A/683/2004

ATAS/188/2005 du 14.03.2005 ( LPP ) , PARTAGE LPP

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En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/683/2004 ATAS/188/2005

ARRET

DU TRIBUNAL CANTONAL DES

ASSURANCES SOCIALES

6ème Chambre

du 14 mars 2005

En la cause

Madame R__________, comparant par Me Philip GRANT en l’étude duquel elle élit domicile

Monsieur o D__________,

demandeurs

contre

FONDATION INSTITUTION SUPPLETIVE LPP, Administration des comptes de libre passage, case postale, 8022 Zürich

CAISSE PARITAIRE DE PREVOYANCE DE L’INDUSTRIE ET DE LA CONSTRUCTION, rue de Malatrex 14, 1201 Genève

WINTERTHUR COLUMNA, Fondation LPP, case postale 1523, 1001 Lausanne

FONDATION DE LIBRE PASSAGE DE L’X__________, Postfach, 4002 BÂLE

défenderesses

 


EN FAIT

Par jugement du 9 février 2004, la 11ème chambre du Tribunal de première instance a prononcé le divorce de Madame R__________, née le 3 juillet 1971, et Monsieur D__________, né le 6 février 1966, mariés en date du 5 février 1993.

Selon le chiffre 4 du jugement précité, le Tribunal de première instance a donné acte aux ex-époux de ce qu’ils ont convenu de partager par moitié leurs avoirs de prévoyance professionnelle accumulés pendant le mariage.

Le jugement de divorce est devenu définitif le 16 mars 2004 et le Tribunal de première instance l’a transmis au Tribunal cantonal des assurances sociales le 2 avril 2004 afin de procéder au partage précité.

Il ressort de l’instruction menée par le Tribunal de céans les faits suivants :

a) S’agissant de Mme R__________, la Fondation de libre passage de X__________a attesté d’un avoir de prévoyance de fr. 19'507.- au 16 mars 2004.

b) S’agissant de M. D__________, la Caisse paritaire de prévoyance de l’industrie et de la construction (CPPIC) a attesté d’un avoir de prévoyance de fr. 1'166.- au 16 mars 2004.

La Fondation institution supplétive LPP a fait état de plusieurs comptes pour un montant total au 16 mars 2004 de fr. 8'770,25, soit : fr. 2'375,35 (versement de la Rentenanstalt Swiss Life), fr. 2'573,55 (versement de la Caisse de prévoyance professionnelle des métiers de la construction), fr. 333,95 (versement de la Caisse de penstion d’Ambrosetti SA), fr. 3'487,40 (versement de la Generali assurance-fondation LPP, valeur au 1er janvier 2004).

Enfin, la Winterthur Columna a attesté d’un avoir de prévoyance au 16 mars 2004 de fr. 4'083.-.

Au vu de ce qui précède, le total de l’avoir de prévoyance de M. D__________ durant le mariage est de fr. 14'019,25.

Le 1er février 2005, l’Office cantonal de l’assurance-invalidité (ci-après l’OCAI) a informé le Tribunal de céans que Mme R__________avait déposé une demande de prestations AI le 3 juin 2003 et que son dossier était toujours en cours d’instruction.

Le 8 février 2005, le Tribunal de céans a informé les parties qu’il entendait ordonner le versement de fr. 2'743,90 du compte de Mme R__________ sur le compte de M. D__________ auprès de la Fondation institution supplétive LPP et leur a demandé de se prononcer sur ce partage, compte tenu également du courrier de l’OCAI du 1er février 2005.

La Fondation institution supplétive LPP et la CPPIC ont donné leur accord à ce mode de faire. La WINTERTHUR-COLUMNA a requis que le versement de l’avoir LPP soit effectué en sa faveur en lieu et place de la Fondation institution supplétive LPP. Mme R__________ s’est déclarée d’accord avec le partage sous réserve du fait que le montant à partager était de fr. 2'518,90 au lieu de fr. 2'743,90. Par ailleurs, il fallait considérer qu’aucun cas de prévoyance n’était encore survenu, sa demande AI étant encore pendante. Enfin, la Fondation de libre passage de X__________a transmis au Tribunal de céans le 15 février 2005 copie d’un virement de l’avoir de libre passage de fr. 2'743,90 en faveur du compte de M. D__________ auprès de la Fondation institution supplétive LPP.

Une copie de ces courriers a été communiquée à Mme D__________ le 1er mars 2005.

Par courrier du 4 mars 2005, Mme R__________ a informé le Tribunal de céans qu’elle partait du principe qu’il était intervenu auprès de la Fondation de libre passage de X__________pour lui communiquer le montant de fr. 2'743,90, lequel était erroné et a requis des explications sur le transfert effectué d’office par la Fondation de libre passage de l’X__________.

Le 8 mars 2005, le Tribunal de céans a transmis à Mme R__________ copie des courriers du 8 février 2005 communiqués à toutes les parties et l’a informée du fait qu’aucun autre courrier dont elle n’aurait reçu copie n’avait été transmis à la Fondation de libre passage de l’X__________.

