A.                               En 2009 et 2010, les immeubles sis rue (...) 1 et 2 ont été édifiés sur la parcelle formant l’article de base [1] du cadastre de Z.________. Bien qu’on ne trouve au dossier aucun acte de vente ni contrat relatif à la construction des immeubles, il est admis par les parties que Y1.________ était propriétaire du terrain et par ailleurs organe de Y2.________ SA, laquelle est intervenue comme entrepreneur général.

Les différents copropriétaires ont acquis leurs parts respectives en 2010 et 2011. Les actes de vente comportaient tous une clause par laquelle « [l]e vendeur qui agit tant en son nom et pour son compte personnel qu’au nom et pour le compte de "Y2.________ SA" qu’il engage par sa signature individuelle déclare céder aux acquéreurs, avec effet libératoire, toutes les prétentions en responsabilité et en garantie ainsi que tous les droits de réclamation et exigences qui y sont liés avec effet à l’échéance de la livraison ».

B.                               Dès 2011, les copropriétaires ou certains d’entre eux se sont plaints de divers défauts de l’immeuble, soit en particulier : humidité dans les caves ; fissures des façades des immeubles ; écoulement d’eau le long des chéneaux, avec formation de glace en hiver. D’autres problèmes (stores ; écoulements d’eau dans les conduits de cheminée, ainsi qu’odeurs de fumée dans les appartements ; serrurerie ; ferblanterie ; talus) ont également été évoqués, mais n’entrent pas dans le cadre du présent litige.

Des travaux de réfection des façades ont été annoncés par Y2.________ SA, le 24 mai 2013, et ils ont eu lieu en 2014, sans que les pièces du dossier n’établissent clairement par qui : la note précitée ne le disait pas mais attribuait les défauts originels à « la mauvaise exécution de la construction par Y2.________ SA » ; on ignore toutefois si elle a été soumise aux intimés et ratifiée par eux, le courriel de A.________ du 18 avril 2016, cité dans celui de Me B.________ du 8 juin 2016, n’étant pas produit ; le courrier de Y2.________ SA à Me B.________, du 24 juin 2016, indique pour sa part que les façades et leur réfection ont été réalisées par C.________ SA et, pour les matériaux, D.________ AG, alors que le tableau récapitulatif des défauts dressé par Me B.________ le 22 février 2016 désignait C.________ SA comme réalisatrice des façades extérieures.

Dans le courrier du 24 juin 2016 précité, Y2.________ SA proposait la mise en œuvre de trois expertises, portant sur les chéneaux et balcons, sur l’humidité des caves et sur les façades. Elle se déclarait prête à avancer le 50 % des frais des deux premières expertises, dont la répartition suivrait les conclusions de celles-ci, ainsi que 25% des frais de la troisième expertise, vu la possible mise en cause d’entreprises tierces qui devraient en faire de même. Y2.________ SA demandait par ailleurs aux copropriétaires d’établir une liste des « autres travaux de remise en état qui n’entrent pas dans les trois catégories ci-dessus et dont la réfection incombe à Y2.________ SA », pour pouvoir y donner suite dans la mesure qui serait reconnue.

