C/8593/2014

ACJC/1518/2014 du 12.12.2014 sur JTPI/8484/2014 ( SEX ) , MODIFIE

Descripteurs : DÉCISION ÉTRANGÈRE; RECONNAISSANCE DE LA DÉCISION; PROTECTION DE L'ADULTE; CURATELLE; CHOSE JUGÉE
Normes : LDIP.25; CPC.226
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En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/8593/2014 ACJC/1518/2014

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du VENDREDI 12 DECEMBRE 2014

 

Entre

Monsieur A._______, domicilié ______ (Israël), recourant contre un jugement rendu par la 18ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 3 juillet 2014, comparant par Me Carlo Bertossa, avocat, Postfach 1228, 4011 Basel, en l'étude duquel il fait élection de domicile,

et

Monsieur B._______, domicilié ______ (Belgique), intimé, comparant par Me Matteo Inaudi, avocat, avenue Léon-Gaud 5, 1206 Genève, en l'étude duquel il fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A.            Par ordonnance du 4 février 2013, la Justice de paix du canton d'E._______ en Belgique a désigné B._______, avocat, comme administrateur provisoire des biens d'A._______, du fait de son "état de santé cognitif totalement dégradé".![endif]>![if>

Cette ordonnance, qui a été rendue à la suite d'une demande formée par D._______, fils de l'intéressé, a été déclarée exécutoire nonobstant recours. Le juge de paix a notamment retenu qu'A._______ avait sa résidence habituelle en Belgique car il avait été emmené de force en Israël par son autre fils, C._______. A._______ et C._______ étaient tous deux représentés par avocat dans le cadre de cette procédure.

Quatre certificats médicaux ont été produits au cours de la procédure belge : deux datent du 25 mai 2011 et indiquent qu'A._______ est atteint d'une désorientation spatio-temporelle. Les deux autres, du 21 mars 2012 et du 18 avril 2012, signalent des troubles de la mémoire et une désorientation spatio-temporelle.

A._______ et C._______ ont appelé de cette décision devant le Tribunal de première instance de Bruxelles, faisant notamment valoir que le départ du premier n'était le fait d'aucun enlèvement et qu'il était capable de se déterminer quant à sa volonté de terminer sa vie en Israël. Ils ont produit devant l'autorité belge d'appel un rapport d'expertise psychiatrique daté du 15 septembre 2013. D'après ce rapport, A._______ souffre de troubles cognitifs mais a la capacité d'exprimer sa volonté de rester vivre en Israël ("Volonté pesée, logique et suivie, sans subir d'influences extérieures ou de problèmes cognitifs").

Cet appel est toujours pendant devant le Tribunal de Bruxelles.

B.            a. Le 2 mai 2014, B._______, a déposé devant le Tribunal de première instance de Genève (ci-après : le Tribunal) une requête en exequatur de l'ordonnance susmentionnée. En sa qualité d'administrateur provisoire, il souhaitait obtenir l'accès à deux comptes appartenant à A._______ dans des banques genevoises.![endif]>![if>

b. Par jugement JTPI/8484/2014 du 3 juillet 2014, communiqué pour notification au requérant le 8 juillet 2014, le Tribunal a reconnu et déclaré exécutoire en Suisse l'ordonnance rendue le 4 février 2013 par la Justice de paix du canton d'E._______ en Belgique (chiffre 1 du dispositif), a arrêté les frais judiciaires à 500 fr. et les a compensé avec l'avance fournie par B._______ (ch. 2), les laissant à sa charge (ch. 3).

Ce jugement a été rendu sans débats et sans qu'A._______ ait été invité à se déterminer. Faisant droit à une demande en ce sens de B._______, le Tribunal a en effet considéré que, faute de partie "succombante" ou adverse, il n'y avait pas lieu d'organiser des débats. Sur le fond, le Tribunal a retenu que l'ordonnance avait été rendue par une autorité compétente et déclarée exécutoire nonobstant recours de sorte qu'elle devait être reconnue en Suisse en application des articles 25 et suivants de la LDIP.

C.            a. Par acte expédié à la Cour de justice (ci-après : la Cour) le 18 juillet 2014, A._______ recourt contre ce jugement dont il demande l'annulation. A l'appui de son recours, il a produit un chargé de pièces. ![endif]>![if>

Il a également requis la suspension de l'effet exécutoire attaché au jugement, requête qui a été rejetée par décision présidentielle du 22 juillet 2014, décision confirmée par arrêt du Tribunal fédéral du 10 octobre 2014.

b. Dans sa réponse du 25 août 2014, B._______ conclut à l'irrecevabilité du recours et à la confirmation du jugement entrepris. Il a produit une pièce nouvelle, soit une lettre datée du 7 juin 2013 envoyée par ses soins à Me Carlo BERTOSSA, conseil du recourant, par laquelle il relevait celui-ci de ses fonctions.

c. Par réplique et duplique des 17 septembre et 20 octobre 2014, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

d. Les parties ont été informées par avis de la Cour du 3 octobre 2014 de ce que la cause était gardée à juger.

