A.                               X.________, née en 1948 et donc âgée de 71 ans, est connue médicalement pour un syndrome de Little (paralysie cérébrale infantile), pour un retard mental léger, une incontinence urinaire, une hépatite C et des traits de la personnalité de type dépendants. Durant l’enfance, elle a été opérée plusieurs fois et n’a pu marcher avec des cannes qu’à l’âge de neuf ans. Ses parents dévoués l’ont toujours entourée et stimulée. Elle a accepté son handicap avec beaucoup de philosophie et a développé des compétences sociales et scolaires inattendues qui lui ont permis, jusqu’à présent, de mener une vie relativement indépendante. Elle a ainsi été capable de travailler à temps partiel durant quelques années, puis a bénéficié d’une rente entière de la part de l’assurance invalidité (ci-après : AI). Le parcours de vie de l’intéressée l’a souvent amenée à se confronter à ses limites physiques et intellectuelles. Elle a développé des stratégies pour s’adapter aux situations stressantes et a toujours jalousement défendu son indépendance : construisant à 62 ans des projets professionnels (devenir téléphoniste dans une centrale de taxi) et à 70 ans, se mariant en Turquie et résidant dans ce pays durant quelques mois. Elle a toujours refusé d’aller vivre dans un home.

                        Le 14 juin 2010, l’APEA a institué une curatelle volontaire sur X.________. Par décision du 26 mai 2020, l’APEA a institué une mesure de curatelle de portée générale en se fondant notamment sur l’expertise du Dr A.________ du 27 mars 2020.

B.                               a) Par courriel du 6 janvier 2020, B.________, infirmière au centre de Peseux et Val-de-Ruz (Centre régional appartenant à l’établissement de droit public NOMAD [Neuchâtel Organise le Maintien à Domicile]) a informé C.________, curatrice de X.________, que les soins à domicile n’étaient plus possibles et qu’un placement était devenu nécessaire. Elle a aussi relevé que la personne concernée vivait dans un appartement insalubre et que ses vêtements étaient souillés d’urine, ainsi que son canapé et son fauteuil roulant. Elle faisait régulièrement appel au système d’alarme et sa mobilité était très réduite. Il y avait beaucoup de linge sale et il était devenu impossible de faire le ménage. Les collaborateurs et collaboratrices de NOMAD retrouvaient régulièrement X.________, qui n’arrivait plus à se relever, assise sur les toilettes depuis plusieurs heures. L’intéressée banalisait la situation, en affirmant qu’elle voulait et qu’elle était capable d’être autonome. Le 7 janvier 2020, par fax, la Dre D.________ a interpellé la présidente de l’APEA, en lui faisant part de sa vive inquiétude pour X.________ qui était rentrée à domicile et qui, depuis le départ de son mari en Turquie, vivait seule, sans l’assistance que ce dernier lui apportait – en précisant qu’il s’occupait bien d’elle. Pour cette raison, l’intéressée chutait souvent, se retrouvait coincée dans ses toilettes et devait faire régulièrement appel aux secours pour l’aider. Dans ces conditions, sa vie était en danger. Il était « très urgent de la placer dans un établissement à fin d’assistance même si elle ne sera certainement pas d’accord ».

b) Le 10 janvier 2020, la Dre D.________ a décidé de placer à des fins d’assistance X.________ à l’hôpital de Pourtalès à Neuchâtel après avoir constaté, lors d’un examen clinique, que sa patiente était atteinte notamment d'un syndrome de Little, avec parésie spastique équilibro-congénitale et d’une hépatite C. La Dre D.________ a ajouté ceci : « Merci de recevoir la patiente susnommée, contre son gré (PAFA pour décision d’orientation (Psychogériatrie ? Quelques jours de sevrage en hôpital avant placement probablement définitif dans un home ? Retour à domicile exclu tant que son mari turc coincé en Turquie ne peut pas revenir et cela risque de prendre des mois voire définitif) ». Elle a ajouté que sa patiente était pour la première fois vraiment désorientée et qu’elle était convaincue de n’avoir que 57 ans, dans un contexte de consommation d’alcool avouée, mais minimisée. Les raisons et buts du placement étaient « Mise en danger d’elle-même à domicile. Chutes nombreuses ». Le 15 janvier 2020, la Dre D.________ a écrit à l’APEA pour recommander l’institution d’une curatelle de portée générale, précisant que l’intéressée, présentait des troubles cognitifs, était atteinte d’une infection urinaire et de malnutrition.