Un entretien a pris place le 12 décembre 2016 et la copropriété allègue qu’à cette occasion, Y2.________ SA est revenue sur ses propositions d’expertise, mais elle ne dépose pas la note d’entretien précitée. Dans sa prise de position du 16 janvier 2017, Y2.________ SA annonce qu’un calendrier des travaux de façades à réaliser « sera communiqué prochainement ». Elle s’oppose à une expertise des chéneaux, source de frais inutiles dès lors qu’une « solution viable a été trouvée » et qu’elle prendra à sa charge les frais d’installation des câbles chauffants. Elle propose, sans « reconnaissance de responsabilité et à bien plaire », de poser une grille d’aération des caves, en précisant que les problèmes d’humidité semblent limités aux mois d’été. Enfin, elle prend note du fait que les points traités dans son courrier (parmi lesquels figurent les trois objets de la présente procédure) « sont les seules "prétentions" que vos mandants ont à notre encontre, respectivement Y1.________ ou toutes les sociétés du groupe de Y1.________ ». La correspondance s’est poursuivie les 13 février 2017 (lettre de Me B.________ prenant acte des informations relatives aux façades et acceptant les propositions relatives aux chéneaux – en tant que solution partielle – et à l’humidité des caves, avec réserve de nouvelles démarches si nécessaire) et 10 mars 2017 (lettre de Y2.________ SA annonçant la pose de capteurs-tests par D.________ sur les façades, donnant des précisions sur le coût et l’effet possible des câbles chauffants dans les chéneaux et informant la copropriété que l’autorisation de pose d’une grille n’a pas été accordée). Y2.________ SA a donné de nouvelles informations le 19 juin 2017 et proposé notamment, « [à] bien plaire et sans reconnaissance de responsabilité », une nouvelle solution relative aux chéneaux, courrier auquel la copropriété a répondu le 18 août 2017, en refusant la proposition précitée, que Y2.________ SA a cependant maintenue par courrier du 20 septembre 2017, en précisant qu’à défaut d’accord, elle laisserait « à la PPE le soin d’agir ». On peut noter que, s’exprimant dans le même courrier au sujet du « massif de cheminée » (non en cause ici), Y2.________ SA proposait une répartition des frais de réfection entre les entreprises intervenues, la copropriété et elle-même, bien qu’elle ne s’estimât pas responsable et relevât qu’elle avait cédé les garanties. Réagissant par son mandataire au courrier précité, le 28 septembre 2017, la copropriété a accepté la proposition relative aux chéneaux, en demeurant sceptique sur son efficacité et invitant son interlocutrice à rendre « expressément attentives […] toutes les entreprises concernées au fait qu’en réalité, de l’humidité s’introduit aussi le long de la paroi voisine des chéneaux concernés ». Par lettre du 8 décembre 2017, Y2.________ SA informait la copropriété que D.________ avait testé le mauvais immeuble, ce qu’elle déplorait, tout en rappelant qu’elle avait cédé l’ensemble des garanties et que C.________ SA proposait une expertise, dont les frais devraient être partagés entre elle, D.________ et la copropriété, le rôle de Y2.________ SA étant le « suivi » du dossier, à bien plaire et sans reconnaissance de responsabilité. S’agissant des chéneaux, elle se référait à la solution discutée précédemment et proposait d’en faire l’essai sur une descente d’eau pluviale, suivi d’un bilan (idem). Le 15 décembre 2017, la copropriété a indiqué que l’expertise des façades ne la concernait pas, dès lors que « les vendeurs et entreprises répondent » des défauts de l’immeuble. Elle demandait donc que le vendeur Y1.________, Y2.________ SA et C.________ SA prennent « les dispositions nécessaires pour que les travaux de réfection soient exécutés en 2018 », tout en maintenant son scepticisme au sujet de la solution relative aux chéneaux. Dans un courriel de relance du 16 mars 2018, le mandataire de la copropriété demandait des informations « au sujet des travaux que Y2.________ SA va entreprendre ce printemps » pour résoudre les différents problèmes évoqués. Par mail du 27 mars 2018, le représentant du « groupe F.________ » a répondu que le problème d’humidité des caves était « clos pour le Groupe F.________ ». Au sujet des façades, il écrivait : « [n]ous avons détecté […] deux venues d’eau possibles au niveau des marquises surplombant les surfaces posant problèmes. Nous allons agir au printemps sur ces éléments puis constater l’efficacité de l’intervention. Si cette intervention règle le problème, nous procéderons à la suite à la réfection des surfaces de façade concernées ». Il indiquait de même, à la première personne du pluriel, vouloir procéder à des constats dans plusieurs appartements, au sujet des chéneaux. Dans les échanges de correspondance ultérieurs, les représentants de Y2.________ SA et groupe F.________ du groupe de Y1.________ (les deux dénominations figurant sur les courriers) discutaient les mesures envisagées pour les façades et les chéneaux (problèmes qui leur apparaissaient probablement liés), à la première personne du pluriel.

Le 13 septembre 2018, Me B.________ a reçu en son étude G.________, juriste au sein du groupe F.________, et H.________, conductrice de travaux de Y2.________ SA. Dans la note d’entretien qu’il a rédigée et que ses interlocutrices ont annotée, il relève, au sujet des façades, que « la garantie de Y2.________ SA s’étend aussi à l’immeuble rue (...) 1 et à ses façades en particulier ». S’agissant des chéneaux, il est indiqué que « Y2.________ SA estime que les travaux » à entreprendre sur les marquises résoudront peut-être le problème. Enfin, quant à l’humidité des caves, il est mentionné que « Y2.________ SA décline toute responsabilité en estimant que les relevés d’humidité n’ont pas prouvé qu’il y avait dépassement des normes ». Aucune des expressions précitées n’a fait l’objet d’une correction, si ce n’est sur l’objet de la garantie de façade (limitée ou non à la façade ouest).

Enfin, dans une communication du 6 décembre 2018, Y2.________ SA résumait les travaux en vue concernant les chéneaux et les façades, en des termes donnant à penser qu’elle les mènerait (« … nous avons repris contact... », « … les éléments de ferblanterie que nous avions l’intention d’installer… »), avant de rappeler que l’ensemble des garanties avaient été cédées aux copropriétaires et qu’il leur appartenait donc « d’agir directement contre les entreprises concernées ».

C.                               Lors de l’assemblée de copropriété tenue le 29 janvier 2019, les copropriétaires ont estimé que Y2.________ SA laissait en suspens des défauts incontestables ou ne proposait d’agir que sur les conséquences et non les causes d’infiltrations d’eau, de sorte qu’ils ont décidé à l’unanimité de requérir une expertise par voie de procédure judiciaire contre Y2.________ SA.

La requête déposée au nom de la copropriété, le 18 avril 2019, tend à la mise en œuvre d’une expertise pour constater les défauts affectant les façades, les chéneaux et le taux d’humidité des caves des immeubles rue (...) 1 et 2, déterminer leur origine, proposer des solutions techniques pour y remédier et en chiffrer le coût. Elle est dirigée contre Y2.________ SA et Y1.________, celui-ci en qualité de vendeur et celle-là à titre d’entreprise générale qui s’est investie dans la recherche de solutions aux défauts et a formulé de multiples propositions à ce sujet, attitude par laquelle elle « a admis sa qualité pour défendre dans le présent litige ».

D.                               Après notification de la requête aux intimés et prolongation à deux reprises du délai de réponse, ceux-ci se sont prononcés par mémoires du 3 juin 2019.

