les actions F______ bloquées sur le compte séquestre, jusqu'à droit jugé sur la propriété desdites actions.

5.1 Selon l'art. 73 al. 1 CPC, la personne qui prétend avoir un droit préférable excluant totalement ou partiellement celui des parties peut agir directement contre elles devant le Tribunal de première instance saisi du litige.

L'intervenant principal a droit à ce que sa demande soit traitée. Néanmoins, le Tribunal doit examiner les conditions de recevabilité et cas échéant, déclarer la demande d'intervention irrecevable (arrêt du Tribunal fédéral 5A_494/2015 du
18 janvier 2016 consid. 4.2.4). En effet, l'intervention principale est considérée comme une véritable demande, qui doit satisfaire aux conditions générales de recevabilité (art. 59 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 5A_603/2013 du 25 octobre 2013 consid. 4.2).

5.2 Le juge n'entre en matière que sur les requêtes pour lesquelles les requérants ont un intérêt digne de protection (art. 59 al. 1 et al. 2 let. a CPC). L'absence d'un intérêt digne de protection doit être relevée d'office, à tous les stades de la procédure. L'intérêt doit exister au moment du jugement (arrêt du Tribunal fédéral 4P.239/2005 du 21 novembre 2005 consid. 4.1). La condition de l'intérêt digne de protection implique en particulier que la ou les conclusions en question aient une utilité concrète pour la partie qui les formule (Zürcher, in Kommentar zur ZPO, Sutter-Somm/Hasenböhler/Leuenberger [éd.], 2ème éd., 2013, n. 13
ad art. 59 CPC).

5.3 En l'espèce, l'intervenante invoque un droit préférable sur les actions F______. Elle allègue en être la légitime propriétaire, celles-ci ayant été prêtées à l'intimée par contrat du 5 décembre 2013 conclu avec J______, dont elle est la propriétaire et l'unique ayant-droit économique.

Comme relevé par le premier juge, il ne ressort pas dudit contrat que J______ devait récupérer matériellement les actions F______ prêtées. En effet, celui-ci prévoyait que le prêt devait être utilisé comme fonds dans le cadre d'un investissement. L'intervenante a, par ailleurs, confirmé que les actions prêtées valaient « liquidités ». En outre, J______ a réclamé à l'intimée le remboursement en espèces des 25'000'000 USD, et des intérêts encourus, que ce soit par courrier de mise en demeure du 5 mars 2015 ou dans le cadre de la procédure d'arbitrage, et non une restitution physique des titres en question. Le droit préférable invoqué sur les titres par l'intervenante ne semble donc pas suffisamment vraisemblable. Cette question, se recoupant avec celle de la faculté de l'intimée de disposer librement des actions F______, est d'ailleurs soumise à la Chambre de commerce internationale de Paris dans le cadre de la procédure d'arbitrage en cours.

En tous les cas, l'intimée ne conteste pas être débitrice envers J______ de la somme du prêt, ainsi que des intérêts afférents. Sur cette base, l'intervenante justifie l'utilité du blocage des actions F______ sur le compte séquestre, au motif que l'intimée serait insolvable. Cette dernière ne pouvant pas lui rembourser le montant du prêt, seule la restitution matérielle desdites actions pouvait être revendiquée par elle, ces actions étant le seul actif de l'intimée.

Or, rien dans le dossier ne permet de retenir, sous l'angle de la vraisemblance, que lesdites actions seraient l'unique actif en mains de cette dernière.

En outre, bien que J______ a allégué vouloir déposer une requête en faillite et en séquestre à l'encontre de l'intimée, ce qu'elle n'a cependant pas encore fait, il n'est pas garanti pour J______ et l'intervenante que, par le biais de ces procédures, elles puissent obtenir, ou même revendiquer, la restitution physique des actions F______, au lieu du remboursement de la somme de 25'000'000 USD. L'intervenante n'allègue d'ailleurs pas sur quel fondement juridique, même de droit étranger, elle s'appuierait pour requérir les titres en lieu et place dudit remboursement en espèces.

Dès lors que la faculté pour l'intervenante de revendiquer la restitution matérielle des actions F______ n'est pas rendue plausible, que ce soit en vertu du contrat de prêt du 5 décembre 2013 ou d'une norme juridique, l'intervenante n'a pas, en l'état, d'utilité au maintien du blocage des actions au sens des principes rappelés supra. Elle n'est ainsi pas au bénéfice d'un intérêt digne de protection. Partant, les conditions de recevabilité de la requête en intervention n'étant pas remplies, celle-ci sera déclarée irrecevable.

