A/4106/2007

DCSO/594/2007 du 20.12.2007 ( PLAINT ) , ADMIS

Descripteurs : Séquestre. Exécution du séquestre.
Normes : LP.272.1.3; LP.276
Résumé : Délimitation des compétences du juge du séquestre et de l'autorité de surveillance. En l'espèce le nom du tiers qui détient des valeurs du débiteur est indiqué sur l'ordonnance de séquestre et il incombe à l'Office des poursuites de l'exécuter.
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En fait
En droit

 

DÉCISION

DE LA COMMISSION DE SURVEILLANCE

DES OFFICES DES POURSUITES ET DES FAILLITES

SIÉGEANT EN SECTION

DU jeudi 20 decembre 2007

Cause A/4106/2007, plainte 17 LP formée le 30 octobre 2007 par M. W______.

 

Décision communiquée à :

- M. W______

 

 

- M. S______

 

 

 

- Office des poursuites


 

EN FAIT

A. Le 25 octobre 2007, le Tribunal de première instance, à la requête de M. W______, a ordonné le séquestre de tous titres, espèces, valeurs, créances, actions nominatives ou au porteur, comptes, dépôts ou coffres-forts, ou de tout bien de quelque nature que ce soit au nom de M. S______ ou de I______ Ltd en mains de la Banque A______. Sous la rubrique "Débiteur", est mentionné M. S______ ainsi que son adresse en France.

Par télécopie du 25 octobre 2007, l'Office des poursuites (ci-après : l'Office) a communiqué à A______ BANK (Suisse) un avis concernant l'exécution d'un séquestre (n° 07 xxxx58 C), les actifs séquestrés étaient tous titres, espèces, valeurs, créances, actions nominatives ou au porteur, comptes, dépôts ou coffres-forts, ou tout bien de quelque nature que ce soit au nom de M. S______.

Par décision du 26 octobre 2007 communiquée par pli recommandé à M. W______ et au Président du Tribunal de première instance, l'Office, considérant que les actifs visés l'étaient notamment au nom d'une autre personne que le débiteur, a refusé de donner suite à l'ordonnance de séquestre en tant qu'elle concernait les actifs appartenant à I______ Ltd.

B. Par pli recommandé du 30 octobre 2007, M. W______ a demandé à l'Office de reconsidérer sa décision. Copie de ce courrier était adressé à la Commission de céans, le prénommé demandant que celui-ci soit traité comme une plainte pour autant que l'Office ne donne pas une suite positive à sa réclamation. M. W______ exposait que cette décision était inacceptable dans la mesure où le juge du séquestre avait autorisé le séquestre tant sur les biens appartenant à M. S______ que sur ceux appartenant à I______ Ltd et cela sur la base des allégations de fait de sa requête en séquestre et de la décision de la Commission de taxation des honoraires d'avocat, titre de la créance. Il ajoutait qu'en tant que mandataire de M. S______ depuis de nombreuses années, il ne pouvait ignorer sa qualité d'ayant droit économique d'I______ Ltd.

Le 6 novembre 2007, l'Office a transmis à la Commission de céans la télécopie qu'il adressait à M. W______ et à teneur de laquelle il maintenait les termes de sa décision du 26 octobre 2007.

Au terme de son rapport du 20 novembre 2007, l'Office a conclu au rejet de la plainte, faisant valoir que seuls les biens du débiteur pouvaient être mis sous le poids du séquestre, à l'exclusion des biens appartenant à un tiers, en l'occurrence I______ Ltd. L'Office se réfère à une jurisprudence antérieure à l'entrée en vigueur, le 1er janvier 1997, de la LP révisée.

Invité à se déterminer, M. S______ a transmis à la Commission de céans copie d'un courrier, intitulé "Plainte" et adressé à M. W______, et lui a demandé de le transmettre aux autorités compétentes.

A la demande de la Commission de céans, M. W______ lui a notamment communiqué la requête de séquestre déposée le 25 octobre 2007 par devant le Tribunal de première instance à teneur de laquelle il déclare connaître l'existence de compte bancaire ou de dépôts à la banque A______ appartenant à M. S______ ou à I______ Ltd, dont l'ayant droit économique est celui-là. Ses conclusions sont les suivantes : "Ordonner le séquestre de tous titres, espèces, valeurs, créances, actions nominative ou au porteur, comptes, dépôts ou coffres-forts, ou de tout bien de quelque nature que ce soit au nom de M. S______ ou de I______ Ltd en mains de la Banque A______ à concurrence de CHF 12'000.00 avec intérêts à 5% dès le 27 mars 2007".

 

EN DROIT

1. La Commission de céans est compétente pour connaître des plaintes dirigées contre des mesures prises par des organes de l’exécution forcée qui ne sont pas attaquables par la voie judiciaire ou des plaintes fondées sur un prétendu déni de justice ou retard injustifié (art. 17 LP ; art. 10 al. 1 et art. 11 al. 2 LaLP ; art. 56R al. 3 LOJ).

En l'espèce, l'objet de la plainte est la décision de l'Office du 26 octobre 2007 refusant de donner suite à l'ordonnance de séquestre en tant qu'elle concerne les actifs appartenant à I______ Ltd.

En sa qualité de créancier, le plaignant est habilité à agir par cette voie et sa plainte a été déposée en temps utile et dans les formes prescrites (art. 13 al. 1 et 2 LaLP ; art. 65 al. 1 et 2 LPA applicable par renvoi de l’art. 13 al. 5 LaLP).

Elle est donc recevable.

2.a. Selon l'art. 276 LP, il est dressé procès-verbal du séquestre au pied de l'ordonnance de séquestre. Le procès-verbal contient la désignation des objets et de leur valeur. Il est transmis immédiatement à l'office des poursuites (al. 1). Celui-ci en notifie immédiatement une copie au créancier et au débiteur et informe les tiers dont les droits sont touchés par le séquestre (al. 2).

La procédure d'opposition à l'ordonnance de séquestre (art. 278 LP) permet le contrôle de cette dernière par le juge quant aux conditions de fond du séquestre, y compris la désignation "des biens appartenant au débiteur" (art. 272 al. 1 ch. 3 LP) qui fait partie de l'ordonnance en vertu de l'art. 274 al. 2 ch. 4 LP. Les griefs qui concernent la propriété ou la titularité des biens à séquestrer doivent donc être invoqués dans la procédure d'opposition, celui d'abus de droit également. Les compétences des autorités de poursuites sont ainsi circonscrites aux mesures proprement dites d'exécution du séquestre, soit notamment, en vertu du renvoi de l'art. 275 LP, à celles concernant la saisissabilité des biens (art. 92 ss LP), l'ordre de la saisie (art. 95 ss LP), la sauvegarde des biens saisis (art. 98 ss LP) et la procédure de revendication (art. 106 ss LP). L'Office, qui ne peut donner suite à un ordre lacunaire ou imprécis, ni exécuter un séquestre entaché de nullité, conserve, par ailleurs, le droit de contrôler la régularité formelle de l'ordonnance de séquestre (Pierre-Robert Gilliéron, Le séquestre dans la LP révisée, in BlSchK 1995 p. 121 ss ; Michel Oschner, Exécution du séquestre, in JdT 2006 II 77 ; ATF 129 III 203).

2.b. La jurisprudence déduit de l'art. 272 al. 1 ch. 3 LP qu'il soit pour le moins fait mention du nom des tiers qui détiennent formellement des valeurs, en particulier des créances du débiteur, pour pouvoir procéder au séquestre. Ainsi, une banque -le devoir de renseigner dans la procédure de saisie valant par analogie pour l'exécution du séquestre (art. 275 LP)- doit donner des renseignements sur les objets et les biens à séquestrer mentionnés dans l'ordonnance de séquestre, y compris sur les objets ou les biens dont un tiers, et non le débiteur, paraît être nominalement l'ayant droit. En revanche, les autorités de poursuites ne doivent pas faire ou exiger des recherches à propos de valeurs qui ne sont pas mentionnées dans l'ordonnance de séquestre (Pierre-Robert Gilliéron, op. cit. ad art. 275 n° 50 ss ; ATF 130 III 579, JdT 2005 II 100 ; ATF 126 III 95, consid. 4a, JdT 2000 II 35).

2.c. Dans le cas particulier, le juge, à la requête du plaignant, a ordonné le séquestre des avoirs au nom du débiteur et d'I______ Ltd, en mains de la banque A______ à Genève.

L'exigence selon laquelle l'ordonnance de séquestre doit indiquer au moins le nom des personnes qui détiennent formellement des valeurs du débiteur, en particulier ses créances, est donc remplie et l'ordonnance de séquestre du 25 octobre 2007 est en conséquence exécutable dans son intégralité.

3. Il s'ensuit que la décision de l'Office, qui a outrepassé ses compétences (cf. consid. 2.a.), doit être annulée et la Commission de céans l'invitera à exécuter sans délai l'ordonnance de séquestre en tant qu'elle vise tous titres, espèces, valeurs, créances, actions nominatives ou au porteur, comptes, dépôts ou coffres-forts, ou tout bien de quelque nature que ce soit au nom d'I______ Ltd en mains de la Banque A______, à concurrence de CHF 12'000.00 avec intérêts à 5% dès le 27 mars 2007.

 

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,

LA COMMISSION DE SURVEILLANCE

SIÉGEANT EN SECTION :

A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 30 octobre 2007 par M. W______ contre la décision prise par l'Office des poursuites dans le cadre de l'exécution du séquestre n° 07 xxxx58 C.

Au fond :

1. L'admet.

2. Invite l'Office des poursuites à exécuter sans délai l'ordonnance de séquestre en tant qu'elle vise tous titres, espèces, valeurs, créances, actions nominative ou au porteur, comptes, dépôts ou coffres-forts, ou tout bien de quelque nature que ce soit au nom d'I______ Ltd en mains de la Banque A______, à concurrence de CHF 12'000.00 avec intérêts à 5% dès le 27 mars 2007.

3. Déboute les parties de toutes autres conclusions.

 

Siégeant : Mme Ariane WEYENETH, présidente ; Mme Florence CASTELLA et M. Denis MATHEY, juges assesseur(e)s.

 

 

Au nom de la Commission de surveillance :

 

Paulette DORMAN Ariane WEYENETH
Greffière : Présidente :

 

 

La présente décision est communiquée par courrier A à l’Office concerné et par courrier recommandé aux autres parties par la greffière le