A.                               a) Le 5 juin 2020, le Ministère public a décidé l’ouverture d’une instruction contre X.________, prévenu de trafic et consommation de stupéfiants, au sens de l’article 19 al. 1 et 2 LStup, et d’aide au séjour illégal, au sens de l’article 116 al. 1 let. a LEI. Il lui reprochait, en bref, d’avoir, à Z.________, dès janvier 2019 (recte : 2020), hébergé et aidé des ressortissants étrangers, séjournant en Suisse sans autorisation, sachant ou devant savoir qu’ils déployaient un important trafic de stupéfiants, recevant d’importantes sommes d’argent de leur part alors qu’il savait qu’elles provenaient du trafic.

                        b) Le prévenu, qui disposait d’une autorisation de séjour en Suisse, louait un appartement à la rue [aaaaa], à Z.________, dans lequel il avait hébergé des ressortissants étrangers en situation illégale. Le bail s’est terminé le 31 mai 2020 – date à laquelle le prévenu avait aussi perdu son emploi, ayant été renvoyé car il devait conduire des véhicules pour son travail et avait tu qu’il n’avait pas de permis – et le prévenu a loué un nouveau logement dans la même ville, rue [bbbbb]. X.________ n’y vivait apparemment pas, mais l’appartement était occupé par A.________, B.________ et C.________.

                        c) Une opération effectuée le 11 juin 2020 à la rue [bbbbb] a permis l’interpellation des trois susnommés et notamment la découverte de 56 « parachutes » de cocaïne prêts à la vente, de 6'750 francs en liquide et de bulletins de versement amenant à penser que ce n’était pas le locataire qui payait le loyer ; aucun effet personnel de X.________ n’a été retrouvé dans le logement. Des instructions ont été ouvertes contre les trois personnes arrêtées qui, dans un premier temps, se sont rejeté la responsabilité de la drogue et de la somme retrouvées. A.________ a cependant admis avoir vendu de la drogue (il était d’ailleurs mis en cause par deux toxicomanes pour leur avoir vendu de la cocaïne). Des documents au nom de B.________ et C.________ ont par ailleurs été trouvés dans un autre appartement à Z.________, où 25'980 euros et 6'000 francs ont été saisis. Les trois prévenus ont été placés en détention provisoire, où ils se trouvent toujours.

                        d) Le 16 juin 2020, X.________ s’est présenté à la police pour y récupérer les clés de l’appartement rue [aaaaa]. Il a été interpellé. Une perquisition faite dans le logement en question a abouti au constat qu’il était vide. Interrogé, le prévenu a admis avoir hébergé dès novembre 2019 des tiers en situation illégale, qu’il avait su environ un mois plus tard qu’ils trafiquaient des stupéfiants et qu’il recevait d’eux de l‘argent, de la nourriture et de la drogue pour sa consommation personnelle. La prévention contre lui a été précisée et étendue le 17 juin 2020.

B.                               a) Saisi d’une requête de mise en détention déposée par le Ministère public, le Tribunal des mesures de contrainte des Montagnes et du Val-de-Ruz (ci-après : TMC) a interrogé X.________ le 18 juin 2020. Sur les faits de la cause, le prévenu a donné une version correspondant à peu près à ses déclarations précédentes, précisant qu’il ne savait pas « l’intensité » de ce qu’il risquait lorsqu’il s’était présenté à la police. Au sujet de sa situation personnelle, il a expliqué qu’il vivait en Suisse depuis une dizaine d’années, n’avait plus d’emploi, ni de ressources depuis fin mai 2020, avait en France de la famille avec laquelle il n’avait plus trop de contacts, avait un enfant âgé de trois ans qu’il n’avait plus vu depuis un an et demi et n’était pas intégré dans un club de sports ou de loisirs, préférant rentrer chez lui après son travail. Il disait vouloir « régler cette histoire et repartir à zéro ».

