A/1601/2003

ATAS/240/2005 du 04.02.2005 ( AI ) , REJETE

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En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1601/03 ATAS/240/2005

ARRET

DU TRIBUNAL CANTONAL DES

ASSURANCES SOCIALES

4ème chambre

du 9 mars 2005

 

 

 

 

En la cause

 

 

Monsieur V__________,

mais comparant par Maître Daniel MEYER en l’étude duquel il élit domicile

recourant

 

 

 

contre

 

 

 

OFFICE CANTONAL DE L’ASSURANCE-INVALIDITE, domicilié rue de Lyon 97 à Genève

intimé

 


EN FAIT

V__________, ci-après l’assuré, est né en novembre 1954. D’origine portugaise, il s’est marié en 1976. Deux enfants sont nés de cette union, l’un en 1978, la seconde en 1982. L’assuré est arrivé en Suisse en 1985. Sans formation professionnelle, il a travaillé en qualité de maçon carreleur à plein temps (8,5 heures par jour ou 41 heures hebdomadaires) et comme nettoyeur (2,5 heures par jour soit 12,5 heures hebdomadaire), soit à un taux d’activité de 130%.

Il a été en incapacité de travailler du 15 février 1999 au 24 mai 1999 à 100%, puis du 25 mai 1999 au 7 juin 1999 à 50%, et dès le 8 juin 1999 à 100% en raison d’une tendinopathie sévère du sus-épineux de l’épaule droite.

Le 10 mars 2000, l’assuré a déposé une demande de prestations auprès de l’Office cantonal de l’assurance-invalidité (ci-après : OCAI).

Le 30 avril 2000, il a été licencié de son emploi de nettoyeur par Northern Assurances puis, le 30 juin 2000, il a été licencié par l’entreprise Jarnic S.A. (maçonnerie, carrelage, entretien).

Du 19 novembre 2001 au 30 janvier 2002, l’assuré a effectué un stage d’observation OSER au centre d’intégration professionnelle (ci-après : CIP) afin de déterminer sa capacité de travail (temps de travail et rendement). Ce stage, initialement prévu pour s’achever le 17 février 2002 a pris fin prématurément le 30 janvier 2002 en raison de son inefficacité, l’assuré ayant consulté la permanence médico-chirurgicale de Chantepoulet et obtenu successivement deux certificats d’arrêt de travail du Dr François Daniel. La durée totale de 25 jours de ce stage n’a pas permis de répondre en détail aux attentes de l’OCAI. Toutefois, il est attesté par le rapport du CIP du 5 mars 2002 que, jusqu’à son interruption, ce stage permettait de conclure à une capacité résiduelle de travail de 70% au minimum chez l’assuré. Il était précisé dans ce même rapport qu’une opposition passive de l’assuré n’était pas exclue ; ceci notamment aux motifs que le médecin ayant délivré les certificats médicaux interrompant le stage ne figurait pas parmi les trois médecins traitants usuellement consultés par l’assuré et que ce dernier avait clairement indiqué que son but était d’obtenir une rente pour rentrer au Portugal car il s’y trouvait mieux en raison du climat notamment.

Le 13 mars 2002, un rapport de la division de réadaptation professionnelle a été établi. Il reprend les conclusions du rapport du CIP selon lesquelles la capacité résiduelle de travail est de 70% au moins. Il souligne notamment « …l’assuré semble avoir travaillé plus de 50 heures par semaine, soit à 150% ; il n’est pas étonnant qu’il y ait une certaine lassitude. ».

Le 8 octobre 2002, le Dr Nicolas D__________, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, a rendu un rapport d’expertise suite au mandat confié par l’OCAI en vue de clarifier les troubles orthopédiques de l’assuré et d’estimer sa capacité de travail dans son ancienne activité, voire dans toute activité adaptée. Il a établi son rapport sur la base du dossier médical fourni par le mandant auquel il a ajouté son anamnèse, son examen clinique et un bilan radiologique standard. Dans son rapport, il a procédé à un rappel anamnestique avant de faire état des plaintes actuelles du patient, l’anamnèse familiale, l’anamnèse socio-professionnelle, le status clinique, le dossier radiologique, les diagnostics orthopédiques, l’appréciation du cas puis il a répondu à plusieurs questions avant de se déterminer sur la capacité de travail et sur ses influences sur la réadaptation professionnelle pour finir par répondre à deux questions complémentaires. Les détails qui figurent dans ce rapport d’expertise seront, en tant que de besoin, repris ci-après dans la partie en droit. Ses conclusions sont que le recourant présente une atteinte dégénérative modérée de la coiffe des rotateurs et de l’articulation acromio-claviculaire de l’épaule droite, compatible avec l’usure due à l’âge et dont l’amélioration, quel que soit le traitement, est peu probable ; ainsi que des signes modestes d’une souffrance fémoro-patellaire bilatérale laquelle est susceptible de régresser avec un traitement. Il résulte de ces constats une capacité de travail réduite dans l’activité de carreleur mais entière pour toute une palette d’activités ne nécessitant notamment ni le port de charges ni des mouvements de force en torsion de l’épaule droite.