c) Le 22 janvier 2020, X.________ a fait appel au juge en contestant son hospitalisation. A l’appui de son opposition elle fait valoir ceci : « Je refuse d’être placée dans une institution car ça m’empêchera d’avoir de la liberté ».

d) Le 27 janvier 2020, l’intéressée a été entendue par la présidente de l’APEA. Elle a déclaré, en substance, qu’elle n’était pas d’accord de rester à l’hôpital. Moins elle était seule, mieux elle se portait. Elle s’était mariée en juillet 2019 en Turquie avec E.________, né en 1964. Il était toujours retenu en Turquie pour des raisons familiales. Elle souhaitait qu’il rentre, parce qu’elle avait l’ennui de lui. Ils n’avaient pu se téléphoner qu’une seule fois, parce que le prix des communications téléphoniques était élevé. Elle a ajouté qu’elle ne souhaitait pas quitter son appartement. Elle habitait un immeuble avec beaucoup de personnes âgées et elle se sentait entourée. Il n’était pas question qu’elle aille dans un home, puisqu’elle pouvait compter sur son mari, avec qui elle avait vécu durant trois ans. Il faisait le ménage, les courses et les paiements. Il travaillait dans un restaurant. Son mari attendait un visa et ensuite allait rentrer en Suisse, tout prochainement. On lui avait appris à tomber à l’hôpital orthopédique de Lausanne. Elle voulait rentrer chez elle et qu’on la laisse tranquille.

e) Une note au dossier du 30 janvier 2020 indique que, selon le Service des migrations, E.________, qui avait dû quitter la Suisse parce que son titre de séjour était arrivé à expiration, avait déposé une nouvelle demande d’entrée en Suisse. La procédure était suspendue jusqu’à droit connu de la procédure de reconnaissance de son mariage avec X.________, célébré en Turquie.

f) Le 3 février 2020, la présidente de l’APEA a mandaté en qualité d’expert le Dr A.________ pour qu’il détermine, notamment, s’il était nécessaire, pour des raisons médicales, d’hospitaliser X.________ et si l’Hôpital de La Chaux-de-Fonds était un établissement adéquat pour prendre en charge l’intéressée.

g) Le 7 février 2020, le Réseau Hospitalier Neuchâtelois (ci-après : RHNe) a informé l’APEA que X.________ allait être transférée, le 10 février 2020, à la résidence F.________ à Z.________. Le 17 février 2020, le RHNe a établi une lettre de sortie mentionnant que l’intéressée était atteinte d’un syndrome de Little et qu’elle présentait plusieurs comorbidités (décompensation cardiaque globale à FEVG conservée d’origine infectieuse chez une patiente avec une sténose aortique modérée, une infection urinaire, consommation d’alcool à risque avec suspicion d’encéphalopathie, hépatite C, probable dénutrition et escarre de la fesse gauche).

h) Le 17 février 2020, la présidente de l’APEA a maintenu à titre provisoire le placement à des fins d’assistance de X.________ à la résidence F.________ à Z.________.