                         b) Le même 18 juin 2020, le TMC a ordonné la détention provisoire du prévenu, jusqu’au 16 septembre 2020. Il a retenu, en résumé, l’existence de forts soupçons, en se fondant sur le fait que le prévenu avait admis avoir hébergé quatre personnes, qu’il savait depuis décembre 2019 qu’elles se livraient au trafic de stupéfiants, qu’il répondait au téléphone lorsque des clients appelaient, disant alors où les clients devaient se rendre pour obtenir des stupéfiants, l’un des trafiquants se déplaçant ensuite pour la transaction, qu’il avait effectué des traductions en arabe pour les autres prévenus et qu’il avait reçu d’eux de l’argent pour son loyer et 10 grammes de cocaïne à titre gratuit. De tels actes étaient clairement constitutifs d’infractions à la LStup. Une quantité non négligeable de cocaïne avait été trouvée lors des perquisitions, de même que de nombreux téléphones portables et une importante somme d’argent. Le prévenu, originaire de France, n’avait aucune attache en Suisse, même s’il y vivait depuis plusieurs années, et n’y avait notamment pas de famille, ni d’emploi. Il fallait donc retenir un risque de fuite. Un risque de collusion devait aussi être retenu, en fonction de l’état de l’enquête. Un examen des téléphones portables devait être effectué, afin d’identifier les acquéreurs de stupéfiants ; il faudrait entendre ces personnes, ce qui permettrait de déterminer le rôle précis du prévenu et des personnes qu’il avait hébergées. Durant cette période, il importait que le prévenu ne puisse pas communiquer avec l’extérieur et avec les autres prévenus. Aucune mesure de substitution ne pouvait être envisagée en l’état.

C.                               a) Le prévenu a demandé sa libération provisoire le 2 juillet 2020, en alléguant qu’il devait s’occuper de son divorce et de la garde de son fils, s’inscrire au chômage, retrouver rapidement un emploi et éviter de perdre son appartement.

                        b) Le Ministère public s’est opposé à la libération, en exposant qu’un autre prévenu avait encore été arrêté le 22 juin 2020, que les prévenus faisaient partie d’une bande, qu’il fallait identifier le rôle de chacun des intéressés et les clients, que cela prenait du temps, vu notamment l’analyse de nombreux téléphones portables, que les premiers résultats montraient que l’essentiel des contacts téléphoniques étaient intervenus avec des personnes connues pour consommer des stupéfiants, que la convocation et l’audition des clients prenait également du temps et que des séries d’auditions étaient en cours.

                        c) Dans des observations du 10 juillet 2020, le prévenu a maintenu sa demande. Selon lui, le risque de collusion pouvait être écarté, les principaux protagonistes du trafic ayant été arrêtés. Un important client avait été interrogé le 9 juillet 2020 et indiqué que le prévenu ne lui avait pas vendu personnellement de stupéfiants. Comme le prévenu souhaitait garder son appartement de la rue [bbbbb] et n’envisageait pas de quitter le pays, il n’y avait pas de risque de fuite. Il aurait pu s’enfuir au lieu de se présenter à la police. Son rôle n’était que secondaire et il était manifeste qu’il serait condamné à une peine avec sursis. Il n’avait pas d’antécédents dans le domaine considéré.

                        d) Interrogé par le TMC le 15 juillet 2020, le prévenu a repris les arguments déjà développés dans ses observations.

                        e) Par ordonnance du 15 juillet 2020, le TMC a rejeté la demande de mise en liberté, essentiellement pour les mêmes motifs que ceux mentionnés dans sa décision précédente.

D.                               a) Le 10 septembre 2020, le Ministère public a requis auprès du TMC la prolongation pour trois mois de la détention du prévenu. Il relevait que le dossier avait été joint le 23 juillet 2020 à celui d’une autre affaire, concernant aussi des ressortissants nord-africains qui avaient vendu de la drogue à Z.________, deux des prévenus du dossier initial étant mis en cause pour avoir déployé un trafic avec les intéressés. À ce stade, il paraissait établi que les co-prévenus avaient vendu plus de 300 grammes de cocaïne, d’un taux de pureté d’environ 80 % selon des analyses. Le rôle du prévenu dans le trafic n’était a priori pas de vendre des stupéfiants, mais de fournir un appui logistique, constituant à tout le moins une complicité d’infraction à la LStup. Il recevait 300 francs par mois et avait aussi reçu de la cocaïne de la part des personnes qu’il logeait et dont il connaissait les activités depuis au moins mi-décembre 2019. L’enquête était encore en cours et les auditions des prévenus par la police, sur la base des éléments déjà recueillis, étaient agendées entre le 10 septembre et le 13 octobre 2020. Elles devaient permettre d’obtenir des éléments complémentaires sur le rôle du prévenu (éventuelle remise de stupéfiants à des tiers par lui-même, comme certaines conversations téléphoniques le laissaient supposer). Ensuite, un rapport de synthèse serait établi, au sujet duquel les prévenus devraient se déterminer, puis ils seraient encore interrogés par le Ministère public. Un risque de collusion subsistait. S’agissant de X.________, un risque de fuite devait également être retenu.

