A.                               X.________, né en 1968, et Y.________, née en 1981, se sont mariés le 24 novembre 2007. Leur divorce a été prononcé le 3 juillet 2018 par jugement du tribunal civil.

B.                               Le 4 mars 2020, Y.________ a saisi le tribunal civil d’une requête de mesures superprovisionnelles et provisionnelles dirigée contre X.________, en concluant à ce qu’il soit fait interdiction à ce dernier et à tout membre de sa famille de prendre contact avec Y.________, par écrit ou par voie électronique, ou de lui causer d’autres désagréments, d’une part, et d’approcher à moins de 500 mètres de Y.________, de son domicile ou de tout autre lieu de résidence ou nouveau domicile de celle-ci ; à ce que ces interdictions soient assorties de la menace prévue à l’article 292 CP ; avec suite de frais et dépens, sous réserve des décisions sur l’assistance judiciaire.

                        À l’appui de sa démarche, la requérante alléguait avoir dû faire face à de nombreuses violences conjugales de la part du requis durant la vie conjugale ; avoir récemment déposé une plainte pénale contre X.________, après que celui-ci avait prolongé un contrat de téléphonie pour son fils en le mettant au nom de la requérante ; que des membres de la famille du requis, notamment sa fille, sa sœur et son frère, l’avaient contactée afin qu’elle « cesse [cette] procédure pénale » ; avoir déposé une nouvelle plainte pénale contre X.________ le 24 janvier 2020, après que celui-ci lui avait dit à deux reprises : « je suis malade alors si je te tue il ne va rien m’arriver » ; avoir dû se rendre depuis à plusieurs reprises au service d’urgences psychiatriques du canton de Neuchâtel car elle avait développé des angoisses et divers symptômes de stress ; avoir suite à ces événements « croisé le requis à plusieurs reprises de manière étonnante, à savoir à la sortie de ses 4 rendez-vous de physiothérapie et dernièrement en sortant du SAVI à Z.________ » ; que lors de ce dernier événement, après s’être rendue au magazin, elle avait vu X.________ de l’autre côté de la rue [aaaaa] ; que celui-ci avait alors traversé ladite rue en courant, puis avait craché contre elle et l’avait « insultée de multiples manières » ; qu’elle-même avait été effrayée par l’attitude du requis, lequel cherchait manifestement à lui faire régulièrement peur par tous les moyens afin qu’elle abandonne ses démarches pénales à son encontre.

C.                               Le même 4 mars 2020, la juge civile, statuant en urgence et à titre superprovisionnel, a fait interdiction à X.________, d’une part, d’approcher Y.________ à moins de 500 mètres de son domicile ou de tout autre lieu de résidence de celle-ci et, d’autre part, de la contacter de quelque manière que ce soit ou de lui causer des désagréments, le tout sous la menace de l’article 292 CP ; a cité les parties à comparaître à une audience le 23 mars 2020 ; a rejeté à ce stade toute autre ou plus ample conclusion. L’audience a toutefois dû être annulée en raison de la situation sanitaire.

D.                               a) X.________ a également sollicité l’assistance judiciaire, en date du 19 mars 2020. À cette occasion, il a précisé contester intégralement le contenu de la requête du 4 mars 2020.

                        b) Au terme de ses observations du 25 mars 2020, X.________ a conclu au rejet de la requête du 4 mars 2020 en toutes ses conclusions, sous suite de frais et dépens. Il alléguait que, du fait de la requérante exclusivement, la relation entre les parties était conflictuelle depuis début 2017 ; que Y.________ s’était approchée de lui afin qu’il l’épouse rapidement, parce qu’elle souhaitait obtenir un titre de séjour en Suisse ; que ce souhait s’était traduit par des « pressions diverses » de la famille de la requérante sur le requis, lequel avait finalement accepté l’union revendiquée ; que pendant la vie conjugale et malgré les sentiments qu’il nourrissait à l’endroit de son épouse, il s’était « rapidement rendu compte que cette relation n’était pas viable en raison du harcèlement et de la manipulation dont il était victime » ; que ce comportement avait eu de graves conséquences sur sa santé, l’obligeant parfois à être hospitalisé à Préfargier et à consulter régulièrement un psychiatre ; que ses enfants issus d’un premier lit – A.________ et B.________ – avaient également été « la cible des excès de colère et des menaces de la requérante » ; avoir pris la décision de divorcer, de déménager de Z.________ à W.________ et de changer de numéro de téléphone parce qu’il craignait pour sa sécurité et celle de ses enfants ; n’avoir eu depuis lors plus aucun contact avec la requérante ; s’étonner ainsi de la requête dirigée à son endroit, puisqu’elle ne correspondait pas à la réalité des faits et était attentatoire à son honneur ; que depuis le divorce, c’était Y.________ qui n’avait eu de cesse de « mettre la pression sur le requis, au besoin par des menaces, afin qu’ils se remettent ensemble et se remarient », ce qui lui-même refusait catégoriquement ; que Y.________ avait consenti à ce que le contrat de téléphonie mobile en faveur de A.________ soit à son nom ; s’être lui-même toujours acquitté des factures y relatives ; que Y.________ avait décidé unilatéralement et sans juste motif d’avorter une rencontre qui avait été convenue entre elle et A.________ afin de changer le titulaire du contrat.