i) Le Dr A.________ a rendu son rapport le 27 mars 2020. Il en ressort que X.________ était l’aînée d’une fratrie de deux. Sa sœur cadette, âgée d’une soixantaine d’années est établie en Valais. Elle serait jalouse de X.________, lui reprochant d’avoir été privilégiée au sein de la famille. Les deux parents de X.________ sont décédés. Le père, décrit comme sévère, avait toujours soutenu X.________ et avait joué un rôle décisif dans son autonomisation. Sa mère était gentille et aimante. Depuis l’âge de deux ans, elle avait recours à une chaise roulante. Sa vue était également mauvaise (myopie et presbytie). Elle n’avait pas pu suivre une scolarité normale et n’avait pas effectué de formation professionnelle. Elle avait longtemps vécu en internat et travaillé dans un centre protégé. A l’âge de dix-huit ans, elle avait été accueillie dans un foyer pour personne handicapées. Par la suite, elle avait pu prendre un studio et travailler comme téléphoniste. Elle s’était mariée et n’avait pas eu d’enfant. Elle avait finalement obtenu une rente AI et travaillé pour G.________. Il y a quelques années, elle avait fait la connaissance d’un homme d’origine turque qu’elle avait épousé en Turquie parce que les autorités suisses s’étaient opposées à leur mariage. Elle avait décrit son mari comme quelqu’un de gentil, doux et travailleur. D’un point de vue somatique, X.________ présentait un handicap physique moteur important, qui lui imposait de se déplacer en chaise roulante et souffrait d’incontinence urinaire. Elle était atteinte d’une hépatite C. Elle n’avait pas de troubles psychiatriques, mais l’expert a constaté un retard mental léger et des traits de personnalité dépendants avec la présence d’un manque de développement émotionnel et d’une immaturité qui la rendent vulnérable, favorisant l’inhibition de sa volonté par crainte d’être abandonnée par les personnes qui comptent pour elle. En définitive, l’expert a estimé que « X.________ étant très peu autonome, avec une capacité de discernement très faible, ce qui l’amène à ne pas reconnaître ses déficits. Devant un tel dilemme, si elle n’est pas prise en charge, elle risque de ne pas solliciter les aides dont elle a besoin à tous niveaux, y compris du point de vue médical » « X.________ a déjà subi une hospitalisation, elle est au home F.________ à Z.________ actuellement où on lui procure les soins dont elle a besoin. Sa situation même en appartement protégé devenait chaotique les derniers temps, elle présentait des problèmes d’hygiène, des troubles du comportement marqués par des abus d’alcool, des demandes incessantes et des appels à l’aide répétés, des chutes à répétition. La situation devenait ingérable et très couteuse pour des soins ambulatoires », « X.________ a besoin d’une présence quasi permanente et se trouve dans l’impossibilité de vivre seule ». Enfin, l’expert a relevé que X.________ n’avait pas conscience de sa maladie et de la nécessité d’un traitement.

j) Invitée, le 3 avril 2020, à se déterminer sur le rapport du Dr A.________, X.________ a écrit le 26 août 2020 à l’APEA pour lui faire part de ses observations. Il en ressort qu’elle acceptait de demeurer au home F.________ à Z.________, mais « PAS TOUTE MA VIE : Mon Mari prime. » et qu’elle acceptait une curatelle de portée générale.

k) Reprenant les faits exposés ci-dessus, l’APEA a rendu, le 26 mai 2020, une décision dans laquelle elle instituait une curatelle de portée générale (chiffre 1) ; retenait que X.________ était d’accord de rester au home F.________, mais pas pour toute sa vie et qu’un réexamen de la situation devrait être effectué après une période de six mois dès l’admission de l’intéressée dans ce home (chiffre 2 à 4 du dispositif) et statuait sans frais (chiffre 8).

C.                               a) Le 17 juillet 2020, le président de l’APEA a informé la curatrice de l’intéressée, ainsi que la résidence F.________, qu’il devait procéder à un nouvel examen du placement de X.________.