                        b) Le 11 septembre 2020, le TMC a prolongé la détention jusqu’à ce qu’il ait pu statuer sur la requête de prolongation.

                        c) Dans ses observations du 17 septembre 2020, X.________ a relevé que les trois prévenus supplémentaires n’avaient aucun lien avec lui. Lors d’un interrogatoire du 10 septembre 2020, il avait expliqué n’avoir déployé aucun trafic, mais accueilli des gens dans une période de sa vie où il n’allait pas bien. Il contestait tout risque de collusion, puisque tous les prévenus étaient incarcérés, et également tout risque de fuite, notamment parce qu’il recherchait déjà activement un travail.

                        d) Le même jour, X.________ a écrit au Ministère public pour dire qu’il s’excusait de ce qu’il avait fait, qu’il ne voulait pas fuir ses responsabilités et qu’il entendait tirer un trait et reprendre une vie normale, notamment pour avoir son fils durant le week-end.

E.                               Par ordonnance du 22 septembre 2020, le TMC a ordonné la prolongation de la détention provisoire de X.________ jusqu’au 16 décembre 2020. Il a largement repris la motivation de ses décisions précédentes, s’agissant des soupçons existant contre l’intéressé. Il a retenu un risque de fuite, là aussi en fonction des mêmes éléments que précédemment. Un risque de collusion devait aussi être retenu, en fonction de l’état de l’enquête et du fait que les auditions à venir permettraient de clarifier le rôle du prévenu, notamment quant à d’éventuelles remises de stupéfiants par lui-même à des tiers. Dans l’intervalle, il importait que le prévenu ne puisse pas communiquer avec l’extérieur et avec les autres prévenus. Aucune mesure de substitution ne pouvait être envisagée.

F.                               a) Le 23 septembre 2020, avec un complément du 2 octobre 2020, X.________ recourt contre la décision du TMC, en concluant à son annulation et à sa remise en liberté immédiate, toutes mesures de substitution adéquates pouvant être prises, sous suite de frais, sous réserve de l’assistance judiciaire. Il expose qu’il s’est présenté à la police le 16 juin 2020 pour y récupérer des clés et que c’est là qu’il a été appréhendé. S’il pensait avoir commis un crime quelconque, il ne se serait pas rendu à la police. Il s’est expliqué sur les faits qui lui sont reprochés et les a admis, ce qui n’est de loin pas le cas des autres prévenus. Attendre le résultat de l’audition de ces autres prévenus pour libérer le recourant serait disproportionné. Il a été reconnu que le recourant ne se livrait pas à un trafic de stupéfiants. Tous les acteurs de l’affaire étant sous les verrous, le risque de collusion est à écarter. Le risque de fuite doit être relativisé, puisque le recourant a effectué de nombreuses recherches d’emploi et qu’il n’a pas résilié le bail de son appartement. Cela démontre qu’il n’a pas l’intention de fuir ses responsabilités. Des mesures de substitution comme une probation imposant l’obligation de trouver un emploi ou d’essayer d’obtenir des prestations de l’assurance-chômage, ou encore l’obligation de se présenter régulièrement dans un poste de police, seraient suffisantes. Le recourant n’a joué qu’un rôle secondaire dans l’affaire et il fait les frais du fait que les autres prévenus ne disent pas la vérité et d’une jonction de procédure qui ne le concerne pas. Enfin, il est fort probable que la peine à laquelle le recourant sera condamné sera assortie du sursis, ce qui rend disproportionnée la détention provisoire.