D.           Pour légitimer ses pouvoirs de représentation dans le cadre du recours, le conseil d'A._______, Me Carlo BERTOSSA, a produit trois documents, soit une procuration datée du 3 juin 2012 le mandatant à la défense des intérêts d'A._______ concernant deux comptes bancaires, la même procuration avec une confirmation manuscrite d'A._______ datée du 22 septembre 2012 et une lettre signée par ce dernier datée du 3 décembre 2012 indiquant, en anglais, que la procuration initiale du 3 juin 2012 avait été signée par ses soins en présence de son avocat israélien et qu'il mandatait Me Carlo BERTOSSA pour la défense de ses intérêts dans toutes les affaires judiciaires le concernant en Suisse. ![endif]>![if>

Ces documents ont initialement été signés dans le cadre d'un litige entre A._______ et son fils D.______. A._______ avait requis le séquestre de comptes bancaires de son fils à Bâle, lui reprochant d'avoir retiré sans droit des fonds lui appartenant auprès de la banque F._______ à Genève et de les avoir transférés sur un compte à Bâle. Cette affaire a notamment fait l'objet d'un arrêt rendu le 30 juillet 2014 par la Cour d'appel du canton de Bâle-Ville qui, à titre incident, a refusé de reconnaître l'ordonnance rendue le 4 février 2013 par la justice de paix du canton d'E._______.

 

EN DROIT

1.             Le présent litige porte sur la reconnaissance d'une ordonnance belge en Suisse et oppose des parties domiciliées à l'étranger. Dès lors, il présente un élément d'extranéité.![endif]>![if>

1.1 Les conditions de la reconnaissance d'une décision étrangère en Suisse découlent en premier lieu de l'application de la LDIP. L'art. 1 al. 2 LDIP prévoit la primauté des traités internationaux sur le droit interne.

La Convention entre la Suisse et la Belgique sur la reconnaissance et l'exécution de décisions judiciaires et de sentences arbitrales du 29 avril 1959 (RS 0.276.191.721) (ci-après : la Convention) est applicable au cas d'espèce. Selon l'art. 8 al. 2 de la Convention, en Suisse, la décision qui statue sur la demande d'exequatur peut être attaquée par la voie du recours de droit public au Tribunal fédéral dans les trente jours de sa notification. Cela signifie que le recourant n'a pas besoin d'épuiser les instances cantonales, mais il reste toutefois libre de le faire (ATF 105 Ib 45, in JdT 1981 II p. 21).

Pour le surplus, s'agissant de la procédure d'exequatur en Suisse, l'art. 5 de la Convention renvoie aux règles de procédure cantonales, soit le Code de procédure civile (CPC) depuis le 1er janvier 2011.

Contre une décision du tribunal de l'exécution rendue en procédure sommaire, seul un recours écrit et motivé formé dans les dix jours à compter de la notification de la décision est recevable (art. 309 let. a, 319 let. a, 321 al. 1 et 2, et 339 al. 2 CPC).

En l'espèce, le recourant a décidé de porter son recours devant la deuxième instance cantonale qui est compétente. Le recours a été interjeté dans la forme et le délai prescrits de sorte qu'il est recevable.

1.2 La présente cause étant régie par la procédure sommaire, la cognition du juge est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit (Hohl, Procédure civile, Tome II, 2ème éd., 2010, n. 1556, p. 283).

1.3 La Cour examine d'office si les conditions de recevabilité du recours sont remplies (art. 59 et 60 CPC; Chaix, Introduction au recours de la nouvelle procédure civile fédérale, SJ 2009 II 255, p. 259).

2.             Le recourant n'ayant pas participé à la procédure devant le Tribunal de première instance, il convient d'examiner en premier lieu s'il dispose de la qualité pour recourir contre le jugement du 3 juillet 2014.![endif]>![if>

2.1 Le CPC ne traite pas explicitement de la qualité pour appeler ou recourir. Ce sont avant tout les parties à la procédure qui disposent de cette qualité.