Le 19 novembre 2002, le Service médical régional AI du Léman (ci-après : SMR), en la personne du Dr Sylvie Munsch, a établi un rapport d’examen selon lequel l’atteinte principale à la santé de l’assuré consiste en une « arthrose acromio-claviculaire droite modérée associée à une tendinopathie de la coiffe des rotateurs (sus-épinuex et sous scapulaire) ; syndrome fémoro-patellaire bilatérale ». Selon ce rapport, le début de l’incapacité durable de travail date du 15 février 1999. La capacité de travail exigible dans l’activité de travail habituelle est réduite à 33%, alors que celle exigible dans une activité adaptée est de 100%. Les limites fonctionnelles admises sont « Pas de port de charges de plus de 10-15 kg, pas de travail au-dessus de l’horizontale, pas de port de charges en porte-à-faux du membre supérieur droit, pas de travail à genou. Activité alternant les positions assise et debout. » Par ailleurs, ce rapport reprend les conclusions médicales qui figurent au dossier de l’assuré et sont ci-avant décrites.

Le 2 décembre 2002, la division de réadaptation professionnelle de l’OCAI a rendu un rapport proposant l’octroi d’une demi-rente, classant le mandat de réadaptation et déterminant le degré d’invalidité sur la base de l’enquête suisse sur la structure des salaires 2000. Selon la comparaison des gains établie, le revenu annuel brut avec invalidité est de Fr. 36'935.- alors que celui sans invalidité serait de 85'951.- en 2002, ce qui correspond à un taux d’invalidité de 57%. La possibilité de déposer une demande d’aide au placement a été rappelée à l’assuré.

Le 8 avril 2003, une décision octroyant, dès le 1er février 2000, une demi-rente d’invalidité à l’assuré pour une durée illimitée a été rendue par l’OCAI, le taux d’invalidité retenu étant de 57% en raison d’une maladie de longue durée.

Le 29 avril 2003, le Dr A__________, médecin répondant de la permanence médico-chirurgicale de Chantepoulet, a délivré un certificat médical certifiant que l’assuré était en traitement chez lui depuis le 9 mai 1998 pour maladie et que sa capacité de travail était nulle dès le 11 mai 1998 pour une durée indéterminée.

Par acte du 25 avril 2003, opposition a été faite à la décision du 8 avril 2003. L’assuré soutient que l’OCAI n’a pas tenu compte de son état dépressif et de ses incapacités à lire et écrire. Il estime le salaire théorique retenu manifestement surfait et dit que le degré d’invalidité devait être admis à raison d’au moins 70%. Le 6 juin 2003, l’opposition a été complétée. L’assuré se réfère au certificat médical du Dr B__________ du 29 avril 2003 qu’il joint à son écriture et expose être totalement inapte au travail. Il fait par ailleurs valoir qu’un « état dépressif fait d’une humeur déprimée » s’est greffé aux atteintes physiques et que ceci impose une expertise psychiatrique pour évaluer son degré d’invalidité. Il soutient qu’une invalidité de 70% au moins doit être admise. Il souligne ses faibles chances de reclassement vu son absence de formation professionnelle, ses difficultés d’expression en français, son absence de capacités en lecture et en écriture, son manque général d’instruction, la situation actuelle du marché du travail. Il rappelle estimer le revenu théorique retenu surfait et conclut à l’octroi d’une rente entière d’invalidité avec effet au 1er avril 2003 pour une durée indéterminée.

Le 30 juin 2003, une décision sur opposition a été rendue par l’OCAI. Elle rejette l’opposition et confirme la décision d’octroi d’une demi-rente dès le 1er février 2000 aux motifs que seule une atteinte somatique, se situant sur le plan ostéoarticulaire a été mise en évidence chez l’assuré, à l’exclusion de toute atteinte psychiatrique, et que le taux d’invalidité admis, soit 57%, est généreux au vu du dossier. L’argumentation de la caisse sera, en tant que de besoin, reprise dans la partie en droit ci-après.