                        b) Dans ses observations du 6 octobre 2020, le Ministère public conclut au rejet du recours. Il expose, en résumé, que le recourant a, quoi qu’il en dise, eu un rôle actif dans le trafic, à lire les déclarations des autres personnes entendues (la procureure dépose un procès-verbal d’interrogatoire du 1er octobre 2020 de D.________, dans lequel celui-ci met clairement en cause le recourant pour une activité de vente de cocaïne, pour l’avoir incité à vendre lui-même, pour avoir eu les contacts avec les acheteurs et les lui avoir indiqués, etc.). Si son rôle n’était a priori pas de vendre des stupéfiants, il a mis à disposition des autres prévenus un appartement et une logistique leur permettant de le faire. Le risque de collusion demeure. Le risque de fuite également, puisque la situation du prévenu en Suisse est aujourd’hui précaire. Le recourant n’a repris contact avec son épouse que depuis le moment où il a été arrêté, alors qu’il ne l’avait plus vue depuis un an et demi (la procureure dépose une copie d’une lettre que l’épouse a écrite au prévenu à la prison, lettre dans laquelle elle lui dit son incompréhension devant le fait qu’il ne lui avait pas donné de nouvelles pendant un an et demi, qu’il avait l’laissée avec son cancer et des dettes, que son fils ne l’a pas oublié, qu’elle aimerait qu’il lui dise enfin la vérité et qu’elle viendra peut-être le voir à son lieu de détention, quand elle sera prête).

                        c) Les observations du Ministère public ont été transmises le 6 octobre 2020 au recourant, un délai de trois jours lui étant fixé pour une détermination éventuelle.

                        d) Le 9 octobre 2020, le recourant réitère que s’il n’était pas à son domicile lors de la perquisition, il s’est ensuite rendu à la police pour récupérer les clés. S’il avait pensé commettre de graves infractions, il n’y serait pas allé.

C O N S I D E R A N T

1.                                Déposé dans les formes et le délai prévus par la loi, par une personne disposant manifestement d’un intérêt à obtenir la modification de la décision attaquée, le recours est recevable (art. 382, 393 al. 1 let. c et 396 al. 1 CPP).

2.                                a) Conformément à l’article 221 al. 1 let. a CPP, la détention provisoire ne peut être ordonnée que lorsque le prévenu est fortement soupçonné d'avoir commis un crime ou un délit.

                        b) Selon la jurisprudence, il doit exister contre le prévenu des charges suffisantes ou des indices sérieux de culpabilité, c'est-à-dire des raisons plausibles de la soupçonner d'avoir commis une infraction. Il n'appartient cependant pas au juge de la détention de procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge et d'apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure. L'intensité des charges propres à motiver un maintien en détention préventive n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale ; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître avec une certaine vraisemblance après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables (arrêts du TF du 19.03.2020 [1B_90/2020] cons. 3.1 et du 15.07.2020 [1B_321/2020] cons. 4.1 ; ATF 143 IV 330 cons. 2.1).

                        c) En l’espèce, il existe manifestement contre le recourant des soupçons suffisants – et renforcés depuis le début de l’instruction – d’avoir commis des infractions au sens de l’article 19 LStup. Il ne conteste pas que des charges suffisantes existent, puisqu’il indique lui-même, dans la motivation de son recours, que la peine qui lui sera infligée devrait être assortie du sursis, ce qui implique qu’il admet qu’une peine devra être prononcée. Le recourant reconnaît avoir hébergé trois personnes depuis novembre 2019, avoir su depuis mi-décembre 2019 au moins qu’elles se livraient au trafic, avoir parfois pris des téléphones de clients et transmis les informations nécessaires pour que les autres prévenus puissent leur livrer la drogue et avoir obtenu certaines récompenses. Les déclarations faites le 1er octobre 2020 par D.________ (procès-verbal annexé aux observations du Ministère public) amènent à ne pas exclure que le rôle du recourant ait été plus étendu et moins secondaire que ce qu’il prétend. De toute manière, le fait d’héberger, contre récompense, des trafiquants de drogue dans son appartement – ou dans un appartement loué par l’auteur et immédiatement mis à disposition des trafiquants – et de leur assurer une certaine logistique, comme par exemple en les laissant entreposer de la drogue dans les locaux mis à disposition réalise déjà l’infraction à l’article 19 LStup, et pas seulement en qualité de complice (ATF 119 IV 266).