Aux termes de la loi sur le Tribunal fédéral (ci-après : LTF), la qualité pour former un recours en matière civile suppose que le recourant ait pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou ait été privé de la possibilité de le faire (art. 76 al. 1 let. a LTF). Il doit en outre avoir un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (art. 76 al. 1 let. b LTF; ATF 133 III 421 consid. 1.1 et les références citées), condition qu'il lui incombe d'établir lorsqu'elle n'est pas évidente (ATF 133 II 249 consid. 1.1).

Le CPC doit admettre la qualité pour recourir devant ses autorités d'une manière au moins aussi large que la LTF pour le recours au Tribunal fédéral (Message concernant la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale du 28 février 2001, FF 2001, p. 4110; ACJC/223/2013 consid. 1.3).

2.2 En l'espèce, le recourant n'a pas volontairement renoncé à participer à la procédure de première instance, mais le Tribunal a estimé que la requête devait être examinée sans débats.

En outre, la reconnaissance de l'ordonnance aurait pour effet de permettre à l'intimé d'accéder aux comptes bancaires genevois du recourant et de les gérer alors que celui-ci a appelé de la décision octroyant ses pouvoirs à l'intimé. Dès lors, le recourant a un intérêt juridique à l'annulation du jugement qui admet cette reconnaissance.

Vu ce qui précède, A._______ a qualité pour recourir contre le jugement entrepris.

3.             3.1 Dans le cadre d'un recours, les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables (art. 326 al. 1 CPC).![endif]>![if>

Conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, il faut considérer comme une partie intégrante de la motivation juridique d'éventuels avis de droit produits à l'appui de l'argumentation juridique d'une partie (arrêt du Tribunal fédéral 5A_261/2009 du 1er septembre 2009, consid. 1.3, publié in SJ 2010 I 247), qui n'ont pas à être soumis aux règles sur les moyens de preuve ou les nova, mais peuvent être produits tant que la partie concernée est en droit de formuler une argumentation juridique écrite, le cas échéant même dans le cadre de plaidoiries écrites ou en deuxième instance avec un appel ou un recours stricto sensu (Tappy, Code de procédure civile commenté, Bohnet/Haldy/Jeandin/Schweizer/Tappy [éd.], 2011, n. 39 ad art. 221 CPC).

Par ailleurs, le Tribunal fédéral a jugé que l'interdiction des nova en procédure de recours doit trouver une exception lorsque, comme le prévoit la Convention de Lugano, la procédure de reconnaissance du jugement étranger intervient sur requête unilatérale sans audition de la partie adverse (ATF 138 III 82 consid. 3.5.3).

3.2 En l'espèce, le recourant n'a pas eu la possibilité de faire valoir ses moyens devant le Tribunal qui n'a pas convoqué d'audience ni ne l'a invité à se déterminer par écrit. Par conséquent, par analogie avec la jurisprudence précitée relative à la reconnaissance de jugements dans le cadre de la Convention de Lugano, il convient d'admettre les faits et les moyens de preuve présentés par le recourant pour la première fois devant la Cour. L'avis de droit produit par le recourant est quant à lui également recevable s'agissant d'une argumentation juridique complémentaire, laquelle n'est pas soumise aux limitations relatives aux nova.

La pièce nouvelle produite par l'intimé a quant à elle trait à la validité de la représentation du recourant par son conseil devant la Cour et vise à répondre aux allégations du recourant, de sorte que sa recevabilité doit également être admise, sous peine de violer le droit d'être entendu de l'intimé.

4.             La capacité d'ester en justice du recourant doit être examinée d'office par la Cour en application de l'art. 59 al. 2 let. c. CPC.![endif]>![if>

4.1 Selon l'art. 67 CPC, l’exercice des droits civils confère la capacité d’ester en justice. Le plaideur qui se prévaut de sa capacité d'ester en justice doit en conséquence être majeur (art. 14 CC) et capable de discernement (art. 16 CC) (Jeandin, Code de procédure civile commenté, Bohnet/Haldy/Jeandin/ Schweizer/Tappy [éd.], 2011, n. 3 ad art. 67 CPC).

A teneur de l'art. 16 CC, toute personne qui n'est pas privée de la faculté d'agir raisonnablement en raison de son jeune âge, de déficience mentale, de troubles psychiques, d'ivresse ou d'autres causes semblables est capable de discernement. Selon la jurisprudence, jouit de la faculté d'agir raisonnablement celui qui peut se rendre compte de la portée de ses actes et résister d'une façon normale à ceux qui tentent d'influencer sa volonté; cette capacité étant relative, le juge doit rechercher in concreto, pour un acte déterminé ou une série d'acte si la personne la possédait u moment où elle a agi (ATF 117 II 231; 124 III 5, JT 1998 I 361; ATF 134 II 235).

