A.                            X.________ (ci-après : X.________) est né en 1995 au Brésil, pays dont il est ressortissant. Il est arrivé en Suisse avec sa mère à l’âge de 9 ans, en 2004. Père de deux enfants, nés en 2016 et 2019, il n’a pas d’emploi et vit seul dans une chambre d’hôtel à Z.________, où il a été placé par la Fondation en faveur des adultes en difficultés sociales (FADS).

B.                            Le casier judiciaire de X.________ mentionne les condamnations suivantes :

-     21 mars 2012, condamnation à une peine privative de liberté de 30 jours pour vol et violation de domicile, par le Tribunal des mineurs des Montagnes et du Val-de-Ruz de La Chaux-de-Fonds,

-     13 novembre 2013, condamnation à une peine privative de liberté de 6 mois pour vol, dommages à la propriété, utilisation frauduleuse d’un ordinateur, menaces, violation de domicile, contravention selon l’article 19a contre la loi sur les stupéfiants et délit contre la loi sur les stupéfiants, par le Tribunal des mineurs des Montagnes et du Val-de-Ruz,

-     22 septembre 2015, condamnation à une peine pécuniaire de 40 jours-amende avec sursis pendant 4 ans et amende pour injures, menaces, recel et contravention selon l’article 19a de la loi sur les stupéfiants, par le Ministère public du canton de Berne,

-     29 mars 2017, condamnation à une peine privative de liberté de 90 jours pour tentative d’extorsion et chantage par le Ministère public du canton de Neuchâtel, Parquet régional de La Chaux-de-Fonds.

C.                            Par jugement du 13 novembre 2019, le Tribunal de police des Montagnes et du Val-de-Ruz (ci-après : tribunal de police) a retenu que X.________ avait, de concert avec A.________, le 9 août 2018 à Z.________, attiré à un rendez-vous B.________ en lui faisant miroiter une relation sexuelle tarifée au prix de 500 francs avec la jeune femme ; que X.________ avait pris l’argent remis par B.________ et s’était enfui en courant, poursuivi par ce dernier ; que B.________ avait réussi à rattraper X.________ et à le mettre au sol ; que X.________ avait repris le dessus et frappé B.________ de multiples coups de pieds et coups de poings aux jambes, au thorax et à la tête alors que ce dernier était par terre, puis quitté les lieux en courant, tout en conservant les 500 francs ; qu’il s’était ainsi rendu coupable d’escroquerie, de tentative de lésions corporelles graves, de lésions corporelles simples et d’agression. Par ailleurs, le tribunal de police a retenu que, le 30 septembre 2017, X.________ avait, à W.________(BE), fait le guet pendant que deux comparses pénétraient dans un appartement en brisant la fenêtre de la porte d’entrée et en fouillant les locaux ; que ces derniers avaient emporté 500 grammes de marijuana et une PlayStation 4, dans une voiture conduite par X.________ ; que ce dernier s’était ainsi rendu coupable de vol, de dommages à la propriété, de violation de domicile ainsi que d’infraction à l’article 19 al. 1 let. b et d LStup. Enfin, le tribunal de police a retenu que, le 14 juillet 2018, X.________ avait pris le train sans payer de billet, contrevenant ainsi à l’article 57 al. 3 LTV.

Au moment de fixer la peine, le tribunal de police a retenu une culpabilité lourde en relation avec la tentative de lésions corporelles graves, infraction la plus grave. L’auteur avait fait preuve d’une grande violence, de manière tout à fait gratuite. Son mobile était égoïste. Les faits auraient pu très mal tourner. L’auteur ne paraissait pas en avoir conscience. Il avait quitté les lieux sans se soucier de B.________. Son comportement avait été particulièrement choquant. S’agissant de l’escroquerie, l’auteur avait agi par appât du gain. Il ne faisait que peu cas du patrimoine d’autrui. L’agression était gratuite. L’auteur aurait eu tout le loisir de jeter l’argent et de partir. Il s’était également rendu coupable de plusieurs lésions corporelles simples. Quant au vol du 30 septembre 2017, il avait l’appât du gain pour motif. Il avait été commis en lien avec une violation de domicile.