b) Le 21 juillet 2020, l’infirmier chef de la résidence F.________, H.________, a répondu que depuis l’admission de X.________, le 10 février 2020, elle était dans le déni le plus total et qu’elle parlait chaque jour de son retour à domicile qui devait intervenir rapidement car son mari allait rentrer bientôt de Turquie. Ce déni résultait en partie de troubles cognitifs modérés avec une altération de la mémoire courte, de la pensée et du raisonnement. Elle pouvait avoir des troubles du comportement et refuser de prendre ses médicaments. Une surveillance était ainsi nécessaire. Cela étant, elle requérait une aide complète pour les soins d’hygiène du matin (toilette et douche), ne pouvait plus marcher et ne pouvait se déplacer qu’en chaise roulante, devait être assistée (aide mécanique) pour les transferts de son lit à sa chaise roulante et inversement et avait besoin d’une aide partielle pour se rendre aux toilettes (environ six fois par jour). L’ensemble de ces observations faisait penser qu’un placement dans une structure médicalisée était nécessaire à sa prise en charge.

c) Le même jour, C.________, curatrice de X.________, a indiqué à l’APEA qu’étant donné le handicap et l’état de santé de l’intéressée, elle devait impérativement vivre en milieu protégé.

c) Invitée, le 22 juillet 2020, à se déterminer sur le rapport de l’infirmier chef, H.________ et sur celui de sa curatrice, X.________ n’a pas procédé.

d) Reprenant les faits exposés ci-dessus, l’APEA a rendu, le 6 août 2020, une décision dans laquelle elle confirmait le placement de X.________ auprès de l’EMS F.________ à Z.________.

D.                               Le 24 août 2020, X.________ a écrit une lettre à la Cour des mesures de protection de l’enfant et de l’adulte (ci-après : CMPEA) par laquelle elle expose qu’elle veut retrouver un appartement et vivre chez elle. Elle souhaite s’inscrire dans un centre pour enfants handicapés pour leur faire la lecture. Au home F.________, elle n’est pas mal, mais il y a des règles à respecter. Elle veut se débrouiller toute seule chez elle. Comme elle est mariée, elle n’a plus besoin non plus d’une mesure de curatelle. Elle s’oppose donc à son placement.

E.                               Une audience s’est tenue le matin le 8 septembre 2020 devant le président de la CMPEA, par vidéoconférence, par Skype, après que de nombreux cas de COVID-19 ont été diagnostiqués à la résidence F.________ et pour des raisons évidentes liées au contexte de la pandémie actuelle. X.________ a indiqué qu’elle était opposée à son placement. Elle souhaitait reprendre un appartement pour avoir plus de liberté. Son mari serait à ses côté et pourra l’assister et elle n’aurait plus besoin d’aide à domicile. Il était venu une fois la voir au début de son placement. Sa chambre n’était pas mal. Elle la partageait avec une autre pensionnaire. Le personnel infirmier était gentil. Elle avait un certain plaisir à être au home F.________, mais elle voulait retrouver son indépendance et ainsi elle serait très heureuse.

C O N S I D E R A N T

en droit

1.                                Interjeté dans le délai utile de 10 jours contre une décision de l'Autorité de protection de l'enfant et de l'adulte dans le domaine du placement à des fins d’assistance, le recours est recevable, dans la mesure où X.________ a déposé en temps utile un acte écrit adressé à la CMPEA, d’où il ressort clairement qu’elle est en désaccord avec son hospitalisation. En tout cas, lors de son audition, elle a confirmé ce désaccord (art. 450b al. 2 CC).

2.                                La recourante a été entendue par le juge instructeur seul, pour des raisons de disponibilité des membres de la CMPEA, de façon à garantir le respect du principe de célérité, en s’efforçant de respecter le délai de cinq jours prévu à l’article 450e al. 5 CC, dans lequel l’autorité de recours doit statuer.

