A/2921/2005

ATAS/268/2006 du 15.03.2006 ( CHOMAG ) , PARTIELMNT ADMIS

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En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2921/2005 ATAS/268/2005

ARRET

DU TRIBUNAL CANTONAL DES

ASSURANCES SOCIALES

Chambre 4

du 15 mars 2006

 

En la cause

Madame Y_________, comparant avec élection de domicile en l'Etude de Maître P_________ Pierre-Bernard

 

recourante

contre

 

CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE CHOMAGE, sise rue de Montbrillant 40, case postale 2293, 1211 GENEVE 2

 

intimée

 


EN FAIT

Selon le formulaire "Demande d'emploi - confirmation de la réinscription du 7 juin 2004" établi par l'Office régional de placement (ci-après ORP), Madame Y_________ s'est inscrite le 1er juin 2004 à l'Office cantonal de l'emploi (ci-après OCE).

Sur sa demande d'indemnité, signée le 7 juin 2004, l'intéressée a indiqué avoir travaillé du 1er juin 2002 au 31 décembre 2003 chez X_________ SA en qualité de vendeuse à plein temps, ainsi que chez Z_________ (Schweiz) AG. Elle a demandé à bénéficier d'indemnités de chômage dès le 31 décembre 2003.

X_________ SA a mentionné, sur l'attestation d'employeur établie le 22 mars 2004 que l'intéressée avait travaillé du 1er juin 2002 au 29 février 2004, période durant laquelle elle avait perçu son salaire, mais qu'elle avait été libérée de l'obligation de travailler à compter du 31 décembre 2003.

Du 29 mars 2004 au 31 janvier 2005, l'intéressée a travaillé pour Z_________ (Schweiz) AG en qualité de collaboratrice "call center" sur appel.

Par décision du 2 février 2005, la Caisse cantonale genevoise de chômage (ci-après la caisse) a informé l'assurée que sa demande d'indemnité du 1er juin 2004 était reportée au 1er février 2005, au motif qu'entre le 1er juin 2004 et le 31 janvier 2005, le revenu provenant de son activité auprès de Z_________ (Schweiz) AG était au moins égal à l'indemnité de chômage à laquelle elle aurait pu prétendre, de sorte qu'aucune indemnisation n'aurait pu avoir lieu.

Représentée par son époux, Me P_________, l'assurée a formé opposition en date du 21 février 2004, alléguant qu'après avoir été licenciée pour le 29 février 2004, elle s'était présentée le lendemain, soit le 1er mars 2004, à l'ORP de Rive où un formulaire avait été rempli. Elle n'en avait pas reçu copie, mais son interlocuteur lui avait indiqué qu'elle devait attendre d'être contactée par un conseiller en personnel. A la fin mars 2004, elle avait trouvé un nouvel emploi sur appel et restait dans l'attente d'être contactée par un conseiller et imputait ce retard à des lenteurs administratives. Elle a conclu à l'octroi d'indemnités de chômage pour les mois de mars 2004 et mai 2004.

Par décision du 19 juillet 2005, la caisse a rejeté l'opposition de l'assurée, motifs pris que l'ORP a rempli le 7 juin 2004 le formulaire intitulé "demande d'emploi - confirmation de la réinscription du 7 juin 2004" contresigné par l'intéressée. De surcroît, même si l'ORP devait modifier la date d'inscription au chômage à une date antérieure à celle du 1er juin 2004, faute d'avoir fourni les formulaires "indication de la personne assurée" (IPA) dans le délai de trois mois prévu par la loi, son droit à l'indemnité serait éteint.

Par acte du 18 août 2005, l'assurée, représentée par son conseil, a interjeté recours, alléguant qu'elle s'était bien présentée à la caisse de chômage de Rive en date du 1er mars 2004 et qu'un formulaire, dont copie ne lui a pas été délivrée, avait été rempli. Le fonctionnaire lui avait indiqué qu'elle devait attendre d'être contacté par un placeur. Le 11 mars 2004, Me P_________ a demandé à l'OCP le renouvellement de l'autorisation de séjour de son épouse et lui a retourné le formulaire rempli par le nouvel employeur le 15 avril 2004. Elle avait fourni à la caisse de chômage tous les documents qui lui étaient demandés et son époux avait écrit à plusieurs reprises à la caisse en réclamant le paiement des indemnités de chômage dues. L'assurée fait grief à la caisse de n'avoir effectué aucune enquête interne pour vérifier la date de son inscription. Elle conclut au paiement d'indemnités de chômage pour la période de mars 2004, sous imputation de 600 fr. 10 correspondant au salaire mensuel brut réalisé chez Z_________, et pour mai 2004, sous imputation d'un salaire de 1'400 fr.