Par acte daté du 29 août 2003, reçu au greffe du Tribunal de céans le 1er septembre 2003, l’assuré a formé recours contre la décision sur opposition du 30 juin 2003. Il expose souffrir d’une arthrose acromio-claviculaire du bras droit et être droitier, il ajoute avoir une totale absence de formation et de scolarisation et qu’en conséquence sa capacité de travail dans une activité adaptée est manifestement nulle. Il précise qu’un syndrome dépressif réactionnaire est apparu au mois d’octobre 2000 déjà puis s’est développé en juin 2001 et qu’en conséquence une activité à 50% est illusoire. Il conclut préalablement à la mise en oeuvre d’une expertise psychiatrique pour déterminer son état psychique et principalement à l’annulation de la décision de l’OCAI du 30 juin 2003 ; à dire et prononcer qu’il a droit à une rente entière d’invalidité à compter du 1er avril 2003 pour une durée illimitée ainsi qu’à l’octroi d’une indemnité à titre de dépens.

Le 29 septembre 2003, l’OCAI a déposé ses dernières observations en se référant à l’ensemble des pièces au dossier et en particulier à la motivation de sa décision sur opposition avant de conclure au rejet du recours et à la confirmation de la décision attaquée.

Par pli du 30 septembre 2003, l’assuré a envoyé au Tribunal de céans une attestation médicale signée par les Drs M. C __________et B__________, tous deux de la permanence médicale de Chantepoulet. Selon ce document, l’assuré est suivi dans l’établissement depuis février 1999 pour scapulo-huméralgies chroniques. Il est en arrêt de travail depuis le 2 août 1999. Cette attestation certifie « …Les tentatives faites pour une réadaptation professionnelle se sont avérées infructueuses étant donné que les douleurs du membre supérieur droit empêchent tous les mouvements. A partir du mois de mars 2000, les troubles du sommeil s’installent, suivis après de troubles dépressifs nécessitant un traitement psychotrope et ayant une influence néfaste sur son activité déjà diminuée… ».

 

EN DROIT

 

La loi genevoise sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 (LOJ ; E 2 05) a été modifiée et a institué, dès le 1er août 2003, un Tribunal cantonal des assurances sociales (ci-après : TCAS), notamment dans les contestations relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité (ci-après : LAI), ce conformément aux art. 1 let. r et 56V, al. 1 let. a, chiffre 2 LOJ. Dès lors, le TCAS est compétent pour statuer.

La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003, entraînant la modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine des assurances sociales. Sur le plan matériel, le point de savoir quel droit s'applique doit être tranché à la lumière du principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 127 V 467 consid. 1, 126 V 136 consid. 4b et les références). En revanche, en ce qui concerne la procédure, et à défaut de règles transitoires contraires, le nouveau droit s'applique sans réserve dès le jour de son entrée en vigueur (ATF 117 V 93 consid. 6b, 112 V 360 consid. 4a; RAMA 1998 KV 37 p. 316 consid. 3b). C'est pourquoi les procédures pendantes au 1er janvier 2003 ou introduites après cette date devant un tribunal cantonal compétent en matière d'assurances sociales sont régies par les nouvelles règles de procédure contenues dans la LPGA et par les dispositions de procédure contenues dans les différentes lois spéciales modifiées par la LPGA. Quant à l’applicabilité des dispositions matérielles de la LPGA, cette question peut rester ouverte. En effet, les définitions légales contenues aux art. 3 à 13 LPGA constituent, en règle générale, une version formalisée dans la loi de la jurisprudence relative aux notions correspondantes avant l’entrée en vigueur de la LPGA et il n’en découle aucune modification du point de vue de leur contenu. Ainsi, la jurisprudence développée à leur propos peut être reprise et appliquée (ATF 130 V 345, consid. 3.1, 3.2 et 3.3).

Le recours a été déposé le 1er septembre 2003 contre une décision notifiée par lettre signature (LSI) du 30 juin 2003, reçue par l’assuré le 1er juillet 2003. Le délai usuel de recours de 30 jours prévu par l’art. 60 al. 1 LPGA a été suspendu pendant les féries judiciaires, soit, selon l’art. 38 al. 4 litt. b LPGA, du 15 juillet au 15 août inclusivement. Ce délai est en l’espèce respecté. Dans la mesure où il contient un exposé des faits et des motifs invoqués ainsi que des conclusions, le recours est déposé dans la forme prévue par la loi (art. 61 litt. b LPGA). Interjeté dans les forme et délai légaux, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 69 al. 1 LAI ).