EN DROIT

1. L'art. 25a de la loi fédérale sur le libre passage dans la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité du 17 décembre 1993 (LFLP), entré en vigueur le 1er janvier 2000, règle la procédure en cas de divorce. Lorsque les conjoints ne sont pas d’accord sur la prestation de sortie à partager (art. 122 et 123 Code Civil - CC), le juge du lieu du divorce compétent au sens de l'art. 73 al. 1 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle du 25 juin 1982 (LPP), soit à Genève le Tribunal cantonal des assurances sociales depuis le 1er août 2003, doit, après que l'affaire lui a été transmise (art. 142 CC), exécuter d'office le partage sur la base de la clé de répartition déterminée par le juge du divorce.

2. Selon l'art. 22 LFLP (nouvelle teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2000), en cas de divorce, les prestations de sortie acquises durant le mariage sont partagées conformément aux art. 122, 123, 141 et 142 CC; les art. 3 à 5 LFLP s'appliquent par analogie au montant à transférer (al. 1). Pour chaque conjoint, la prestation de sortie à partager correspond à la différence entre la prestation de sortie, augmentée des avoirs de libre passage existant éventuellement au moment du divorce, et la prestation de sortie, augmentée des avoirs de libre passage existant éventuellement au moment de la conclusion du mariage (cf. art. 24 LFLP). Pour ce calcul, on ajoute à la prestation de sortie et à l'avoir de libre passage existant au moment de la conclusion du mariage les intérêts dus au moment du divorce (ATF 128 V 230; ATF 129 V 444). Selon l’art. 122 al. 1 CCS, lorsque l’un des époux au moins est affilié à une institution de prévoyance professionnelle et qu’aucun cas de prévoyance n’est survenu, chaque époux a droit à la moitié de la prestation de sortie de son conjoint calculée pour la durée du mariage selon les dispositions de la loi du 17 décembre 1993 sur le libre passage. Lorsque le cas de prévoyance est survenu, un partage n’est techniquement plus possible, dès lors que cette circonstance a pour effet de supprimer toute prétention à une prestation de sortie. Dans ce cas, une indemnité équitable sera due (ATF 129 V 444).

3. Le législateur a exclu le partage des avoirs de prévoyance en cas de survenance d'un cas de prévoyance essentiellement pour des motifs pratiques. Par la survenance d'un cas de prévoyance au sens de la disposition précitée, il faut entendre la naissance d'un droit concret à des prestations de la prévoyance professionnelle, qui rend impossible le partage des avoirs de prévoyance à la base des prestations servies (dans ce sens, Kieser, Ehescheidung und Eintritt des Vorsorgefalles der beruflichen Vorsorge - Hinweise für die Praxis, PJA 2001 p. 155). Ainsi, la survenance de l'âge de la retraite ou du droit à des prestations d'invalidité d'un conjoint qui n'a jamais travaillé ou qui n'a jamais été affilié à la prévoyance professionnelle, dans la mesure où il n'entraîne aucun droit à des prestations d'une institution de prévoyance, permet encore le partage des avoirs de la prévoyance professionnelle de l'autre conjoint en sa faveur (Thomas Sutter/Dieter Freiburghaus, Kommentar zum neuen Scheidungsrecht, ad art. 124 n° 1 et 3; ad art. 122/141-142 n° 13 ss). En revanche, la survenance effective d'un cas de prévoyance rend le partage des avoirs de prévoyance impossible, si minimes soient les prestations versées ou les avoirs à leur base. Dans cette hypothèse, il appartient alors au juge du divorce de fixer le montant de l'indemnité équitable en tenant compte de cet élément (Thomas Sutter/Dieter Freiburghaus, op. cit., ad art. 124, n° 3) (ATFA du 30 janvier 2004, cause B 19/03).

En vertu du système des art. 122ss CC, les règles d’applicables sont différentes selon que le cas de prévoyance est survenu ou non. Un problème concret se pose lorsqu’un cas de prévoyance survient ou risque de survenir en cours de procédure. Cette situation peut se produire tant devant le juge du divorce que devant le juge des assurances (…). Comme il est fréquent que le cas d’invalidité soit admis avec effet rétroactif, il est également possible que le partage des prestations de sortie entre en force à l’égard de l’institution de prévoyance et qu’ultérieurement l’institution de prévoyance admette que le cas de prévoyance est survenu avant l’entrée en force. La loi ne contient aucune disposition réglant expressément ces situations. (J-A. Schneider / C. Bruchez « La prévoyance professionnelle et le divorce » in Le nouveau droit du divorce, p. 255).

Nonobstant les difficultés énoncées ci-dessus, la loi prévoit clairement l’impossibilité de partager les avoirs LPP dans le cas uniquement de la survenance effective du cas de prévoyance.

En l’espèce, l’OCAI ne s’est pas encore prononcé sur l’existence ou non d’une invalidité de la demanderesse. Il y a donc lieu de constater qu’un cas de prévoyance n’est pas effectivement survenu et qu’en conséquence le partage tel qu’arrêté par le jugement du Tribunal de première instance du 9 février 2004 peut avoir lieu.