Dans sa réponse du 7 octobre 2005, la caisse relève que suite aux démarches du conseil de la recourante, le service des agences économiques (SAE) a reconnu par courrier du 23 août 2005, qu'au vu des éléments en sa possession, la recourante s'était présentée le 11 mars 2004 au centre d'accueil de l'ORP des Glacis-de-Rive et la date d'inscription a été modifiée en conséquence. La caisse se déclare prête à accepter de verser les indemnités de chômage à l'assurée dès le 11 mars 2004, sous imputation des gains intermédiaires. S'agissant du litige qui subsiste quant à la date effective de l'inscription, la caisse s'en remet à justice.

Invitée à se déterminer, la recourante persiste à soutenir qu'elle s'est inscrite le 1er mars 2004, relevant qu'elle n'a jamais reçu le courrier du 15 mars 2004 la convoquant pour le 31 mars 2004.

Le Tribunal a entendu les parties en audience de comparution personnelle le 11 janvier 2006. La recourante a déclaré qu'elle s'était présentée au chômage très rapidement après la fin de son contrat de travail au 29 février 2004, soit le 1er ou le 2 mars 2004. Elle admet avoir signé le formulaire de pré-inscription, mais la date qui y figure n'a pas été inscrite de sa main ; elle rappelle qu'il a fallu qu'elle intente une action en justice pour que l'ORP admette qu'elle s'était bien inscrite en mars 2004 et non en juin. La caisse relève que la date de pré-inscription n'est pas de sa compétence, mais de celle de l'ORP, qui s'est déterminé.

Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

 

 

 

 

EN DROIT

La loi genevoise sur l’organisation judiciaire (LOJ) a été modifiée et a institué, dès le 1er août 2003, un Tribunal cantonal des assurances sociales, composé de 5 juges, dont un président et un vice-président, 5 suppléants et 16 juges assesseurs (art. 1 let. r et 56 T LOJ).

Suite à l’annulation de l’élection des 16 juges assesseurs, par le Tribunal fédéral le 27 janvier 2004 (ATF 130 I 106), le Grand Conseil genevois a adopté, le 13 février, une disposition transitoire urgente permettant au Tribunal cantonal des assurances sociales de siéger sans assesseurs à trois juges titulaires, ce, dans l’attente de l’élection de nouveaux juges assesseurs.

Conformément à l'art. 56V al. 1 let. a ch. 8 LOJ, le Tribunal cantonal des assurances sociales connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 8 octobre 2000 (LPGA) qui sont relatives à la loi fédérale sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité du 25 juin 1982 (LACI).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

Interjeté dans les forme et délai prescrits par la loi, le recours est à cet égard recevable (art. 56 et 60 LPGA).

Le Tribunal de céans relève préalablement que l'intimée reconnaît que la recourante s'est bien inscrite au chômage en mars 2004, étant précisé que la demande d'indemnités ne portent que sur les mois de mars et mai 2004. Seule demeure encore litigieuse la date effective à laquelle elle s'est inscrite, à savoir le 1er, voire le 2 mars 2004, ou le 11 mars 2004 comme le soutient l'intimée.

Selon l'art. 17 al. 2 LACI, en vue de son placement, l'assuré est tenu de se présenter à sa commune de domicile ou à l'autorité compétente aussitôt que possible, mais au plus tard le premier jour pour lequel il prétend à l'indemnité de chômage; il doit ensuite se conformer aux prescriptions de contrôle édictées par le Conseil fédéral.

Conformément à l'art. 19 al. 3 OACI, la commune ou l'office compétent donne confirmation à l'assuré de la date à laquelle il s'est présenté et de la caisse qu'il a choisie. Le canton est responsable de la saisie des données de contrôle qui doivent être saisies dans les sept jours à compter de la date à laquelle il s'est présenté à l'office compétent. L'autorité cantonale peut prolonger ce délai jusqu'à quinze jours au maximum, notamment en cas de licenciements collectifs. Lors de son inscription, l'assuré doit présenter divers documents et l'office compétent introduit les données d'inscription dans le système informatique en matière de placement et de marché du travail (PLASTA) et remet à l'assuré la copie destinée à la caisse (cf. art. 20 al. 1 à 3 OACI).

