A/645/2004

ATAS/185/2005 du 22.02.2005 ( AI ) , PARTIELMNT ADMIS

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En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/645/2004 ATAS/185/2005

ARRET

DU TRIBUNAL CANTONAL DES

ASSURANCES SOCIALES

2ème Chambre

du 22 février 2005

En la cause

Madame M__________, mais comparant par Me Patrice RIONDEL, avocat, en l’étude duquel elle élit domicile,

recourante

contre

OFFICE CANTONAL DE L’ASSURANCE-INVALIDITE, rue de Lyon 97, case postale 425, 1211 Genève 13

intimé


EN FAIT

Mère d’un enfant (né le 5 juillet 1993), M__________, ressortissante suisse, née en 1958, est divorcée depuis le 1er juin 1997 (mariage célébré le 22 janvier 1993). Elle a obtenu un certificat fédéral de capacité de coiffeuse en 1978, et n’a travaillé que quatre mois dans cette profession. Après avoir exercé irrégulièrement diverses activités, elle a travaillé comme aide-hospitalière de février 1991 à janvier 1992, date à laquelle elle a présenté une demande de prestations auprès de l’Office cantonal de l’assurance-invalidité (OCAI).

Par décision du 2 décembre 1992, ledit Office lui a accordé une rente entière dès janvier 1993, sur la base d’un taux d’invalidité de 100%. A l’époque, l’assurée présentait des dorso-lombalgies liées à une ancienne maladie de Scheuermann (cyphoscoliose dorsolombaire importante, gibbosité dorsale), une santé psychique précaire (anxiété, hyperémotivité, fond dépressif marqué, troubles relationnels importants) et un status post néphrectomie droite (rapport du docteur A__________, généraliste, du 16 février 1992).

A la suite d’une première procédure de révision, l’OCAI, par décision du 6 avril 1995, a constaté que le degré d’invalidité de l’assurée n’avait pas changé au point d’influencer son droit à la rente et a, en conséquence, maintenu celle-ci intégralement. A cet égard, l’Office s’est fondé sur le rapport du 24 février 1995 du docteur B__________, ancien médecin traitant généraliste. Ce praticien y diagnostiquait une cyphoscoliose dorso-lombaire invalidante, un status après néphrectomie droite, et des antécédents dépressifs.

Dans le cadre d’une nouvelle révision du dossier de l’assurée, la doctoresse C__________, médecin traitant généraliste, a posé les diagnostics suivants, ayant des répercussions sur la capacité de travail : néphrectomie droite ; hypertrophie compensatoire du rein gauche ; cyphoscoliose à convexité droite dorsale et lombaire ; personnalité anxieuse. Sur le plan psychologique, cette praticienne a constaté que la patiente était collaborante et euthymique, mais tendue, fragile, anxieuse et soucieuse ; elle élevait en outre bien son fils. Elle a par ailleurs estimé qu’une surcharge physique et psychologique liée à une réinsertion professionnelle serait préjudiciable à la patiente (rapport du 8 novembre 2001).

Afin d’évaluer l’évolution de l’état santé de l’assurée par rapport à la décision du 6 avril 1995, sur les plans psychique et physique, l’OCAI a mis en œuvre deux expertises médicales, confiées au professeur D__________ (spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie) et au docteur E__________ (spécialiste FMH en médecine interne).

Dans son rapport du 12 septembre 2002, établi à l’issue de deux consultations, le professeur D__________ a constaté que, en dehors des réactions affectives liées à ses douleurs, l’intéressée était cliniquement euthymique et ne présentait aucune affection majeure sur le plan psychiatrique au sens de la Classification Internationale des troubles mentaux et des troubles du comportement (CIM-10), hormis des aptitudes cognitives légèrement limitées, liées cependant davantage à l’éducation de la patiente qu’à sa constitution, ce qui permettait d’écarter un retard mental léger (F 70). Ce médecin a par ailleurs relevé que l’assurée, avec laquelle le contact était facile, était ponctuelle à ses rendez-vous, souriante et correctement habillée. Malgré les douleurs décrites et l’usage passager de Ponstan et de Panadol, la patiente ne voulait pas prendre d’antalgiques, dont elle avait peur, tout en ne s’opposant pas, par ailleurs, à un traitement médicamenteux raisonné de son syndrome algique ; elle ne pouvait faire de la physiothérapie, affirmant qu’elle était plus malade avant qu’après ; son temps de loisir n’était pas diminué en raison de ses douleurs, lesquelles n’étaient pas permanentes et non ressenties les trois-quarts du temps ; elle se voyait comme une battante et se trouvait « mieux dans sa peau » depuis 1995. Dans la journée, l’intéressée s’occupait de son entretien et de celui de son fils. Elle était aidée par une femme de ménage et semblait avoir peu d’activités en dehors de la peinture sur bois, dont elle suivait des cours privés depuis six ou sept années. Sur le plan psychique, il n’existait pas de réelles limitations ayant des incidences sur la capacité de travail, excepté celle, modérée, de la cognition, limitation pour laquelle le praticien a estimé que des mesures de réadaptation professionnelle étaient envisageables, étant par ailleurs observé que l’assurée était capable de s’adapter à son environnement professionnel (rapport, p. 7). Enfin, l’expert a retenu que depuis 1995, l’état de santé psychologique de la patiente s’était amélioré, cela en particulier suite à son divorce, prononcé en juin 1997, l’entretien de son mari étant un poids de trop pour elle ; par rapport à 1992, l’amélioration était encore plus évidente. Il indiquait également ne pas avoir retrouvé les faits observés par le docteur C__________ en novembre 2001 : en particulier, l’expertisée ne se montrait ni anxieuse, ni angoissée sur la base du questionnaire BATE de M. de BONIS (ibid, p. 8).