                        c) Le dossier relatif à la plainte pénale de Y.________ contre X.________ a été versé à la procédure, à la demande de la juge civile.

                        d) Le 6 avril 2020, le requis a déposé des observations écrites et confirmé ses précédentes conclusions.

                        e) Le 27 avril 2020, le requis a déposé une décision de non-entrée en matière du Ministère public du 17 mars 2020.

                        f) Le 29 avril 2020, la requérante a consenti à ce que la procédure se poursuive par écrit, contesté la version des faits donnée par X.________ dans son écrit du 25 mars 2020 et demandé à ce que les déclarations écrites déposées en annexe à cet écrit soient écartées du dossier. Le 5 juin 2020, elle a déposé des documents médicaux.

                        g) Le 26 mai 2020, la juge civile a mis Y.________ au bénéfice de l’assistance judiciaire et désigné Me C.________ en qualité d’avocat d’office (chargé de pièces séparé du tribunal civil relatif à l’assistance judiciaire).

                        h) Les 26 mai, 8 et 16 juin 2020, le requis a déposé diverses pièces, dont des documents médicaux et de nouveaux témoignages écrits.

                        i) Le 22 juin 2020, la juge civile a mis X.________ au bénéfice de l’assistance judiciaire et désigné Me D.________ en qualité d’avocate d’office (chargé de pièces séparé du tribunal civil relatif à l’assistance judiciaire).

                        j) Au terme de ses observations du 10 juillet 2020, la requérante a confirmé ses conclusions.

                        k) Au terme de ses observations du 31 juillet 2020, le requis a lui aussi confirmé ses conclusions.

                        l) Le 3 août 2020, la requérante a formulé des observations et déposé copie de l’arrêt du 27 juillet 2020 par lequel l’Autorité de recours en matière pénale avait annulé la décision de non-entrée en matière du Ministère public du 17 mars 2020 (v. supra e).

                        m) Le 26 août 2020, le requis a déposé des observations et confirmé ses conclusions.

E.                               Par décision de mesures provisionnelles du 14 septembre 2020, le tribunal civil a, sous la menace de l’article 292 CP (dispositif, ch. 3), fait interdiction à X.________ « d’approcher Y.________ à moins de 100 mètres de son domicile ou de tout autre lieu de résidence de celle-ci » (ch. 1) et de « contacter Y.________ de quelque manière que ce soit, notamment par téléphone, par écrit, ou par voie électronique ou de lui causer d’autres dérangements » (ch. 2) ; imparti à Y.________ un délai de 60 jours pour introduire l’action au fond (ch. 4) ; rejeté toute autre ou plus ample conclusion des parties (ch. 5) ; arrêté les frais judiciaires, avancés par l’État pour le compte de la requérante qui plaidait au bénéfice de l’assistance judiciaire, à 700 francs ; mis ces frais à la charge de X.________, sous réserve des règles de l’assistance judiciaire (ch. 6) ; condamné X.________ à verser une indemnité de dépens de 1'800 francs en faveur de la requérante (ch. 7).

                        À l’appui de cette décision, la juge civile a retenu et considéré, en résumé, que les menaces étaient rendues vraisemblables, à mesure qu’il ressortait du rapport du SAVI du 4 mars 2020 que Y.________ disait avoir été menacée de mort à deux reprises par son ex-époux et qu’elle avait consulté les urgences psychiatriques suite à ces prétendues menaces ; qu’elle avait déposé plainte pénale de ce fait ; que lors de son audition devant la police le 24 janvier 2020, elle avait déclaré que X.________ menaçait de s’en prendre à elle, de la tuer et de la renvoyer au Maroc (lignes 37-38 et 51-52) ; qu’elle avait décrit les menaces faites par son ex-époux dans des termes similaires au SAVI et à la police. Le harcèlement avait aussi été rendu vraisemblable, en ce sens que Y.________ avait décrit les faits de manière relativement similaire au SAVI et à la police, à plusieurs semaines d’intervalle (au premier, elle avait dit avoir croisé X.________ à plusieurs reprises de manière étonnante depuis que la procédure pénale était engagée, soit à la sortie de ses quatre rendez-vous de physiothérapie et à la sortie d’un entretien au SAVI ; devant la police, elle avait dit que X.________ surgissait de nulle part lorsqu’elle se baladait dans la rue, comme s’il la suivait continuellement). Les témoignages écrits déposés par X.________ ne remettaient pas en cause la vraisemblance des menaces et du harcèlement, parce qu’ils émanaient tous « de proches du requis, enclins à souligner ses bons côtés ».

                        Aux dires de Y.________, les menaces dateraient de janvier 2020, alors qu’elle n’avait plus vu X.________ depuis fin 2019, et elle avait dû consulter les urgences psychiatriques suite à ces menaces. Or il ressortait du certificat du CNP que la requérante avait consulté les urgences psychiatriques en décembre 2019, si bien que les menaces étaient antérieures à cette date. Quant au harcèlement, il paraissait s’être déroulé de manière concomitante aux menaces, selon le procès-verbal relatif à l’audition de la requérante par la police en date du 24 janvier 2020 (l. 37 s.). Selon un arrêt de l’Autorité de recours en matière pénale du 27 juillet 2020, la requérante semblait être une personne sensiblement fragilisée au vu du contexte social dans lequel elle évoluait ; elle ne maîtrisait pas le français, s’exprimait en dialecte marocain, semblait isolée et avoir été dans une relation de dépendance face à son ex-mari, lequel, tout en étant son garant pour pouvoir rester en Suisse, n’avait cessé de clamer qu’il ne l’avait jamais aimée ; le fait que X.________ ait précisé sur la fiche d’annonce à l’intention du Service pour les auteurs de violences conjugales qu’il « ne v[oulait] plus des femmes arabes » montrait le peu de considération qu’il avait pour son ex-épouse, voire pour les femmes arabes en général ; ce contexte social pourrait expliquer pourquoi la recourante n’avait pas consulté un médecin du temps où elle partageait la vie de l’intimé. De l’avis de la juge civile, les mêmes raisons pouvaient expliquer pourquoi la requête de mesures superprovisionnelles et provisionnelles n’avait pas été déposée à la fin de l’année 2019, voire au tout début de l’année 2020. Les trois mois environ écoulés après les derniers épisodes n’étaient donc pas rédhibitoires.

F.                               X.________ forme appel contre cette décision le 2 octobre 2020, en concluant à titre préjudiciel à l’octroi de l’assistance judiciaire ; principalement à l’annulation de la décision querellée ; subsidiairement à cette annulation et au renvoi du dossier à la première juge pour nouvelle décision ; en tout état de cause sous suite de frais et dépens. À l’appui de sa démarche, il se plaint d’une violation de son droit d’être entendu et fait valoir que les faits allégués par l’intimée sont invraisemblables et que l’urgence exigée pour prononcer des mesures provisoires n’était pas réalisée. Il dépose en outre le procès-verbal d’une audition/confrontation du 30 septembre 2020 entre lui-même et Y.________ devant le Ministère public.    

G.                               Y.________ conclut à l’octroi de l’assistance judiciaire, au rejet de l’appel « dans la faible mesure de sa recevabilité » et à la confirmation de la décision querellée, avec suite de frais et dépens et sous réserve des dispositions sur l’assistance judiciaire. Selon elle, la conclusion principale de l’appel serait irrecevable, dès lors que l’appelant ne conclut qu’à l’annulation de la décision querellée, sans formuler de conclusion en lien avec la requête du 4 mars 2020. 

H.                               Le 26 octobre 2020, le juge instructeur a écrit aux parties qu’il ne lui paraissait pas qu'un deuxième échange d'écritures soit nécessaire ; qu’ils serait statué ultérieurement, sur pièces et sans débats ; que le sort des pièces produites au stade de la procédure d'appel restait réservé, tout comme le droit inconditionnel de réplique à exercer le cas échéant dans les 10 jours ; que les requêtes d’assistance judiciaire seraient traitées dans l’arrêt au fond, tout comme le sort des pièces déposées au stade de la procédure d’appel.

I.                                 L’appelant réplique spontanément le 9 novembre 2020. Au chapitre de la recevabilité de l’appel, il se prévaut d’une « erreur de plume » et demande à pouvoir préciser comme suit sa conclusion numéro 2 : « Annuler les décisions de mesures superprovisionnelles du 4 mars 2020 et provisionnelles du 14 septembre 2020 rendues par le Tribunal civil du Tribunal régional des Montagnes et du Val-de-Ruz ». Il estime en outre qu’il ressort tant de conclusions qu’il a prises tout au long de la procédure de première instance que de la motivation de son appel « que son souhait est de s’émanciper des mesures superprovisionnelles et provisionnelles ordonnées contre lui ». Il se détermine aussi sur quelques points de fond.

J.                                L’intimée duplique spontanément le 13 novembre 2020, en contestant que l’appelante ait pu commettre une erreur de plume et en confirmant les conclusions de sa réponse.

K.                               Le 19 novembre 2020, l’appelant a indiqué qu’il n’entendait pas exercer son droit de réplique inconditionnel.

C O N S I D E R A N T

1.                                a) L’appel est recevable contre les décisions de première instance sur les mesures provisionnelles (art. 308 al. 1 let. b CPC) dans les causes non patrimoniales ou dont la valeur litigieuse est supérieure à 10’000 francs (art. 308 al. 2 CPC). Les ordonnances de mesures provisionnelles étant régies par la procédure sommaire, selon l’article 248 lettre d CPC, le délai pour introduire l’appel est de dix jours (art. 314 al. 1 CPC).

                        b) Le mémoire d’appel a été déposé dans le délai légal et il respecte les formes requises, hormis quant à la précision de la conclusion principale, qui tend à l’annulation de la décision querellée, sans indiquer le sort devant être réservé à la demande en mesures provisionnelles du 4 mars 2020. En effet, en cas d’admission de l’appel, les conclusions de l’appelant doivent pouvoir être intégrées, telles quelles, au dispositif du jugement d’appel (ATF 137 III 617, 619, cité dans de nombreux arrêts postérieurs).

                        Cette condition n’est pas remplie en l’espèce. Toutefois, « le tribunal doit entrer en matière même sur des conclusions formellement insuffisantes lorsqu'il résulte clairement des motifs du mémoire d'appel en relation avec la décision attaquée quelles sont exactement les conclusions prises et donc les modifications du jugement demandées ou, en cas de créances portant sur des sommes d'argent, quel montant est réclamé. Les modifications demandées dans les conclusions stricto sensu du mémoire d'appel doivent être interprétées à la lumière des motifs de celui-ci » (arrêt du TF du 13.03.2019 [4A_373/2018]). En l’occurrence, il ressort des motifs du mémoire d’appel que X.________ estime, d’une part, que les faits allégués par l’intimée à l’appui de sa demande du 4 mars 2020 sont invraisemblables et, d’autre part, que l’urgence exigée pour prononcer des mesures provisoires n’était pas réalisée. On comprend aisément de cette motivation que, matériellement, l’appelant estime que les conditions au prononcé de mesures provisionnelles n’étaient pas réalisées et que la demande du 4 mars 2020 aurait partant dû être rejetée. Contrairement à l’avis de l’intimée, juger dans ces conditions l’appel irrecevable relèverait du formalisme excessif.  

2.                                a) Aux termes de l’article 317 alinéa 1 CPC, les faits et moyens de preuve nouveaux ne sont pris en compte au stade de la procédure d’appel que s’ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s’ils ne pouvaient être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s’en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

                        b) En l’espèce, le procès-verbal déposé par l’appelante date du 30 septembre 2020. Postérieure au prononcé querellé, cette pièce est recevable.

                        c) Datées respectivement du 4 août 2020 et du 18 novembre 2010, les pièces déposées en annexe à la réponse auraient par contre, à première vue, pu être déposées déjà devant le premier juge. L’intimée allègue toutefois n’avoir eu connaissance de l’existence de ces pièces qu’à l’occasion de la confrontation du 30 septembre 2020 devant le Ministère public. Ces explications sont vraisemblables, à mesure que les pièces en question ont été versées au dossier pénal après le 31 juillet 2020, date d’expédition de l’arrêt de l’Autorité de recours en matière pénale du 27 juillet 2020. L’appelante ne prétend d’ailleurs pas que l’intimée aurait pu, en faisant preuve de la diligence requise, déposer ces pièces devant la première juge. Toutes les pièces déposées au stade de l’appel sont partant recevables.

3.                                L'appel peut être formé tant pour violation du droit que pour constatation inexacte des faits (art. 310 CPC). L'autorité d'appel peut revoir l'ensemble du droit applicable, y compris les questions d'opportunité ou d'appréciation laissées par la loi à la décision du juge. Elle peut revoir librement l'appréciation des faits sur la base des preuves administrées en première instance. Le large pouvoir d'examen en fait et en droit ainsi défini s'applique même si la décision attaquée est de nature provisionnelle (Tappy, Les voies de droit du nouveau Code de procédure civile, in JdT 2010 III 115 ss, p. 134-136).

4.                                Dans un grief que l’économie de procédure impose d’examiner en premier lieu (v. ATF 137 I 195 cons. 2.2), l’appelant se plaint d’une violation de son droit d’être entendu. Il reproche à la première juge de ne pas avoir tenu compte d’éléments de preuve essentiels dans sa motivation (appel, p. 8), soit les témoignages écrits, justificatifs de paiements et rapports médicaux déposés par ses soins (appel, p. 10 s.).

4.1                   La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu ancré à l’article 29 al. 2 Cst. féd. le devoir pour le juge de motiver sa décision, afin que le justiciable puisse la comprendre, la contester utilement s'il y a lieu et exercer son droit de recours à bon escient ; pour répondre à ces exigences, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause ; s’il n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, il doit à tout le moins traiter ceux qui, sans arbitraire, apparaissent pertinents (ATF 143 III 65 cons. 5.2 et les références).

                        Cela étant, il est de jurisprudence constante que le droit d’être entendu peut, s’il a été violé en première instance, être réparé devant l’instance de recours ou d’appel qui jouit d’un pouvoir d’examen complet, en fait et en droit (comme le prévoit l’art. 310 CPC pour la Cour de céans). Ceci vaut d’autant plus lorsque la violation n’est pas grave ou que le renvoi à l’autorité inférieure constituerait un « détour procédural » inutile, qui n’aurait comme effet que de rallonger la procédure sans mieux garantir les droits du prévenu (arrêt du TF du 03.10.2017 [6B_421/2017] cons. 1.1 et les références citées).

4.2                   En l’espèce, le jugement attaqué mentionne clairement que les écrits déposés par l’appelant, « émanant de diverses personnes de son entourage et décrivant notamment sa personnalité », n’étaient pas décisifs, au moment d’examiner la vraisemblance des menaces et du harcèlement, parce qu’ils « éman[ai]ent de proches du requis, enclins à souligner ses bons côtés ». Sur ce point, l’appelante pouvait attaquer la décision du tribunal civil en connaissance de cause, de sorte que le grief tiré de la violation du droit d’être entendu n’est pas fondé. En tout état de cause, une violation éventuelle sur ce point, de même que sur tous les autres points soulevés (justificatifs de paiements et rapports médicaux, leur pertinence étant réservée), pourrait être corrigée devant la Cour d’appel civile.

5.                                a) Aux termes de l'article 28 CC, celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité peut agir en justice pour sa protection contre toute personne qui y participe (al. 1). Une atteinte est illicite, à moins qu'elle ne soit justifiée par le consentement de la victime, par un intérêt prépondérant privé ou public, ou par la loi (al. 2). Le demandeur à une telle action peut, en vertu de l'article 28a al. 1 CC, requérir des mesures tendant à interdire une atteinte illicite à sa personnalité, si elle est imminente ou actuelle, à la faire cesser si elle dure encore, et à en constater le caractère illicite si le trouble qu’elle a créé subsiste. En vertu de l’article 28b al. 1 CC, applicable par renvoi de l’article 172 al. 3 2e phrase CC, en cas de violence, de menaces ou de harcèlement, le demandeur peut requérir le juge d’interdire à l’auteur de l’atteinte, en particulier de l’approcher ou d’accéder à un périmètre déterminé autour de son logement (ch. 1), de fréquenter certains lieux, notamment des rues, places ou quartiers (ch. 2) ou de prendre contact avec lui, notamment par téléphone, par écrit ou par voie électronique, ou de lui causer d’autres dérangements (ch. 3). On entend par violence l'atteinte directe à l'intégrité physique, psychique, sexuelle ou sociale d'une personne. Cette atteinte doit présenter un certain degré d'intensité, tout comportement social incorrect n'étant pas constitutif d'une atteinte à la personnalité. Les menaces se rapportent à des situations où des atteintes à la personnalité sont à prévoir. Il doit s'agit d'une menace sérieuse qui fasse craindre la victime pour son intégrité physique, psychique, sexuelle ou sociale (FF 2005 p. 6437ss). Le harcèlement vise la poursuite et le harcèlement obsessionnel d'une personne sur une longue durée. Les caractéristiques de ce comportement sont l'espionnage, la recherche de la proximité physique et tout ce qui y est lié, la poursuite et la traque ainsi que le dérangement et la menace d'une personne. Ces événements doivent engendrer chez la victime une grande peur et survenir de manière répétée (ATF 129 IV 262, arrêt du TF du 03.09.2009 [5A_377/2009]).

                        b) L’article 261 al. 1 CPC pose deux conditions cumulatives à l’octroi des mesures provisionnelles. Pour en bénéficier, le requérant doit rendre vraisemblable qu’un droit dont il se prétend titulaire est l’objet d’une atteinte ou risque de l’être et que cette atteinte est susceptible d’entraîner un préjudice difficilement réparable. Le requérant doit rendre vraisemblable la nécessité d’une protection immédiate en raison d’un danger imminent menaçant ses droits, soit qu’ils risquent de ne plus pouvoir être consacrés, ou seulement tardivement. Par préjudice, il ne faut pas comprendre exclusivement un dommage patrimonial. Le dommage peut être immatériel. Il peut aussi s’agir d’un trouble. La vraisemblance, qui est exigée, s’oppose à la conviction absolue ; elle peut être admise même si le tribunal doit compter encore avec la possibilité que les faits pour lesquels parlent certaines preuves ne se confirment pas. Un risque de préjudice irréparable est admis largement en matière d'atteintes à la personnalité (Bohnet, La procédure sommaire, procédure civile suisse, Faculté de droit de l’Université de Neuchâtel, n. 83 ss).

                        Le risque de préjudice difficilement réparable implique l’urgence (Bohnet in CR CPC, 2ème éd., n. 12 ad art. 261 et les références citées). Si le requérant tarde trop, sa requête risque d’être rejetée, dans le cas où le tribunal arrive à la conclusion qu’une procédure ordinaire introduite à temps aurait abouti à un jugement au fond dans des délais équivalents (TF, RJJ, 1992, 134 cons. 2 ; TF, SJ 1991, 113). L’urgence apparaît comme une notion juridique indéterminée dont le contenu ne peut être fixé une fois pour toutes. Il appartient au juge d’examiner de cas en cas si cette condition est réalisée, ce qui implique qu’il puisse se montrer plus ou moins exigeant suivant les circonstances (RSPC, 2005, 414).

                        Pour obtenir la protection provisionnelle, le requérant doit en premier lieu rendre vraisemblable le motif qui justifie la mesure, qui consiste en une mise en danger ou une violation effective d’une prétention risquant de causer à son titulaire un préjudice difficilement réparable et impliquant une urgence temporelle. Le requérant est ainsi tenu de rendre vraisemblable la légitimité de sa demande principale (FF 2006 p. 6961), ce qui implique, d'une part, la vraisemblance des faits à l'appui de la prétention et, d'autre part, l'apparence du droit prétendu (ATF 131 III 473 cons. 2.3).

                        Lorsqu'il prend des mesures pour protéger la victime, le juge doit respecter le principe fondamental de la proportionnalité et prendre la mesure qui est suffisamment efficace pour la victime et la moins incisive pour l'auteur de l'atteinte. Cela signifie que ces mesures doivent être adéquates, nécessaires et adaptées au cas concret. Le principe de la proportionnalité vaut aussi pour la durée des mesures (Jeandin/Peyrot – Commentaire romand CC, no 17 ad art. 28b).

6.                                a) Dans un premier grief, l’appelant reproche à la première juge d’avoir retenu que les menaces et le harcèlement avaient été rendus vraisemblables. Il fait valoir que E.________ avait pourtant fait état d’angoisses de l’appelant à la vue de son ex-épouse ; que de même, F.________ avait affirmé que l’intimée s’était rendue chez elle en lui demandant de supplier l’appelant pour qu’il se remette avec elle ; que parallèlement, le rapport du Dr G.________ du 19 mars 2020 relatait que l’appelant bénéficiait d’une prise en charge psychothérapeutique de soutien ambulatoire et qu’il se plaignait depuis plusieurs mois du fait que l’intimée le mettait sous pression ; que « les témoins I.________ et J.________ notamment ainsi que les Docteurs K.________ et G.________ confirm[ai]ent l’absence de volonté de l’appelant d’entretenir des contacts avec [l’intimée] et les moyens qu’il met[tait] en œuvre pour l’éviter » ; que sa fille et « le témoin L.________, témoin direct de certains événement » confirmaient que c’était l’appelant qui était victime de harcèlement de la part de l’intimée.

                        L’appelant se référait aussi aux déclarations récentes de l’intimée devant le Ministère public, lesquelles contrastaient avec les déclarations que la même avait tenues auparavant. Y.________ avait ainsi déclaré dernièrement que seuls deux épisodes de violence conjugale avaient eu lieu pendant la vie conjugale, alors même qu’elle avait affirmé l’inverse dans sa requête du 4 mars 2020 ; elle avait précisé que l’un de ces deux épisodes avait consisté en une menace avec un couteau, alors qu’un tel événement n’avait jamais été relaté à la police auparavant. De même, Y.________ avait dernièrement indiqué avoir été suivie et menacée à deux reprises à la sorte de ses deux rendez-vous de physiothérapie, alors même qu’elle avait indiqué au SAIV que ce type de comportement avait eu lieu à quatre reprises (44.1, p. 7 s.).

                        b) S’agissants de faits dont aucun tiers n’a été témoin, les allégués de Y.________ ne paraissent à première vue pas dénués de crédibilité. Constitue un indice supplémentaire de crédibilité le fait que, dans le cadre de l’examen des griefs pénaux, l’Autorité de recours en matière pénale a accordé une certaine foi aux faits tels que dénoncés par Y.________, au point d’annuler la non-entrée en matière que le ministère public avait prononcée au bénéfice de X.________. 

                        L’écrit de E.________ n’est pas propre à décrédibiliser les allégués de l’intimée. Dans cet écrit, E.________ relate un épisode qu’il ne situe pas dans le temps, mais qui remonte certainement à la vie commune des parties. Même si un téléphone de l’intimée avait paru effrayer l’appelant, on ne voit pas en quoi cela rendrait invraisemblable que l’appelant ait menacé ou harcelé l’intimée.

                        Selon l’écrit de F.________ – sœur de l’appelant – l’intimée lui aurait dit que l’appelant allait « le payer cher » s’il refusait de se remarier avec elle. Cet écrit ne rend pas invraisemblables les accusations de menaces et de harcèlement de l’intimée. Au contraire, on conçoit mal que la requête du 4 mars 2020 puisse être une mesure de représailles destinée à nuire à X.________ : si ce dernier ne voulait effectivement plus rien avoir à faire avec Y.________, on ne voit pas en quoi il aurait été dérangé par une interdiction de contact : au contraire, en sollicitant cette interdiction, c’est l’intimée qui se prive de la possibilité de contacter l’appelant car il serait totalement incohérent de se part de prendre l’initiative de tels contacts.

                        Dans son écrit du 19 mars 2020, le Dr G.________ indique suivre l’appelant depuis 2008 « en raison d’un trouble dépressif important », et que ce dernier se plaint depuis plusieurs mois que Y.________ « ne le laisserait pas tranquille, le suivrait partout et le mettrait sous pression en lui demandant de retourner vivre avec elle, ce qu’il refuse catégoriquement ». Cet écrit ne rend pas invraisemblables les accusations de menaces et de harcèlement de l’intimée. Au contraire, si l’appelant avait réellement subi des menaces, des pressions et du harcèlement de la part de l’intimée, on ne voit pas pourquoi il se serait opposé aux conclusions de celle-ci tendant à une interdiction de contacts entre eux, parce qu’une telle interdiction aurait été en réalité dans son intérêt. L’argument soulevé – tardivement – dans la réplique du 9 novembre 2020, selon lequel « une rencontre inopinée aurait pour corollaire l’application de l’article 292 CP » tombe à faux, à mesure que l’insoumission à une décision de l’autorité n’est pas punie par négligence (art. 292 cum 12 al. 1 CP). Cet argument ne fait donc qu’illustrer la volonté de l’appelant d’avoir des contacts avec l’intimée, ce qui indique qu’il n’est très vraisemblablement pas victime de menaces, pressions et harcèlement de la part de celle-ci. Si l’appelant avait été victime de tels comportements, il aurait plus vraisemblablement demandé des mesures d’éloignement dirigées contre Y.________, à tout le moins à titre reconventionnel, en réponse à la requête du 4 mars 2020. En ne le faisant pas, mais au contraire en s’opposant aux mesures d’éloignement sollicitées, l’appelant a fait la démonstration que ce qui le dérangeait était précisément la rupture des contacts avec Y.________. Les écrits selon lesquels l’appelant essayait systématiquement d’éviter tous contacts avec l’intimée ne sont ainsi pas crédibles, parce qu’ils sont contredits par l’attitude procédurale de l’appelant lui-même. Au surplus, l’expérience judiciaire montre qu’il n’est pas inusuel que les auteurs de menaces, violences et harcèlement tentent de se faire passer pour des victimes aux yeux de leurs victimes et des tiers.

                        Toujours au sujet de l’attitude procédurale de l’appelant, on relève qu’alors même qu’à l’appui de sa requête du 4 mars 2020, l’intimée a allégué les faits déjà mentionnés plus haut (v. supra Faits, let. B), sans préciser les dates des derniers incidents, X.________ n’a, curieusement, pas exigé de Y.________ qu’elle indique précisément les dates et les heures de chacun de ces incidents dans sa réponse du 25 mars 2020, alors même qu’il eût été simple pour elle de le faire (s’agissant à tout le moins des séances de physiothérapie) et que ces indications auraient permis à l’appelant de se défendre en recherchant s’il était en mesure de prouver qu’à l’une ou l’autre de ces occasions, il ne pouvait matériellement pas se trouver sur place au moment des faits qui lui étaient reprochés.

                        Lors de l’audition/confrontation du 30 septembre 2020 devant le Ministère public, l’intimée a déclaré, au sujet des derniers épisodes avec l’appelant : « [i]l est arrivé durant cette période que X.________ me suive. Les 13 et 20 janvier 2020, lorsque je me rendais chez le physio, X.________ m’a dit qu’il voulait me tuer. C’était sur la rue [aaaaa]. Il a aussi craché par terre lorsqu’il m’a croisée. Il n’y a pas eu de témoin de ces faits ». Contrairement à l’avis de l’appelant, ces déclarations ne décrédibilisent pas la version des faits donnée par Y.________ des derniers épisodes de violence relatés dans la demande du 4 mars 2020. Au contraire, il ressort de la requête du 4 mars 2020 que l’intimée a croisé l’appelant « à plusieurs reprises de manière étonnante » et que l’appelant a menacé de mort l’intimée « à deux reprises ».

                        Enfin, la propension à la violence de l’appelant vis-à-vis des femmes est attestée par sa condamnation, en date du 18 novembre 2010, à une peine privative de liberté de 3 ans pour lésions corporelles simples aggravées au sens de l’article 123 ch. 2 al. 2 CP, délit manqué de lésions corporelles graves, lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 CP), menaces (art. 180 CP) et voies de faits (art. 126 CP). Non seulement les actes de violence avaient été commis au préjudice de son ex-épouse H.________, mais il ressort de plusieurs passages du jugement du 18 novembre 2010 du tribunal correctionnel que dans le cadre de cette procédure-là, X.________ avait cherché à se présenter comme une victime. Les antécédents judiciaires de l’appelant renforcent ainsi encore la crédibilité de la version des faits donnée par l’intimée à l’appui de sa demande du 4 mars 2020. Sur ce point, le jugement querellé ne prête pas le flanc à la critique.   

7.                                Dans un second grief, l’appelante conteste la réalisation de la condition de l’urgence (v. supra cons. 5/b) dans le cas d’espèce. Selon lui, l’intimée n’a pas démontré l’existence d’un dommage imminent : se prétendant victime de menaces d’une certaine gravité en fin d’année 2019, elle s’était rendue à la police une première fois pour déposer plainte pénale en lien avec la question du contrat de téléphonie, puis avait attendu le 24 janvier 2020 pour déposer plainte pénale pour menaces, respectivement encore jusqu’au 4 mars 2020 pour solliciter des mesures provisionnelles. Cette temporisation ne pouvait être protégée, l’isolement de l’intimée ne pouvant expliquer son retard. 

7.1                   Comme déjà dit plus haut (cons. 5/b), l’urgence apparaît comme une notion juridique indéterminée dont le contenu ne peut être fixé une fois pour toutes, par exemple en référence à une durée entre le moment de la dernière atteinte alléguée et celui du dépôt de la requête. Au contraire, il appartient au juge d’examiner de cas en cas si cette condition est réalisée, ce qui implique qu’il puisse se montrer plus ou moins exigeant suivant les circonstances.

7.2                   En l’espèce, dans sa requête du 4 mars 2020, l’intimée n’a pas situé avec précision dans le temps les derniers épisodes où elle alléguait avoir croisé l’appelant « de manière étonnante », notamment le dernier, lors duquel elle reproche à X.________ d’avoir craché contre elle et de l’avoir « insultée de multiples manières » ; elle s’est contentée de dire que les comportements problématiques de X.________ ne s’étaient pas arrêtés aux menaces décrites au chiffre 4 de la requête, mais que d’autres avaient eu lieu « [c]es derniers temps ».

                        La première juge a retenu que ces derniers épisodes avaient eu lieu « de manière concomitante aux menaces », sur la base des déclarations faites par Y.________ à la police en date du 24 janvier 2020. Or à cette occasion, Y.________ avait déclaré : « [d]epuis que j’ai fait cela, quand je croise X.________ dans la rue, il me menace de s’en prendre à moi et de me renvoyer au Maroc. Des fois quand je me balade dans la rue, X.________ surgit de nulle part comme s’il me suivait continuellement ». Contrairement à l’avis de la première juge, on ne peut pas déduire que le sens de cette déclaration est qu’aucun épisode de harcèlement n’a eu lieu après les menaces de mort proférées par X.________. Le courriel du SAVI du 4 mars 2020 permet au contraire de cerner, sous l’angle de la chronologie, que Y.________ a déposé plainte contre X.________ après avoir reçu des menaces de mort de sa part et que, « depuis la procédure engagée », elle avait croisé cinq reprises X.________ « de manière étonnante », soit à la sortie de quatre rendez-vous de physiothérapie et d’un entretien dans les locaux du SAVI (c’est lors de ce dernier événement que, selon Y.________, X.________ avait traversé la rue en courant pour venir à sa rencontre, puis avait craché contre elle et l’avait insultée). La Cour de céans retient donc que plusieurs épisodes relevant possiblement du harcèlement ont vraisemblablement eu lieu après ces menaces de mort, jusqu’à récemment avant le dépôt de la requête du 4 mars 2020, comme allégué dans ladite requête. À l’instar du SAVI, la Cour de céans estime cette situation assez inquiétante, en ce sens que l’existence de la procédure pénale n’a apparemment pas servi d’avertissement à X.________. Vu que l’intimée est une personne sensiblement fragilisée (elle ne maîtrise pas le français, s’exprime en dialecte marocain, semble isolée et partant démunie pour se défendre et réagir adéquatement – et sans délai – sur le plan civil, face à des atteintes à sa personnalité telles que des menaces et/ou des comportements relevant du stalking), les antécédents pénaux de l’appelant et le caractère peu incisif des mesures prononcées sur la liberté de l’appelant, les mesures ordonnées par la première juge s’avèrent tout à fait opportunes, du point de vue de la pesée des intérêts en présence.

8.                                Vu l’ensemble de ce qui précède, l’appel doit être rejeté et la décision querellée confirmée. L’intimée doit être mise au bénéfice de l’assistance judiciaire. Cette assistance doit en revanche être refusée à l’appelant, dont la démarche, vu les considérants qui précèdent, apparait comme téméraire (notamment vu l’arrêt de l’Autorité de recours en matière pénale du 27 juillet 2020). La condition ancrée à l’article 117 let. b CPC n’est dès lors pas réalisée en ce qui le concerne. Les frais de la procédure d’appel doivent être mis à la charge de l’appelant, qui sera en outre condamné à verser à l’intimée une indemnité de dépens (art. 95 al. 1 cum 106 al. 1 CPC ; art. 12 et 61 à 66 de la loi fixant le tarif des frais, des émoluments de chancellerie et des dépens en matière civile, pénale et administrative [LTFrais, RSN 164.1]).

                        Le conseil juridique commis d’office pour l’intimée doit être rémunéré équitablement par le canton, en application de l’article 122 al. 2 CPC, à mesure que l’appelant est indigent, si bien que les dépens ne pourront vraisemblablement pas être obtenus de la partie adverse. L’État est subrogé à concurrence du montant qui sera versé à Me C.________.

Par ces motifs,
LA COUR D'APPEL CIVILE

1.    Rejette l’appel et confirme la décision attaquée.

2.    Dit que l’appelant n’a pas droit à l’assistance judiciaire pour la procédure d’appel.

3.    Accorde l’assistance judiciaire à l’intimée pour la procédure d’appel.

4.    Met à la charge de l’appelant les frais de la procédure d’appel, arrêtés à 500 francs.

5.    Condamne l’appelant à verser à l’intimée une indemnité de dépens de 1'250 francs, payable en mains de l’État jusqu’à concurrence de l’indemnité qui sera versée à Me C.________ en application de l’article 122 al. 2 CPC.

6.    Invite Me C.________ à présenter, dans un délai de 10 jours dès réception du présent arrêt, la liste de ses opérations pour la procédure d’appel, en l’informant que faute d’une telle liste, il sera statué sur son indemnité d’avocat d’office sur le vu du dossier.

Neuchâtel, le 2 décembre 2020

 

Art. 28b1 CC
Violence, menaces ou harcèlement
 

1 En cas de violence, de menaces ou de harcèlement, le demandeur peut requérir le juge d’interdire à l’auteur de l’atteinte, en particulier:

1. de l’approcher ou d’accéder à un périmètre déterminé autour de son logement;

2. de fréquenter certains lieux, notamment des rues, places ou quartiers;

3. de prendre contact avec lui, notamment par téléphone, par écrit ou par voie électronique, ou de lui causer d’autres dérangements.

2 En outre, si le demandeur vit dans le même logement que l’auteur de l’atteinte, il peut demander au juge de le faire expulser pour une période déterminée. Ce délai peut être prolongé une fois pour de justes motifs.

3 Le juge peut, pour autant que la décision paraisse équitable au vu des circonstances:

1. astreindre le demandeur à verser à l’auteur de l’atteinte une indemnité appropriée pour l’utilisation exclusive du logement;

2. avec l’accord du bailleur, attribuer au seul demandeur les droits et les obligations qui résultent du contrat de bail.

3bis Il communique sa décision aux autorités de protection de l’enfant et de l’adulte compétentes et au service cantonal visé à l’al. 4, ainsi qu’à d’autres autorités ou à des tiers si cela semble nécessaire à l’accomplissement de leur tâche ou à la protection du demandeur ou si cela sert à l’exécution de la décision.2

4 Les cantons désignent un service qui peut prononcer l’expulsion immédiate du logement commun en cas de crise, et règlent la procédure.


1 Introduit par le ch. I de la LF du 16 déc. 1983 (RO 1984 778; FF 1982 II 661). Nouvelle teneur selon le ch. I de la LF du 23 juin 2006 (Protection de la personnalité en cas de violence, de menaces ou de harcèlement), en vigueur depuis le 1er juil. 2007 (RO 2007 137; FF 2005 6437 6461).
2 Introduit par le ch. I 1 de la LF du 14 déc. 2018 sur l’amélioration de la protection des victimes de violence, en vigueur depuis le 1er juil. 2020 (RO 2019 2273; FF 2017 6913).