A/3734/2005

ATAS/142/2006 (2) du 14.02.2006 ( LAA ) , REJETE

Recours TF déposé le 21.03.2006, rendu le 21.12.2006, REJETE, U 166/06
Descripteurs : ; AA ; TROUBLE SOMATOFORME DOULOUREUX ; CAUSALITÉ NATURELLE ; CAUSALITÉ ; FORCE PROBANTE ; EXPERTISE ; EXPERTISE ORDONNÉE PAR L'ADMINISTRATION ; EXPERTISE MÉDICALE ; DEGRÉ DE L'INVALIDITÉ ; RENTE ORDINAIRE ; RENTE(EN GÉNÉRAL)
Normes : LAA18
Pdf
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3734/2005 ATAS/142/2006

ARRET

DU TRIBUNAL CANTONAL DES

ASSURANCES SOCIALES

Chambre 2

du 14 février 2006

 

En la cause

Madame N___________, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître POGGIA Mauro

recourante

 

contre

SWICA ASSURANCES SA, Römerstrasse 37, 8401 WINTERTHUR

intimée

 


EN FAIT

Madame N___________ (ci-après la recourante), née en 1944, avait repris une activité professionnelle en qualité d'aide à domicile au début de l'année 2000, lorsqu'elle a été victime d'un accident de la circulation en date du 6 avril 2000, sous la forme d'une collision par la droite.

Elle était alors assurée tant pour les accidents que pour la maladie auprès deSWICA ASSURANCES SA (ci-après la caisse).

Selon le rapport de police, une collision violente a eu lieu entre l'avant des deux véhicules et les deux conductrices ont été légèrement blessées. Sur le moment, la recourante s'est plainte de douleurs aux côtes.

Selon le rapport médical initial de la Dresse A___________, spécialiste en maladies rhumatismales, établi le 4 août 2000, la recourante souffrait de "céphalées constantes, de vertiges, de (illisible) sans déficit neurologique". Les diagnostics étaient cervico-brachialgies droites, hématomes multiples, céphalées post-commotionnelles. La patiente lui a indiqué avoir frappé la tête et le bras droit sur le volant, avec probable perte de connaissance.

Dans le rapport médical intermédiaire du 29 août 2000, le Dr B___________, endocrinologue, a diagnostiqué une déchirure du tendon du muscle sus épineux.

L'incapacité de travail a été totale dès le 6 avril 2000, puis de 50 % dès le 1er juin 2000 jusqu'au 30 septembre 2000, puis à nouveau totale dès cette date.

Une appendicite, sans lien de causalité avec l'accident, a été diagnostiquée en mai 2000 et a donné lieu à une opération le 17 mai 2000. Par ailleurs, la recourante a été opérée en raison de la rupture du tendon de l'épaule droite le 20 octobre 2000.

Selon une attestation de la doctoresse A___________, du 25 janvier 2001, la recourante souffre depuis 1998 de douleurs au niveau de l'articulation sterno-claviculaire droite irradiant vers l'épaule, et depuis le mois de mars 2000 de cervico-brachialgies droites avec douleurs au niveau cervical. La rupture du muscle sus-épineux est d'origine traumatique. Le Dr C___________, spécialiste en maladies rhumatismales, a confirmé le 13 février 2001 l'état antérieur d'une part, et la déchirure consécutive à l'accident d'autre part.

Une imagerie par résonance magnétique (ci-après IRM) a mis en évidence, le 15 novembre 2001, un genou droit dégénératif sévère.

La caisse a diligenté une expertise auprès du Dr D___________. Selon son rapport d'expertise du 7 mars 2002, au niveau cervical on peut estimer que le statu quo sine voire ante est retrouvé, l'accident n'ayant entraîné qu'une aggravation passagère de l'état antérieur des cervicales. En ce qui concerne l'épaule droite, il existait un état antérieur mais l'accident a entraîné une aggravation déterminante avec rupture du sus-épineux. Sur le plan médical il n'y a plus de traitement susceptible d'améliorer significativement l'état de la patiente en dehors d'un traitement médicamenteux et de physiothérapie. Sur le plan assécurologique, l'incapacité de travail est actuellement totale mais elle n'est que partiellement en rapport avec les suites de l'accident, l'état antérieur ainsi que les troubles psychiques décrits dans les différents rapports médicaux, notamment un état anxio-dépressif et des troubles de la personnalité, jouent également un rôle important dans l'évolution et l'incapacité de travail actuelle. La répartition lui semble être de l'ordre de 50/50. L'activité d'aide à domicile, qui est un travail pénible, est difficilement compatible avec un status après opération pour suture de la coiffe des rotateurs. Vu les troubles psychiques et les troubles de la personnalité, la reprise d'une quelconque activité professionnelle ou d'un recyclage n'entre pas en ligne de compte. Le taux d'atteinte à l'intégrité est fixé à 15 %.