Le tribunal de police a retenu que les conditions objectives du sursis étaient réalisées mais que le pronostic était défavorable. Les antécédents de l’auteur étaient mauvais. Les peines fermes précédemment prononcées n’avaient pas eu l’effet escompté. L’auteur avait depuis peu une activité professionnelle, mais un rapport de l’Office d’exécution des sanctions et de probation du 9 septembre 2019 ainsi que le rapport de l’expert psychiatre du 23 octobre 2018 mettaient en avant un manque de motivation de sa part.

Le tribunal de police a considéré qu’on était dans un cas d’expulsion obligatoire, et que l’auteur ne pouvait pas se prévaloir de la clause de rigueur. Les infractions permettant d’envisager son expulsion étaient en effet d’une gravité certaine, allant empirant. Le casier judiciaire du condamné montrait qu’il ne respectait pas l’ordre juridique suisse. Le risque de récidive était qualifié de modéré par l’expert, mais pour autant, en substance, que l’intéressé entreprenne une activité professionnelle et ne se retrouve pas dans le besoin financièrement. Or, si ce dernier avait bien un nouvel emploi, il continuait à émarger aux services sociaux et n’avait montré aucune motivation à travailler. Il n’avait aucun contact avec son fils aîné depuis une année et il était trop tôt pour dire quel type de relation il entretiendrait avec son nouvel enfant. Être père au moment des faits ne l’avait pas dissuadé de commettre des infractions. Il n’avait aucun problème médical. La situation du Brésil était stable, même si le pays traversait une phase tendue sur les plans politique et économique. Les relations père-enfants pourraient s’exercer par d’« autres moyens de communication ». L’expulsion a donc été prononcée, pour la durée minimale de 5 ans.

D.                            a) X.________ forme appel du jugement du 13 novembre 2019. Il reproche au premier juge de n’avoir pas correctement examiné, en relation avec l’expulsion, sa situation personnelle et pris en compte l’impossibilité dans laquelle il est d’intégrer son pays d’origine. Il fait valoir qu’il est de langue maternelle francophone et qu’il ne maîtrise aucunement la langue ou même les us et coutumes de son pays d’origine. Il doit être mis au bénéfice de la clause de rigueur.

b) En cours de procédure, l’appelant a déposé des rapports d’hospitalisation au Centre neuchâtelois de psychiatrie (ci-après : CNP) en sollicitant le dépôt de questions complémentaires à leurs auteurs, ou une expertise psychiatrique complémentaire. Cette requête de preuve a été rejetée par la direction de la procédure.

c) L’audience de débats initialement fixée le 20 octobre 2020 a dû être renvoyée en raison de l’état de santé de la mandataire de l’appelant. Ce dernier ne s’est pas présenté à l’audience nouvellement fixée le 11 novembre 2020. La Cour pénale a alors décidé derechef le renvoi des débats et admis l’audition de C.________, mère de l’appelant, à effectuer à la reprise de ceux-ci. Un mandat d’amener a été délivré contre le prévenu. Diverses pièces littérales ont été versées au dossier. Le 8 décembre 2020, le témoin C.________ a été mise en quarantaine à domicile pour 10 jours.

d) A l’audience de ce jour, la défense a renoncé à l’audition de la mère de l’appelant, déposé diverses pièces littérales et renouvelé sa requête d’expertise psychiatrique. La Cour pénale a interrogé l’appelant. Ses déclarations seront reproduites ci-après dans la mesure utile.

e) En plaidoirie, la défense fait valoir que l’appelant a dorénavant besoin d’un suivi psychiatrique qui ne pourrait lui être assuré en cas d’expulsion. De façon générale, le système de santé est déficient au Brésil. Les séjours psychiatriques y sont mal perçus. L’état de santé de l’appelant rendrait une réintégration encore plus difficile. L’intéressé n’a pas d’attaches personnelles dans son pays d’origine, dont il parle mal la langue. En Suisse, ce jeune adulte, qui n’a pas bénéficié d’un soutien paternel, a deux enfants qui méritent de maintenir les relations avec leur père. Le risque de récidive est modéré selon l’expert ; l’appelant n’a pas commis de nouvelles infractions depuis 13 mois. Son état psychique rend compréhensible qu’il ne puisse retrouver seul un nouvel emploi.

