A/126/2006

ATAS/332/2006 (3) du 06.04.2006 ( AF ) , REJETE

Descripteurs : ; ALLOCATION FAMILIALE(AFA) ; PRESCRIPTION ; DEMANDE DE PRESTATION D'ASSURANCE ; DEMANDE ADRESSÉE À L'AUTORITÉ ; DROIT À LA PRESTATION D'ASSURANCE
Normes : LAF12
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En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/126/2006 ATAS/332/2006

ARRET

DU TRIBUNAL CANTONAL DES

ASSURANCES SOCIALES

Chambre 2

du 6 avril 2006

 

En la cause

Monsieur E__________

 

 

recourant

 

contre

FEDERATION DES ENTREPRISES ROMANDES, Administration des allocations familiales, sis 98, rue de St-Jean, 1211 Genève 11

 

 

 

Intimée


EN FAIT

Monsieur E__________ (ci-après le recourant) est père d'un enfant, né le 4 mai 1999. Il travaille à Genève. Sa compagne, S__________, est sans activité lucrative depuis la naissance de l'enfant. Le couple et l'enfant vivent à Genève.

Le 28 septembre 2005, le recourant a déposé une demande d’allocation pour l'enfant auprès de la FEDERATION DES ENTREPRISES ROMANDES, Administration des allocations familiales (ci-après l'intimée), indiquant que la mère avait touché des allocations familiales de la naissance de l'enfant jusqu'au 30 avril 2001, de la caisse d'allocations familiales françaises. Il sollicite le versement de ces allocations depuis le 1er mai 2001 jusqu'au 30 novembre 2004, sa compagne pouvant percevoir à nouveau des allocations familiales depuis le 1er décembre 2004, de la CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE COMPENSATION.

Par courrier du 12 octobre 2005, le recourant a déposé des pièces complémentaires.

Par décision du 13 octobre 2005, l'intimée a accordé les allocations familiales pour la période du 1er octobre 2003 au 30 novembre 2004, au motif que les prestations arriérées se prescrivent par deux ans au maximum, le délai partant en l'occurrence du 6 octobre 2005, date de la réception de la demande.

Suite à l'opposition du recourant du 15 novembre 2005, l'intimée a confirmé sa position par décision sur opposition du 14 décembre 2005.

Dans son recours du 12 janvier 2006, le recourant conclut à ce qu’il soit ordonné à l'intimée de verser le montant de 5'800 fr. correspondant aux allocations dues pour les mois de mai 2001 à septembre 2003. Il explique ne s'être jamais préoccupé de savoir si les allocations familiales lui étaient bien versées, partant de l'idée qu'elles étaient incluses dans le versement de son salaire. Il signale, par ailleurs, que la caisse vaudoise a versé sans autre un arriéré d'allocations familiales depuis 2001 pour le même employeur concernant d'autres salariés.

Dans sa réponse du 6 février 2006, l'intimée conclut au rejet du recours. Elle rappelle que le système genevois est différent du système vaudois.

Le 21 février 2006, le Tribunal de céans a entendu les parties en comparution personnelle.

A cette occasion, le recourant a expliqué que jusqu'en mars 2005 il avait toujours pensé que les allocations familiales lui avaient été versées avec son salaire. La société qui l'emploie depuis 1983 a réduit drastiquement son personnel en 1999. Depuis cette année, c'est une fiduciaire qui s'occupe de toute la comptabilité de la société. C'est sur question de l'administration fiscale cantonale qu'il a découvert en mars 2005 que les allocations familiales n'étaient pas déclarées aux impôts, pour le motif qu'elles ne lui étaient pas versées. Il a entrepris tout d'abord par téléphone des démarches auprès de l'intimée et, après avoir réuni les documents nécessaires, a déposé une demande formelle le 29 septembre 2005. Il a indiqué pouvoir établir que le contact avec l'intimée date du mois de mars 2005. La représentante de l'intimée a indiqué qu'elle vérifierait ce point, ainsi que la question de savoir si, dans une telle hypothèse, le droit aux allocations arriérées pouvait partir du mois de mars 2005 plutôt que du mois d'octobre 2005.

Par courrier du 21 février 2006, le recourant a indiqué par écrit à l'intimée, avec copie au Tribunal de céans, que le contact téléphonique datait du 24 février 2005, et avait eu lieu avec Mme G__________. Par ailleurs, par courrier du 3 mars 2006 l'intimée, sans mettre en doute l'entretien téléphonique allégué, a fait savoir au Tribunal de céans qu'elle ne pouvait calculer le droit aux allocations familiales qu'à partir du dépôt formel de la demande, soit en l'espèce octobre 2005.

Le 9 mars 2006, cette détermination a été transmise au recourant par le Tribunal de céans qui a ensuite gardé la cause à juger.