Par décision du 9 avril 2002, la caisse a alloué une indemnité pour atteinte à l'intégrité de 15 % et a réduit les indemnités journalières depuis le 1er mai 2002 à 50 %, vu les conclusions de l'expert. La recourante a accepté ces décisions par la voix de son conseil, en date du 13 mai 2002.

Par pli du 29 avril 2002 adressé à l'OFFICE CANTONAL DE L'ASSURANCE INVALIDITÉ (ci-après OCAI), le Dr B___________ rappelle tous les diagnostics posés depuis 1992 et les différentes opérations subies par sa patiente. Il expose que même si l'expert estime que l'accident est responsable d'une incapacité de travail de 50 % seulement, il est inconcevable que sa patiente puisse reprendre une activité professionnelle, et une invalidité de 100 % doit être envisagée, en raison « aussi de la dépression profonde induite par les multiples interventions médicales subies, l'insécurité qui en a résulté, et les douleurs permanentes qu'elle ressent depuis l'intervention à l'épaule droite ». Sa patiente est à la limite d'une hospitalisation en milieu psychiatrique pour "décompensation anxio-dépressive secondaire à ses douleurs chroniques et multiples ".

Par décision du 1er août 2002, l'OCAI a mis la recourante au bénéfice d'une rente entière d'invalidité depuis le 1er avril 2001.

Durant les mois de septembre et octobre 2002, un échange de correspondance a eu lieu entre les parties. À la demande de la recourante, la caisse a accepté de diligenter une expertise psychiatrique, tout en rappelant que la question de la réduction de l'indemnité journalière avait été réglée par une décision entrée en force de chose jugée.

Une expertise pluridisciplinaire a été effectuée par la CLINIQUE ROMANDE DE RÉADAPTATION, qui a rendu son rapport le 13 mai 2003. Dans l'appréciation du cas, l'expert indique partager les conclusions et les prises de position du Dr D___________. Il s'agit d'une « situation expertale habituelle, à savoir celle de lésions préexistantes traumatisées. On considère que dans ces situations, l'accident entraîne une aggravation ». Il confirme ainsi qu'au niveau de la colonne cervicale il existait des lésions antérieures qui n'ont pas été aggravées par l'accident. En revanche, au niveau de l'épaule droite il existait un état antérieur, mais la recourante a subi lors de l'accident « un traumatisme adéquat qui a été susceptible d'entraîner une rupture partielle du muscle sus-épineux ». Il s'agit d'une aggravation durable, et l'expert souscrit à l'appréciation du Dr D___________ selon laquelle on peut attribuer l'état actuel de la recourante pour 50 % aux séquelles de l'accident et pour 50 % à l'état antérieur. Les autres pathologies dont souffre la recourante, à l'épaule gauche, la colonne lombaire, la hanche droite et le genou droit sont toutes liées à des pathologies antérieures ou indépendantes de l'accident. Il s'agit soit de lésions dégénératives préexistantes (genou droit) soit de douleurs articulaires dans le cadre d'un syndrome douloureux somatoforme persistant.

En réponse aux questions, l'expert indique que les troubles actuels au niveau de l'épaule droite sont dus partiellement à l'accident, parce que la recourante été traitée depuis des années pour des troubles à l'épaule droite, en relation avec une tendinopathie chronique. La répartition 50 %-50 % lui semble correspondre à la situation assécurologique de la recourante. Les autres pathologies ne sont pas dues à l'accident (cf. p. 11 de l'expertise). En raison des troubles au membre supérieur droit, la recourante n'est plus en mesure d'exécuter des travaux lourds ou répétitifs. La capacité de travail est nulle dans les activités d'aide à domicile. Seul le 50 % de cette incapacité est à mettre en relation avec l'accident.