Pour l’accusation en revanche, la pesée des intérêts commande l’expulsion. L’appelant n’a absolument pas pris conscience de la gravité de ses actes délictueux. La justice pénale des mineurs est venue à son secours à plusieurs reprises. Il n’a pas d’attaches avec la Suisse. Il est séparé de sa compagne. Il n’a plus de contact avec ses enfants. Il n’a pas d’activité professionnelle. Ses hospitalisations sont dues à des prises massives de stupéfiants. Le Brésil dispose d’un système de santé adéquat. L’appel doit être rejeté.

C O N S I D E R A N T

1.                            Déposé dans les formes et délai légaux, l’appel est recevable. Un jugement directement motivé a été notifié aux parties, de sorte qu’une annonce d’appel n’était pas nécessaire.

2.                            Au terme de l’article 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement. L’appel peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation, le déni de justice, et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité. La Cour pénale limite son examen aux violations décrites dans l’acte d’appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décision inégale ou inéquitable (art. 404 al. 2 CPP).

La juridiction d’appel ne doit pas se bornier à rechercher les erreurs du juge précédent ni à critiquer les jugements de ce dernier ; elle doit tenir ses propres débats et prendre sa décision sous sa responsabilité et selon sa libre conviction, qui doit reposer sur le dossier et, cas échéant, sa propre administration des preuves (arrêt du TF du 27.08.2012 [6B_78/2012] cons. 3.1). En l’espèce, la juridiction d’appel a procédé d’office à des recherches concernant la vie au Brésil, en particulier son système de santé. L’appelant a aussi produit des pièces littérales. Ces divers documents ont été versés au dossier. Le prévenu a été interrogé. La défense a sollicité l’audition de la mère de l’appelant, puis renoncé à celle-ci. Elle a renouvelé sa requête d’expertise psychiatrique.

La Cour pénale rejette cette dernière requête. Celle-ci se fonde sur la détérioration de l’état de santé psychique de l’appelant durant la procédure de seconde instance. Cette péjoration serait démontrée par deux hospitalisations en milieu psychiatrique et les constatations de proches. On observe que les séjours hospitaliers, le premier de trois jours en décembre 2019, le second d’environ deux semaines en mai 2020, étaient liés à des consommations de substances psychoactives et d’alcool (alors qu’au moment de l’expertise psychiatrique réalisée durant la procédure, il n’était pas noté de problèmes de toxicodépendance avérés. Le patient est reparti à domicile avec un traitement médicamenteux, qu’il n’a pas pris, estimant être en bonne santé ; l’anosognosie est relevée par les psychiatres. Depuis lors, il ne fait pas l’objet d’un traitement ou d’un suivi médical. Selon les professionnels interrogés par la défense, un suivi psychiatrique ciblé, une pharmacothérapie et un réseau de soin adaptés, sinon en cas d’échec un placement dans un foyer spécialisé, seraient indispensables et pertinents dans le cas « échéant », soit en cas de trouble du spectre schizophrénique résultant d’une consommation abusive de longue date de substances psychotoxiques. Cela étant, un tel trouble n’est pour l’instant que suspecté, et seule une abstinence totale de six mois de substances toxiques permettrait d’explorer un diagnostic psychiatrique de base. Reste que l’absence actuelle de traitement ou de suivi médical en Suisse que la situation de l’appelant ne serait pas pérorée par une expulsion vers le Brésil. Ce pays est pourvu d’un système de santé, qui donne l’accès à des soins gratuits à l’ensemble de la population, même si ce système est jugé insuffisant sur de nombreux points, et sans doute de moindre qualité que le système mis en place en Suisse. Selon la jurisprudence fédérale, un étranger ne peut toutefois se fonder sur l’existence de prestations médicales supérieures en Suisse pour s’opposer à son renvoi dans un pays où le traitement dont il a besoin s’avère disponible (arrêt du TF du 07.08.2018 [6B_706/2018] cons. 2.5). Qu’un séjour en milieu psychiatrique soit mal vu au Brésil, comme l’a plaidé la défense à l’audience de ce jour, ne signifie pas qu’une prise en charge psychiatrique adéquate ne soit pas accessible dans ce pays en cas de besoin.

3.                            Les faits constitutifs d’infractions et leurs qualifications juridiques ne font pas partie des points attaqués dans l’appel. De même, l’auteur ne conteste pas le genre et la quotité de la peine prononcée. L’appel porte uniquement sur l’expulsion qui a été ordonnée. La Cour pénale limitera son examen à ce point (art. 404 al. 1 CPP).

4.                            Selon l’article 66a al. 1 let. b et d CP, le juge expulse de Suisse l’étranger qui est condamné notamment pour lésions corporelles graves, agression et vol en lien avec une violation de domicile, quelle que soit la quotité de la peine prononcée à son encontre, pour une durée de 5 à 15 ans. L’expulsion est en principe indépendante de la gravité des faits retenus (ATF 144 IV 332 cons. 3.1.3). Elle s’applique également à la tentative de commettre une infraction énumérée dans le catalogue (ATF 144 IV 168 cons. 1.4.1).

5.                            Dans le cas présent, l’appelant a été reconnu coupable de plusieurs infractions mentionnées dans la liste de l’article 66a CP. L’expulsion est donc obligatoire.

6.                            Selon l’article 66a al. 2 CP, le juge peut exceptionnellement renoncer à une expulsion (obligatoire) lorsque celle-ci mettrait l’étranger dans une situation personnelle grave et que les intérêts publics à l’expulsion ne l’emportent pas sur l’intérêt privé de l’étranger à demeurer en Suisse. A cet égard, il tiendra compte de la situation particulière de l’étranger qui est né ou qui a grandi en Suisse.

La clause de rigueur permet de garantir le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 Cst.; ATF 146 IV 105 cons. 3.3.1). Elle doit être appliquée de manière restrictive (ATF 146 IV 105 cons. 3.4.2, ATF 144 IV 332 cons. 3.3.1). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral (cf. ATF 144 IV 332 cons. 3.3.2), il convient de s'inspirer des critères énoncés à l'article 31 de l'ordonnance du 24 octobre 2007 relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative (OASA; RS 142.201). L'article 31 al. 1 OASA prévoit qu'une autorisation de séjour peut être octroyée dans les cas individuels d'extrême gravité. L'autorité doit tenir compte notamment de l'intégration du requérant selon les critères définis à l'article 58a al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (LEI; RS 142.20), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants, de la situation financière, de la durée de la présence en Suisse, de l'état de santé ainsi que des possibilités de réintégration dans l'Etat de provenance. Comme la liste de l'article 31 al. 1 OASA n'est pas exhaustive et que l'expulsion relève du droit pénal, le juge devra également, dans l'examen du cas de rigueur, tenir compte des perspectives de réinsertion sociale du condamné (ATF 144 IV 332 cons. 3.3.2 ; arrêt du TF du 11.05.2020 [6B_312/2020] cons. 2.1.1). En règle générale, il convient d'admettre l'existence d'un cas de rigueur au sens de l'article 66a al. 2 CP lorsque l'expulsion constituerait, pour l'intéressé, une ingérence d'une certaine importance dans son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par la Constitution fédérale (art. 13 Cst.) et par le droit international, en particulier l'article 8 CEDH (arrêts du TF du 01.07.2020 [6B_286/2020] cons. 1.3.1 ; [6B_312/2020] précité cons. 2.1.1; du 06.05.2020 [6B_255/2020] cons. 1.2.1).

Selon la jurisprudence, pour se prévaloir du droit au respect de sa vie privée au sens de l'article 8 § 1 CEDH, l'étranger doit établir l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire. Le Tribunal fédéral n'adopte pas une approche schématique qui consisterait à présumer, à partir d'une certaine durée de séjour en Suisse, que l'étranger y est enraciné et dispose de ce fait d'un droit de présence dans notre pays. Il procède bien plutôt à une pesée des intérêts en présence, en considérant la durée du séjour en Suisse comme un élément parmi d'autres et en n'accordant qu'un faible poids aux années passées en Suisse dans l'illégalité, en prison ou au bénéfice d'une simple tolérance (cf. ATF 134 II 10 cons. 4.3 ; arrêt du TF [6B_312/2020] précité cons. 2.1.2). Un séjour légal de dix années suppose en principe une bonne intégration de l'étranger (ATF 144 I 266 cons. 3.9).