3.                                a) Au sens de l’article 221 al. 1 let. b CPP, un risque de collusion doit être admis lorsqu’il y a sérieusement lieu de craindre que le prévenu ne compromette la recherche de la vérité en exerçant une influence sur des personnes ou en altérant des moyens de preuve.

                        b) Selon la jurisprudence (arrêt du TF du 11.08.2020 [1B_382/2020] cons. 3.1), pour retenir l'existence d'un risque de collusion, l'autorité doit démontrer que les circonstances particulières du cas d'espèce font apparaître un danger concret et sérieux de manœuvres propres à entraver la manifestation de la vérité, en indiquant, au moins dans les grandes lignes et sous réserve des opérations à conserver secrètes, quels actes d'instruction elle doit encore effectuer et en quoi la libération du prévenu en compromettrait l'accomplissement. Dans cet examen, entrent en ligne de compte les caractéristiques personnelles du détenu, son rôle dans l'infraction ainsi que ses relations avec les personnes qui l'accusent. Entrent aussi en considération la nature et l'importance des déclarations, respectivement des moyens de preuve susceptibles d'être menacés, la gravité des infractions en cause et le stade de la procédure. Plus l'instruction se trouve à un stade avancé et les faits sont établis avec précision, plus les exigences relatives à la preuve de l'existence d'un risque de collusion sont élevées.

                        c) Il résulte du dossier et des explications fournies par le Ministère public que l’enquête se trouve encore à un stade où il s’agit d’éviter toute possibilité de contact entre les différents prévenus, ainsi qu’entre ceux-ci et des tiers impliqués dans leurs actes et qui n’ont pas encore pu être identifiés et entendus. Une série d’interrogatoires est en cours. Après ceux-ci, des confrontations entre certains des prévenus devront sans doute être organisées. Cela concerne aussi le recourant, puisque celui-ci devra notamment s’expliquer sur les déclarations faites le 1er octobre 2020 par D.________ et, s’il les conteste, être confronté à celui-ci. Le rôle du recourant dans le trafic n’est pas suffisamment éclairci pour que l’on puisse considérer que, remis en liberté, il ne pourrait pas compromettre le résultat de l’enquête. Que les principaux protagonistes du trafic soient actuellement détenus est sans pertinence : quand les différents prévenus impliqués dans des infractions qu’ils ont commises plus ou moins ensemble sont détenus, l’un ne peut pas exciper de la détention des autres pour en déduire que le risque de collusion le concernant serait nul. De plus, les consommateurs de la drogue – soit les clients du réseau – sont aussi susceptibles de fournir des indications sur les rôles des différents membres de celui-ci (remise directe de drogue, intermédiaire, prise de commandes, etc.). La récente mise en cause du recourant par D.________ ajoute au risque de collusion. Ce risque de collusion justifie encore le maintien en détention, étant cependant précisé que l’enquête devrait prochainement – sauf éléments nouveaux – atteindre un stade où ce risque sera atténué.

4.                                a) D’après l’article 221 al. 1 let. a CPP, la détention provisoire peut être fondée sur un risque de fuite, soit lorsqu'il y a sérieusement lieu de craindre que le prévenu se soustraie à la procédure pénale ou à la sanction prévisible en prenant la fuite.

                        b) Selon la jurisprudence (arrêt du TF du 15.07.2020 [1B_321/2020] cons. 4.1), le risque de fuite doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères, tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'État qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable. La gravité de l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier le placement ou le maintien en détention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé. Le risque de fuite s'étend également au risque de se soustraire à la procédure pénale ou à la sanction prévisible en tombant dans la clandestinité à l'intérieur du pays.