Y2.________ SA a conclu principalement à l’irrecevabilité de la requête, subsidiairement à son rejet et plus subsidiairement à l’admission de ses questions complémentaires, le tout avec suite de frais et dépens. Elle se fonde sur l’exclusion de toute garantie en relation avec la vente, ce qui exclut sa responsabilité « en tout cas pour les parties de l’ouvrage qu’elle n’a pas réalisées ». Ses différentes interventions au sujet des défauts allégués (qu’elle rappelle en détail, sur les trois points considérés, dans ses allégués de fait) s’inscrivaient dans l’assistance qu’elle accordait à bien plaire aux acquéreurs. Elle n’a pas réalisé les travaux de façades, accomplis par C.________ SA (de même, indique-t-elle dans ses allégués de fait, que les travaux de réfection de 2014), et elle n’a fait qu’exécuter les plans d’exécution des descentes d’eaux pluviales, les travaux étant exécutés par I.________ SA. Il ressort de la question complémentaire posée à titre subsidiaire, au sujet des façades, que l’intimée admet avoir assumé la direction des travaux et requiert une détermination des parts de responsabilité des différents intervenants, dont elle-même.

Pour sa part, Y1.________ se réfère à l’exclusion stipulée de toute garantie du vendeur, celui-ci ayant cédé tous ses droits de garantie aux acquéreurs. Il souligne n’avoir jamais été informé des défauts allégués, à titre personnel.

E.                               Par courrier du 19 septembre 2019, rappelé le 5 novembre 2019, le mandataire de la requérante a demandé qu’une audience soit appointée pour débattre de la cause. Le juge a estimé, par lettre du 2 décembre 2019, qu’aucune audience n’était nécessaire et qu’une décision fondée sur le dossier en l’état serait prochainement notifiée.

Le 6 décembre 2019, Me B.________ a insisté sur la nécessité d’appointer une audience, dès lors que la contestation de la qualité pour défendre des requis soulevait des questions de fait et de droit impossibles à trancher, en l’état du dossier. Il admettait la signature par les acquéreurs des vingt-deux actes d’acquisition comportant cession des droits de garantie, mais soulignait le comportement abusif des requis, niant leur qualité pour défendre alors que Y2.________ SA, propriété du Groupe F.________, lui-même propriété de Y1.________, avait systématiquement répondu aux copropriétaires, s’agissant des défauts de construction.

F.                               Par décision du 29 avril 2020, le président du Tribunal régional des Montagnes et du Val-de-Ruz a rejeté la requête de preuve à futur et condamné la copropriété requérante aux frais de justice, sans dépens.

                        En substance, le premier juge a considéré qu’il pouvait statuer sans tenir d’audience, en vertu de l’article 256 al. 1er CPC, dès lors que la requête s’accompagnait de nombreuses pièces et que la requérante, représentée par un mandataire professionnel, pouvait exercer son droit de réplique inconditionnel si elle l’estimait utile, comme elle en aurait largement eu le temps vu le retard de la décision, ajoutait-il. Admettant ensuite la qualité pour agir de la communauté des copropriétaires d’étage, le juge a en revanche retenu que l’intimé Y1.________ ne pouvait être considéré comme un entrepreneur susceptible de répondre des défauts de l’ouvrage, comme l’implique l’article 367 al. 2 CO sur lequel se fondait la requête. En effet, les actes du dossier le faisaient exclusivement apparaître comme le vendeur des unités de propriété d’étages. Examinant enfin la position juridique de Y2.________ SA, le premier juge a observé qu’à lire tant la requête que la réponse, cette entreprise avait exécuté certaines parties de l’ouvrage, en qualité d’entreprise générale, notion qui pouvait recouvrir diverses réalités selon la délégation des travaux à des sous-entrepreneurs, avec une répercussion sur le régime de responsabilité. Or le libellé de la clause contractuelle reprise au chiffre 2 de la requête (soit celle de cession des prétentions en responsabilité et en garantie) et diverses pièces du dossier conduisaient à la conclusion qu’une pluralité d’entrepreneurs étaient intervenus sur le chantier. Le juge civil résumait donc comme suit les relations contractuelles nouées au sujet des immeubles : « Y1.________, propriétaire de l’article de base, a confié à Y2.________ SA, entrepreneur général, et à d’autres entrepreneurs (agissant lui-même ou par l’intermédiaire de la société précitée) la construction des deux immeubles, sur lesquels ont été constituées des unités de propriété par étages qui ont, une fois l’ouvrage réalisé, été vendues aux parties requérantes, avec cession à leur profit des droits découlant de la garantie à raison des défauts ». Le dossier n’était en revanche « pas suffisamment étayé pour admettre qu’il incomberait à Y2.________ SA d’assumer seule et à titre exclusif par rapport à d’autres entrepreneurs les obligations découlant de la survenance d’éventuelles malfaçons », son intervention très active dans la recherche de solutions pouvant s’expliquer par l’engagement du vendeur d’assister les acquéreurs dans l’exercice de leurs droits. Passant pour finir à l’identification des entrepreneurs concernés par les éventuels défauts, le juge a retenu que c’était C.________ SA pour la peinture des façades extérieures ; la société I.________ SA pour les écoulements des chéneaux et l’entreprise J.________ SA, chargée des travaux de maçonnerie, pour ce qui était de l’humidité des caves.

G.                               La copropriété par étages rue (…) 1-2 (plus loin : la copropriété) a formé appel de la décision précitée, par pli recommandé du 18 mai 2020. Elle conclut à son annulation et à ce que le Tribunal cantonal ordonne « une expertise de preuves à futur au sens des articles 158 al. 1 litt. A CPC et 367 al. 2 CO contre Y2.________ SA et Y1.________», dont les frais seraient avancés par l’appelante, avec droit de répétition dans une future procédure « en dommages-intérêts » contre les intimés.