Par ailleurs, un étranger peut se prévaloir de l'article 8 § 1 CEDH (et de l'art. 13 Cst.), qui garantit notamment le droit au respect de la vie familiale, pour s'opposer à l'éventuelle séparation de sa famille, pour autant qu'il entretienne une relation étroite et effective avec une personne de sa famille ayant le droit de résider durablement en Suisse (ATF 144 II 1 cons. 6.1 ; 144 I 91 ; 139 I 330 cons. 2.1 et les références citées). Les relations familiales visées par l'article 8 par. 1 CEDH sont avant tout celles qui concernent la famille dite nucléaire, soit celles qui existent entre époux ainsi qu'entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun (cf. ATF 144 II 1 cons. 6.1 ; 135 I 143 cons. 1.3.2 ; arrêt du TF du 01.07.2020 [6B_286/2020] cons. 1.3.2).

7.                            a) En l’espèce, l’auteur est de nationalité brésilienne. Il a vécu les neuf premières années de sa vie au Brésil, élevé par sa grand-mère, aujourd’hui décédée. Il est arrivé il y a seize ans en Suisse avec sa mère, qui avait rencontré un ressortissant suisse, et ses deux frères. Il a maintenant une demi-sœur née en Suisse, qu’il ne voit pas très souvent. Ayant des relations difficiles avec sa mère, il prend néanmoins actuellement ses repas chez elle. Père d’un garçon né en 2016, qu’il ne voit plus, il est depuis le 5 octobre 2019 père d’une fillette qu’il ne voit plus non plus. En couple avec la mère de celle-ci depuis 2018, il s’est séparé de sa compagne. Actuellement il vit dans une chambre d’hôtel où il a été placé par la FADS. Il ne paie pas de pension pour ses enfants. Il ne fait partie d’aucune association ou équipe sportive.

b) Sur le plan de sa formation, l’auteur a d’abord fréquenté une classe d’accueil à son arrivée en Suisse, puis il a rejoint le cycle secondaire normal. Il a appris le français facilement. Il déclare aujourd’hui que sa langue maternelle est le français et qu’il parle un peu le portugais mais qu’il n’arrive pas à s’exprimer et ne sait pas l’écrire. Dès l’âge de treize ans, il a été placé dans des institutions. Il est retourné chez sa mère à l’âge de seize ans. C’est à ce moment-là qu’il a commencé à commettre des vols, car, selon lui, il avait besoin d’argent. Son beau-père lui a proposé de suivre un apprentissage au sein de son entreprise, en qualité de peintre en bâtiment, mais il a décliné parce que cette profession ne l’intéressait pas. Au moment où il a été soumis à une expertise, l’appelant souhaitait être chauffeur poids-lourds voire boxeur professionnel. Le service de probation lui avait trouvé un stage non payé mais après quelques jours, il a préféré chercher un emploi rémunéré. Il a été engagé à temps partiel dans une boulangerie le 2 septembre 2019 mais ne s’est plus présenté au travail car il n’arrivait plus à suivre. Depuis lors, il est sans travail et projet professionnel.

Le casier judiciaire de l’appelant mentionne quatre condamnations pour des infractions contre le patrimoine, la liberté, la loi sur les stupéfiants et l’honneur, la dernière, en 2017 à une peine privative de liberté ferme de 90 jours. L’intégration professionnelle et sociale est donc mauvaise.

c) Sur le vu de ce qui précède, on peut douter qu’un renvoi de l’appelant au Brésil constituerait une atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale au sens de l’article 8 § 1 CEDH et le mette dans une situation personnelle grave. On rappellera que lorsque le parent étranger ne dispose pas du droit de garde sur son enfant habilité à résider en Suisse, il suffit en règle générale, sous l’angle de l’article 8 § 2 CEDH que le parent vivant à l’étranger exerce son droit de visite par le biais de séjours brefs ou par le biais de moyens de communication modernes, un droit plus étendu ne pouvant exister qu’en présence notamment d’un comportement irréprochable dudit parent (ATF 144 I 91 cons. 5.2).

Cela étant, même si l’on retenait que la première condition cumulative de l’article 66a al. 2 CP était réalisée, l’intérêt public présidant à son expulsion l’emporterait sur son intérêt privé à rester en Suisse.