L'évaluation psychiatrique de la recourante retient comme diagnostic un trouble de l'adaptation avec perturbation à la fois des émotions et des conduites, et un syndrome douloureux somatoforme persistant probable. Le problème de base a été une « maladie de la relation soignant-soignée. L'assurée présente indiscutablement des traits de personnalité persécutoire ». Ce jour la recourante est en rémission de ce trouble de l'adaptation, et il n'y a plus d'élément dépressif. Ces troubles n'ont probablement pas dépassé l'été 2002, et leur origine est vraisemblablement mixte, en partie liée à l'accident en cause. L'incapacité de travail sur le plan psychiatrique ne peut relever aujourd'hui que du seul trouble somatoforme douloureux. S'il était retenu, il est tout au plus d'un degré de gravité léger.

Par décision du 26 août 2003, la caisse a retenu un taux d'invalidité de 50 % et a octroyé par conséquent une rente à la recourante sur cette base.

Suite à l'opposition du 26 septembre 2003, la caisse a confirmé sa décision en date du 5 août 2005. Dans l'intervalle, par pli du 9 février 2005, la recourante avait fait parvenir à la caisse une copie de l'expertise du Dr D___________, selon elle « truffée d'inexactitudes et de contre-vérités », avec ses propres remarques en vis-à-vis.

Par acte du 19 octobre 2005, la recourante conclut à l'annulation de la décision sur opposition et de la décision antérieure, et à ce que la caisse soit condamnée à compléter les indemnités journalières versées depuis le 1er mai 2002, ainsi que la rente d'invalidité versée depuis le 1er septembre 2003, sur la base d'une incapacité de gain de 100 % consécutive à l'accident, avec suite de dépens.

Elle produit un rapport du Dr E___________, du 6 mai 2004, qui recommande une nouvelle expertise, ainsi qu'un rapport du Dr B___________, du 18 avril 2005 qui atteste de ce que la recourante était en excellente santé avant son accident d'avril 2000 et qu'elle ne présentait aucune limitation dans son activité professionnelle. Une rente d'invalidité à 100 % devrait lui être octroyée. Il est inconcevable que sa patiente puisse reprendre une activité professionnelle. Elle produit également une IRM du 22 août 2005 qui met en évidence des séquelles de fracture/tassement de la partie en antéro-supérieure de la vertèbre L1.

Elle rappelle qu'aux termes de l'article 36 al. 2 LAA, la rente d'invalidité peut être réduite de manière équitable lorsque l'atteinte à la santé n'est que partiellement imputable à l'accident, mais qu'il n'y a pas lieu de tenir compte des états antérieurs qui ne portaient pas atteinte à la capacité de gain de l'assurée. Or, les différentes douleurs ressenties par la recourante avant l'accident n'ont jamais diminué sa capacité de gain.

Dans sa réponse du 1er décembre 2005, la caisse conclut au rejet du recours. Elle relève que le dossier médical est très complet. En particulier, les deux expertises ont pleine valeur probante. L'état antérieur ne fait aucun doute. Certains troubles ne sont aucunement en lien de causalité avec l'accident, et sont estimés responsables à 50 % de l'incapacité de travail. La caisse n'a donc pas à en répondre en tant qu'assureur-accidents. Le trouble à l'épaule provient, certes, d'un état antérieur mais aggravé par l'accident. Pour ce trouble la caisse doit entrer en matière à hauteur des 50 % retenus par les experts. Il n'y a donc pas eu de réduction en application de l'article 36 al. 2 LAA. L'incapacité de travail est certes totale, mais seuls 50 % de cette incapacité sont à mettre en relation avec l'accident.

Par pli du 14 décembre 2005, le Tribunal a communiqué la réponse à la recourante, et lui a indiqué que les pièces produites étaient à disposition pour consultation. Sans remarques de sa part d'ici au 6 janvier 2006, la cause serait gardée à juger.

Par pli du 6 janvier 2006, la recourante rappelle qu'elle conteste l'expertise du Dr D___________. Elle conteste par ailleurs avoir accepté la réduction des indemnités journalières. Elle critique également le « mode de fonctionnement de la CLINIQUE ROMANDE DE RÉADAPTATION à Sion, créée par la SUVA et mise à disposition des assureurs LAA ». Elle reprend, pour le surplus, son argumentation relative à l'article 36 LAA, et persiste dans les conclusions de son recours.

Après communication de cette écriture à la caisse, par pli du 13 janvier 2006, le Tribunal a gardé la cause à juger.