                        En substance, l’appelante invoque une violation de son droit d’être entendue, les intimés ayant nié leur qualité pour défendre et soulevé « ainsi une question juridique trop complexe pour être traitée par écrit » et le juge n’ayant pas imparti aux copropriétaires un délai pour déposer leurs moyens de preuves, en leur notifiant la réponse des intimés. Sur le fond, elle conteste la validité de la cession des droits de garantie mentionnée dans les contrats de vente, dès lors que les cédants n’ont pas fourni aux acquéreurs la liste des maîtres d’état ayant participé à la construction, comme ils s’y engageaient aussi dans lesdits contrats. Enfin, l’appelante fait valoir un abus manifeste de droit de la part de Y2.________ SA qui se déclare non concernée par les défauts, après avoir proposé elle-même une expertise en 2016 – refusée par les copropriétaires dès lors qu’elle n’aurait eu « aucune force coercitive, ce qui n’est pas le cas d’une expertise judiciaire » -, et après s’être beaucoup impliquée, tout comme Y1.________, « dans les affaires de la copropriété ». Elle souligne que la société holding F.________ SA – dont elle dépose l’acte constitutif −, propriété de l’intimé Y1.________, regroupe tant Y2.________ SA que J.________ SA et C.________ SA, entreprises citées dans la décision attaquée. Quant à I.________ SA, le premier juge la tient pour responsable potentiel des défauts, sans avoir administré la moindre preuve, pour un ouvrage dont Y2.________ SA admettait être à l’origine des plans d’exécution. Il n’est d’ailleurs pas interdit de requérir une preuve à futur « sans impliquer d’entrée de cause toutes les parties ».

H.                               Les intimés, désormais représentés, concluent principalement au rejet intégral de l’appel et, subsidiairement, à l’admission de leurs questions complémentaires, le tout avec suite de frais et dépens. Ils contestent toute complexité de la cause qui aurait imposé la tenue d’une audience et rappellent qu’en procédure sommaire, les parties n’ont pas, selon la jurisprudence, le droit de s’exprimer deux fois (le droit de réplique ne permettant pas l’allégation de faits ni l’invocation de moyens de preuve nouveaux). Ils estiment nouvelle en appel, et donc irrecevable, l’affirmation selon laquelle l’appelante n’aurait pas reçu la liste des maîtres d’état ayant participé à la construction (affirmation totalement fausse d’ailleurs, à leurs yeux, vu notamment du tableau récapitulatif des défauts établi par le propre mandataire de l’appelante). En ce qui concerne le grief d’abus de droit, les intimés indiquent que Y2.________ SA a recherché une solution amiable, dans le cadre de son devoir d’assistance, mais que cela ne lui impose pas de devoir répondre ensuite à une procédure judiciaire de preuve à futur. L’argument lié à la réunion des différentes sociétés concernées au sein d’une holding est, lui aussi, nouveau et irrecevable, comme la preuve déposée à ce sujet. Quoi qu’il en soit, ajoutent les intimés, les sociétés en cause sont juridiquement distinctes et il n’y a aucune raison de les confondre s’agissant de la garantie des défauts. Le fait que Y2.________ SA ait réalisé la conception des chéneaux est invoqué pour la première fois en appel et aucun avis de défaut n’a jamais été donné à ce titre. Enfin, l’absence de toute argumentation, dans l’appel, au sujet de la qualité pour défendre de Y1.________ donne à penser que l’appelante admet la décision à cet égard.

I.                                 Par courrier du 22 juin 2020, le juge instructeur de l’appel a annoncé que la cause serait jugée sur pièces et sans débat, sous réserve d’un droit de réplique inconditionnel, à exercer dans les 20 jours, le cas échéant. Par mémoire du 20 juillet 2020, la copropriété formule des « observations » au sujet de la réponse des intimés. Elle relève que l’absence d’une liste des maîtres d’état concernés fait l’objet d’un simple constat de sa part et non d’un allégué nouveau. S’agissant du refus du premier juge de tenir une audience, l’appelante se réfère à son courrier du 6 décembre 2019 auquel le juge aurait dû répondre, en lui fixant au moins un délai pour prendre position sur la question de la légitimation passive. Elle discute la portée, à son avis nulle quant à la qualité pour défendre, de certaines pièces invoquées par l’adverse partie. Concernant la nouveauté prétendue de l’argument relatif aux plans d’exécution, elle fait valoir qu’elle aurait invoqué ce moyen à l’audience qu’elle réclamait et qu’au demeurant, Y2.________ SA n’a admis être l’auteure des plans que dans sa réponse du 3 juin 2019. Enfin, elle réaffirme l’abus de droit qui consiste, pour Y2.________ SA, à se retrancher derrière un « juridisme absolu » si on ne se plie pas entièrement à ses conditions.

                        Suite au courrier du juge instructeur du 28 juillet 2020 (expédié le 21 août vu l’absence annoncée de Me L.________), les intimés ont renoncé à dupliquer.

C O N S I D E R A N T

1.                                a) La décision refusant l’administration d’une preuve à futur requise hors procès (art. 158 CPC) est une décision finale au sens de l’article 90 LTF (arrêt du TF du 27.06.2014 [4A_248/2014], avec référence à l’ATF 138 III 46 ; voir aussi l’arrêt du 04.03.2020 [4A_606/2018]), mais finale aussi au sens de l’article 308 CPC et donc susceptible d’appel si la valeur litigieuse de 10'000 francs est atteinte (premier arrêt cité, cons. 1.3). Ce dernier constat va à l’encontre du raisonnement de l’appelante, pour qui la procédure de preuve à futur ne serait pas patrimoniale, dans la perspective de l’article 308 al. 2 CPC. Le fait que la réquisition d’expertise fondée sur l’article 367 al. 2 CO donne lieu à une procédure gracieuse (cf. CR CO I – Chaix, art. 367 N. 17, avec référence à un arrêt neuchâtelois paru RJN 1995, p. 76 et résumé dans DC 96 p. 119 ; voir également CR CPC – Haldy, art. 19 N. 4) n’empêche ni l’application des règles de la procédure sommaire (art. 250 let. b ch. 4 CPC), ni la qualification d’affaire patrimoniale si la requête « vise un but économique » (arrêt du TF du 18.03.2013 [5A_763/2012]), comme l’est à l’évidence la détermination des responsabilités liées à des défauts de construction. La mesure de la valeur litigieuse paraît logiquement pouvoir porter, s’agissant d’une preuve requise avant procès, sur l’objet du litige futur (voir, en ce sens, l’arrêt du TF du 04.01.2016 [4A_352/2015] cons. 1.2). En l’espèce, celui-ci n’est certes pas articulé, même de manière vague, dans la requête mais on peut néanmoins admettre qu’entre les frais des expertises en jeu, des travaux de réfection qui pourraient en résulter et d’éventuels dommages subis du fait des défauts, le seuil de 10'000 francs est assurément dépassé (on ne saurait par contre l’affirmer, en l’état, pour ce qui est de la limite de 30'000 francs posée à l’article 74 LTF).

                        b) Le mémoire d’appel a été posté le lundi 18 mai 2020, soit le dernier jour utile (art. 314 al. 1er CPC), vu la notification intervenue le 6 mai 2020. Il respecte sans autre les formes requises, hormis quant à la précision de la seule conclusion de fond prise, soit la quatrième, qui tend à ce que la Cour « ordonne une expertise de preuves à futur », sans indiquer son ou ses objet(s). Le principe jurisprudentiel veut qu’en cas d’admission de l’appel, ses conclusions puissent être intégrées, telles quelles, au dispositif du jugement d’appel (ATF 137 III 617, 619, cité dans de nombreux arrêts postérieurs). Cette condition n’est pas remplie en l’espèce. Toutefois, « le tribunal doit entrer en matière même sur des conclusions formellement insuffisantes lorsqu'il résulte clairement des motifs du mémoire d'appel en relation avec la décision attaquée quelles sont exactement les conclusions prises et donc les modifications du jugement demandées ou, en cas de créances portant sur des sommes d'argent, quel montant est réclamé. Les modifications demandées dans les conclusions stricto sensu du mémoire d'appel doivent être interprétées à la lumière des motifs de celui-ci » (arrêt du TF du 13.03.2019 [4A_373/2018]). Certes, la conclusion No 1 de la requête du 18 avril 2019 n’était pas plus précise que celle reprise en appel, mais la requérante indiquait, au chiffre 5 de son mémoire, quel serait l’objet « de la requête de preuves à futur » [recte : l’objet de la preuve à futur] et elle accompagnait ce mémoire d’un programme de questions, portant sur les différents défauts allégués. Comme le rejet de la requête reposait sur l’absence de légitimation passive des intimés, sans que l’objet des preuves requises ne soit examiné plus avant, on peut retenir sans hésitation que l’appelante persiste à requérir la même expertise qu’en première instance, de sorte qu’il serait excessivement formaliste de déclarer l’appel irrecevable pour ce motif.

                        c) En revanche, la motivation de l’appel n’est dirigée que contre Y2.________ SA et il n’est nullement prétendu que Y1.________ aurait pris une autre part au développement du litige que celle de vendeur des immeubles, ni qu’il soit recherché (à futur) au titre de la garantie de la chose vendue (la brève chronologie figurant au premier allégué de fait de l’appel ne permet d’ailleurs pas de savoir dans quelle mesure les immeubles étaient construits au moment de la vente des unités d’étages). Le premier paragraphe du considérant 7 de la décision attaquée ne fait l’objet d’aucune critique spécifique, comme l’exige la jurisprudence (voir par exemple l’arrêt du TF du 31.10.2019 [4A_368/2019] cons. 7). Si donc l’appel est également dirigé contre le second intimé, il est insuffisamment motivé (art. 311 CPC) et doit être déclaré irrecevable dans cette mesure.

                        d) Par ailleurs, comme observé par les intimés, la preuve N° 2 jointe à l’appel (acte constitutif de F._________ SA) est nouvelle en appel, sans la moindre explication, alors qu’elle aurait pu être produite en première instance, tout comme le fait qu’elle documente (l’imbrication des sociétés en cause) aurait pu être allégué devant le premier juge. L’une et l’autre ne peuvent donc être pris en compte (art. 317 al. 1er CPC).