Dans son rapport du 19 mai 2003, le docteur E__________ a attesté que l’état de santé de la patiente s’était globalement plutôt amélioré (par rapport à 1995), notamment ses problèmes de dos qui s’étaient stabilisés ; celle-ci prenait des antalgiques mineurs, ne voyait son médecin traitant que deux fois par année et ne suivait aucun traitement de physiothérapie. Par ailleurs, l’examen de la colonne vertébrale avait montré des troubles statiques importants et une douleur à la palpation de la colonne cervicale et dorsale, mais aucune contracture de la musculature paravertébrale lombaire, ni déficit sensitivomoteur ; la distance doigt-sol était de « 0 cm ! » et la mobilité lombaire était très bonne. La patiente avait en outre « avoué que ce qui l’empêcherait de travailler serait plutôt des problèmes d’organisation que les douleurs dont elle souffrait, qu’elle arrivait, d’ailleurs, à gérer avec des antalgiques simples ». Elle parvenait en effet à s’occuper de son appartement et des activités domestiques courantes et n’avait besoin que d’une aide pour le ménage ; elle avait des semaines bien remplies, y compris pour des hobbies. Le docteur E__________ a ajouté que le fait pour l’intéressée de suivre des cours de peinture sur bois indiquerait que le problème cervical n’était pas si handicapant que cela. Sur le plan subjectif, les plaintes étaient très modestes, l’intéressée arrivant à contrôler ses douleurs à la colonne vertébrale avec des antalgiques simples et ne consultant que deux fois par année son médecin traitant. Le praticien a conclu que la patiente souffrait de cervicalgies et lombalgies chroniques et d’une maladie de Scheuermann avec des répercussions fonctionnelles limitées. A ce titre, une activité professionnelle sans port de charges lourdes était possible à un taux d’au moins 50% comme aide-infirmière, voire à 100% comme coiffeuse.

Sur la base de ces éléments, le Service médical régional de l’assurance-invalidité (SMR) a retenu que l’assurée présentait, désormais, un état de santé psychique tout à fait satisfaisant, voire normal, à l’exception d’une limitation légère de la cognition, et un état physique bien consolidé, les douleurs liées au trouble statique étant bien maîtrisées par la prise d’antalgiques. L’intéressée était ainsi apte à reprendre sans délai une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles, à savoir sans port de charges au-delà de 10 kg, sans positions prolongées en flexion/rotation du rachis, et avec la possibilité de changer de position pendant le travail (rapport du 25 juillet 2003).

Lors d’un entretien à l’OCAI du 25 septembre 2003, l’assurée s’est opposée à toute décision allant dans le sens d’une suppression de sa rente ou d’une reprise d’une activité quelconque, singulièrement d’un stage ou d’un reclassement professionnel.

Dans un rapport du 27 janvier 2004, le Service de réadaptation professionnelle de l’OCAI (SRP) a proposé la suppression de la rente, compte tenu d’un taux d’invalidité de 32.7%. Cet Office a retenu à cet égard un revenu annuel sans invalidité de 55'047 fr. (salaire réalisé entre 1991 et 1992 en qualité d’aide hospitalière aux Hôpitaux universitaires de Genève, actualisé pour l’année 2002) et d’un salaire avec invalidité de 37'037 fr. (valeur 2002), compte tenu d’un abattement de 10% sur un revenu annuel de 41'152 fr. Ce dernier montant correspondait à la rémunération que pourrait obtenir une femme exerçant une activité dans le domaine des soins corporels et possédant des connaissances professionnelles spécialisées [selon l’Enquête suisse sur la structure des salaires en 2000 (ESS), colonne 34 de niveau 3]. Ce Service a par ailleurs estimé que des mesures professionnelles seraient possibles afin de tenter de diminuer la perte de gain, mais n’étaient pas indiquées en l’espèce, au vu du refus manifesté par l’assurée à ce sujet.

Par décision du 28 janvier 2004, l’OCAI a supprimé la rente précédemment allouée avec effet dès le 1er avril 2004. Reprenant en particulier les conclusions du SRP du 27 janvier 2004, cet Office a estimé que l’assurée était désormais apte à exercer une activité professionnelle à un taux d’au moins 50% comme aide-infirmière, voire de 100% en tant que coiffeuse.

Le 11 février 2004, l’assurée a formé opposition contre cette décision, faisant principalement valoir que son médecin traitant s’opposait à une reprise de travail. Elle s’est en outre interrogée sur la pertinence de l’expertise effectuée par le docteur E__________, dans la mesure où celui-ci n’était pas spécialisé en rhumatologie. A cet égard, elle a produit un certificat médical du 5 février 2004, établi, à la demande de son médecin traitant, par le professeur Cem F__________, médecin-chef de service au Service de rhumatologie auprès des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). Ce praticien a diagnostiqué des rachialgies diffuses dans le contexte d’un syndrome douloureux chronique sans atteinte neurologique et une maladie de Scheuermann. Il a constaté des troubles statiques du rachis avec bascule des épaules en défaveur de la gauche, bascule du bassin en défaveur de la droite, cyphose dorsale avec scoliose dextro-convexe et une palpation du rachis dorsal faiblement douloureuse. Il n’y avait pas de contracture musculaire para-spinale. La mobilité cervicale était normale et la mobilité lombaire harmonieuse. Concernant le dossier radiologique, il a retenu une suspicion de lyse isthmique L5 gauche au niveau lombaire, sans répercussion fonctionnelle en position neutre. Il a également noté que l’intéressée bénéficiait de l’aide d’une femme de ménage « payée par l’AI ». D’un point de vue médical, la patiente pourrait bénéficier d’un traitement de reconditionnement physique sous forme de séances de physiothérapie active, associées à des séances d’informations sur les problèmes du rachis dans le contexte de l’Ecole du dos. A titre antalgique, il a proposé un traitement d’antidépresseurs tricycliques. Enfin, compte tenu du peu de formation professionnelle de la patiente, du syndrome douloureux chronique, du déconditionnement physique et de l’arrêt de travail de plus de 12 ans, il lui semblait « illusoire » d’espérer une reprise professionnelle, en particulier dans des métiers contraignants pour le rachis. Dans ce contexte, le professeur F__________ a estimé qu’une suppression de la rente était non seulement « peu justifiée », mais serait probablement « inefficace ». Et a conclu : « Au pire, on déplacera le problème vers une autre instance de soutien social ».

Le praticien ne s’est pas exprimé sur la capacité de travail exigible sur le plan physique.

Dans son rapport du 27 février 2004, le SMR a maintenu ses conclusions du 25 juillet 2003, estimant que le rapport du professeur F__________ n’apportait pas d’éléments nouveaux sur le plan somatique, son status rhumatologique étant absolument superposable à celui du docteur (recte : E__________). Au surplus, les arguments invoqués étaient d’ordre social, et non médical.

Par décision sur opposition du 25 mars 2004, l’OCAI a confirmé sa décision de suppression de rente du 28 janvier 2004.

Le 30 mars 2004, l’assurée a recouru contre cette décision, en se prévalant principalement du rapport médical du professeur F__________ du 5 février 2004.

Dans sa réplique du 10 mai 2004, l’OCAI a conclu au rejet du recours, en renvoyant aux motifs exposés dans sa décision sur opposition du 25 mars 2004.

Par l’intermédiaire de son conseil, la recourante a conclu « préalablement » à la mise en œuvre d’une nouvelle expertise et, principalement, à la confirmation de la rente allouée depuis 1992 sur la base d’un degré d’invalidité de 100%. A cet égard, elle s’est référée aux conclusions du professeur F__________ du 5 février 2004. A son avis, elle n’avait aucune chance de retrouver un nouvel emploi et d’exercer une quelconque activité professionnelle, au vu de son état de santé. La recourante a en particulier contesté que l’activité de coiffeuse fût raisonnablement exigible, compte tenu de ses problèmes dorsaux, du fait qu’elle n’avait plus pratiqué cette profession depuis 26 ans, d’un marché de la coiffure « saturé », ainsi que des nouvelles méthodes et produits utilisés dans ce domaine. Subsidiairement, elle a conclu à l’octroi de mesures de réadaptation « en vue de reclassement ».

Dans sa réponse du 30 septembre 2004, l’OCAI a conclu à la confirmation de sa décision sur opposition du 25 mars 2004. En substance, cet Office a relevé que la force probante des expertises médicales des docteurs D__________ (12 septembre 2002) et E__________ (19 mai 2003) ne faisait aucun doute. En outre, les facteurs avancés par la recourante, tels que l’âge, l’absence de mise à jour des connaissances professionnelles ou les difficultés liées au marché de l’emploi étaient étrangers à l’invalidité. Enfin, quand bien même la condition objective ouvrant le droit à un reclassement professionnel - taux d’invalidité supérieur à 20% - était remplie in casu, l’attitude négative présentée par l’assurée lors de son entretien du 25 septembre 2003 quant à la reprise d’une activité lucrative excluait l’octroi de toute mesure professionnelle et avait contraint l’administration à porter « une conclusion théorique sur ce dossier ».

Les autres faits et moyens de la cause seront examinés, si nécessaire, dans les considérants qui suivent.

EN DROIT

La loi genevoise sur l’organisation judiciaire (LOJ) a été modifiée et a institué, dès le 1er août 2003, un Tribunal cantonal des assurances sociales, composé de 5 juges, dont un président et un vice-président, 5 suppléants et 16 juges assesseurs (art. 1 let. r et 56 T LOJ).

La controverse à propos de la base constitutionnelle de la juridiction cantonale a pris fin (ATF 130 I 226). Le Tribunal fédéral a jugé, en effet, que l'existence du Tribunal de céans trouve son fondement directement dans le droit fédéral, soit l'art. 57 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA), à teneur duquel chaque canton institue un tribunal des assurances, qui statue en instance unique sur les recours dans le domaine des assurances sociales. Le Tribunal fédéral en a déduit qu'une base constitutionnelle cantonale expresse n'était pas nécessaire pour la création de cette juridiction de recours (cf. ATF 130 I 230 s. consid. 2.4 à 2.6).

Quant à la solution consistant à rendre des arrêts par trois juges régulièrement élus, à teneur de la loi cantonale du 13 février 2004, dans l'attente de l'élection des juges assesseurs par le peuple, le Tribunal fédéral a jugé qu'elle était la plus rationnelle et conforme de surcroît au droit fédéral (ATF 130 I 233 consid. 3.4).

Par ailleurs, l’objet du recours ressortit à la loi fédérale sur l'assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI) (cf. art. 56 V al. 1 let. a ch. 2 LOJ).

Partant, le Tribunal de céans est matériellement compétent pour statuer en l’espèce.

Selon l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA, entrée en vigueur le 1er janvier 2003, sont applicables à l'AI (art. 1a à 70), à moins que la loi n'y déroge expressément. Aux termes de l’art. 52 al. 1 LPGA, les décisions peuvent être attaquées dans les trente jours par voie d'opposition auprès de l'assureur qui les a rendues (art. 52 al. 1 LPGA) et les décisions sur opposition peuvent faire l'objet d'un recours, dans le même délai (art. 60 al. 1 LPGA), devant le tribunal cantonal des assurances compétent (art. 56 al. 1 en relation avec les art. 57 al. 1 et 58 al. 1 LPGA).

Interjeté en temps utile auprès de l’autorité compétente et dans les formes prescrites, par une assurée directement touchée dans ses intérêts juridiquement protégés par la décision querellée, le présent recours est recevable.

Le litige porte sur le point de savoir si l’invalidité de la recourante s'est modifiée au point d'influencer son droit à la rente entre le 2 décembre 1992, date de la décision initiale d'octroi d’une rente entière, et le 25 mars 2004, date de la décision sur opposition par laquelle cette prestation a été supprimée (cf. ATFA du 6 juillet 2004, I 123/04, consid. 1 ; ATF 125 V 369 consid. 2), étant par ailleurs relevé que la décision de l’OCAI du 6 avril 1995, qui a simplement confirmé la première décision d’octroi de la rente, ne doit pas être prise en considération (infra, § 6).

Selon l’art. 17 al. 1 LPGA, si le taux d’invalidité du bénéficiaire de la rente subit une modification notable, la rente est, d’office ou sur demande, révisée pour l’avenir, à savoir augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée. Cette disposition n'a pas apporté de modification aux principes jurisprudentiels développés en ce domaine sous le régime du droit en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002 (ATFA du 30 avril 2004, destiné à la publication, I 626/03, consid. 3.5).

Savoir si l'on est en présence d'un motif de révision du droit à la rente suppose une modification notable du taux d'invalidité. Le point de savoir si un tel changement s'est produit doit être tranché en comparant les faits tels qu'ils se présentaient au moment de la décision initiale de rente et les circonstances existant à l'époque de la décision litigieuse (ATF 125 V 369 consid. 2; voir également ATF 112 V 372 consid. 2b et 390 consid. 1b). Il en va également ainsi lorsque, comme en l’espèce (cf. décision de l’OCAI du 6 avril 1995), une première procédure de révision a été menée entre-temps, sans toutefois aboutir à une modification du droit à la rente (ATFA du 13 janvier 2005, I 137/04, consid. 2.2 ; ATF 130 V 345 ss consid. 3 ; RCC 1984, p. 364).

Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, le juge a besoin de documents que le médecin, éventuellement aussi d'autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l'assuré (ATF 125 V 261 consid. 4, 115 V 134 consid. 2, 114 V 314 consid. 3c, 105 V 158 consid. 1).

Le juge apprécie librement les preuves, sans être liés par des règles formelles, en procédant à une appréciation complète et rigoureuse des preuves. Il doit ainsi examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. Si les rapports médicaux sont contradictoires, il ne peut liquider l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un certificat médical n'est ni son origine ni sa désignation sous la forme d'un rapport ou d'une expertise, mais bel et bien son contenu. Il importe en particulier que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et, enfin, que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATFA du 6 juin 2003, cause I 483/02, consid. 5.1).

Lorsque, au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATFA du 14 avril 2003, cause I 39/03, consid. 3.2).

En outre, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (eod. loc.). Il conviendra ainsi d'attacher plus de poids aux constatations faites par exemple par un spécialiste d'un centre d'observation de l'assurance-invalidité ou d'une clinique orthopédique universitaire, qu'à l’appréciation de l'incapacité de travail par le médecin de famille (cf. ATF 125 V 353 consid. 3b/cc).

8.1 A l’appui de sa décision de supprimer la rente entière d’invalidité, l’OCAI s’est fondé sur les expertises des docteurs D__________ (spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie) et E__________ (spécialiste FMH en médecin interne), réalisées respectivement les 12 septembre 2002 et 19 mai 2003, pour admettre que l’état de santé de l’assurée s’était amélioré au point qu’elle pouvait désormais exercer une activité adaptée à 100%.

8.2 Dans le cas particulier, on doit constater que ces deux expertises répondent entièrement aux critères propres à leur conférer pleine valeur probante (cf. supra, § 7) ; en outre, leurs conclusions sont corroborées par le SMR. D’autre part, la recourante n’amène pas d’éléments susceptibles de mettre sérieusement en doute l’évaluation médicale et les conclusions données par les experts précités. Il n'y a d’ailleurs pas de discussion entre les différents médecins relativement au diagnostic. En particulier, le status rhumatologique posé par le docteur F__________, chef du Service de rhumatologie des HUG, est superposable à celui du docteur E__________. Il n'y a pas davantage de divergence sur le fait que l'état de santé physique de l’assurée ne lui permet plus d’exercer son ancienne activité d’aide soignante à 100%, ni de porter de charges au-delà de 10 kg, ou de garder des positions prolongées en flexion/rotation du rachis.

8.3 En revanche, il subsiste un désaccord sur l'évaluation de la capacité de travail de l’assuré dans une activité adaptée. Selon les experts, ce taux s’élève à 100%. Pour le médecin-traitant de la recourante, en revanche, ce taux serait nul, en ce sens qu’une surcharge physique et psychologique liée à une réinsertion professionnelle serait préjudiciable à la patiente. Dans le même sens, le docteur F__________ a estimé « illusoire » la reprise d’une activité professionnelle, s’agissant d’une patiente avec peu de formation professionnelle, un syndrome douloureux chronique, un déconditionnement physique et un arrêt de travail de plus de 12 ans.

8.4 Pour autant, ces considérations ne sauraient prévaloir sur les avis circonstanciés des deux spécialistes précités, qui ont été donnés au terme d'examens fouillés. D’une part, en effet, les docteurs G__________ et F__________ - qui ne sont d’ailleurs pas spécialisés en psychiatrie - ne se déterminent pas sur l’aptitude de la patiente à exercer une activité de substitution adaptée à son état de santé. En particulier, le premier praticien ne précise pas la portée de la surcharge physique et psychique, qu’il lie à une reprise d’activité, sur la capacité de travail de la patiente, se limitant à estimer qu’elle lui serait « préjudiciable ». Quant au second, il indique uniquement qu’une réinsertion professionnelle serait « illusoire » et que, partant, le maintien de la rente est souhaitable. En l’absence d’un diagnostic de troubles psychiques proprement dits, pareil point de vue n’est d’aucun secours à la recourante (comp. ATFA du 28 mars 2003, I 376/02 ; du 30 avril 2002, I 340/01, consid. 2c). Or, conformément à son obligation de diminuer le dommage, l’assurée est tenue d’atténuer par tous les moyens les effets de son invalidité en tirant parti de sa capacité de travail résiduelle, au besoin en changeant de profession (ATF 123 V 96, consid. 4c). Par ailleurs, l’appréciation du docteur F__________, selon laquelle la suppression de la rente serait « peu justifiée » ou « inefficace », elle n'est pas, dans le domaine de l'assurance-invalidité, du ressort du médecin. Il incombe au contraire à l’administration de trancher cette question de droit (cf. art. 28 al. 2 LAI) (ATFA du 4 juin 2003, cause I 748/02, consid. 4.2 ; F. PAYCHERE, Le juge et l'expert - plaidoyer pour une meilleure compréhension, page 133 ss, p. 147, in : L’expertise médicale, éditions Médecine & Hygiène, 2002). On ajoutera que les raisons qui ont amené ce praticien à se distancer des conclusions des experts sur la capacité de travail résiduelle de la recourante - notamment une formation professionnelle limitée et une longue période d’inactivité - ne sont pas, en tant que telles, déterminantes du point de vue de l'assurance-invalidité pour juger de l'exigibilité ou non d'une reprise d'activité professionnelle (ATFA du 26 mai 2003, cause I 462/02, consid. 2.3). En effet, cela reviendrait à admettre qu'une personne est invalide par le seul fait d'avoir subi une longue période d'inactivité professionnelle, ce qui n'est conforme ni à la lettre ni à l'esprit des articles 7 et 8 LPGA (dans leur teneur au 31 décembre 2003) (cf. arrêt du 22 mars 2004, I 597/03, consid. 4.1).

Quant à la situation du marché de l'emploi invoquée par la recourante, elle n'entre pas davantage en considération dans l'évaluation de l'invalidité (voir l'art. 7 LPGA, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2003 : ATFA du 3 janvier 2005, I 172/02, consid. 4.2).

8.5 Par ailleurs, la présence d'une atteinte psychique ayant valeur de maladie – tel le syndrome douloureux chronique diagnostiqué par le docteur F__________ - est une condition juridique nécessaire, mais ne constitue pas encore une base suffisante pour que l'on puisse admettre qu'une limitation de la capacité de travail revêt un caractère invalidant (Ulrich Meyer-Blaser, Der Rechtsbegriff der Arbeitsunfähigkeit und seine Bedeutung in der Sozialversicherung, namentlich für den Einkommensvergleich in der Invaliditätsbemessung, in : René Schauffhauser/Franz Schlauri (éd.), Schmerz und Arbeitsunfähigkeit, St. Gall 2003, p. 64 sv., et note 93). En effet, selon la jurisprudence, les troubles somatoformes douloureux persistants n'entraînent pas, en règle générale, une limitation de longue durée de la capacité de travail pouvant conduire à une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI (voir sur ce point Meyer-Blaser, op. cit. p. 76 ss, spéc. p. 81 ss.). Une exception à ce principe est admise dans les seuls cas où, selon l'estimation du médecin, les troubles somatoformes douloureux se manifestent avec une telle sévérité que, d'un point de vue objectif, la mise en valeur de sa capacité de travail ne peut, pratiquement, - sous réserve des cas de simulation ou d'exagération (SVR 2003 IV no 1 p. 2 consid. 3b/bb; voir aussi Meyer-Blaser, op. cit. p. 83, spéc. 87 sv.) - plus raisonnablement être exigée de l'assuré, ou qu'elle serait même insupportable pour la société (ATFA du 21 avril 2004 précité, consid. 3.3.2 ; cf. aussi ATF 127 V 298 consid. 4c in fine). Admissible seulement dans des cas exceptionnels, le caractère non exigible d'un effort de volonté en vue de surmonter la douleur et de la réintégration dans un processus de travail suppose, dans chaque cas, soit la présence manifeste d'une comorbité psychiatrique d'une acuité et d'une durée importantes, soit le cumul d'autres critères présentant une certaine intensité et constance. Ce sera le cas (1) des affections corporelles chroniques ou d'un processus maladif s'étendant sur plusieurs années sans rémission durable, (2) d'une perte d'intégration sociale dans toutes les manifestations de la vie, (3) d'un état psychique cristallisé, sans évolution possible au plan thérapeutique, marquant simultanément l'échec et la libération du processus de résolution du conflit psychique (profit primaire tiré de la maladie), ou enfin (4) de l'échec de traitements ambulatoires ou stationnaires conformes aux règles de l'art et de mesures de réhabilitation, cela en dépit de la motivation et des efforts de la personne assurée pour surmonter les effets des troubles somatoformes douloureux (ATFA du 21 avril 2004 précité, consid. 3.3.2 ; VSI 2000 p. 155 consid. 2c; Meyer-Blaser, op. cit. p. 76 ss, spéc. 80 ss ; Mosimann, somatoforme Störungen: Gerichte und (psychiatrische) Gutachten, RSAS 1999, p. 1 ss et 105 ss.

En l’occurrence, la présence manifeste d'une comorbidité psychiatrique d'une acuité et d'une durée importantes, au sens de la jurisprudence précitée, doit être niée. Se pose dès lors la question du cumul éventuel d'autres critères permettant d'apprécier le caractère invalidant des troubles somatoformes douloureux litigieux. Sur ce point, il convient de tenir pour établie la présence d'affections corporelles chroniques. Cependant, les pièces médicales versées au dossier contiennent suffisamment d'éléments pertinents sur le plan psychiatrique pour que l'on puisse se convaincre de l'exigibilité d'une reprise du travail à plein temps de la part de l'assurée. En effet, à la suite en particulier de son divorce prononcé en 1997, la symptomatologie dépressive s’est actuellement pour le moins fortement atténuée, si bien qu’il n’y a pas lieu de retenir l'existence d'un état psychique cristallisé, sans évolution possible (comp. ATFA du 19 septembre 2004, I 648/03, consid. 6.2). En outre, la recourante s’est révélée en mesure de bien élever son enfant (né en 1993) ; malgré ses douleurs, elle n'en a pas moins été capable de continuer d'assumer, dans une large mesure, la responsabilité de ses tâches quotidiennes, même si elle est aidée par une femme de ménage pour les travaux lourds (comp. ATFA du 10 janvier 2005, I 726/03, consid. 5.3.2). Par ailleurs, on ne saurait conclure à l'existence d'une perte d'intégration sociale dans toutes les manifestations de la vie, du moment qu’elle s’occupe bien de son fils ou suit régulièrement des cours de peinture sur bois. Les observations consignées dans l’expertise du professeur D__________ (bonne présentation et facilité de contact) laissent au contraire présager d'une intégration sociale normale (comp. ATFA du 20 mars 2003, I 182/02, consid. 4.2). De plus, l’assurée s’est déclarée disposée à se soumettre à un traitement médicamenteux raisonné de son syndrome algique (expertise du professeur D__________ du 12 septembre 2002, p. 7), de sorte que l’on ne saurait admettre l'existence d'un échec des traitements pratiqués conformément aux règles de l'art, en dépit de la motivation et des efforts de la personne assurée pour surmonter les effets des troubles somatoformes douloureux. Enfin et surtout, les douleurs en cause n’apparaissent pas revêtir l’intensité requise par la jurisprudence, dans la mesure où l’intéressée parvient à les gérer avec des antalgiques simples ; au demeurant, selon ses propres dires, ce ne sont pas tant ces douleurs qui l’empêcheraient de travailler, mais plutôt des problèmes d’organisation.

Sur le vu de ce qui précède, il convient de retenir que les troubles somatoformes douloureux litigieux ne se manifestent pas avec une sévérité telle que, d'un point de vue objectif, la mise en valeur à plein temps de la capacité de travail de la recourante ne peut plus être raisonnablement exigée d'elle. Il y a lieu d'admettre au contraire le caractère exigible d'un effort de volonté de sa part en vue de surmonter la douleur et de se réinsérer dans un processus de travail.

Il apparaît ainsi que l’intéressée ne présente plus de troubles psychiques invalidants et que sa capacité de travail n'est affectée que par sa maladie de Scheuermann (cyphoscoliose dorsolombaire importante, gibbosité dorsale).

Selon le rapport du docteur E__________, cette affection somatique a des répercussions fonctionnelles limitées, en ce sens qu’elle entraîne, désormais, une incapacité partielle (50%) de travail de l’assurée dans son ancienne profession d’aide-soignante ; dans une activité adaptée, elle dispose en revanche d'une capacité entière de travail.

Comme la mise en oeuvre d'une expertise complémentaire, demandée par la recourante, ne modifierait selon toute vraisemblance pas cette appréciation (cf. supra, § 8,2), il s’avère superflu d’ordonner un complément d’instruction médicale.

Cela étant, force est de considérer, avec l’Office intimé, que l’assurée est, désormais, effectivement apte à exercer à 100% une activité adaptée à son état de santé, soit sans port de charges supérieures à 10 kg et évitant des positions prolongées en flexion/rotation du rachis.

Toutefois, contrairement à ce qu’a retenu l’OCAI, il faut admettre que celle-ci n’est plus en mesure d’exercer une activité de coiffeuse à l’heure actuelle. En effet, bien qu’elle soit en possession d’un CFC de coiffeuse depuis 1978, l’assurée n'a pas exercé cette profession depuis de nombreuses années (26 ans) et l'on peut raisonnablement considérer qu'elle ne dispose pas de connaissances suffisamment actuelles pour retrouver un emploi dans ce domaine. Seules peuvent dès lors être prises en considération des activités simples et répétitives (comp. ATFA I 318/02 du 18 octobre 2002 consid, 3.3 ; voir aussi VSI 2000, p. 305).

Par ailleurs, il convient de considérer que parmi toutes les activités qui peuvent être exercées dans les conditions décrites ci-dessus (supra, § 8.2), il s'en trouve un certain nombre, mise à part celle de coiffeuse, qui correspondent aux limitations physiques de la recourante. Compte tenu du large éventail d'activités non qualifiées que recouvrent les secteurs de la production et des services énumérés dans les enquêtes sur la structure des salaires de l'Office fédéral de la statistique (tabelle 1), un certain nombre d'entre elles sont nécessairement légères, permettent l'alternance des positions, ne nécessitent pas une position statique répétée (cf. dans ce sens ATFA du 21 janvier 2004, I 770/02, consid. 4.1 ; Plädoyer, 2002/6 p. 64, consid. 4b; SVR 2002 IV no 24 p. 76 consid. 3, cité).

Dans le cadre de la comparaison des revenus (art. 28 al. 2 LAI et 16 LPGA), il faut se placer au moment de la naissance du droit à la rente, respectivement de sa suppression ; les revenus avec et sans invalidité doivent alors être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente survenues jusqu'au moment où la décision sur opposition litigieuse est rendue être prises en compte (ATFA du 22 janvier 2004, 71/03, consid. 3.1 ; ATF 125 V 369 consid. 2; VSI 2000 p. 313 consid. c). Dans le cas particulier, la suppression du droit à la rente se situe en 2004 et la comparaison des revenus doit se faire à ce moment-là. Toutefois, les données statistiques de l'Enquête (bisannuelle) suisse sur la structure des salaires (ESS) pour 2004 n’étant pas disponibles, il y a lieu d’appliquer celles de l’année 2002 (et non 2000, comme l’a fait l’Office intimé, tout en les indexant à l’année 2002).

La recourante est sans activité lucrative depuis 1992. Faute d'un revenu exigible effectivement réalisé, il convient de se référer, conformément à la jurisprudence (ATF 126 V 76 consid. 3a/bb et les références), aux données de l’ESS. Selon les indications fournies par cette publication, une femme pouvait en 2002 prétendre, en exerçant une activité simple et répétitive (niveau de qualification 4), un revenu annuel de Fr. 45'840.-. ([ 3'820 fr. x 12]) (ESS 2002, Tableau TA1, valeur médiane, tous secteurs confondus, part au 13ème salaire comprise). Ce salaire hypothétique représente, compte tenu du fait que les salaires bruts standardisés se basent sur un horaire de travail de quarante heures, soit une durée hebdomadaire inférieure à la moyenne usuelle dans les entreprises en 2002 (41,7 heures : Annuaire statistique de la Suisse 2004, tableau 3.2.3.5, p. 200), un revenu annuel de 47'788 fr. ([45'840 fr. x 41,7] : 40). Compte tenu des limitations fonctionnelles subies par la recourante, l’OCAI a procédé à une réduction – non contestée et non critiquable en l’espèce - de 10 % du revenu d'invalide, lequel se monte par conséquent à 4’401 fr. Par ailleurs, le salaire sans invalidité de 48.631 fr. en 1992 (non contesté), réévalué en 2002, s’élève à 55'675 fr. [et non 55'047 fr. comme calculé par l’OCAI, l’indice des salaires nominaux étant passé de 1788 à 2047 entre 1992 et 2002 (source : OFS, ISS, Tableau T1A.39)]. La comparaison de ces deux revenus indexés abouti à une perte de gain de 11'665 fr. (55'675 fr. moins 44'010 fr.), correspondant à un taux d’invalidité de 21%, insuffisant pour l’octroi d’une rente (art. 28 al. 1 LAI).