Le juge des assurances sociales n’a pas à prendre en considération des modifications du droit ou de l’état de fait postérieures à la date déterminante de la décision entreprise (ATF 127 V 467 consid. 1, 121 V 366 consid. 1b; ATF 121 V 366). Les faits survenus postérieurement doivent cependant être pris en considération dans la mesure où ils sont étroitement liés à l’objet du litige et de nature à influencer l’appréciation au moment où la décision attaquée a été rendue (ATF 99 V 102).

Le litige porte sur la question de savoir si la décision de l’OCAI octroyant une demi-rente à l’assuré dès le 1er février 2000, au motif que son taux d’invalidité est de 57%, doit être confirmée ou si, comme le conclut l’assuré, un droit à une rente entière, dès le 1er avril 2003 doit être admis, la décision sur opposition du 30 juin 2003 de l’OCAI devant, cas échéant, être annulée.

L’invalidité de 40% et plus ouvre un droit à un quart de rente, celle de 50% et plus à une demi-rente. A partir d’un degré d’invalidité de 66 2/3%, l’assuré a droit à une rente entière (art. 28 al. 1 LAI dans sa teneur valable jusqu’au 31 décembre 2003). Selon les art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI, l’invalidité est la diminution de la capacité de gain, présumée permanente ou de longue durée, qui résulte d’une atteinte à la santé physique ou mentale provenant d’une infirmité congénitale, d’une maladie ou d’un accident. L’invalidité est une notion économique et non médicale. Il résulte de ce qui précède que l’invalidité au sens de cette disposition exige que deux éléments l’un économique, le second médical soient réunis par un lien de causalité. La diminution de la capacité de gain doit résulter d’une atteinte à la santé ; cette dernière devant pour sa part, qu’elle soit physique ou mentale, provenir d’une infirmité congénitale, d’une maladie ou d’un accident.

7. Il est admis que les troubles à la santé de l’intéressé sont provoqués par une maladie de longue durée. En une telle hypothèse, l’art. 29 al. 1 let. b LAI, dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2003, prévoit que le droit à la rente naît lorsqu’une incapacité au travail d’au moins 40% a persisté pendant une année au minimum sans interruption notable. Dans le cas d’espèce, l’assuré était en totale incapacité de travailler depuis le 15 février 1999. Sa demande de prestations a été déposée le 10 mars 2000, soit dans le délai imparti par l’art. 48 al. 2 LAI. Le délai d’attente d’un an, prévu par l’art. 29 al. 1 let b LAI, court depuis le 15 février 1999 dans la mesure où c’est à cette date que la capacité de travail de l’assuré s’est restreinte, ce dernier ne pouvant plus exercer ses activités de maçon carreleur et de nettoyeur. Dès lors, la date du 1er février 2000, retenue comme date de début du droit à une rente - totale ou partielle - est conforme au droit.

8. Il est généralement admis qu’un rapport médical a valeur probante lorsque les points litigieux ont fait l’objet d’une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu’il prend en considération l’ensemble de la situation et du dossier. La description du contexte médical doit être claire, le diagnostic précis et les conclusions de l’expert motivées doivent apporter des réponses exhaustives et sans équivoque aux questions posées (cf. VSI 2000 p. 154, ATF 125 V 352 consid. 3a, ATF 122 V 160 c. 1c et les références, notamment).

9. Dans son expertise du 8 octobre 2002, le Dr D__________ a, conformément aux exigences détaillées ci-avant, notamment déterminé la capacité résiduelle de travail de l’assuré à 33 1/3% dans ses anciennes activités de maçon carreleur et de nettoyeur. Il a ajouté que toute une palette d’activités pouvait être réalisée avec un plein rendement. Il a cité plusieurs exemples d’activités compatibles avec l’état de santé de l’assuré telles que surveillant de parking, travail à la caisse, travail de bureau, emploi sur une chaîne de montage avec maniement d’objets légers voire en fin de chaîne, empaquetage, travail microtechnique, micro-soudure, ainsi que le service et l’entretien de petites machines. Il a ensuite évalué le rendement de l’assuré à 70% au minimum vu les limitations fonctionnelles et la capacité de travail exigible dans une activité adaptée. Cette dernière évaluation rejoint celle faite par le CIP. Conformément aux conclusions du rapport d’expertise du Dr D__________ et du rapport d’évaluation dressé par le CIP suite au stage effectué par l’assuré, Le Tribunal de céans estime avec l’OCAI que, dès le 15 février 1999, l’assuré avait une capacité de travail résiduelle de 70% dans une activité adaptée, telle un travail léger et simple, en position assise ou debout, dans l’industrie manufacturière. Toutefois, l’assuré soutient encore que l’atteinte psychique, qui résulterait d’un état dépressif, n’a pas été prise en considération dans la décision dont est recours. Il doit être relevé qu’aucune pièce médicale figurant au dossier ne fait état du constat objectif d’un tel état dépressif ou d’une quelconque atteinte psychique. Ce dernier allégué figure pour la première fois dans les écritures sur recours. Il n’est joint aucune autre pièce probante, hormis le certificat médical émanant de la permanence de Chantepoulet, selon lequel, dès mars 2000, le recourant a subi des troubles du sommeil puis des troubles dépressifs qui ont nécessité un traitement psychotrope et ont influé négativement sur son activité. Cette seule attestation ne saurait mettre en cause les constatations du CIP et de l’expert, à qui un état dépressif d’une certaine gravité n’aurait certainement pas échappé.

10. D’après l’art. 16 LPGA, pour évaluer le taux d’invalidité, le revenu que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé à celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré.

La formalisation normative de l’art. 16 LPGA ne conduit pas davantage que celle des art. 3 à 13 LPGA à un changement de la jurisprudence relative à l’évaluation de l’invalidité des assurés exerçant une activité, laquelle doit être effectuée, comme par le passé, selon la méthode générale de la comparaison des revenus (cf. arrêt A. précité du 30 avril 2004, I 626/02, consid. 3.4 ; ATF 128 V 230 consid. 1; 104 V 136 s. consid. 2 a et b).

Conformément à la jurisprudence, pour déterminer le revenu d’invalide, on se réfère à la statistique des salaires bruts standardisés en se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 126 V 77 consid. 3b/bb ; 124 V 323 consid. 3b/bb). Le salaire statistique retenu est représentatif de ce que pourrait gagner l’assuré compte tenu d’un marché équilibré du travail (au sens de l’art. 16 LPGA), en mettant à profit sa capacité résiduelle de travail dans une activité adaptée.

Il est sans importance, pour l’évaluation du revenu d’invalide, de savoir si une personne handicapée exerce effectivement l’activité que l’on peut raisonnablement exiger d’elle. Elle ne peut donc, par exemple, pas prétendre une rente si elle n’utilise pas pleinement sa capacité de travail, obéissant à des considérations purement personnelles, alors qu’en exerçant une telle activité, elle pourrait réaliser un revenu excluant l’octroi d’une rente (RCC 1982 p. 471 ; RCC 1980 p. 581). En principe, il appartient à l’administration d’indiquer quelles sont les possibilités de travail concrètes qui entrent en considération, compte tenu des indications médicales et des aptitudes de l’assuré (ATF 107 V 20 consid. 2 b = RCC 1982 p. 34). Pour ce faire, il ne faut pas subordonner la concrétisation des possibilités de travail et des perspectives de gain à des exigences excessives. En l’espèce, il est établi par les pièces versées à la procédure que les activités de l’assuré lui permettaient d’obtenir, en 1999, un salaire annuel brut de Fr. 85'951.-, montant qui n’est pas contesté.

L’OCAI a ensuite considéré que les activités que le recourant était susceptible d’exercer, selon les conclusions du Dr D__________ notamment, pouvaient lui permettre d’obtenir un salaire annuel brut de Fr. 36'935.-

Ce dernier montant est estimé surfait par l’assuré aux motifs qu’il ne bénéficie pas d’une formation professionnelle, ne maîtrise pas la langue française ni parlée ni écrite et qu’il subit la conjoncture économique. Ces griefs ne sauraient être retenus dans la mesure où ils ont été pris en considération lors de l’évaluation des activités adaptées à l’état de santé et à la capacité de travail de l’assuré. Ils n’ont toutefois, à juste titre, pas été considérés propres à influencer les facteurs décisifs pour l’évaluation. En effet, un éventail d’activités simples et répétitives, telles celles énoncées par le Dr D__________ dans son expertise, ne nécessite ni formation professionnelle, ni maîtrise de la langue parlée ou écrite. Ces activités sont légères, adaptées aux compétences et au handicap de l’assuré. Quant à la conjoncture économique, elle n’a aucune pertinence vu qu’elle est identique pour chacun et qu’elle représente un facteur étranger à la fixation du degré d’invalidité.