3.                                a) Selon l'article 426 CC, une personne peut être placée dans une institution appropriée lorsque, en raison de troubles psychiques, d'une déficience mentale ou d'un grave état d'abandon, l'assistance ou le traitement nécessaire ne peuvent lui être fournis d'une autre manière (al. 1). La personne concernée est libérée dès que les conditions de placement ne sont plus remplies (al. 3). La personne concernée ou l'un de ses proches peut demander sa libération en tout temps (al. 4). Dans les six mois qui suivent le placement, puis encore au cours des six mois qui suivent, puis ensuite chaque année au moins, l'autorité de protection de l'adulte examine si les conditions du maintien de la mesure sont encore remplies et si l'institution est toujours appropriée (art. 431 CC).

b) La jurisprudence (arrêt du TF du 25.06.2018 [5A_374/2018] cons. 4.2.1) précise que la notion de « troubles psychiques » englobe toutes les pathologies mentales reconnues en psychiatrie, à savoir les psychoses et les psychopathies ayant des causes physiques ou non, les démences, ainsi que les dépendances, notamment l'alcoolisme, la toxicomanie ou la pharmacodépendance (arrêts du TF des 13.10.2015 [5A_717/2015] cons. 4.1; 08.07.2014 [5A_497/2014] cons. 4.1 ; Meier, op. cit, n. 1192 ; Guide pratique COPMA, Droit de la protection de l'adulte, 2012, n. 10.6, p. 245). L'article 426 CC exige la réalisation de trois conditions cumulatives, à savoir une cause de placement (troubles psychiques, déficience mentale ou grave état d'abandon), un besoin d'assistance ou de traitement ne pouvant être fourni autrement et l'existence d'une institution appropriée permettant de satisfaire les besoins d'assistance de la personne placée ou de lui apporter le traitement nécessaire (Meier, op. cit., n. 1189). Ainsi, le placement à des fins d'assistance ne peut être décidé que si, en raison de l'une des causes mentionnées de manière exhaustive à l'article 426 CC, l'intéressé a besoin d'une assistance personnelle, c'est-à-dire présente un état qui exige qu'une aide lui soit fournie, souvent sous la forme d'un traitement médical, que des soins lui soient donnés et qu'une protection au sens étroit lui soit assurée (ATF 134 III 289 cons. 4 ; Steinauer/Fountoulakis, Droit des personnes physiques et protection de l'adulte, 2014, n. 1365, p. 596). Il faut encore que la protection nécessaire ne puisse être réalisée autrement que par une mesure de placement à des fins d'assistance, c'est-à-dire que d'autres mesures, telles que l'aide de l'entourage, l'aide sociale ou un traitement ambulatoire, aient été ou paraissent d'emblée inefficaces (Steinauer/Fountoulakis, op. cit., n. 1366, p. 596; Message du Conseil fédéral du 17 août 1977 à l'appui de la révision du code civil suisse (privation de liberté à des fins d'assistance) [Message], FF 1977 III 28-29). Il s'agit là de l'application du principe de proportionnalité, qui exige que les actes étatiques soient propres à atteindre le but visé, justifiés par un intérêt public prépondérant, et qu'ils soient à la fois nécessaires et raisonnables pour les personnes concernées. La mesure doit être considérée comme une ultima ratio, toutes les mesures alternatives portant une atteinte moins importante à la situation juridique de l'intéressé devant être examinées (Meier, op. cit., n. 1199 ; Guide pratique COPMA, op.cit., n. 10.7, p. 245 s.). Une mesure restrictive est notamment disproportionnée si une mesure plus douce est à même de produire le résultat escompté. L'atteinte, dans ses aspects matériel, spatial et temporel, ne doit pas être plus rigoureuse que nécessaire (arrêt du TF du 01.10.2008 [5A_564/2008] cons. 3). Eu égard au principe de la proportionnalité, le fait que l'assistance ou le traitement nécessaires ne puissent pas être fournis d'une autre façon que par un internement ou une rétention dans un établissement constitue l'une des conditions légales au placement. Tel peut notamment être le cas lorsque la personne concernée n'a pas conscience de sa maladie et de son besoin de placement  ATF 140 III 101 cons. 6.2.3 et des références ; arrêt du TF du 21.09.2016 [5A_634/2016] cons. 3.1) ou que son bien-être nécessite un traitement stationnaire, qui ne peut être couronné de succès que s'il est assuré sans interruption (arrêt du TF du 15.12.2016 [5A_652/2016] cons. 2.2).