4.2 La capacité de discernement est présumée. Celui qui en allègue l'absence doit prouver l'incapacité de discernement au stade de la vraisemblance prépondérante (arrêt du Tribunal fédéral 4A_542/2012 du 24 janvier 2013 consid. 2.4, 6B_869/2010 du 16 septembre 2011 consid. 4.2, in SJ 2012 I p. 275).

4.3 En l'espèce, contrairement à ce que fait valoir l'intimé, aucun élément décisif ressortant du dossier ne permet de retenir, au stade de la vraisemblance prépondérante, que le recourant est actuellement incapable de discernement.

En effet, les certificats médicaux figurant à la procédure attestent du fait que le celui-ci souffre de troubles cognitifs, mais aucun des praticiens concernés ne retient que le recourant est incapable de discernement pour des actes similaires à ceux qui sont concernés en l'espèce, à savoir former un recours contre la reconnaissance en Suisse de l'ordonnance nommant un tiers administrateur provisoire de ses biens.

Le certificat le plus récent fait de plus état de ce que, s'agissant du choix de son lieu de vie actuel, le recourant a fait preuve d'une volonté pesée, logique et suivie, exempte d'influences extérieures.

Par ailleurs, le comportement du recourant, certes représenté par avocat, dans le cadre de la présente procédure et les arguments soulevés dans ses écritures n'ont rien d'incohérents. Partant, l'incapacité de discernement du recourant n'a pas été rendue vraisemblable et celui-ci doit être considéré comme capable de discernement dans le cadre du présent recours.

5.             L'intimé fait valoir que le conseil du recourant n'a pas été valablement constitué, remettant en cause la validité de la procuration et des annexes produites.![endif]>![if>

5.1 Toute personne capable d’ester en justice peut se faire représenter au procès (art. 68 al. 1 CPC), le représentant devant justifier de ses pouvoirs par une procuration (art. 68 al. 3 CPC).

Selon l'art. 394 al. 1 CO, le mandat est un contrat par lequel le mandataire s'oblige, dans les termes de la convention, à gérer l'affaire dont il s'est chargé ou à rendre les services qu'il a promis. L'étendue du mandat est déterminée par la convention ou, à défaut, par la nature de l'affaire (art. 396 al. 1 CO).

Afin de protéger le mandant, l'article 396 al. 3 CO exige un pouvoir spécial pour transiger (en procédure ou hors procédure; également acquiescer ou se désister), compromettre, souscrire des engagements de change, aliéner ou grever des immeubles, ou faire des donations. La règle est importante en matière de mandat d'avocat, qui porte souvent sur la représentation en justice. La procuration spéciale n'est pas soumise à une forme particulière, si bien qu'elle découle souvent du mandat donné à l'avocat et d'une procuration générale (Bohnet/Martenet, Le droit de la profession d'avocat, p. 1067).

5.2 En l'espèce, il n'est pas contesté que les rapports entre le recourant et son conseil relèvent du contrat de mandat.

Contrairement à ce que fait valoir l'intimé, et pour les motifs déjà relevés, il n'y a pas lieu de considérer que le recourant était incapable de discernement au moment où il a signé la procuration dont se prévaut Me Carlo BERTOSSA.

Dans sa dernière procuration (courrier du 3 décembre 2012), le recourant a expressément mandaté Me Carlo BERTOSSA pour toutes les affaires judiciaires le concernant en Suisse alors que dans ses procurations précédentes, il avait limité son pouvoir de représentation à la procédure bâloise. Il a donc expressément étendu le mandat de Me Carlo BERTOSSA à toutes les affaires helvétiques. La Cour relève également que le présent recours a un lien étroit avec les affaires judiciaires bâloises, soit le contexte de conflit entre le recourant et son fils D._______. Enfin, le travail déployé par le conseil suisse du recourant s'inscrit dans le prolongement de l'appel du recourant pendant à Bruxelles contre l'ordonnance belge.

Compte tenu de ce qui précède, les procurations donnant les pouvoirs nécessaires à Me Carlo BERTOSSA pour représenter le recourant dans la présente procédure sont valables.

La lettre adressée par l'intimé à Me BERTOSSA le 7 juin 2013 et relevant celui-ci de son mandant est quant à elle dépourvue d'effets dans la mesure où, à cette date, la décision le nommant ne déployait aucun effet en Suisse à défaut d'avoir été reconnue dans ce pays.