                        c) En l’espèce et comme relevé par le TMC, le prévenu n’a pas d’attaches solides avec la Suisse. S’il ne s’y trouve pas en situation illégale, il n’y a pas de famille, sinon son épouse et son fils ; il a expliqué plusieurs fois qu’il entendait divorcer de la première (il en a même tiré argument pour solliciter sa libération, disant devoir s’occuper de son divorce) et admis qu’au moment de son arrestation, il n’avait plus vu le second, âgé de trois ans, depuis un an et demi ; le prévenu ne peut donc pas soutenir sérieusement que ces relations le détourneraient, s’il était libéré, de mettre une frontière entre lui et la justice helvétique. Il n’a pas de liens sociaux particuliers en Suisse, où il n’a notamment – selon ses déclarations – jamais fait partie d’un club ou d’une autre association. Il a perdu son emploi à fin mai 2020, dans des circonstances qui font que son précédent employeur ne lui délivrera sans doute pas un certificat élogieux qui pourrait l’aider dans une recherche de travail. Depuis lors, il n’a plus travaillé, ni perçu de revenu licite jusqu’à son interpellation à mi-juin 2020, si on se réfère à ses explications. Ses recherches de travail actuelles paraissent avoir peu de chances de succès. Il dispose certes d’un appartement qu’il loue, mais il ne semble pas y avoir vécu, puisqu’aucun effet personnel lui appartenant n’a été trouvé lors de la perquisition dans ce logement. On ne sait donc pas où il résidait en fait depuis début juin 2020. Il aurait une voiture immatriculée en France et les doutes du Ministère public quant à sa situation dans ce pays ne sont pas forcément infondés. S’agissant de la gravité des infractions qui sont reprochées au recourant, on relèvera qu’à ce stade, il n’est en tout cas pas exclu que l’article 19 al. 2 LStup lui soit applicable, en fonction des quantités de drogue et des sommes d’argent découvertes, ainsi que des autres éléments de l’enquête (cas grave de la quantité, let. a), éventuellement de son implication dans les activités du groupe (cas grave de la bande, let. b). Une telle qualification impliquerait une condamnation à une peine privative de liberté d’un an au moins, ainsi qu’une expulsion obligatoire pour cinq ans au moins (art. 66a al. 1 let. o CPP). Dans ces conditions, un risque de fuite doit être retenu, qui s’oppose à une libération.

5.                                a) Comme toutes les autres mesures de contrainte, la détention provisoire ne peut être ordonnée que si les buts poursuivis ne peuvent pas être atteints par des mesures moins sévères, et qu'elle apparaît justifiée au regard de la gravité de l'infraction (art. 197 al. 1 let. c et d CPP).

                        b) L'art. 212 al. 3 CPP prévoit que la détention provisoire ne doit pas durer plus longtemps que la peine privative de liberté prévisible. Le juge peut dès lors maintenir une telle mesure aussi longtemps qu'elle n'est pas très proche de la durée de la peine privative de liberté à laquelle il faut s'attendre concrètement en cas de condamnation. Il convient d'accorder une attention particulière à cette limite, car il y a lieu de veiller à ce que les autorités de jugement ne prennent pas en considération dans la fixation de la peine la durée de la détention avant jugement à imputer selon l'article 51 CP. Afin d'éviter d'empiéter sur les compétences du juge du fond, le juge de la détention ne tient en principe pas compte de l'éventuel octroi, par l'autorité de jugement, d'un sursis, d'un sursis partiel ou d'une libération conditionnelle ; pour entrer en considération sur cette dernière hypothèse, son octroi doit être d'emblée évident (arrêt du TF du 29.04.2020 [1B_185/2020] cons. 4.1).