EN DROIT

La loi genevoise sur l’organisation judiciaire (LOJ) a été modifiée et a institué, dès le 1er août 2003, un Tribunal cantonal des assurances sociales, composé de 5 juges, dont un président et un vice-président, 5 suppléants et 16 juges assesseurs (art. 1 let. r et 56 T LOJ).

Suite à l’annulation de l’élection des 16 juges assesseurs, par le Tribunal fédéral le 27 janvier 2004 (ATF 130 I 106), le Grand Conseil genevois a adopté, le 13 février, une disposition transitoire urgente permettant au Tribunal cantonal des assurances sociales de siéger sans assesseurs à trois juges titulaires, ce, dans l’attente de l’élection de nouveaux juges assesseurs.

Conformément à l'art. 56 V al. 1 let. a ch. 5 LOJ, le Tribunal cantonal des assurances sociales connaît en instance unique des contestations prévues à l’article 56 LPGA qui sont relatives à la loi fédérale sur l’assurance-accidents du 20 mars 1981 (LAA).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003, entraînant la modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine des assurances sociales. Sur le plan matériel, le point de savoir quel droit s'applique doit être tranché à la lumière du principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 130 V 230 consid. 1.1; 335 consid. 1.2; ATF 129 V 4 consid. 1.2; ATF 127 V 467 consid. 1, 126 V 136 consid. 4b et les références). Les règles de procédure quant à elles s'appliquent sans réserve dès le jour de son entrée en vigueur (ATF 117 V 93 consid. 6b, 112 V 360 consid. 4a; RAMA 1998 KV 37 p. 316 consid. 3b). La LPGA s’applique donc au cas d’espèce.

Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 à 60 LPGA et 106 LAA).

a) Aux termes de la loi, les prestations en espèces auxquelles a droit un assuré qui est totalement ou partiellement incapable de travailler à la suite d'un accident sont d'une part l'indemnité journalière, d'autre part la rente d'invalidité, enfin l'indemnité pour atteinte à l'intégrité (cf. art. 16, 18 et 24 LAA). Seuls sont en cause ici les deux premières, la question de l'indemnité pour perte d'intégrité ayant été réglée.

Le droit à l'indemnité journalière naît le troisième jour qui suit celui de l'accident et s'éteint dès que l'assuré a recouvré sa pleine capacité de travail, dès qu'une rente est versée ou dès que l'assuré décède. La rente d'invalidité est due dès que l'assuré est invalide à 10 % au moins. Le droit naît dès qu'il n'y a plus lieu d'attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l'état de santé et que les éventuelles mesures de réadaptation de l'assurance-invalidité ont été menées à terme.

b) Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette exigence est remplie lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout, ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière. Il n'est pas nécessaire, en revanche, que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé; il faut et il suffit que l'événement dommageable, associé éventuellement à d'autres facteurs, ait provoqué l'atteinte à la santé physique ou psychique de l'assuré, c'est-à-dire qu'il se présente comme la condition sine qua non de celle-ci. Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage paraît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assuré doit être nié (ATF 119 V 337 consid. 1, 118 V 289 consid. 1b et les références).

c) Dans un arrêt du 14 juin 1999 (ATF 125 V 351), le Tribunal fédéral des assurances a précisé sa jurisprudence relative à l'appréciation des preuves notamment dans le domaine médical. Il convient de rappeler ici que selon le principe de la libre appréciation des preuves, qui s'applique aussi bien en procédure administrative qu'en procédure de recours de droit administratif (art. 40 PCF en corrélation avec l'art. 19 PA; art. 95 al. 2 OJ en liaison avec les art. 113 et 132 OJ), l'administration ou le juge apprécie librement les preuves, sans être lié par des règles formelles, en procédant à une appréciation complète et rigoureuse des preuves. Dès lors, le juge doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. Si les rapports médicaux sont contradictoires, il ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre.

L'élément déterminant pour la valeur probante d'un certificat médical est son contenu. A cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées. Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, la jurisprudence a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux. C'est ainsi que, lorsqu'une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé. En outre, au sujet des rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATFA du 10 octobre 2003 en la cause U 278/02).

