A/3816/2007

DCSO/579/2007 du 06.12.2007 ( PLAINT ) , REJETE

Descripteurs : Commandement de payer. Abus de droit.
Normes : CC.2.2
Résumé : En l'espèce, des circonstances exceptionnelles permettent de conclure à l'existence d'une poursuite abusive sont établies. Sauf à protéger un comportement contraire à la bonne foi, l'on ne saurait admettre qu'un prétendu créancier utilise la procédure de poursuite aux fins manifestes d'exercer des pressions sur le mandataire de sa partie adverse dont il désapprouve l'activité déployée sur instructions de son mandant.
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En fait
En droit

 

DÉCISION

DE LA COMMISSION DE SURVEILLANCE

DES OFFICES DES POURSUITES ET DES FAILLITES

SIÉGEANT EN SECTION

DU JEUDI 6 DECEMBRE 2007

Cause A/3816/2007, plainte 17 LP formée le 8 octobre 2007 par M. H______.

 

Décision communiquée à :

- M. H______

- Mme G______

- M. K______

- Office des poursuites


EN FAIT

A. A la requête de M. H______, l’Office des poursuites (ci-après : l’Office) a notifié, le 15 août 2007, un commandement de payer, poursuite n° 07 xxxx83 E à Mme G______ et un commandement de payer, poursuite n° 07 xxxx84 D à M. K______, les précités étant pris conjointement et solidairement en paiement de la somme de 3'000'000 fr. plus intérêts à 5% dès le 13 novembre 2006 au titre de « dommage intérêts (sic) et tort moral pour avoir par des déclarations mensongères obtenu l’inculpation de M. H______ et le blocage de tous les avoirs de la famille H______ entraînant ainsi la vente de la pharmacie H______ et la perte de l’emploi des époux H______ ».

Ces actes ont été frappés d’opposition.

B. Par courrier du 16 août 2007, Mme G______ et M. K______ ont informé l’Office que la première nommée est l’avocate de parties adverses contre lesquelles plaide M. H______, qu’elle n’avait jamais agi à titre personnel à son encontre et que si M. K______ était l’un des cinq autres avocats de l’Étude dont fait partie Mme G______, il n’avait jamais eu de contacts avec M. H______. Ils ont en outre exposé que les poursuites dirigées à leur encontre n’avaient aucun fondement juridique et économique et qu’elles devaient être considérées comme abusives, dans la mesure où elles visaient à nuire à leur réputation et à exercer des pressions sur les mandats de Mme G______. Ils ont requis de l’Office, à titre provisionnel, de ne pas communiquer à M. H______ l’exemplaire « créancier » des commandements de payer et de ne pas porter ces poursuites à la connaissance de tiers, principalement, d’annuler les commandements de payer, poursuites nos 07 xxxx83 E et 07 xxxx84 D et, subsidiairement, de sommer M. H______ de justifier de sa prétendue créance conformément à l’art. 73 al. 1 LP et, s’il n’obtempérait pas ou remettait des documents lacunaires, de reconsidérer ses décisions et de constater la nullité des poursuites précitées.

Le 20 août 2007, l’Office a décidé d’adresser à M. H______ les exemplaires « créancier » des commandements de payer en tant que ces actes avaient été valablement notifiés, de ne pas porter à la connaissance de tiers les poursuites nos 07 xxxx83 E et 07 xxxx84 D jusqu’à ce qu’une décision au fond n’intervienne sur le caractère abusif ou non de ces poursuites, d’inviter M. H______ à produire les moyens de preuve afférents à sa créance et de surseoir à statuer sur le caractère abusif ou non des poursuites jusqu’à l’expiration du délai imparti pour produire lesdits moyens de preuve.

C. Par acte du 23 août 2007, Mme G______ et M. K______ ont porté plainte devant la Commission de céans, concluant, préalablement, à la suspension de l’instruction de leur plainte jusqu’à nouvelle détermination de l’Office, à titre provisionnel, au maintien de la décision de l’Office du 20 août 2007 et, principalement, à l’annulation des poursuites nos 07 xxxx83 E et 07 xxxx84 D.

Par ordonnance du 24 août 2007, la Commission de céans a confirmé, à titre de mesure provisionnelle, la décision de l’Office du 20 août 2007 de ne pas porter les poursuites considérées à la connaissance de tiers et suspendu l’instruction de la cause jusqu’à nouvelle décision de l’Office sur le caractère abusif ou non des poursuites en cause.

D. Par courrier du 4 septembre 2007, M. H______ a indiqué à l’Office que les poursuites nos 07 xxxx83 E et 07 xxxx84 D étaient motivées par le fait que dans le cadre d’une procédure pénale intentée contre lui par « l’Office des poursuites [recte : Office des faillites] de Zug (sic), l’Étude K______ et Associés, représentée par Me G______ qui représente l’office des poursuites (sic), a délibérément caché au juge d’instruction le fait que la totalité des créanciers avait été indemnisé (sic) et qu’il n’y avait plus de partie civile », ce qui « a entraîné la poursuite de l’instruction et le maintien du blocage de [s]es comptes en banque et de celui de la Pharmacie de B______, ce qui a eu pour résultat la vente de la Pharmacie et la perte de [s]on emploi et de celui de [s]a femme, ce qui [leur] cause un grave préjudice financier ». M. H______ a encore exposé que le montant réclamé correspond « aux salaires que [s]a femme et [lui] aur[aient] dû toucher de la Pharmacie jusqu’à l’âge de la retraite » et qu’il avait également poursuivi M. K______ en raison du fait qu’Mme G______ n’avait pas « la surface financière pour payer ce dommage » et qu’elle agissait pour le compte de l’Étude K______ & Associés.

M. H______ a notamment joint à son envoi copie de deux courriers, datés des 29 mai et 17 juillet 2007, de son avocate au juge d’instruction en charge de la procédure pénale P/16437/2004.

Par le premier courrier précité, l’avocate de M. H______ se plaint des mesures d’instruction requises par Mme G______ dans le cadre de la procédure pénale précitée, estimant que « Mme H______ exploite à loisir la procédure pénale à des fins qui lui sont totalement étrangères, à savoir saper l’autorité de m. le Président de la 9ème Chambre du Tribunal de première instance en charge de la liquidation des rapports patrimoniaux ayant prévalu entre les ex-époux et harceler psychologiquement M. H______ et ses proches ». Elle s’étonne pour le surplus que le juge d’instruction « dirige exclusivement [son] enquête au gré des desiderata de [Mme H______], sans donner suite, ou de manière retardée, aux demandes légitimes formulées par [son] mandant, en notamment de démontrer l’inanité des accusations d’usure qui pèse sur lui ». Elle rappelle en outre que la Chambre d’accusation aurait nié la qualité de partie civile de Mme H______ au regard de l’ensemble des faits ayant conduit à l’inculpation de M. H______ le 24 mars 2006 et conteste que « Mme H______ et son conseil » puissent encore intervenir dans la procédure sous prétexte d’une inculpation complémentaire de M. H______. Elle signale enfin que « Mme H______ et son conseil » auraient dissimulé « de nombreux éléments de faits essentiels », soit, notamment, que la masse en faillite du Laboratoire Dr. H______ SA aurait renoncé à se prévaloir de toute prétention à l’encontre de M. H______, que ni Mme H______, ni aucun créancier colloqué dans la faillite n’auraient contesté cette décision, ni réclamé la cession des droits de la masse, et que les créanciers de la masse en faillite auraient été intégralement désintéressés avec pour conséquence que l’administration de la faillite aurait perdu sa qualité de partie civile.

Par le deuxième courrier précité, l’avocate de M. H______ indique qu’après avoir pu consulter le dossier de la faillite du Laboratoire Dr. H______ SA, elle a notamment pu constater que la masse en faillite n’a subi aucun préjudice et que, partant, sa qualité de partie civile devrait être niée. Il en irait de même d’une société A______ SA, société dont Mme H______ serait l’ayant droit économique et qui aurait acquis les actifs dépendant de la masse en faillite du Laboratoire du Dr. H______ SA.

E. Par courrier du 4 septembre 2007, reçu le 10, M. H______ a porté plainte contre la décision de l’Office du 20 août 2007, avalisée par ordonnance provisionnelle rendue par la Commission de céans le 24 août 2007. Sur interpellation, M. H______ a indiqué que son courrier du 4 septembre 2007 ne constituait pas un recours au Tribunal fédéral contre l’ordonnance précitée et qu’il formerait plainte, le cas échéant, contre la nouvelle décision de l’Office.

F. Par décision du 27 septembre 2007, notifiée en recommandé, l’Office a déclaré nulles et de nul effet les poursuites nos 07 xxxx83 E et 07 xxxx84 D dirigées, respectivement, contre Mme G______ et M. K______.

L’Office a considéré, en substance, que la poursuite dirigée contre Mme G______ procédait de la volonté de M. H______ d’exercer des pressions à son encontre, le précité étant dans l’impossibilité de démontrer qu’il subissait un dommage dont Mme G______ pourrait être tenue pour responsable. S’agissant de la poursuite dirigée contre M. K______, l’Office a considéré que le motif invoqué par M. H______ pour le poursuivre solidairement avec Mme G______ était « juridiquement intenable » et que cette poursuite procédait également de la volonté d’exercer des pressions illicites sur M. K______. L’Office a, dès lors, retenu que les poursuites considérées étaient constitutives d’un abus de droit.

Au vu de cette décision, Mme G______ et M. K______ ont retiré la plainte qu’ils avaient déposée le 23 août 2007 et la cause a été rayée du rôle par ordonnance du 2 octobre 2007.

G. Par acte du 8 octobre 2007, M. H______ a formé plainte contre la décision de l’Office du 27 septembre 2007, qu’il indique avoir reçue le 2 octobre 2007 et dont il demande l’annulation.

A l’appui de sa plainte, M. H______ rappelle la teneur de la jurisprudence du Tribunal fédéral et de la Commission de céans (notamment ATF 115 III 18 et DCSO/577/06), ainsi que de la doctrine relatives aux poursuites abusives ; il en conclut que la décision de l’Office violerait le droit fédéral et devrait être mise à néant. M. H______ relève en particulier que le simple fait qu’une poursuite soit dirigée contre un avocat ne permet pas de conclure « sans plus de motivation » qu’une telle démarche serait d’emblée purement vexatoire. Selon le précité, il est « tout à fait vraisemblable » qu’un avocat puisse causer un dommage à la partie adverse de son mandant, « en particulier lorsque les procédures sont très longues, complexes et portent sur des montants importants », comme cela serait le cas en l’espèce.

S’agissant de la cause de la créance en poursuite, M. H______ répète ce qu’il a d’ores et déjà indiqué dans son courrier à l’Office du 5 septembre 2007, à savoir qu’il reproche à Mme G______ d’avoir caché au juge d’instruction en charge de la procédure pénale P/16437/2004 dirigée contre lui le fait que la totalité des créanciers de la masse en faillite du Laboratoire Dr. H______ SA avait été indemnisée et qu’il n’y avait plus de partie civile, ainsi que d’avoir eu à plusieurs reprises un comportement contraire à la déontologie. Ces faits auraient notamment eu pour conséquence la poursuite de l’instruction pénale, le blocage de ses comptes bancaires et de ceux de la Pharmacie de B______, la vente de ladite pharmacie et la perte de son emploi et de celui de sa femme.

H. Dans leurs observations du 22 novembre 2007, Mme G______ et M. K______ concluent au rejet de la plainte et à la confirmation de la décision de l’Office du 27 septembre 2007.

Les arguments développés par les précités seront repris ci-après dans la partie en droit en tant que de besoin.

L’Office s’est référé aux motifs de sa décision du 27 septembre 2007.

I. M. H______ est actuellement partie aux procédures suivantes :

procédure pénale P/16437/2004, dans laquelle il a été inculpé d’escroquerie (art. 146 CP), de gestion déloyale (art. 158 CP), de diminution effective de l’actif au préjudice des créanciers (art. 164 CP), de gestion fautive (art. 165 CP), de détournement de valeurs patrimoniales mises sous main de justice (art. 169 CP), d’infraction à l’art. 61 de la loi sur les marques avec l’aggravante du métier, d’escroquerie (art. 146 CP), de faux dans les titres (art. 251 CP) et d’usure (art. 157 CP), actuellement pendante devant le juge d’instruction. Dans le cadre de cette procédure, Mme G______ représente Mme H______, ex-épouse de M. H______, ainsi que l’Office des faillites de Zoug.

Des procès-verbaux d’inculpation produits dans la cause A/3644/2007 (DCSO/529/2007) à laquelle M. H______ était partie en qualité de plaignant, il résulte que ce dernier a été inculpé des chefs précités :

« pour avoir, alors que tous les pouvoirs [lui] avaient été retirés en mars 2000 s’agissant de la succursale de Genève du Laboratoire Dr. H______ SA (ci-après le Laboratoire), continué [son] activité comme [s’il] disposait encore de pouvoirs et encaissé sur [son] propre compte bancaire au Crédit Suisse le produit des factures du Laboratoire, étant précisé que la faillite du Laboratoire a été prononcée le 29 janvier 2002, pour [s’] être servi du nom, de la renommée et du papier à en-tête du Laboratoire pour continuer l’activité de ce dernier, en réalisant ainsi d’importants revenus qui auraient dû revenir au Laboratoire, pour avoir continué à utiliser le nom, la clientèle et la renommée du Laboratoire sans en avertir les administrateurs, les actionnaires et par la suite les chargés de la liquidation pour en retirer un bénéfice important [qu’il n’a] pas reversé au Laboratoire, pour n’avoir jamais cessé de fabriquer ni de vendre les produits du Laboratoire au nom même de celui-ci, comme cela ressort notamment des pièces comptables établies par [lui-même] pour la Régie Fédérale des Alcools (pièces 72 et 74), pour avoir, alors [qu’il] ne disposai[t] plus de pouvoirs dans le Laboratoire, continué à fabriquer, à distribuer et à vendre les produits de l’entreprise en faillite de manière non autorisée et illicite et pour avoir encaissé [lui-même] le produit des ventes, pour avoir repris, sans droit, la licence du Laboratoire en indiquant faussement sur la demande de licence dans les remarques "changement de la raison sociale du Laboratoire du Dr H______ SA client 17410" (pièce 75), en évitant ainsi les contrôles de la R______ s’agissant des nouvelles licences, étant précisé que cette licence est un actif du Laboratoire, et en reprenant à [son] seul profit des marques qui étaient encore protégées en faveur du Laboratoire, pour avoir continué, sans. droit, à agir pour le compte du Laboratoire, notamment auprès de B______ SA, société s’occupant de la protection des marques, en ne l’informant jamais de la fin de [ses] pouvoirs, pour n’avoir jamais transmis à Mme H______, liquidatrice du Laboratoire, ni à l’Office des poursuites de Zoug, les informations [qu’il] recevai[t] de B______ SA et de l’Institut P______ à Berne concernant l’échéance des marques et leur délai de renouvellement, préférant laisser passer les délais pour pouvoir les inscrire par la suite à [son] nom, pour avoir porté délibérément atteinte aux créanciers et à l’autre actionnaire du Laboratoire en omettant volontairement d’informer l’Office des poursuites de Zoug de l’échéance des marques de manière à pouvoir [se] les approprier, pour avoir repris astucieusement des marques appartenant au Laboratoire et les avoir utilisées pour la Pharmacie H______ Sàrl et avoir ainsi usurpé ces marques durant plusieurs années », et

« pour n’avoir pas versé de salaires à Mme H______ pour son activité au sein du LABORATOIRE H______ [Laboratoire Dr. H______ SA] et pour d’autres sociétés pour les années 1995 à 2002, tout en établissant de faux certificats de salaires et en déclarant qu’un salaire avait été versé dans les déclarations d’impôts, étant précisé notamment qu'un montant de CHF 831'955,95 a été porté à l’état de collocation du Laboratoire relativement à ces salaires non versés et que le CIAM a retiré sa production de CHF 47'895.05 qui concernait les salaires de Mme Mme H______ auprès de l’Office des faillites de Zoug concernant la faillite du LABORATOIRE H______ ».

procédure C/30195/1998 sur effets accessoires du divorce des époux H______, actuellement pendante. Mme H______ est représentée dans cette procédure par Mme G______.

procédure C/2590/2004 en paiement diligentée par M. H______ à l’encontre de Mme H______, suspendue d’entente entre les parties. Mme H______ est représentée dans cette procédure par Mme G______.

procédure C/18658/2006 en validation de mesures provisionnelles concernant le blocage de comptes bancaires de Mme H______, actuellement pendante. Mme H______ est représentée dans cette procédure par Mme G______.

J. Il ressort des registres de l’Office cantonal de la population que M. H______, né en décembre 1953, est divorcé de Mme H______, depuis novembre 2002. Il s’est remarié à Mme B______ en mai 2004.

Selon le registre du commerce de Genève, la faillite de la Pharmacie de B______ SA, prononcée le 8 janvier 2002, a été clôturée et ladite société radiée selon publication du 16 mars 2007. Jusqu’en janvier 2000, lorsqu’il a été radié du registre du commerce, M. H______ était inscrit comme administrateur, avec signature individuelle. A compter de cette date, Mme H______ est devenue administratrice avec signature individuelle.

Selon le registre du commerce de Zoug, la faillite du Laboratoire Dr. H______ SA a été prononcée le 29 janvier 2002. Mme H______ en est membre du conseil d’administration et liquidatrice avec signature individuelle.

EN DROIT

1. La présente plainte a été formée en temps utile auprès de l’autorité compétente contre une mesure sujette à plainte par une personne ayant qualité pour agir par cette voie (art. 17 LP ; art. 10 al. 1 et 13 LaLP ; art. 56R al. 3 LOJ).

Elle est donc recevable.

2.a. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral (cf. notamment ATF 7B.36/2006 du 16 mai 2006 consid. 2.1 ; 7B.45/2006 du 28 juillet 2006 consid. 3.1 ; 7B.219/2006 et 7B.220/2006 du 16 avril 2007 consid. 4.2 et les arrêts cités), la procédure de plainte de l’art. 17 LP ne permet pas d’obtenir, en invoquant l’art. 2 CC, l’annulation de la procédure de poursuite dans la mesure où le grief d’abus de droit est invoqué à l’encontre de la prétention litigieuse ; la décision sur ce point est réservée au juge ordinaire (ATF 113 III 2, JdT 1989 II 120). La nullité d’une poursuite pour abus de droit peut toutefois être admise dans des cas exceptionnels : ainsi, lorsqu’il est manifeste que le créancier agit dans un but sans le moindre rapport avec la procédure de poursuite, en particulier pour délibérément tourmenter le poursuivi (ATF 115 III 18 ss, JdT 1991 II 76). Il en va également ainsi du créancier qui procède de manière générale par voie de poursuite contre une personne dans la seule intention de ruiner sa bonne réputation et du poursuivant qui admet devant l’office ou le poursuivi lui-même qu’il n’agit pas envers le débiteur effectif (même arrêt).

2.b. En l’espèce, des circonstances exceptionnelles permettant de conclure à l’existence d’une poursuite abusive sont établies.

Les faits retenus démontrent en effet que le plaignant use de la procédure de poursuite à des fins détournées de son but. Il convient en effet de rappeler que si le droit de l’exécution forcée permet à un soi-disant créancier de poursuivre un prétendu débiteur en recouvrement d’une prétention sans devoir prouver l’existence de cette dernière, l’intervention d’un organe de l’exécution forcée requise à des fins complètement étrangères à celles pour lesquelles elle a été prévue représente un abus manifeste de droit, qui n’est pas protégé par la loi (art. 2 al. 2 CC ; par ex. DCSO/131/07 du 22 mars 2007 consid. 2 et les références).

Or, en l’occurrence, le plaignant s’attaque à l’avocate en charge de la défense des intérêts de son ex-épouse dans le cadre de plusieurs procédures actuellement pendantes et dans lesquelles il est directement partie prenante. Il considère, en substance, que ladite avocate lui aurait causé un dommage dans le cadre de l’exécution du mandat confié par son ex-épouse dans le cadre d’une procédure pénale pendante contre lui. Se contentant simplement d’affirmer que « l’instruction pénale pourra mettre en évidence la responsabilité de Me G______ dans cette affaire », il reproche à cette dernière d’avoir caché au juge d’instruction en charge de la procédure pénale P/16437/2004 le fait que la totalité des créanciers de la masse en faillite du Laboratoire Dr. H______ SA avait été indemnisée et qu’il n’y avait plus de partie civile, ainsi que d’avoir eu à plusieurs reprises un comportement contraire à la déontologie.

Sauf à protéger un comportement contraire à la bonne foi, l’on ne saurait admettre qu’un prétendu créancier utilise la procédure de poursuite aux fins manifestes d’exercer des pressions sur le mandataire de sa partie adverse dont il désapprouve l’activité déployée sur instructions de son mandant. Cela est d’autant plus justifié qu’une poursuite dirigée contre un avocat – à plus forte raison lorsqu’elle est d’un montant aussi important que celui du cas d’espèce – peut entraîner de désastreuses conséquences tant au niveau de sa réputation (risque de perte de clientèle, etc. ; cf. BlSchK 1991, p. 111 consid. 5) que de sa pratique professionnelle (impossibilité d’obtenir un crédit ou un leasing, de conclure un bail, etc.), ce que le plaignant ne saurait ignorer.

A cela s’ajoute, comme le relèvent à juste titre les intimés, un certain nombre d’indices concordants d’une intention de nuire à l’avocate de l’ex-épouse du plaignant, à savoir, notamment :

importance insolite du montant en poursuite, en regard de la cause invoquée par le plaignant dans sa réquisition de poursuite, soit, en particulier, un tort moral et une perte de salaire dus à des mesures ordonnées par un juge d’instruction en charge d’une procédure pénale dirigée contre lui, étant précisé que le plaignant n’est plus administrateur de la Pharmacie de B______ SA depuis janvier 2000, soit deux ans avant la mise en faillite de ladite pharmacie, et que la procédure pénale critiquée par le plaignant a été initiée en 2004 et les inculpations prononcées en 2006 ;

absence de poursuite à l’encontre de Mme H______, cliente de Mme G______ et maître des instructions données à cette dernière dans le cadre de l’exécution de la défense de ses intérêts dans les procédures l’opposant au plaignant ; et

mise en cause d’un associé de l’Étude dans laquelle Mme G______ est employée, alors que ce dernier n’a jamais eu une quelconque relation avec le plaignant et n’est jamais intervenu dans les dossiers traités par la précitée.

2.c. Au vu de ce qui précède, la Commission de céans considère que c’est à bon droit que l’Office a déclaré les poursuites considérées nulles et de nul effet pour cause d’abus de droit. La plainte doit en conséquence être rejetée.

3. Il est statué sans frais (art. 20a al. 2 ch. 5 LP ; art. 61 al. 2 let. a OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,

LA COMMISSION DE SURVEILLANCE

SIÉGEANT EN SECTION :

A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 8 octobre 2007 par M. H______ contre la décision de l’Office des poursuites du 27 septembre 2007 déclarant nulles et de nul effet les poursuites nos 07 xxxx83 E et 07 xxxx84 D dirigées, respectivement, contre Mme G______ et M. K______.

Au fond :

1. La rejette.

2. Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant : M. Grégory BOVEY, président ; M. Etienne KISS-BORLASE, juge assesseur ; M. Yves de COULON, juge assesseur suppléant.

Au nom de la Commission de surveillance :

 

Marisa BATISTA Grégory BOVEY

Greffière : Président :

 

 

 

 

 

 

La présente décision est communiquée par courrier A à l’Office concerné et par courrier recommandé aux autres parties par la greffière le