Il ressort encore du dossier et plus particulièrement du détail des calculs effectués le 2 décembre 2002 par l’OCAI qui figure à la procédure que, conformément à la jurisprudence précitée, le montant retenu au titre de salaire d’invalide est fondé sur un travail simple, ne nécessitant pas de qualification professionnelle et ce en conformité avec le tableau de l’enquête suisse sur la structure des salaires 2000 (ESS) réf. TA1, soit une activité exercée dans l’industrie manufacturière (15-37), de niveau 4 (activités simples et répétitives).

L’OCAI a fixé le revenu d’invalide conformément aux conclusions du rapport de stage du CIP du mois de mars 2002 et a admis une diminution de rendement de 30%.

Certains empêchements propres à la personne de l’invalide exigent que l’on réduise le montant des salaires statistiques retenus (ATF 126 V 79 s. consid. 5b. aa). La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits, dépend de l’ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d’autorisation de séjour et taux d’occupation). Une déduction globale maximum de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d’une activité lucrative (ATF 126 V 79 s. consid. 5b/aa-cc ; VSI 2002 p. 70 s. consid. 4b).

L’assuré qui requiert des prestations de l’assurance-invalidité doit faire tout ce que l’on est en droit d’attendre de lui pour diminuer les effets de son invalidité en tirant parti de sa capacité résiduelle de travail, fût-ce au prix d’un effort considérable (ATFA 20 mai 1983, cause Y.C.). A cet égard, il est le lieu de rappeler que les arguments soulevés telle l’absence de formation professionnelle, les connaissances linguistiques limitées, la conjoncture économique défavorable sont dénués de pertinence pour fixer le degré d’invalidité.

Un abattement de 10% du salaire d’invalide, tel celui retenu par l’OCAI dans le cas particulier, apparaît justifié pour tenir compte des limitations propres à l’assuré notamment du fait que seule une activité simple et répétitive lui est désormais possible et du fait qu’il pouvait se prévaloir de plusieurs années de service lors de la survenance de son incapacité partielle de travail (comp. RAMA 1998 no U 320 p. 602 consid. 2b). Ainsi le revenu d’invalide doit être déterminé à 36'935.- fr.

Il résulte de la comparaison entre le revenu annuel professionnel exigible avec l’invalidité, soit 36'935 fr., et ceux obtenus sans invalidité, soit 85'951 fr., une perte de gain de 49'016 fr. qui correspond à un taux d’invalidité de 57%, insuffisant pour ouvrir le droit à une rente entière.

11. Vu ce qui précède, le Tribunal de céans admet que le recourant ne présente pas d’atteinte à la santé justifiant un taux égal ou supérieur à 66 2/3%, de sorte que l’OCAI a, à juste titre, nié son droit à une rente entière de l’assurance-invalidité.

12. Il y a lieu de relever que l’assuré peut bénéficier de l’aide au placement sur demande écrite. Le recours est dès lors mal fondé.

13. La procédure est gratuite (art. 61 a LPGA).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant conformément à la disposition transitoire de l’article 162 LOJ

A la forme :

Reçoit le recours formé le 1er septembre 2003 par Monsieur V__________ contre la décision de l’OFFICE CANTONAL DE L’ASSURANCE - INVALIDITE du 30 juin 2003.

Au fond :

Rejette le recours.

Confirme en conséquence la décision sur opposition de l’OFFICE CANTONAL DE L’ASSURANCE-INVALIDITE du 30 juin 2003.

Dit que la procédure est gratuite.

Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par pli recommandé adressé au Tribunal fédéral des assurances, Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE, en trois exemplaires. Le délai ne peut être prolongé. Le mémoire doit : a) indiquer exactement quelle décision le recourant désire obtenir en lieu et place de la décision attaquée; b) exposer pour quels motifs il estime pouvoir demander cette autre décision; c) porter sa signature ou celle de son représentant. Si le mémoire ne contient pas les trois éléments énumérés sous lettres a) b) et c) ci-dessus, le Tribunal fédéral des assurances ne pourra pas entrer en matière sur le recours qu’il devra déclarer irrecevable. Le mémoire de recours mentionnera encore les moyens de preuve, qui seront joints, ainsi que la décision attaquée et l’enveloppe dans laquelle elle a été expédiée au recourant (art. 132, 106 et 108 OJ).

 

Le greffier:

 

Walid BEN AMER

 

 

 

La Juge suppléante :

 

Nicole Dournow

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le