8.                            Dans l’appréciation du cas de rigueur, l’article 66a al. 2 2ème phrase CPArt. 66a1 CP impose expressément de prendre en considération la situation particulière de l’étranger qui est né ou qui a grandi en Suisse. L’examen de la clause de rigueur doit être effectué dans chaque cas dans la base des critères d’intégration habituels (ATF 144 IV 332 cons. 3.3.2 ; cf. à ce sujet arrêt du TF du 01.07.2020 [6B_286/2020] cons. 1.4.1).

                        a) En l’espèce, les intérêts privés de l’appelant à demeurer en Suisse sont d’une certaine importance, puisque celui-ci y a passé son adolescence jusqu’à l’âge adulte et qu’il a deux jeunes enfants. Malgré tout, l’intégration de ce dernier en Suisse n’est pas réussie, loin s’en faut. Il vit seul, en prenant ses repas chez sa mère, solution mise en place durant la procédure d’appel. Ses relations avec les mères de ses enfants – sur lesquels il n’exerce pas de droit de visite et dont il ne participe pas à l’entretien – sont distendues. L’intéressé n’a achevé aucune formation. Il n’a jamais travaillé durablement. Il est sans revenus. Ses projets professionnels sont inexistants.

                        Au Brésil, les membres les plus proches de la famille de l’auteur (père, dont il n’était pas très proche mais dont la mort violente en 2018 l’a beaucoup affecté et grand-mère paternelle avec laquelle il avait une bonne relation) sont décédés. L’intéressé est retourné à quelques reprises dans son pays natal. Il n’éprouve pas un intérêt particulier pour ce pays. Il préfère voyager en Thaïlande.

                        Selon l’expertise psychiatrique réalisée le 23 octobre 2018, l’appelant présente un trouble mixte de la personnalité avec une composante labile de type impulsif et une autre dissociale. Aucun traitement ou mesure n’a été préconisé puisqu’il aurait fallu qu’un suivi psychiatrique soit sincèrement accepté, et que l’expertisé soit partie prenante d’une façon volontaire ; l’expert a plutôt conseillé un processus de formation et de reconversion professionnelle. Après le prononcé du jugement de première instance, l’appelant a été hospitalisé au Centre neuchâtelois de psychiatrie du 7 décembre au 9 décembre 2019 et du 27 avril au 13 mai 2020. Le diagnostic posé est « troubles psychotiques sous consommation de substances psychoactives et d’alcool ». Au moment où le patient est sorti, les médecins ont noté une évolution progressivement favorable, en observant un refus de suivi pour prévention de la violence, un manque d’investissement dans les soins et un comportement avec des traits antisociaux dans l’unité de soin, facteurs limitant la prise en charge hospitalière. Le patient est parti de l’hôpital pour se rendre à son domicile, suivi par une équipe de transition. A l’audience, il a expliqué qu’il n’avait pas pris les médicaments prescrits et qu’il ne consultait aucun médecin. Selon les renseignements figurant sur le site du DFAE concernant la situation au Brésil, l’offre de santé publique est plutôt modeste dans ce pays ; en plus des établissements publics, il existe des services d’urgence et des hôpitaux privés. L’appelant n’a pas dû être ré-hospitalisé depuis mai 2020 pour ses troubles psychiques. On en déduit qu’il ne court pas de risque immédiat pour sa santé en cas de renvoi dans son pays (cf. aussi cons. 2 ci-dessus).

