A/3078/2005

ATAS/137/2006 (2) du 06.02.2006 ( LAMAL ) , REJETE

Descripteurs : ; AM ; DROIT CANTONAL ; ALLOCATION SOCIALE ; PRESTATION D'ASSISTANCE ; RESTITUTION DE LA PRESTATION
Normes : LALAMal33
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En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3078/2005 ATAS/137/2006

ARRET

DU TRIBUNAL CANTONAL DES

ASSURANCES SOCIALES

Chambre 6

du 6 février 2006

 

En la cause

Madame P__________

et

Monsieur D__________

recourants

 

contre

SERVICE DE L'ASSURANCE-MALADIE, route de Frontenex 62, 1207 GENEVE

intimé

 


EN FAIT

Mme P__________ (ci-après : l'assurée) est au bénéfice d'une rente complète d'invalidité depuis 1994. Elle a bénéficié de prestations complémentaires de la part de l'Office cantonal des personnes âgées (ci-après : l'OCPA) dont, pour son fils, M. D__________, né en 1984 (ci-après : l'assuré), des subsides 100 % d'assurance-maladie depuis le 1er avril 1998.

Par décision du 1er février 2005, l'Office cantonal de l'assurance-invalidité (ci-après l'OCAI) a constaté que l'assurée avait droit dès le 1er janvier 1999 à un paiement rétroactif de l'AI de fr. 40'493.- qu'il a entièrement compensé avec une créance de l'OCPA.

Dans une décision complémentaire du 1er avril 2005, l'OCAI a constaté que l'assurée avait encore droit dès le 1er janvier 1999, au titre de rente entière enfant, à un paiement rétroactif de fr. 24'464.- qu'il a également compensé avec une créance de l'OCPA.

Par quatorze décisions du 12 avril 2005, l'OCPA a repris le calcul des prestations de l'assurée dès le 1er janvier 1999 en tenant compte des nouvelles décisions de l'OCAI et requis la restitution d'un montant de fr. 30'180.-, entièrement compensé par le rétroactif de l'AI. Un solde de fr. 26'709.- était dû à l'assurée.

Le même jour, l'OCPA a demandé au Service de l'Assurance-Maladie (ci-après : SAM) de supprimer le droit au subside de l'assuré dès le 1er janvier 1999.

Le 25 avril 2005, l'OCPA a informé l'assurée que selon une décision du 17 novembre 2004 le solde de sa créance s'élevait encore à fr. 5'242.-.

Par deux décisions du 16 juin 2005, le SAM a réclamé la restitution des subsides pour les primes de l'assurance-maladie versés à l'assuré pour la période du 1er janvier 1999 au 30 septembre 2004, soit une décision de restitution notifiée à l'assurée, pour la période du 1er janvier 1999 au 31 mai 2002 durant laquelle son fils était mineur et portant sur un montant de fr. 3'693,30 et une décision de restitution notifiée à l'assuré pour la période du 1er juin 2002 au 30 septembre 2004 et portant sur un montant de fr. 7'778,40.

Le SAM relevait que ces décisions faisaient suite aux décisions de restitution rendues le 12 avril 2005 par l'OCPA attestant que l'assuré n'avait plus la qualité de bénéficiaire des prestations de l'OCPA du 1er janvier 1999 au 30 septembre 2004.

Le 11 juillet 2005, les assurés ont formé opposition aux décisions du SAM du 16 juin 2005 en relevant qu'ils avaient reçu en toute bonne foi le subside du SAM et se trouvaient dans l'impossibilité de rembourser les montants demandés.

Par deux décisions du 25 juillet 2005, le SAM a rejeté les oppositions en se fondant sur les décisions de l'OCPA du 12 avril 2005.

Le 22 août 2005, les assurés ont recouru à l'encontre de ces deux dernières décisions auprès du Tribunal cantonal des assurances sociales en demandant à ce qu'il soit tenu compte de leur situation difficile et de leur bonne foi.