6.             Le recourant reproche au Tribunal d'avoir reconnu l'ordonnance belge en dépit du fait qu'elle n'est pas définitive et qu'elle a été rendue par une autorité incompétente. ![endif]>![if>

6.1 Selon l'article 1 de la Convention précitée entre la Suisse et la Belgique, l'autorité des décisions judiciaires rendues en matière civile et commerciale dans l'un des deux Etats sera reconnue dans l'autre, si elles réunissent les conditions, cumulatives, suivantes: la reconnaissance de la décision ne doit pas être incompatible avec l'ordre public de l'Etat où elle est invoquée, elle doit émaner d'une juridiction compétente, elle ne doit plus pouvoir être attaquée par les voies de droit ordinaires selon la loi de l'Etat où elle a été rendue et, si la décision a été rendue par défaut, l'acte ou l'assignation qui a introduit l'instance doit avoir été notifié au défendeur conformément à la loi de l'Etat où la décision a été rendue, et, le cas échéant, aux conventions en vigueur entre les deux pays, et qu'il lui soit parvenu en temps utile.

6.2 En l'espèce, l'ordonnance litigieuse fait l'objet d'un appel actuellement pendant devant le Tribunal de première instance de Bruxelles. Il y a donc lieu d'examiner si l'appel en question constitue une voie de droit ordinaire ou extraordinaire selon le droit belge.

Selon un avis de droit du Professeur Jacques ENGELBERT de l'Université libre de Bruxelles, produit par le recourant :

"la décision ("ordonnance") rendue par le juge de paix du canton d'E._______ le 4 février 2013 était bien susceptible d'un recours ordinaire, en l'espèce l'appel, qui a été valablement introduit devant la juridiction d'appel compétente, à savoir le tribunal de première instance de Bruxelles (…)

Cette décision n'est dès lors pas "définitive" au sens courant du terme dès lors qu'elle est aujourd'hui toujours susceptible d'être totalement ou partiellement réformée en appel".

L'ordonnance litigieuse était ainsi susceptible de faire l'objet d'un recours ordinaire, voie de droit utilisée par le recourant. La Cour d'appel de Bâle-Ville est d'ailleurs également parvenue à cette conclusion. Cette ordonnance, bien qu'elle soit exécutoire, n'est dès lors pas définitive. L'une des conditions cumulatives de la reconnaissance faisant défaut, l'ordonnance ne pouvait être reconnue Suisse.

Vu ce qui précède, le recours est admis et le ch. 1 du jugement de première instance sera annulé sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs soulevés par le recourant.

Les ch. 2 et 3 du jugement, prévoyant que les frais sont laissés à charge de l'intimé peuvent quant à eux être maintenus, puisque le montant desdits frais n'est pas contesté et que ceux-ci sont mis à charge de la partie qui succombe (art. 106
al. 1 CPC).

7.             Les frais judiciaires de la présente décision seront fixés à 500 fr. (art. 31 et 37 du Règlement fixant le tarif des frais en matière civile [RTFMC - E 1 05.10], et mis à la charge de l'intimé qui succombe (art. 106 al. 1 CPC).![endif]>![if>

Les frais judiciaires seront compensés avec l'avance de frais de 500 fr. fournie par le recourant qui reste acquise à l'Etat (art. 111 al. 1 CPC).

L'intimé sera condamné à verser 500 fr. au recourant au titre des frais judiciaires.

Le présent litige n'étant pas de nature pécuniaire, les dépens pour le défraiement du conseil du recourant seront fixés à 2'500 fr., débours et TVA compris (art. 95 al. 3 CPC, art. 86 RTFMC).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté par A._______ contre le jugement JTPI/8484/2014 rendu le 3 juillet 2014 par le Tribunal de première instance dans la cause C/8593/2014-18 SEX.

Au fond :

Annule le chiffre 1 du jugement entrepris et, cela fait, statuant à nouveau :

Rejette la requête en reconnaissance du caractère exécutoire d'une décision étrangère formée le 2 mai 2014 par B._______.

Confirme le jugement pour le surplus.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires du recours à 500 fr. et les met à la charge de B._______.

Compense les frais judiciaires avec l'avance de frais fournie par A._______, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne B._______ à verser à A._______ 500 fr. au titre des frais judiciaires.

Condamne B._______ à verser à A._______ 2'500 fr. à titre de dépens.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Pauline ERARD et Madame
Fabienne GEISINGER-MARIÉTHOZ, juges; Madame Céline FERREIRA, greffière.

 

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Céline FERREIRA

 


Indication des voies de recours
:

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF : RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse indéterminée.