2.                                Le premier grief de l’appelante tient dans la violation prétendue du droit d’être entendu, faute pour le premier juge d’avoir convoqué une audience de débats ou du moins d’avoir fixé aux parties un délai de preuves. En ce qui concerne la nécessité d’une audience, les intimés se réfèrent à tort à l’article 273 CPC, qui pose, pour les procédures matrimoniales, une règle plus stricte que celle de l’article 256 CPC, laquelle laisse toute latitude au juge de « renoncer aux débats et statuer sur pièces, à moins que la loi n’en dispose autrement ». Comme rappelé par CR CPC – Bohnet, art. 256 N. 4, le droit à la tenue d’une audience publique, garanti par les articles 6 par. 1 CEDH et 30 al. 3 Cst. féd., ne vaut que si la cause aboutit à une décision définitive, ce qui n’est pas le cas d’une procédure de preuve à futur. S’il s’agissait de déterminer le ou les objets de preuve et de discuter les qualités requises de l’expert à désigner, la tenue de débats pourrait être plus opportune que des échanges écrits, sans que ceux-ci ne soient inconcevables. En revanche, pour trancher la question de la légitimation passive des intimés, à partir des preuves littérales administrées, soit une question essentiellement juridique, on ne voit pas l’avantage que procureraient des débats oraux (hormis peut-être la possibilité d’un interrogatoire, qui n’a toutefois pas été requis). Il n’était donc nullement interdit au premier juge de renoncer à la tenue d’une audience, comme il l’a fait savoir par courrier du 2 décembre 2019, soit près de six mois après la notification des réponses des intimés et près de cinq mois avant de rendre la décision attaquée, de sorte que la requérante avait largement le temps de développer ses arguments par écrit, en faisant usage de son droit de réplique inconditionnel si elle l’estimait utile, sans que le juge n’ait à lui impartir de délai pour ce faire.

                        Pour ce qui est de l’administration de preuves complémentaires, à l’appui de la requête, il y a lieu d’observer d’abord que la requérante n’en a pas proposé, ni dans ses courriers de rappel des 19 septembre et 5 novembre 2019, ni surtout dans la lettre du 6 décembre 2019 par laquelle elle persistait à requérir la tenue d’une audience et aurait dû la justifier sous cet angle aussi, si elle l’estimait opportun. Elle ne saurait donc dire que son offre de preuves a été rejetée. Au demeurant, l’affirmation doctrinale à laquelle l’appelante se réfère, préconisant la fixation d’un délai de preuves en procédure sommaire, s’il n’est pas tenu d’audience (CR CPC − Bohnet art. 253 N. 9), paraît isolée, sans doute parce qu’elle se concilie mal avec le cours ordinaire de la procédure sommaire, qui ne prévoit en principe qu’un tour de parole (écrite ou orale), comme le souligne le Tribunal fédéral dans l’ATF 144 III 117 (et comme il le rappelle dans l’arrêt du TF du 06.08.2019 [4A_70/2019]). Enfin, avec ou sans délai imparti à cette fin, l’appelante pouvait, comme déjà dit, faire usage de son droit de réplique inconditionnel.

                        Ce premier grief doit dès lors être rejeté.

3.                                L’appelante fait ensuite valoir trois griefs, soit l’invalidité de la cession des droits de garantie, l’abus de droit des intimés et, de manière très brève, la possibilité pour le maître de l’ouvrage de requérir une expertise fondée sur l’article 367 CO sans impliquer d’entrée de cause toutes les parties. Certes, si la Cour d’appel applique le droit d’office, elle « le fait uniquement, en vertu de l'art. 311 al. 1 CPC, sur les points du jugement que l'appelant[e] estime entachés d'erreurs et qui ont fait l'objet d'une motivation suffisante – et, partant, recevable (cf. cons. 3.1) –, pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) ou pour constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC) » (arrêt du TF du 01.09.2014 [4A_290/2014] cons. 5). Ce n’est que de façon très ponctuelle, presque en passant, que l’appelante évoque la question de la partie contre laquelle doit être dirigée une requête de preuve à futur, mais comme il s’agit de la question centrale en l’espèce (et, peut-on dire, sous-entendue dans le grief relatif à la validité de la cession de garantie), il convient néanmoins de l’examiner.  

                        Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, la « qualité pour agir (communément qualifiée de légitimation active, Aktivlegitimation ; cf. arrêts du TF du 08.11.2016 [4A_357/2016]  [publié au RO 142 III 782] cons. 3.1.3.2 ; du 07.12.2016 [4A_404/2016] cons. 2 ; Jean-François Poudret, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, vol. II, 1990, no 1.3.2.4 ad art. 43 OJ, p. 114) ou la qualité pour défendre (communément qualifiée de légitimation passive, Passivlegitimation) relève du fondement matériel de l'action ; elle appartient au sujet (actif ou passif) du droit invoqué en justice et son absence entraîne, non pas l'irrecevabilité de la demande, mais son rejet (ATF 128 III 50 cons. 2b/bb p. 55 et les références) » (arrêt du TF du 15.03.2017 [4A_619/2016]).