Le 3 octobre 2005, le SAM a conclu au rejet des recours en constatant que l'assuré avait perdu sa qualité de bénéficiaire de prestations complémentaires dès le 1er janvier 1999. Par ailleurs, la demande de remise serait examinée après l'entrée en force de la décision de restitution, en application par analogique de l'art. 4 al. 4 de l'ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales du 11 septembre 2002 (OPGA).

Le 7 novembre 2005, le Tribunal de céans a entendu les parties en audience de comparution personnelle.

L'assurée a déclaré : J'ai obtenu une rente AI en 1994. Mon ex-mari a également obtenu une rente AI en 1999. Il n'a à cette époque toutefois pas signalé à l'AI qu'il avait un fils et n'a de ce fait pas reçu de rente complémentaire pour celui-ci. J'ai donc entamé une procédure contre l'AI en 1999 pour obtenir une rente complémentaire pour mon fils. J'ai reçu de l'AI un rétroactif de fr. 26'000.- environ. J'ai utilisé cet argent pour payer mes dettes. Je n'avais pas conscience que je devais encore rembourser les prestations du SAM.

L'assuré a déclaré : Je reçois une rente complémentaire AI de fr. 1'213.- par mois. Je suis étudiant et je vis chez ma mère. Nous estimons avoir droit à toutes les prestations AI y compris le rétroactif versé, ainsi que toutes les prestations OCPA et SAM qui nous ont été versées. Je paye actuellement une prime d'assurance-maladie de base de fr. 300.-.

Le SAM a précisé que le subside 100 % était dû mais qu'il serait examiné si le subside partiel pouvait être donné pour la période durant laquelle l'assuré était mineur.

Sur demande du Tribunal de céans, l'OCPA a versé à la procédure une copie des quatorze décisions rendues le 12 avril 2005 adressées à l'assurée, et précisé qu'elles étaient entrées en force, ainsi qu'une copie d'une décision du 17 novembre 2005 relevant que l'assurée avait une dette envers lui de fr. 5'242.-. Il a relevé que les différents changements intervenus dans le montant des rentes de l'assurance-invalidité des assurés avaient engendré un recalcul des prestations qui avait fait l'objet de leurs décisions du 12 avril 2005. Ce calcul avait généré une demande de remboursement de fr 30'180.-.

Le rétroactif des rentes, établi par la caisse de compensation, qui ascende à Fr. 40'493.-, a servi à rembourser la part de prestations versées en trop par l'OCPA. Il a saisi l'opportunité de ce recalcul pour intégrer dans les comptes le solde d'une ancienne dette dont Mme P__________ était redevable à son égard (Fr. 5'242.-, cf. copie de notre décision du 17.11.2004) et de rectifier une erreur survenue dans les flux financiers entre lui-même et la caisse de compensation (rentes du mois de janvier 2005, soit Fr. 2'098.- + Fr. 728.-, versées à l'OCPA par erreur et restituées à Mme P__________).

Enfin, l'assuré ne remplissait plus les conditions de l'art. 22 al. 6 LALAMal du 1er janvier 1999 au 30 septembre 2004, ainsi que le précisait la décision de demande en restitution du 16 juin 2005 notifiée par le SAM.

Le 28 novembre 2006, les recourants ont informé le Tribunal de céans qu'ils n'avaient jamais reçu "le courrier du 12 avril".

Sur demande du Tribunal de céans, l'OCPA a précisé que les décisions du 12 avril 2005 avaient été notifiées à l'intéressée en courrier B. Par ailleurs, il relevait qu'une décision sur opposition du 14 février 2005 notifiée à l'assurée en LSI lui avait été retournée avec la mention "non réclamé" à l'échéance du délai de garde, ce qui laissait supposer que le problème de non réception du courrier allégué par les recourants n'était pas unique et ne pouvait être imputé à l'OCPA.