b) L’intérêt public présidant à l’expulsion de l’appelant s’avère considérable, compte tenu de la nature et de la multiplicité des faits qui ont conduit à la présente condamnation. Les infractions commises portent atteinte à différents biens juridiquement protégés, notamment l’intégrité corporelle et le patrimoine. L’auteur s’est montré très brutal pour des motifs égoïstes. Lors de son interpellation suivant l’agression du 9 août 2018, il a déclaré que s’il avait frappé la victime avec autant de haine, c’est parce qu’on le menaçait depuis ses 15 ans de le renvoyer (au Brésil), que son père avait été assassiné au Brésil et que si on le renvoyait là-bas, c’était comme si on l’envoyait dans la tombe. La perspective d’un renvoi aurait plutôt dû le dissuader de commettre des infractions. L’appelant manifeste un mépris complet de l’ordre juridique suisse depuis plusieurs années. Devant la Cour pénale, il a continué à projeter la responsabilité de ses actes sur son environnement, ainsi que cela avait déjà été mis en évidence par l’expert. L’absence confirmée de tout projet de formation professionnelle, donc de moyens financiers, constitue un facteur de récidive mis en avant par l’expert. L’appelant ne s’implique pas dans l’éducation de ses enfants, ni par les soins apportés à titre personnel, ni financièrement. Des relations avec eux et ses autres proches pourront être maintenues par le biais des moyens de communication modernes le temps de l’expulsion, si sa famille ne peut lui rendre visite.

En définitive, malgré la présence en Suisse de deux enfants mineurs, et compte tenu de la gravité des actes pour laquelle il a été condamné, du risque effectif de récidive, l’intérêt public à l’éloignement de l’appelant l’importe sur l’intérêt privé de celui-ci à demeurer en Suisse. Ainsi, il n’y avait pas lieu de faire application de la clause de rigueur.

9.                            Au vu de ce qui précède, la mesure prononcée par le tribunal de police doit être confirmée. La durée de l’expulsion a été fixée au minimum légal, soit 5 ans.

10.                          Vu l’issue de la cause, les frais d’appel sont mis à la charge de l’appelant. Son défenseur d’office a droit à une indemnité pour la procédure d’appel. Le relevé d’activité produit comporte des rubriques qui doivent être revues à la baisse, s’agissant du nombre excessif de contacts avec le client, A.________ ou le témoin D.________, des contacts avec un confrère qui ne s’expliquent pas ou de communications avec le greffe du Tribunal cantonal qui relèvent du travail de secrétariat compris dans les frais généraux. En définitive on retiendra que 510 minutes ont été nécessaires à l’avocate, qui connaissait déjà le dossier, pour la bonne exécution du mandat afférent à la procédure d’appel, à quoi s’ajoutent des frais forfaitaires de 5 % et la TVA de 7.7 %, le tarif horaire appliqué étant de 180 francs l’heure ou 3 francs la minute. L’indemnité est donc arrêtée à 1'730.20 francs.

Par ces motifs,
la Cour pénale décide

Vu les articles 66a al. 1 let. b et d CP, 135, 428 CPP,

1.    L’appel est rejeté.

2.    Le jugement attaqué est confirmé.

3.    Les frais de justice de seconde instance, arrêtés à 2'000 francs, sont mis à la charge de l’appelant.

4.    L’indemnité d’avocat d’office due à Me D.________, pour la défense de X.________ en procédure d’appel est fixée à 1'730.20 francs, frais et TVA inclus. Elle sera entièrement remboursable par X.________ aux conditions de l’article 135 al. 4 CPP.

5.    Le présent jugement est notifié à X.________, par Me D.________, au ministère public, à La Chaux-de-Fonds (MP.2018.3890), au Tribunal de police des Montagnes et du Val-de-Ruz, à La Chaux-de-Fonds (POL.2019.258).

Neuchâtel, le 15 décembre 2020

Art. 66a1 CP
Expulsion
Expulsion obligatoire
 

1 Le juge expulse de Suisse l’étranger qui est condamné pour l’une des infractions suivantes, quelle que soit la quotité de la peine prononcée à son encontre, pour une durée de cinq à quinze ans:

a. meurtre (art. 111), assassinat (art. 112), meurtre passionnel (art. 113), incitation et assistance au suicide (art. 115), interruption de grossesse punissable (art. 118, al. 1 et 2);

b. lésions corporelles graves (art. 122), mutilation d’organes génitaux féminins (art. 124, al. 1), exposition (art. 127), mise en danger de la vie d’autrui (art. 129), agression (art. 134);

c. abus de confiance qualifié (art. 138, ch. 2), vol qualifié (art. 139, ch. 2 et 3), brigandage (art. 140), escroquerie par métier (art. 146, al. 2), utilisation frauduleuse d’un ordinateur par métier (art. 147, al. 2), abus de cartes-chèques ou de cartes de crédit par métier (art. 148, al. 2), extorsion et chantage qualifiés (art. 156, ch. 2 à 4), usure par métier (art. 157, ch. 2), recel par métier (art. 160, ch. 2);

d. vol (art. 139) en lien avec une violation de domicile (art. 186);

e. escroquerie (art. 146, al. 1) à une assurance sociale ou à l’aide sociale, obtention illicite de prestations d’une assurance sociale ou de l’aide sociale (art. 148a, al. 1);

f. escroquerie (art. 146, al. 1), escroquerie en matière de prestations et de contributions (art. 14, al. 1, 2 et 4, de la loi fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif2), fraude fiscale, détournement de l’impôt à la source ou autre infraction en matière de contributions de droit public passible d’une peine privative de liberté maximale d’un an ou plus;

g. mariage forcé, partenariat forcé (art. 181a), traite d’êtres humains (art. 182), séquestration et enlèvement (art. 183), séquestration et enlèvement qualifiés (art. 184), prise d’otage (art. 185);

h.3 actes d’ordre sexuel avec des enfants (art. 187, ch. 1), contrainte sexuelle (art. 189), viol (art. 190), actes d’ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance (art. 191), encouragement à la prostitution (art. 195), pornographie (art. 197, al. 4, 2e phrase);

i. incendie intentionnel (art. 221, al. 1 et 2), explosion intentionnelle (art. 223, ch. 1, al. 1), emploi, avec dessein délictueux, d’explosifs ou de gaz toxiques (art. 224, al. 1), emploi intentionnel sans dessein délictueux (art. 225, al. 1), fabriquer, dissimuler et transporter des explosifs ou des gaz toxiques (art. 226), danger imputable à l’énergie nucléaire, à la radioactivité et aux rayonnements ionisants (art. 226bis), actes préparatoires punissables (art. 226ter), inondation, écroulement causés intentionnellement (art. 227, ch. 1, al. 1), dommages intentionnels aux installations électriques, travaux hydrauliques et ouvrages de protection (art. 228, ch. 1, al. 1);

j. mise en danger intentionnelle par des organismes génétiquement modifiés ou pathogènes (art. 230bis, al. 1), propagation d’une maladie de l’homme (art. 231, ch. 1), contamination intentionnelle d’eau potable (art. 234, al. 1);

k. entrave qualifiée de la circulation publique (art. 237, ch. 1, al. 2), entrave intentionnelle au service des chemins de fer (art. 238, al. 1);

l. actes préparatoires délictueux (art. 260bis, al. 1 et 3), participation ou soutien à une organisation criminelle (art. 260ter), mise en danger de la sécurité publique au moyen d’armes (art. 260quater), financement du terrorisme (art. 260quinquies);

m. génocide (art. 264), crimes contre l’humanité (art. 264a), infractions graves aux conventions de Genève du 12 août 19494 (art. 264c), autres crimes de guerre (art. 264d à 264h);

n. infraction intentionnelle à l’art. 116, al. 3, ou 118, al. 3, de la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers5;

o. infraction à l’art. 19, al. 2, ou 20, al. 2, de la loi du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants (LStup)6.

2 Le juge peut exceptionnellement renoncer à une expulsion lorsque celle-ci mettrait l’étranger dans une situation personnelle grave et que les intérêts publics à l’expulsion ne l’emportent pas sur l’intérêt privé de l’étranger à demeurer en Suisse. À cet égard, il tiendra compte de la situation particulière de l’étranger qui est né ou qui a grandi en Suisse.

3 Le juge peut également renoncer à l’expulsion si l’acte a été commis en état de défense excusable (art. 16, al. 1) ou de nécessité excusable (art. 18, al. 1).


1 Introduit par le ch. I 1 de la LF du 20 mars 2015 (Mise en oeuvre de l’art. 121, al. 3 à 6, Cst. relatif au renvoi des étrangers criminels), en vigueur depuis le 1er oct. 2016 (RO 2016 2329; FF 2013 5373).
2 RS 313.0
3 Erratum de la CdR de l’Ass. féd. du 28 nov. 2017, publié le 12 déc. 2017 (RO 2017 7257).
4 RS 0.518.12; 0.518.23; 0.518.42; 0.518.51
5 RS 142.20
6 RS 812.121