Force est ainsi de constater que, depuis le moment de la décision initiale d'octroi d’une rente entière (2 décembre 1992), l’invalidité de l'intéressée s'est modifiée de manière à influencer son droit à ladite rente. Dans la mesure où ce changement durait depuis plus de trois mois déjà, sans interruption notable et sans qu'une complication prochaine fût à craindre (art. 88a al. 1 RAI), l'Office intimé était fondé, par sa décision du 28 janvier 2004, à supprimer le droit à la rente à partir du 1er avril suivant, conformément à l'art. 88bis al. 2 let. a RAI.

Subsidiairement, la recourante a sollicité l’octroi de mesures de reclassement professionnel adaptées à son état de santé. En l’espèce, le degré d’invalidité de l’intéressée s’élève à 21%, soit un taux qui, s’il ne permet pas l’octroi d’une rente, est supérieur au seuil à partir duquel une perte de gain durable dans toute activité exigible ouvre droit, en principe, au reclassement dans une nouvelle profession (cf. ATF 124 V 110 consid. 1b).

Dans ces circonstances, et dès lors que l'assurée présente une aptitude à la reconversion professionnelle compte tenu notamment de ses ressources adaptatives et de son âge, aucun élément au dossier ne permet de conclure de manière convaincante que la recourante n'est pas à même de réussir une mesure de réadaptation – qu’elle sollicite désormais. D’ailleurs, tant l’expert D__________ (rapport du 12 septembre 2002, p. 7) que le SRP lui-même ont estimé que des mesures professionnelles étaient envisageables en l’occurrence, afin de tenter de diminuer la perte de gain (rapport du 27 janvier 2004, p. 3). En particulier, le manque de motivation dont, selon ce même SRP, l'assurée aurait fait preuve lors de l’entretien du 25 septembre 2003 ne constitue pas un obstacle à un reclassement dans une nouvelle profession adaptée à son état de santé (cf. ATFA du 5 février 2004, I 495/03, consid. 4.4). Il convient dès lors de considérer qu'il existe une juste proportion entre le succès d'une telle mesure et les frais qu'elle entraîne (cf. ATF 103 V 16 consid. 1b; RCC 1988 p. 495 consid. 2a). Au demeurant, l'administration peut suivre l'évolution du reclassement en se réservant la possibilité de supprimer le droit aux prestations par la voie de la révision (cf. art. 41 LAI, par analogie), dans l'éventualité où la recourante, par son attitude, compromettrait le succès de la réadaptation (cf. ATFA précité du 5 février 2004, consid. 4.4).

Sur le vu de ce qui précède, c'est à tort que l’administration a rejeté la demande de la recourante tendant à l'octroi d'un reclassement dans une nouvelle profession adaptée à son état de santé. Le recours se révèle dès lors bien fondé dans ses conclusions subsidiaires.

Enfin, eu égard au risque éventuel de surcharge psychologique liée à une réinsertion professionnelle de la patiente (risque évoqué par le médecin traitant dans son rapport du 8 novembre 2001), il incombera à l’Office intimé, le cas échéant, de prendre en charge les frais d’une prise en charge psychiatrique. En effet, pareille mesure devrait permettre à l’assurée – inactive depuis une douzaine d’années - de reprendre graduellement une activité professionnelle, étant précisé qu’il ne s’agit pas de soigner l’affection psychique comme telle, mais de fournir une prestation s’apparentant à une aide au placement (cf. ATFA du 28 août 2001, I 128/01, consid. 3).


PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

(conformément à la disposition transitoire de l’art. 162 LOJ)

A la forme :

Déclare recevable le recours.

Au fond :

L’admet partiellement.

Renvoie la cause à l’OCAI pour mise en œuvre des mesures de réadaptation au sens des considérants.

Dit que l’Office intimé versera à la recourante 200.- fr. à titre de dépens.

Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par pli recommandé adressé au Tribunal fédéral des assurances, Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE, en trois exemplaires. Le délai ne peut être prolongé. Le mémoire doit : a) indiquer exactement quelle décision le recourant désire obtenir en lieu et place de la décision attaquée; b) exposer pour quels motifs il estime pouvoir demander cette autre décision; c) porter sa signature ou celle de son représentant. Si le mémoire ne contient pas les trois éléments énumérés sous lettres a) b) et c) ci-dessus, le Tribunal fédéral des assurances ne pourra pas entrer en matière sur le recours qu’il devra déclarer irrecevable. Le mémoire de recours mentionnera encore les moyens de preuve, qui seront joints, ainsi que la décision attaquée et l’enveloppe dans laquelle elle a été expédiée au recourant (art. 132, 106 et 108 OJ).

Le greffier:

Pierre RIES

Juge suppléant :

Jean-Louis BERARDI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le