 

EN DROIT

La loi genevoise sur l’organisation judiciaire (LOJ) a été modifiée et a institué, dès le 1er août 2003, un Tribunal cantonal des assurances sociales (TCAS), composé de cinq juges, dont un président et un vice-président, cinq suppléants et seize juges assesseurs (art. 1 let. r et 56T LOJ). Le Tribunal statue en instance unique, notamment sur les contestations relatives à la loi cantonale sur les allocations familiales du 1er mars 1996 (ci-après : LAF ; cf. art. 1 let. r, 56 V al. 2 let. e LOJ).

Suite à l’annulation de l’élection des seize juges assesseurs par le Tribunal fédéral le 27 janvier 2004 (ATF 130 I 106), le Grand Conseil genevois a adopté, le 13 février, une disposition transitoire urgente (art. 162 LOJ) permettant au TCAS de siéger sans assesseurs, à trois juges titulaires, dans l’attente de l’élection de nouveaux juges assesseurs.

Sa compétence pour juger du cas d'espèce est ainsi établie.

Déposé dans les forme et délai imposés par la loi, le présent recours est recevable (art. 38 al. 1 LAF).

L’objet du recours consiste à déterminer à partir de quelle date le recourant peut être mis au bénéfice d’allocations familiales pour son enfant William. Il sollicite le versement de ces allocations depuis le mois de mai 2001, tandis que l'intimée considère que le droit peut remonter au maximum au mois d'octobre 2003.

a) La loi sur les allocations familiales du 1er mars 1996 régit l'octroi de prestations sous forme d'allocations familiales pour tout enfant à la charge d'une personne assujettie à la loi (cf. art. 1 LAF). L’allocation pour enfant est une prestation mensuelle accordée dès le mois qui suit celui de la naissance de l’enfant jusqu’à la fin de celui au cours duquel il atteint l’âge de 18 ans, s’il est domicilié en Suisse, ou de 15 ans s’il ne l’est pas (art. 7 al. 1 LAF). Elle s'élève à 200.- fr. par mois pour l’enfant jusqu’à 15 ans et à 220.- fr. par mois pour l’enfant de plus de 15 ans (cf. art. 8 al. 2 LAF).

b) L’art. 2 al. 1 LAF définit le cercle des personnes assujetties à la loi. En font notamment partie les personnes salariées au service d’un employeur tenu de s’affilier à une caisse d’allocations familiales. Tel est le cas du recourant, ce qui n'est pas contesté, comme d'ailleurs le fait que le recourant peut bénéficier des prestations dans la mesure où il assume l’entretien de l'enfant de manière prépondérante et durable (art. 3 al. 1 LAF).

c) Selon l’art. 12 al. 1er LAF, le droit aux allocations familiales arriérées se prescrit par deux ans à compter du moment où le bénéficiaire a eu connaissance de son droit à percevoir des allocations familiales, mais au plus tard cinq ans après la fin du mois pour lequel elles étaient dues.

Il découle de cette disposition que deux ans d’allocations familiales arriérées peuvent être réclamés par l’assuré dans un délai de prescription de cinq ans dès le dépôt de la demande. Le texte légal n’indique pas si ces deux ans doivent être consécutifs. Il résulte d’une interprétation a contrario de cette norme que cela n’est pas le cas. Dès lors, l’assuré a droit à 24 mois d’allocations familiales dans le délai de cinq ans, sans qu’il soit nécessaire que cette durée soit ininterrompue (cf. ATAS 177/2006).

d) Aux termes de l'art. 35 al. 2 LAF, la demande d'allocations familiales doit être formée par écrit, sur une formule officielle remise par la caisse.

En l'espèce, le recourant a eu connaissance de son droit à réclamer les allocations familiales lorsqu'il a découvert que son employeur ne les lui versait pas avec son salaire, c'est-à-dire vers la fin du mois de février 2005 puisqu'il est rendu vraisemblable, et qu'il est non contesté, qu'il a eu un entretien téléphonique avec une collaboratrice de l'intimée le 24 février 2005. Il a ensuite collecté les documents nécessaires puis a déposé sa demande le 29 septembre 2005.

Ainsi, le recourant a agi dans le délai de deux ans prévu par l'art. 12 al.1 LAF, de sorte que son droit aux allocations familiales arriérées n'est pas prescrit. Cependant, le moment à partir duquel il y a lieu de calculer les deux ans de prestations arriérées est celui du dépôt de la demande, puisque celui-ci est une condition au versement des prestations.

C'est donc bien dès le mois d'octobre 2003 que le recourant à un droit aux allocations familiales. Par conséquent, le recours ne peut être que rejeté.

 

***

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

(conformément à la disposition transitoire de l’art. 162 LOJ)

A la forme :

Déclare le recours recevable.

Au fond :

Le rejette.

Dit que la procédure est gratuite.

 

 

 

 

 

 

Le greffier

 

 

Pierre Ries

 

La Présidente

 

 

Isabelle Dubois

 

 

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties par le greffe le