Le 12 janvier 2006, le Tribunal de céans a demandé aux recourants s'ils avaient fait opposition aux décisions de l'OCPA depuis le 28 novembre 2005, date à laquelle ils avaient informé le Tribunal qu'ils avaient pris connaissance desdites décisions.

Le 19 janvier 2006, les recourants ont précisé qu'ils n'avaient pas fait opposition aux décisions du 12 avril 2005 dès lors que ces décisions ne leur avaient pas été notifiées par l'OCPA.

Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

La loi genevoise sur l’organisation judiciaire (LOJ) a été modifiée et a institué, dès le 1er août 2003, un Tribunal cantonal des assurances sociales, composé de 5 juges, dont un président et un vice-président, 5 suppléants et 16 juges assesseurs (art. 1 let. r et 56 T LOJ).

Suite à l’annulation de l’élection des 16 juges assesseurs, par le Tribunal fédéral le 27 janvier 2004 (ATF 130 I 106), le Grand Conseil genevois a adopté, le 13 février, une disposition transitoire urgente permettant au Tribunal cantonal des assurances sociales de siéger sans assesseurs à trois juges titulaires, ce, dans l’attente de l’élection de nouveaux juges assesseurs.

Conformément à l'art. 36 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 29 mai 1997 (LALAMal), le Tribunal cantonal des assurances sociales connaît des recours contre les décisions sur opposition prises par les organes d'application de la LAMal.

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

Interjetés en temps utile devant la juridiction compétente, les recours sont recevables. En application de l'art. 70 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA), les recours seront joints dès lors qu'ils se rapportent à une situation identique.

Les décisions en restitution litigieuses portent sur la période du 1er janvier 1999 au 30 septembre 2004. Il sera en conséquence fait application de la législation pertinente dans sa teneur en vigueur à ce moment-là.

La LALAMal prévoit qu'en vertu des art. 65 et 66 LAMal, l'Etat de Genève accorde des subsides destinés à la couverture totale ou partielle des primes de l'assurance-maladie des assurés de condition économique modeste (art. 19 al. 1).

Les subsides sont notamment destinés aux assurés bénéficiaires des prestations complémentaires à l'AVS/AI ou des prestations d'assistance accordées par l'OCPA (art. 20 let. b dont la teneur est identique à l'art. 20 al. 1 let. b entré en vigueur le 1er juillet 2004).

Le droit aux subsides s'étend au conjoint et aux enfants à charge de l'ayant droit (art. 21 al. 3 dont la teneur est identique à l'art. 21 al. 2 entré en vigueur le 1er juillet 2004).

L'OCPA et l'Hospice général communiquent régulièrement au service de l'assurance-maladie le nom des bénéficiaires de leurs prestations, la date d'ouverture du droit aux subsides, et le cas échéant, la date de fin du droit aux subsides (art. 23A al. 1, teneur en vigueur dès le 1er juillet 2004).

Selon l'art. 33 LALAMal, les subsides indûment touchés doivent être restitués. Toutefois, ceux-ci ne peuvent pas être exigés lorsque l'intéressé est de bonne foi et serait mis, du fait de cette restitution, dans une situation difficile. Le droit de demander la restitution se prescrit par une année à compter du jour où le service de l'assurance-maladie a eu connaissance de l'irrégularité, mais au plus tard 5 ans après le versement.

6. a) En l'espèce, conformément à la procédure précitée (art. 23A al. 1 LALAMal), l'OCPA a communiqué au service de l'assurance-maladie la fin du droit au subside du recourant fixée rétroactivement au 1er janvier 1999, en se fondant sur les décisions du 12 avril 2005, entrées en force à l'échéance du délai d'opposition.

Il convient de se demander préalablement si, compte tenu de l'allégation des recourants selon laquelle ils n'auraient jamais reçu les décisions du 12 avril 2005 précitées, celles-ci sont néanmoins entrées en force et en conséquence si la fin du droit au subside est elle-même exécutoire.