Du fait de ce défaut d'intérêt digne de protection, la Cour n'a pas à trancher la question de la qualité pour agir de l'intervenante à titre d'ayant-droit économique mais, en son nom et pour son propre compte, et non au nom et pour le compte de J______.

L'ordonnance querellée sera ainsi confirmée sur ce point.

6. L'appelante reproche au premier juge de ne pas avoir fait droit à sa requête en mesures provisionnelles visant au blocage des titres mis en dépôt sur le compte séquestre, jusqu'à droit jugé au fond sur la propriété des actions F______.

6.1 Aux termes de l'art. 261 al. 1 CPC, celui qui requiert des mesures provisionnelles doit rendre vraisemblable qu'une prétention dont il est titulaire est l'objet d'une atteinte, ou risque de l'être, et qu'il s'expose de ce fait à un préjudice difficilement réparable. Il s'agit là de conditions cumulatives comme cela ressort des textes allemand et italien de la loi (Bohnet, CPC, Code de procédure civile commenté, 2011, n. 3 ad art. 261 CPC).

Un fait est rendu vraisemblable si le juge, en se basant sur des éléments objectifs, a l'impression que le fait invoqué s'est produit, sans pour autant devoir exclure la possibilité qu'il ait pu se dérouler autrement (ATF 132 III 715 consid. 3.1; ATF 130 III 321 consid. 3.3).

6.2 L'octroi de mesures provisionnelles suppose ainsi la vraisemblance du droit invoqué. Le requérant doit ainsi rendre vraisemblable que le droit matériel invoqué existe et que le procès a des chances de succès (arrêts du Tribunal fédéral 5A_931/2014 du 1er mai 2015 consid. 4 et 5A_791/2008 du 10 juin 2009
consid. 3.1; Bohnet, op. cit., n. 7 ad art. 261). Le requérant doit également rendre vraisemblable une atteinte au droit ou son imminence, sur la base d'éléments objectifs (Bohnet, op. cit., n. 10 ad art. 261).

La vraisemblance requise doit en outre porter sur un préjudice difficilement réparable, qui peut être patrimonial ou immatériel (ATF 138 III 378 consid. 6.3; Bohnet, op. cit., n. 11 ad art. 261; Huber, Kommentar zur schweizerischen Zivilprozessordnung, 2010, n. 20 ad art. 261). La condition du préjudice difficilement réparable vise à protéger le requérant du dommage qu'il pourrait subir s'il devait attendre jusqu'à ce qu'une décision soit rendue au fond (ATF 116 Ia 446 consid. 2, JdT 1992 I p. 122). Elle suppose l'urgence, laquelle s'apprécie au regard des circonstances concrètes du cas (Bohnet, op. cit., n. 12 ad art. 261 CPC).

6.3 En l'espèce, vu l'existence du contrat de prêt entre J______ et l'intimée, l'appelante allègue craindre que J______ intente à son encontre une action en revendication des actions F______, détenues par elle, si elle devait pour finir les acquérir en versant le dernier acompte de 15'000'000 USD.

Comme exposé supra, la revendication matérielle des actions F______ par J______ se fonde sur un droit préférentiel qui, en l'état, n'est pas rendu vraisemblable, étant donné que sur la base du contrat de prêt, J______ ne peut apparemment prétendre qu'au remboursement du prêt en espèces, et non à la restitution physique des titres, et qu'aucune norme juridique n'est alléguée par J______, ou par l'intervenante, pour fonder une telle restitution. Partant, le risque d'atteinte allégué par l'appelante n'est pas vraisemblable.

La condition de l'atteinte n'étant pas remplie, il n'est pas nécessaire d'analyser le préjudice difficilement réparable au sens de l'art. 261 al. 1 CPC. Partant, la question de la capacité financière de l'intimée, à rembourser ou non les montants dus, n'a pas besoin d'être tranchée.

L'appelante allègue un autre risque d'atteinte, soit l'éventualité que le contrat de vente entre elle et l'intimée soit dénoncé. Ne détenant pas les actions F______, elle subirait un préjudice difficilement réparable, dès lors que l'intimée ne serait pas en mesure de lui rembourser les montants des deux acomptes déjà versés en vertu dudit contrat. Or, il ne ressort pas des déclarations de l'intimée qu'elle souhaiterait dénoncer le contrat de vente la liant à l'appelante, ni qu'elle ne désirerait plus transférer les actions en mains de celle-ci.