En l'espèce, il y a lieu de relever en premier lieu que les données relatives à la recourante n'ont pas été saisies dans le système informatique PLASTA ainsi que l'explique la directrice de l'OCE dans un courrier adressé le 4 octobre 2005 à l'époux de la recourante, dès lors qu'elle ne s'était pas présentée à la convocation du 31 mars 2004 (cf. pièce no. 46 recourante). On ne peut en conséquence tirer aucune information du fichier informatique PLASTA quant à la date d'inscription au chômage de la recourante.

La recourante conteste avoir reçu la convocation du 15 mars 2004 pour le 31 du même mois, relève qu'il aurait été dans son intérêt d'y donner suite, et stigmatise la façon dont son dossier a été traité par l'administration.

Dans la mesure où celle-ci n'est pas à même de fournir la preuve de l'envoi de la convocation, le Tribunal de céans considère qu'il convient de se fonder sur les déclarations de la destinataire et d'admettre qu'elle n'a pas reçu la convocation du 15 mars 2004.

Selon la jurisprudence et la doctrine, l’autorité administrative ou le juge ne doivent considérer un fait comme prouvé que lorsqu’ils sont convaincus de sa réalité (Kummer, Grundriss des Zivilprozessrechts, 4ème édition Berne 1984, p. 136 ; Gygi, Bundesverwaltungsrechtspflege, 2ème édition, p. 278 ch. 5). Dans le domaine des assurances sociales, le juge fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5 let. b 125 V 195 consid. ch. 2 et les références). Aussi, n’existe-t-il pas en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 322 consid. 5 let. a). Enfin, le juge apprécie librement les preuves, sans être lié par des règles formelles.

Le Tribunal constate à cet égard que le formulaire de préinscription à l'OCE signé par la recourante comporte une date qui peut se lire de deux façons : le chiffre du jour du mois peut être soit le chiffre "11", suivi du mois III en chiffres romains, soit le chiffre II en chiffres romains (cf. pièce no. 6 caisse). Il convient de relever cependant que le timbre apposé sur ledit formulaire mentionne clairement la date du 11 mars 2004 et que la convocation du 15 mars 2004 fait également référence à l'inscription du 11 mars 2004 (cf. pièce no. 47 recourante).

Au vu de ce qui précède, le Tribunal considère qu'il n'est pas établi à satisfaction de droit que la recourante a déposé sa demande d'indemnités le 1er ou le 2 mars 2004; en revanche, la date du 11 mars 2004 est indiscutable, de sorte qu'elle a droit à des indemnités de chômage dès cette date, sous déduction des gains intermédiaires réalisés en mars et mai 2004.

La recourante, qui obtient partiellement gain de cause a droit à une indemnité à titre de dépens.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES

Statuant

(conformément à la disposition transitoire de l’art. 162 LOJ)

A la forme :

Déclare le recours recevable.

Au fond :

L'admet partiellement.

Condamne l'intimée à verser des indemnités de chômage à la recourante dès le 11 mars 2004, dans le sens des considérants.

Condamne l'intimée à payer à la recourante la somme de Fr. 800.- à titre de dépens.

Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par plis recommandé adressé au Tribunal fédéral des assurances, Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE, en trois exemplaires. Le délai ne peut être prolongé. Le mémoire doit : a) indiquer exactement quelle décision le recourant désire obtenir en lieu et place de la décision attaquée; b) exposer pour quels motifs il estime pouvoir demander cette autre décision; c) porter sa signature ou celle de son représentant. Si le mémoire ne contient pas les trois éléments énumérés sous lettres a) b) et c) ci-dessus, le Tribunal fédéral des assurances ne pourra pas entrer en matière sur le recours qu’il devra déclarer irrecevable. Le mémoire de recours mentionnera encore les moyens de preuve, qui seront joints, ainsi que la décision attaquée et l’enveloppe dans laquelle elle a été expédiée au recourant (art. 132, 106 et 108 OJ).

 

Le greffier :

 

 

 

Walid BEN AMER

 

La Présidente :

 

 

Juliana BALDE

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties et au Secrétariat d’Etat à l’économie par le greffe