                        c) Comme on l’a vu plus haut, une qualification des actes du recourant au sens de l’article 19 al. 2 LStup n’est en tout cas pas exclue en l’état. Si elle était retenue, elle entraînerait en principe, comme déjà dit, une peine privative de liberté d’un an au moins. Une prolongation de la détention de trois mois, portant le total de la détention provisoire subie à six mois, reste ainsi parfaitement proportionnée à la peine à laquelle s’expose le recourant pour les actes qui lui sont reprochés. L’octroi d’un sursis n’est certes pas exclu a priori, mais il n’apparaît pas d’emblée comme une évidence, dans la mesure où il ressort de l’extrait du casier judiciaire du recourant qu’il a déjà été condamné à trois reprises en Suisse, soit le 12 février 2015 à 60 jours-amende avec sursis pendant 2 ans et 1'300 francs d’amende pour conduite en état d’incapacité (ivresse qualifiée), le 15 décembre 2015 à 120 jours-amende avec sursis pendant 4 ans et 200 francs d’amende pour la même infraction et conduite sans permis et le 14 janvier 2019 à 45 jours-amende sans sursis pour conduite sans permis. Le casier judiciaire français fait quant à lui état de condamnations prononcées entre 2000 et 2005, notamment pour des faits assez semblables (étant précisé que si les infractions suisses concernent des infractions d’un autre type que celles qui sont l’objet de la présente procédure, elles démontrent la tendance du recourant à ne pas tenir compte de l’avertissement que constitue une première condamnation et à persévérer dans les mêmes infractions).

                        d) La jurisprudence (arrêt du TF du 11.08.2020 [1B_382/2020] cons. 4.1) retient que conformément au principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.), il convient d'examiner les possibilités de mettre en œuvre d'autres solutions moins dommageables que la détention (règle de la nécessité). Cette exigence est concrétisée par l'article 237 al. 1 CPP, qui prévoit que le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention si ces mesures permettent d'atteindre le même but que la détention. Selon l'article 237 al. 2 CPP, font notamment partie des mesures de substitution la fourniture de sûretés (let. a), la saisie des documents d'identité (let. b), l'assignation à résidence ou l'interdiction de se rendre dans un certain lieu ou un certain immeuble (let. c), l'obligation de se présenter régulièrement à un service administratif (let. d), l'obligation d'avoir un travail régulier (let. e) et l'interdiction d'entretenir des relations avec certaines personnes (let. g).

                        e) En l’espèce, aucune mesure de substitution ne peut remplacer la détention, ne serait-ce qu’en raison du risque de collusion, qui subsiste en l’état actuel de l’enquête. Celles que propose le recourant ne sont de toute manière pas de nature à assurer qu’il ne prendrait pas la fuite, au vu de sa situation actuelle, déjà rappelée plus haut.

6.                                Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté. Les frais de la procédure de recours seront mis à la charge du recourant. Son avocate d’office sera invitée à déposer un mémoire pour ses activités devant l’autorité de recours, dans les 10 jours, et informée qu’à défaut, son indemnité sera fixée sur la base du dossier.

Par ces motifs,
l'Autorité de recours en matière pénale

1.    Rejette le recours et confirme la décision entreprise.

2.    Arrête les frais de la procédure de recours à 500 francs et les met à la charge du recourant.

3.    Invite Me E.________ à déposer un mémoire pour ses activités devant l’autorité de recours, dans les 10 jours, et l’informe qu’à défaut son indemnité sera fixée sur la base du dossier.

4.    Notifie le présent arrêt à X.________, par Me E.________, au Tribunal des mesures de contrainte des Montagnes et du Val-de-Ruz, à La Chaux-de-Fonds (TMC.2020.53) et au Ministère public, à La Chaux-de-Fonds (MP.2020.784-MPNE).

Neuchâtel, le 14 octobre 2020

Art. 221 CPP
Conditions
 

1 La détention provisoire et la détention pour des motifs de sûreté ne peuvent être ordonnées que lorsque le prévenu est fortement soupçonné d’avoir commis un crime ou un délit et qu’il y a sérieusement lieu de craindre:

a. qu’il se soustraie à la procédure pénale ou à la sanction prévisible en prenant la fuite;

b. qu’il compromette la recherche de la vérité en exerçant une influence sur des personnes ou en altérant des moyens de preuves;

c. qu’il compromette sérieusement la sécurité d’autrui par des crimes ou des délits graves après avoir déjà commis des infractions du même genre.

2 La détention peut être ordonnée s’il y a sérieusement lieu de craindre qu’une personne passe à l’acte après avoir menacé de commettre un crime grave.