Au surplus, si l'appelante devait renoncer à verser le dernier acompte de 15'000'000 USD sur le compte séquestre, elle ne pourrait se prévaloir du risque que l'intimée ne lui remboursera pas les deux premiers acomptes déjà versés, étant donné que le contrat de vente la liant à l'intimée prévoyait que, dans ce cas, lesdits acomptes étaient non remboursables. L'appelante ne peut donc se prévaloir d'un risque d'atteinte sur cette base, le non-remboursement des acomptes dans ces circonstances ayant été contractuellement prévu entre elle et l'intimée.

Partant, il ne se justifie pas de maintenir le blocage du compte séquestre jusqu'à droit jugé sur la propriété des actions F______, étant donné qu'en l'état le risque d'une revendication physique desdites actions par J______ n'est pas plausible et qu'une dénonciation du contrat de vente par l'intimée n'est pas vraisemblable, ni même allégué par cette dernière, de sorte que les conditions d'octroi de mesures provisionnelles au sens de l'art. 261 al. 1 CPC ne sont pas remplies.

Partant, l'appel sera rejeté et l'ordonnance entreprise confirmée.

7. Les frais judiciaires et dépens sont mis à la charge de la partie succombant
(art. 106 al. 1 CPC).

7.1 En l'espèce, l'appelante et l'intervenante remettent en cause tout le dispositif de l'ordonnance querellée. Toutefois, leurs actes d'appel ne comportent pas de conclusions formelles relatives aux frais de première instance, ni aucun grief et motivation sur ce point. Partant, ceux-ci seront confirmés par la Cour.

7.2.1 Les frais d'appel relatifs à la requête en intervention seront arrêtés à 2'000 fr., et mis à la charge de l'intervenante, qui succombe (art. 20 et 26 du Règlement fixant le tarif des frais en matière civile - RTFMC). Ils seront compensés à hauteur de ce montant par l'avance de frais versée par l'intervenante, qui reste acquise à l'Etat (art. 111 al. 1 CPC) et le solde lui sera restitué.

Les frais d'appel relatifs à la requête en mesures provisionnelles, qui comprennent également les frais de mesures superprovisionnelles, seront arrêtés à 3'000 fr. et mis à la charge de l'appelante, qui succombe (art. 26, 31 et 37 RTFMC). Ils seront entièrement compensés avec l'avance de frais versée par l'appelante, qui reste acquise à l'Etat (art. 111 al. 1 CPC).

7.2.2 S'agissant de la requête en intervention, l'intervenante sera condamnée à verser à l'intimée la somme de 1'500 fr., débours et TVA compris, à titre de dépens (art. 95 al. 3 CPC; art. 85, 88 et 90 RTFMC; art. 25 et 26 LaCC).

S'agissant de la requête en mesures provisionnelles, l'appelante sera condamnée à verser à l'intimée la somme de 2'500 fr., débours et TVA compris, à titre de dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté par A______ contre l'ordonnance OTPI/747/2015 rendue le 18 décembre 2015 par le Tribunal de première instance dans la cause C/7987/2015-4 SP.

Déclare recevable l'appel interjeté par B______ contre l'ordonnance OTPI/747/2015 rendue le 18 décembre 2015 par le Tribunal de première instance dans la cause C/7987/2015-4 SP.

Au fond :

Confirme l'ordonnance précitée.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais d'appel relatifs à la requête en intervention à 2'000 fr. et les met à charge d'A______.

Dit qu'ils sont compensés par l'avance de frais de 3'000 fr. fournie par A______, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Invite en conséquence les Services financiers du Pouvoir judiciaire à verser à A______ la somme de 1'000 fr.

Arrête les frais d'appel relatifs à la requête en mesures provisionnelles à 3'000 fr. et les met à charge de B______.

Dit qu'ils sont entièrement compensés par l'avance de frais de 3'000 fr. fournie par B______, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser à C______ la somme de 1'500 fr. à titre de dépens d'appel.

Condamne B______ à verser à C______ la somme de 2'500 fr. à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Nathalie LANDRY-BARTHE et Madame Fabienne GEISINGER-MARIÉTHOZ, juges; Madame Céline FERREIRA, greffière.

 

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Céline FERREIRA

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.