                        La procédure de preuve à futur est toutefois particulière à cet égard. Dans l’arrêt du TF du 25.01.2013 [5A_832/2012], il est rappelé que, selon « l'art. 158 CPC traitant de la preuve à futur, le tribunal peut ordonner qu'une preuve soit administrée à tout moment, également hors procès. La loi limite cependant le droit à la preuve à futur dans les cas [« aux cas », faut-il comprendre] où il existe une prétention légale à l'administration d'une preuve hors procès (al. 1 let. a), où le moyen de preuve ou la force probante de cette preuve est mise en danger (al. 1 let. b), et lorsque le requérant rend vraisemblable un " intérêt digne de protection " à l'administration d'une preuve à futur (al. 1 let. b) ». En l’occurrence, c’est le premier cas de figure qui est invoqué, par référence à l’article 367 al. 2 CO, que le CPC n’a pas modifié (Fellmann, Sutter-Somm et al. ZPO Komm. 3e éd., art. 158 N. 11). Dans toutes les hypothèses visées à l’article 158 CPC, il « n'existe pas de lien juridique, tel qu'un délai à observer sous menace de caducité, entre la procédure de la preuve à futur et le procès civil où celle-ci sera éventuellement mise en œuvre (arrêt du TF du 18.06.2013 [4A_9/2013] cons. 5). Cette procédure-là est donc indépendante » (arrêt du TF du 08.11.2018 [4A_421/2018]). Même dans les cas visés à l’article 158 al. 1 let. b CPC, où un intérêt digne de protection est requis, le juge n’a pas à apprécier les chances de succès de la partie requérante dans un procès au fond. Il faut et il suffit qu’elle rende vraisemblable un état de fait dont elle pourrait déduire des prétentions (ATF 140 III 12 cons. 3.3.4 ; voir également ATF 140 III 16 cons. 2.2.2 et 2.5). L’intimé n’est pas tenu de participer à la procédure de preuve à futur et, s’il y renonce, sa position dans la procédure au fond ne sera pas affaiblie, notamment quant à la possibilité d’administrer de nouvelles preuves sur les mêmes objets (Fellmann, op. cit. art. 158 N. 45a et les références citées). Au vu de ces considérations et sans aller jusqu’à ne nier la légitimation passive, en procédure de preuve à futur, qu’en présence d’une requête chicanière ou, plus généralement, abusive, il convient d’admettre une telle légitimation, dans ce cadre particulier, s’il est rendu simplement vraisemblable que l’objet des preuves requises puisse donner lieu à des prétentions futures de la partie requérante contre l’intimée.

4.                                En l’espèce, la position de Y2.________ SA ne manque pas d’ambiguïté, à la lecture des communications échangées durant plusieurs années sur les points litigieux.

                        On notera d’abord que, sur un plan général, l’intimée – qui se réfère en procédure à son rôle d’intermédiaire et de soutien dans la recherche de solutions – n’a pas toujours tenu le même langage : la première expression claire de ce rôle de « suivi », au dossier, figure, pour ce qui est des façades, dans son courrier du 8 décembre 2017, mais en d’autres occasions, elle adoptait ou concédait une position de responsable potentielle des défauts allégués. Ainsi, sa proposition d’expertise du 24 juin 2016, portant exactement sur les trois objets de l’actuel litige, s’accompagnait d’une offre d’avance partielle des coûts (de 50% pour les chéneaux ainsi que les caves et de 25% pour les façades, vu la responsabilité éventuelle d’autres intervenants) qui dépasse clairement le rôle de médiateur, même si elle est formulée « à bien plaire et sans reconnaissance de responsabilité » (quant à l’origine des défauts, faut-il logiquement comprendre). Une telle conclusion est encore raffermie par le paragraphe final du même courrier, sur la manière de procéder pour « les autres travaux de remise en état qui n’entrent pas dans les trois catégories ci-dessus et dont la réfection incombe à Y2.________ SA », sans que l’intimée ne précise que sa position juridique serait fondamentalement différente, pour ces travaux-ci et ceux-là. Ultérieurement, la lettre de Y2.________ SA du 16 janvier 2017, qui passe en revue les divers défauts allégués, a pour titre général : « rue (…) 1 et 2, Z.________ – contrat d’architecte », ce qui paraît traduire le (ou un) statut assumé par l’intimée et ouvrir, potentiellement, un fondement de responsabilité. Enfin, suite à l’entretien du 13 septembre 2018, le mandataire de la PPE a adressé aux représentantes de Y2.________ SA et F.________ SA un résumé détaillé dont il ressort que seuls les travaux, déjà menés ou futurs, de Y2.________ SA, ainsi que la responsabilité de cette dernière ont été discutés à cette occasion. Le résumé prête notamment auxdites représentantes la déclaration que « la garantie de Y2.________ SA s’étend aussi à l’immeuble rue (…) 1 et à ses façades en particulier ». Ce résumé d’entretien a fait l’objet de six remarques numérotées de la part de la représentante de F.________ SA, avec copie aux organes de Y2.________ SA, mais loin de corriger les termes utilisés dans le passage susmentionné, la première note étend leur objet aux « cloques constatées sur la façade Ouest ».

                        Toujours sur un plan général, il convient d’observer que la cession de garantie invoquée, à titre libératoire, par l’intimée n’a sans doute pas la portée qu’elle lui prête. En effet, la formulation de la clause de cession ne fait intervenir que le vendeur des immeubles et la subordonnée qui le désigne comme organe de Y2.________ SA ne fait pas de celle-ci, d’un point de vue syntaxique, la cessionnaire d’on ne sait pas précisément quels droits (le dossier ne permet pas de conclure que le contrat d’entreprise générale ait été intégré à l’acte de vente). Certes, le tableau récapitulatif des défauts établi par Me B.________ le 22 février 2016 fait apparaître Y2.________ SA comme entrepreneur, architecte ou ingénieur, de certaines parties d’ouvrage seulement, mais cela n’exclut pas une éventuelle responsabilité comme entrepreneur général, points sur lesquels le dossier ne permet pas de se prononcer (logiquement d’ailleurs car ce serait l’objet du procès au fond).

                        Si l’on examine ensuite les divers objets d’expertise litigieux, il faut observer, s’agissant des façades d’immeubles, que le courrier du 24 mai 2013, relatif aux « garanties des façades », correspond aux expressions classiques d’un entrepreneur mis en cause pour des défauts et ne comporte aucune référence à la responsabilité éventuelle de tiers. Il ressort par ailleurs de la question complémentaire d’expertise No 5 de l’intimée que celle-ci reconnaît avoir assumé sur ce point la direction des travaux.