c) L’examen périodique au sens de l’article 431 CC doit comprendre une appréciation individualisée de chaque cas (et non pas seulement, une évaluation de la politique générale d’un établissement) ; il requiert une audition de la personne placée (et en principe de son curateur), ainsi qu’un rapport de l’établissement lui-même. La doctrine ne paraît exiger une nouvelle expertise que dans des conditions exceptionnelles. La jurisprudence (ATF 140 III 105 ; JdT 2015 II 75) en fait cependant une obligation générale, l’autorité ne pouvant qu’exceptionnellement se fonder sur une expertise rendue précédemment, car le but de l’expertise réalisée au moment de l’examen périodique est précisément de vérifier si des changements sont intervenus depuis les précédentes décisions. Le questionnaire envoyé à l’expert pourra demeurer sommaire et se limiter à examiner si la situation s’est modifiée depuis la décision de placement ou le précédent contrôle (Meier, Droit de la protection de l’adulte, Zurich, 2016, no 1270, p.610 à 611).

4.                                a) En l’espèce, tous les intervenants professionnels et la curatrice qui se sont prononcés (la Dre D.________, les 7, 10 et 31 janvier 2020 ; la Dre I.________, le 17 janvier 2020, et l’expert A.________, dans son rapport d’expertise du 27 mars 2020 ; le rapport de l’infirmier chef de la résidence F.________ du 21 juillet 2020 ; la curatrice, dans ses courriers des 3 février, 7 avril et 21 juillet 2020 sont d’avis que X.________ est actuellement trop atteinte dans sa santé pour pouvoir être livrée à elle-même, ce d’autant qu’elle présente un déni complet de sa problématique et que sa prise en charge ambulatoire s’était soldée, depuis plusieurs années, par des échecs. Elle est rentrée de Turquie le 8 décembre 2019 et est retournée vivre dans son appartement. Rapidement, le suivi ambulatoire (repas à domicile, téléalarme et NOMAD) a montré que l’intéressée ne pouvait plus vivre seule dans un appartement et qu’un placement était nécessaire (rapport de la curatrice du 6 janvier 2020 ; note de B.________, infirmière de NOMAD, du 6 janvier 2020, et le signalement de la Dre D.________ du 7 janvier 2020).