5. Le juge de première instance a donné acte aux époux de ce qu’ils ont convenu de partager par moitié leurs avoirs de prévoyance.

Selon les documents produits, la prestation acquise pendant le mariage par M. D__________ est de fr. 14'019,25 tandis que celle acquise par Mme R__________ est de fr. 19'507.-, les intérêts ayant déjà été calculés par les institutions de prévoyance défenderesses. Ainsi M. D__________ doit à son ex-épouse le montant de fr. 7'009,60 (fr. 14'019,25 : 2) et celle-ci doit à celui-là le montant de fr. 9'753,50 (fr. 19'507.- : 2), de sorte que c’est Mme R__________ qui doit à M. D__________ le montant de fr. 2'743,90.

A cet égard, le montant de fr. 2'518,90 invoqué par la demanderesse provient d’un calcul fondé sur un avoir de prévoyance de celle-ci de fr. 19'057.- (lequel a été indiqué par erreur dans les courriers du Tribunal de céans du 8 février 2005) en lieu et place de fr. 19'507.-. C’est toutefois bien ce dernier montant qui est attesté par la Fondation de libre passage de X__________ au 16 mars 2004, dans un courrier du 4 juin 2004 dûment transmis à Mme R__________ le 8 juin 2004.

6. Selon l’art. 60 al. 5 LPP, l’institution supplétive gère notamment les comptes de libre passage, conformément à l’art. 4 al. 2 LFLP et tient à cet effet un compte spécial. L’art. 4 al. 1 et 2 LFLP prévoit que si l’assuré n’entre pas dans une autre institution de prévoyance, il doit notifier à son institution de prévoyance sous quelle forme admise il entend maintenir sa prévoyance (al. 1). A défaut de notification, l’institution de prévoyance verse, au plus tôt six mois, mais au plus tard deux ans après la survenance du cas de libre passage, la prestation de sortie, y compris les intérêts, à l’institution supplétive (art. 60 LPP) (al. 2).

En l’espèce, la WINTERTHUR-COLUMNA a attesté que M. D__________ fait encore partie du cercle de ses assurés dans le cadre d’un contrat avec l’entreprise de nettoyage Yarez Gil. Partant, il se justifie d’ordonner le versement du montant de fr. 2'743,90 en sa faveur.

6. Conformément à la jurisprudence, depuis le jour déterminant pour le partage jusqu'au moment du transfert de la prestation de sortie ou de la demeure, le conjoint divorcé bénéficiaire de cette prestation a droit à des intérêts compensatoires sur le montant de celle-ci. Ces intérêts sont calculés au taux minimum légal selon l'art. 12 de l'ordonnance sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 18 avril 1984 (OPP 2) ou selon le taux réglementaire, si celui-ci est supérieur (ATF non publié B 36/02 du 18 juillet 2003).

7. Compte tenu de l’avis de virement de la Fondation de libre passage de X__________ du 15 février 2005, lequel a été fait spontanément par celle-ci, en dehors de tout jugement du Tribunal de céans, il convient d’inviter la Fondation institution supplétive LPP à restituer le montant de fr. 2743,90 à la Fondation de libre passage de l’X__________.

8. Aucun émolument ne sera perçu, la procédure étant gratuite (art. 73 al. 2 LPP et 89H al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985).

 


PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

(conformément à la disposition transitoire de l’art. 162 LOJ)

Invite la Fondation de libre passage de X__________ à transférer, du compte de Mme R__________, la somme de fr. 2'743,90 sur le compte de M. D__________ auprès de la WINTERTHUR-COLUMNA, assurance n° 752.66.137.184.

Invite la Fondation de libre passage de l’X__________ à verser, en plus de ce montant, des intérêts compensatoires au sens des considérants, dès le 16 mars 2004 jusqu'au moment du transfert.

L’y condamne en tant que de besoin.

Invite la Fondation institution supplétive LPP à restituer à la Fondation de libre passage de X__________ le montant de fr. 2'743,90.

L’y condamne en tant que de besoin.

Dit que la procédure est gratuite.

Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par pli recommandé adressé au Tribunal fédéral des assurances, Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE, en trois exemplaires. Le délai ne peut être prolongé. Le mémoire doit : a) indiquer exactement quelle décision le recourant désire obtenir en lieu et place de la décision attaquée; b) exposer pour quels motifs il estime pouvoir demander cette autre décision; c) porter sa signature ou celle de son représentant. Si le mémoire ne contient pas les trois éléments énumérés sous lettres a) b) et c) ci-dessus, le Tribunal fédéral des assurances ne pourra pas entrer en matière sur le recours qu'il devra déclarer irrecevable. Le mémoire de recours mentionnera encore les moyens de preuve, qui seront joints, ainsi que la décision attaquée et l'enveloppe dans laquelle elle a été expédiée au recourant (art. 132, 106 et 108 OJ).

La greffière :

Nancy BISIN

 

La Présidente :

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le