                        En ce qui concerne les chéneaux, il sied d’observer que dans son courrier du 16 janvier 2017, l’intimée se réfère à une solution (pose de câbles chauffants) dont elle assumerait les frais, ce qui n’aurait aucune justification (sauf circonstance très particulière dont il n’y a pas trace) si son rôle se limitait à la recherche de solutions amiables.

                        Dans la même lettre, l’intimée propose également une solution (pose de grille) pour résoudre d’éventuels problèmes d’humidité des caves. Elle paraît s’engager à le faire à ses propres frais et, si elle émet une telle proposition « [s]ans reconnaissance de responsabilité et à bien plaire », cela tient apparemment au fait qu’elle nie la survenance d’un tel défaut (et non qu’elle l’attribue au fait d’un tiers).

                        Au vu de l’ensemble des remarques qui précèdent, on ne saurait nier d’emblée la vraisemblance que, si les expertises requises venaient à établir l’existence de défauts, l’appelante puisse en déduire des prétentions à l’égard de l’intimée (peut-être pas exclusivement, il est vrai, mais cela n’est pas déterminant en l’état). Il s’ensuit que la requête du 18 avril 2019 ne pouvait être rejetée pour ce motif et que l’appel doit être admis dans cette mesure.

5.                                Vu l’option retenue par le premier juge, la question du choix de l’expert – ou des experts car il se peut fort que deux ou trois expertises distinctes soient plus opportunes, comme le proposait l’intimée en 2016 – et celle des questionnaires d’expertise(s) n’ont pas du tout été instruites, de sorte qu’il se justifie de renvoyer la cause en première instance pour reprendre ces points (art. 318 al. 1er let. c CPC).

6.                                En principe, les frais de la procédure de preuve à futur avant procès doivent être supportés par la partie requérante, de même qu’une indemnité de dépens en faveur de la partie intimée (arrêt du TF du 28.08.2014 [5A_224/2014] et les références citées), sauf si les questions de cette dernière dépassent le simple complément. Un droit à répétition dans le procès au fond demeure possible. Cela étant, la nouvelle décision à rendre devra suivre le principe susmentionné. En revanche, les frais et dépens d’appel doivent suivre le sort de celui-ci, selon la règle générale et sans qu’il y ait matière à renvoi sur ce point, au sens de l’article 104 al. 4 CPC. L’irrecevabilité partielle de l’appel n’a pas suscité de longs développements et il se justifie de ne laisser à charge de l’appelante qu’un huitième des frais. Dans la même perspective, cette dernière devra verser une indemnité de dépens de 250 francs en faveur de l’intimé Y1.________, alors que l’intimée Y2.________ SA versera à l’appelante une indemnité de dépens de 1'750 francs, vu le mémoire produit par celle-ci.

Par ces motifs,
LA COUR D'APPEL CIVILE

1.    Déclare l’appel irrecevable en tant qu’il vise le rejet de la preuve requise à l’encontre de Y1.________.

2.    Déclare irrecevable la preuve nouvelle déposée en appel par l’appelante.

3.    Admet partiellement l’appel et annule la décision querellée, en tant qu’elle rejette la requête dirigée contre Y2.________ SA.

4.    Renvoie la cause en première instance pour instruction de la requête et nouvelle décision, au sens des considérants.

5.    Arrête les frais d’appel à 3'000 francs, montant couvert par l’avance de frais déjà versée par l’appelante, et les met à la charge de l’intimée pour sept huitièmes, le solde restant à la charge de l’appelante.

6.    Condamne l’intimée Y2.________ SA à verser à l’appelante une indemnité de dépens de 1'750 francs et condamne cette dernière à verser à l’intimé Y1.________ une indemnité de dépens de 250 francs, pour la procédure d’appel.

Neuchâtel, le 14 septembre 2020

 

Art. 158 CPC
Preuve à futur
 

1 Le tribunal administre les preuves en tout temps:

a. lorsque la loi confère le droit d’en faire la demande;

b. lorsque la mise en danger des preuves ou un intérêt digne de protection est rendu vraisemblable par le requérant.

2 Les dispositions sur les mesures provisionnelles sont applicables.

 

Art. 256 CPC
Décision
 

1 Le tribunal peut renoncer aux débats et statuer sur pièces, à moins que la loi n’en dispose autrement.

2 Une décision prise dans une procédure relevant de la juridiction gracieuse qui s’avère ultérieurement être incorrecte peut être, d’office ou sur requête, annulée ou modifiée, à moins que la loi ou la sécurité du droit ne s’y opposent.

  
Art. 311 CPC
Introduction de l’appel1
 

1 L’appel, écrit et motivé, est introduit auprès de l’instance d’appel dans les 30 jours à compter de la notification de la décision motivée ou de la notification postérieure de la motivation (art. 239).

2 La décision qui fait l’objet de l’appel est jointe au dossier.


1 Rectifié par la Commission de rédaction de l’Ass. féd. (art. 58, al. 1, LParl; RS 171.10).

 
Art. 367 CO
Garantie des défauts de l’ouvrage
Vérification
 

1 Après la livraison de l’ouvrage, le maître doit en vérifier l’état aussitôt qu’il le peut d’après la marche habituelle des affaires, et en signaler les défauts à l’entrepreneur, s’il y a lieu.

2 Chacune des parties a le droit de demander, à ses frais, que l’ouvrage soit examiné par des experts et qu’il soit dressé acte de leurs constatations.