b) Actuellement, avec l’âge, la recourante ne peut plus marcher avec ses cannes et doit recourir à des moyens auxiliaires mécaniques pour être déplacée de sa chaise à son lit et inversement. Elle est dans l’incapacité de se laver elle-même et a besoin d’aide pour se rendre aux toilettes. Elle est donc impotente, ce qu’elle ne veut pas admettre. Elle est aussi atteinte d’une grave incontinence urinaire. Par le passé, ce trouble ajouté à sa paralysie a rendu très difficile, voire impossible, son maintien à domicile (rapport de la commission de salubrité du 4 novembre 2009, rapports de la curatrice des 22 août 2016 et 6 décembre 2017 plus annexes ; signalement de la curatrice du 6 janvier 2020 et décision d’hospitalisation de la Dre D.________ du 10 janvier 2020). Le rapport de l’infirmier chef de la résidence F.________ indique que la situation de la recourante n’a pas connu d’évolution depuis son arrivée, le 10 février 2020. X.________ est toujours paralysée. Ces constatations rejoignent celles de l’expert A.________ dans son rapport du 27 mars 2020. La paralysie de l’intéressée résulte d’un problème survenu à la naissance. Cette maladie a connu durant l’enfance une amélioration, puisqu’elle a pu marcher avec des cannes dès l’âge de neuf ans. Cependant, elle a toujours eu recours à une chaise roulante. Avec l’âge, la recourante n’a plus été en mesure de se déplacer avec ses cannes. A son handicap physique s’ajoute un retard mental léger et des traits de la personnalité dépendants. Ses facultés de compréhension s’en trouvent amoindries, ce qui peut expliquer en partie son déni de la réalité. Sa personnalité de type abandonnique la rend vulnérable aux agissements de personnes malveillantes qui chercheraient à exploiter ses faiblesses. Le rapport de l’infirmier chef de la résidence F.________ montre aussi que la prise en charge de la recourante nécessite de l’aide pour tous les actes de la vie quotidienne. L’impotence de l’intéressée n’est ainsi pas moins lourde aujourd’hui qu’elle ne l’était en au moment de l’expertise. Par ailleurs, le 9 mai 2019, le Tribunal fédéral a rejeté le recours déposé par E.________, le mari de la recourante, suite au refus de l’état civil de reconnaître son mariage avec X.________. Le Service des migrations a indiqué qu’il n’envisageait donc pas d’octroyer une autorisation de séjour par regroupement familial à E.________. Il est dès lors peu probable que ce dernier puisse revenir s’installer dans le canton et qu’il reprenne la vie commune avec l’intéressée, en lui fournissant à domicile l’aide dont elle a besoin. Il faut toutefois rappeler à l’APEA que la jurisprudence citée plus avant lui impose de requérir une nouvelle expertise dans le cadre de ses examens périodiques. En l’occurrence, la dernière expertise date de la fin du mois de mars 2020, il n’était donc pas indispensable de requérir à nouveau l’avis d’un expert en août 2020, au vu par ailleurs d’une situation documentée sur une longue période. Le maintien du placement de l’intéressée s’impose donc. Lors des prochains examens périodiques, une expertise devra être ordonnée pour suivre une fois par année l’évolution de la personne concernée. C’est pourquoi, tout en ne pouvant accéder à la conclusion du recours, l’Autorité de céans invitera l’APEA à réexaminer, d’ici le 31 mars 2021, la nécessité du placement, après avoir sollicité l’avis d’un expert. Le lieu du placement n’est pas en soi contesté et il présente à l’évidence les qualités requises.

5.                                X.________ s’oppose également à la curatelle de portée générale dont elle fait l’objet suite à la décision du 26 mai 2020. Cependant la décision attaquée ne porte pas sur l’institution d’une curatelle de portée générale, de sorte que la CMPEA n’a pas à s’en saisir (hors l’hypothèse d’un déni de justice de la part de l’APEA). Il reviendra à l’APEA d’examiner la demande de levée de la curatelle que la recourante a adressée à la CMPEA.

6.                                Le recours doit dès lors être rejeté.

7.                                Compte tenu des circonstances, il y a lieu de statuer sans frais.

Par ces motifs,
la Cour des mesures de protection
de l'enfant et de l'adulte

1.    Rejette le recours, au sens des considérants.

2.    Invite l’APEA à procéder à un nouvel examen périodique du placement le 31 mars 2021 et à statuer sur la base d’une nouvelle expertise.

3.    Transmet à l’APEA comme objet de sa compétence le recours du 24 août 2020 de X.________ en ce qu’il vise la levée de sa curatelle.

4.    Statue sans frais.

Neuchâtel, le 15 septembre 2020

 

Art. 426 CC
Mesures
Placement à des fins d’assistance ou de traitement
 

1 Une personne peut être placée dans une institution appropriée lorsque, en raison de troubles psychiques, d’une déficience mentale ou d’un grave état d’abandon, l’assistance ou le traitement nécessaires ne peuvent lui être fournis d’une autre manière.

2 La charge que la personne concernée représente pour ses proches et pour des tiers ainsi que leur protection sont prises en considération.

3 La personne concernée est libérée dès que les conditions du placement ne sont plus remplies.

4 La personne concernée ou l’un de ses proches peut demander sa libération en tout temps. La décision doit être prise sans délai.

Art. 431 CC
Examen périodique
 

1 Dans les six mois qui suivent le placement, l’autorité de protection de l’adulte examine si les conditions du maintien de la mesure sont encore remplies et si l’institution est toujours appropriée.

2 Elle effectue un deuxième examen au cours des six mois qui suivent. Par la suite, elle effectue l’examen aussi souvent que nécessaire, mais au moins une fois par an.