A cet égard, le Tribunal fédéral des assurances a jugé que la preuve de la notification d'une décision administrative et de la date à laquelle cette notification a eu lieu incombe, en principe, à l'administration. Celle-ci supporte les conséquences de l'absence de preuve, en ce sens que si la notification, ou sa date, sont contestées, et qu'il existe effectivement un doute à ce sujet, il y a lieu de se fonder sur les déclarations du destinataire de l'envoi (ATF 124 V 402 consid 2a, 103 V 66 consid. 2a;RAMA 1997 n° U 288 p. 444 consid. 2b et les références). Selon la jurisprudence, l'absence de notification d'une décision administrative ne doit pas nuire à la personne qui a le droit de recourir; le délai de recours ne commence à courir qu'au moment où elle a connaissance de cette décision; elle ne peut cependant retarder ce moment selon son bon plaisir : en vertu du principe de la bonne foi, elle est tenue de se renseigner sur l'existence et le contenu de la décision dès qu'elle peut en soupçonner l'existence, à défaut de quoi elle risque de se voir opposer l'irrecevabilité de son recours pour cause de tardiveté (SJ 2000 I p. 121 consid. 4 et les références; ATFA du 4 mai 2000, cause I 663/99).

b) En l'espèce, les décisions de l'OCPA du 12 avril 2005 ayant été notifiées par pli simple, c'est à l'administration de supporter le risque inhérent à une telle modalité d'envoi. La preuve de la notification n'a ainsi pas pu être rapportée par l'OCPA.

C'est suite à la communication par le Tribunal de céans le 21 novembre 2005 des décisions précitées que les recourants en ont en tous les cas pris connaissance (cf. leur courrier du 28 novembre 2005).

Conformément à la jurisprudence précitée, le délai pour faire opposition a commencé à courir dès cette communication (en tous les cas établie le 28 novembre 2005) et est venu à échéance au plus tard le 12 janvier 2006, compte tenu d'une suspension de délais du 18 décembre au 1er janvier (art. 89C LPA).

Au vu de ce qui précède et considérant que les recourants n'ont pas saisi l'OCPA d'une opposition dans le délai précité - comme ils l'ont confirmé au Tribunal de céans dans leur courrier du 19 janvier 2006 - il convient d'admettre que les décisions du 12 avril 2005 sont entrées en force et que, partant, le recourant n'avait plus droit à des prestations complémentaires du 1er janvier 1999 au 30 septembre 2004 et, donc, au subside de l'assurance-maladie pendant la même période.

Le règlement d'exécution de la LALAMal du 15 décembre 1997 ne prévoit pas de disposition d'exécution de l'art. 33 LALAMal.

En renonçant à statuer sur la demande de remise formulée par les recourants et en précisant que celle-ci serait examinée après l'entrée en force des décision litigieuses, le SAM a fait une application par analogie de la procédure prévue tant en matière de prestations fédérales et cantonales complémentaires (art. 12 et 12A du règlement d'application de la loi sur les prestations fédérales complémentaires à l'AVS/AI du 23 décembre 1998 - art 14 et 15 du règlement d'application de la loi sur les prestations cantonales complémentaires à l'AVS/AI du 25 juin 1999) que par la LPGA (art 3 et 4 de l'Ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales).

Il est à constater que cette manière de procéder ne viole pas le texte de la loi (art. 33 LALAMal) et qu'elle a le mérite de créer une procédure uniforme en matière de restitution de prestations. Il convient, dès lors, de la confirmer.

En conséquence, les recours seront rejetés et il incombera au SAM de se saisir de la demande de remise des recourants, déjà formulée, dès l'entrée en force des décisions litigieuses.

 


 

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

(conformément à la disposition transitoire de l’art. 162 LOJ)

Préalablement :

 

Joint la cause A/3077/2005 à la cause A/3078/2005.

A la forme :

Déclare les recours recevables.

Au fond :

Les rejette.

 

La greffière

 

Nancy BISIN

 

La Présidente :

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties par le greffe le