En l'espèce, le Tribunal examinera le droit aux prestations susmentionnées de la recourante à la lumière du dossier médical, très complet, en particulier des deux expertises effectuées, l'une en mars 2002 par le Dr D___________, l'autre en mai 2003 par la CLINIQUE ROMANDE DE RÉADAPTATION. Toutes deux ont pleine valeur probante, au sens de la jurisprudence susmentionnée. À noter que les nombreuses remarques faites par la recourante à même l'expertise du Dr D___________ ne sont pas de nature à permettre de s'écarter de ses conclusions. Elles portent, en effet, sur des faits sans pertinence, ou consistent en des appréciations médicales pour lesquelles on ne peut reconnaître de compétences à la recourante. Il sera relevé également que ces deux expertises sont parfaitement convergentes. Elles ne sont, par ailleurs, pas en opposition avec les conclusions des médecins de la recourante. En effet, tous les médecins s'accordent à dire que la capacité de travail de la recourante est nulle, la question étant de savoir dans quelle mesure cette incapacité de travail est en causalité naturelle ou non avec l'accident.

Il ressort très clairement des deux expertises, dont les conclusions ont été reprises plus haut, que seuls les troubles à l'épaule droite, consécutifs à la rupture du tendon du muscle sus-épineux, sont en relation de causalité naturelle avec l'accident, et que l'incapacité de travail y relative est de l'ordre de 50 % sur les 100 % d'incapacité de travail. Les autres troubles dont souffre la recourante, qui sont par ailleurs nombreux, ne sont pas du tout en relation de causalité avec l'accident. Par ailleurs, la recourante souffre d'un trouble somatoforme douloureux probable et les troubles psychiques relevés chez la recourante découlent non de l'accident mais des nombreux problèmes de santé subis par la recourante depuis de longues années et des douleurs qui les ont accompagnés.

C'est donc bien de l'incapacité de travail évaluée à 50 %, due au trouble de l'épaule droite, que la caisse doit répondre.

a) indemnités journalières

Comme le relève la caisse, le droit aux indemnités journalières a été ramené à 50 % par décision du 9 avril 2002. Or, non seulement cette décision n'a pas fait l'objet d'une opposition, mais elle a donné lieu à une acceptation expresse par pli du 13 mai 2002, dont les termes, très clairs, ne prêtent pas à confusion. Par conséquent, la question est donc définitivement réglée, sous réserve d'une révision ou d'une reconsidération au sens de l'article 53 LPGA, qui n'entrent pas en considération ici.

b) rente d'invalidité

En l'occurrence, la recourante, servie par l'assurance-invalidité, à droit à une rente complémentaire à la rente (article 20 LAA), sur la base d'un taux d'invalidité de 50 %. Comme cela a été vu plus haut, ce pourcentage ne correspond pas à un pourcentage réduit mais à la part de l'incapacité de travail qui est en causalité naturelle avec l'accident. Il est exact que selon l'article 36 al. 2 LAA, la caisse ne serait pas en droit de réduire la rente en raison d'états antérieurs qui ne portaient pas atteinte à la capacité de gain. Cela signifie cependant uniquement que la caisse ne pourrait pas réduire à moins de 50 % le droit à la rente au motif que les troubles de l'épaule droite existaient déjà en partie avant l'accident, parce qu'à cette époque ces troubles ne généraient pas d'incapacité de travail.

Vu ce qui précède, le recours sera rejeté.

******


 

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

(conformément à la disposition transitoire de l’art. 162 LOJ)

A la forme :

Déclare le recours recevable.

Au fond :

Le rejette.

Dit que la procédure est gratuite.

Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par pli recommandé adressé au Tribunal fédéral des assurances, Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE, en trois exemplaires. Le délai ne peut être prolongé. Le mémoire doit : a) indiquer exactement quelle décision le recourant désire obtenir en lieu et place de la décision attaquée; b) exposer pour quels motifs il estime pouvoir demander cette autre décision; c) porter sa signature ou celle de son représentant. Si le mémoire ne contient pas les trois éléments énumérés sous lettres a) b) et c) ci-dessus, le Tribunal fédéral des assurances ne pourra pas entrer en matière sur le recours qu’il devra déclarer irrecevable. Le mémoire de recours mentionnera encore les moyens de preuve, qui seront joints, ainsi que la décision attaquée et l’enveloppe dans laquelle elle a été expédiée au recourant (art. 132, 106 et 108 OJ).

 

Le greffier

 

 

 

 

 

Pierre RIES

 

La Présidente :

 

 

 

 

 

Isabelle DUBOIS

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe