A.                            A.X.________ et B.X.________ travaillent l’un et l’autre pour l’entreprise Z.________, propriété du premier nommé, qui détient une concession sur la commune de V.________ (rapport du service de la sécurité de W.________ du 26 mars 2018 ; selon le Registre du commerce, il s’agit d’une entreprise individuelle sise à V.________).

                        Après avoir fait opposition, successivement, à deux ordonnances pénales administratives, A.X.________ a été entendu par le ministère public le 24 avril 2018 puis a fait l’objet d’un acte d'accusation du 14 novembre 2018, dans lequel il lui était reproché d'avoir commis deux contraventions au Règlement sur le service de taxis de W.________ et son arrêté d’exécution, à savoir :

-       le 29 octobre 2017 entre 03h00 et 03h20, à la place (aaa) et à la rue (bbb), à W.________l, en qualité de chauffeur de taxi, stationné son véhicule immatriculé NE XXXXXX sur l'espace public dans l'attente de potentiels clients alors qu'il ne disposait d'aucun permis de stationnement sur W.________ ;

-       sur l'Avenue(ccc), le dimanche 11 mars 2018 à 03h40, avoir, au volant de son taxi, interpellé à plusieurs reprises des passants au bord de la chaussée afin de savoir s'ils avaient besoin d'un taxi, alors qu'il ne disposait d'aucun permis de stationnement sur W.________.

Pour sa part, B.X.________ a fait opposition à une ordonnance pénale administrative sanctionnant le fait d'avoir, à W.________, sur la rue « sans nom », le samedi 23 septembre 2017, à 23h03, en qualité de chauffeur de taxi, stationné son véhicule durant la Fête des Vendanges, dans l'attente d'un potentiel client, alors qu'elle ne disposait d'aucun permis de stationnement sur W.________. Lors de son audition par le ministère public, la prévenue a déclaré qu’elle attendait une cliente dont elle ignorait le nom mais qu’elle avait d’abord descendue à la Fête des vendanges, vers 21 h 00, en convenant avec elle de la reprendre vers la place (ddd) aux environs de 22 h 45 – 23 h 00. Sur la base du relevé des appels téléphoniques de la prévenue, la police a été chargée d’entendre ladite cliente, soit C.________ qui, le 8 mai 2018, a déclaré être descendue à la Fête des Vendanges avec un taxi Z.________ conduit par une femme qu’elle ne connaît pas particulièrement ; n’avoir pas le souvenir d’un rendez-vous ultérieur convenu avec elle, mais bien de l’avoir appelée à nouveau pour remonter à (…) chercher sa carte bancaire, avant d’être empêchée de prendre ce taxi par un policier. Auditionnée comme témoin par le procureur, C.________ (dont la mère avait pour nom de naissance X.________) s’est exprimée, parfois de manière plutôt vague, sur certaines obscurités de sa narration et sur l’une ou l’autre contradictions avec les dires de la prévenue, puis elle a admis que A.X.________ est son oncle et que la prévenue lui avait dit de prétendre qu’elle ne les connaissait pas. Elle a également admis n’avoir rien convenu avec sa tante pour le retour de la Fête des Vendanges et n’avoir pas eu besoin de ses services à 23 h 00 le 23 septembre 2017. Le procureur a alors étendu l’instruction à l’instigation à faux témoignage, ce qu’il a signifié à B.X.________ le 28 août 2018, sur quoi la nièce de cette dernière a écrit au tribunal (mais à l’intention du ministère public), le 3 septembre 2018, qu’elle s’était rétractée par peur mais que les choses s’étaient passées comme l’avait dit la prévenue. Réentendue par le ministère public le 11 octobre 2018, elle a déclaré avoir écrit sa lettre spontanément et ne pas considérer les prévenus comme son oncle et sa tante, en raison de problèmes familiaux (qui ne l’empêchaient pas néanmoins de faire appel à eux comme chauffeurs de taxi), tout en confirmant, sans grande précision, son premier témoignage. Sur la base de ses deux dépositions, dont l’une était nécessairement fausse, C.________ a été dénoncée pour faux témoignage et tentative d’entrave à l’action pénale.

Dans l’intervalle, B.X.________ a fait opposition à une nouvelle ordonnance pénale administrative, décernée pour avoir, à W.________, sur la rue (eee), le 15 juin 2018 à 22h30, circulé à faible vitesse au volant de son taxi à proximité de l'entrée d’un festival musical dans le but de démarcher des clients, alors qu'elle ne disposait d'aucun permis de stationnement sur W.________. L’acte d’accusation la concernant visait donc les trois préventions précitées.

Sur proposition de la présidente du Tribunal de police, les causes des deux prévenus, défendus par le même avocat, ont été jointes, cela avec leur accord.

B.                            A l’audience du 29 janvier 2019, la présidente du Tribunal de police a entendu les A.X.________ et B.X.________, puis l’inspecteur D.________ et le chauffeur de taxi E.________ en tant que témoins et finalement le mandataire des prévenus en sa plaidoirie. Le jugement a été renvoyé au 12 mars 2019. A cette dernière date, la première juge a rendu le jugement dont est appel et elle en a remis séance tenante une expédition motivée.

                        En substance, la juge de police a acquitté A.X.________ de la prévention relative aux faits survenus le 11 mars 2018, faute de preuve suffisante de son interpellation de passants en vue d’une course en taxi. Elle a en revanche condamné le prévenu pour la contravention commise le 29 octobre 2017, dès lors qu’indiscutablement il s’était parqué à 3 h 20 sur la place(aaa) , sans avoir été appelé là par un client.

                        A l’endroit de B.X.________, la première juge a retenu l’infraction commise le 23 septembre 2017, les faits décrits dans l’acte d’accusation étant établis et l’explication relative à la cliente C.________ apparaissant comme dénuée de crédibilité. Elle a, en revanche, abandonné, à tout le moins au bénéfice du doute, la prévention relative aux faits peut-être survenus le 15 juin 2018, ceux-ci n’étant pas établis à satisfaction. Enfin, le Tribunal de police a condamné B.X.________ pour instigation à faux témoignage, les aveux passés par C.________ devant le procureur, le 25 juin 2018, étant parfaitement crédibles, à l’inverse de sa rétractation ultérieure, dont le contenu se heurtait aux constatations policières et comportait de nombreuses incohérences. Elle a considéré la culpabilité de la prévenue comme lourde, vu l’absence de scrupules avec laquelle elle avait placé sa nièce par alliance dans une situation difficile.

C.                            Dans la déclaration d’appel motivée du 27 juin 2019, l’avocat des appelants s’en prend d’abord à la condamnation de A.X.________, le fait de parquer son véhicule, enseigne lumineuse éteinte, ne contrevenant pas au Règlement communal et l’intention d’attendre d’éventuels clients n’étant pas établie, de sorte que cette condamnation viole le principe « in dubio pro reo ». Il tient un raisonnement semblable au sujet de la contravention retenue à charge de B.X.________, la première déposition du témoin C.________ ne pouvant être écartée sur la base du seul témoignage contraire du policier D.________. Dans le même élan, il souligne que C.________ s’est rétractée de ses aveux relatifs à un prétendu faux témoignage et considère que même si ses déclarations à la police étaient fausses, rien n’indiquerait que l’appelante ait commis un acte d’instigation, de sorte qu’il « réside une zone d’ombre dans l’établissement des faits », imposant l’acquittement.

                        Revenant ensuite aux contraventions relevant du service des taxis, l’avocat des appelants se réfère à un arrêt rendu par la Cour constitutionnelle du canton de Vaud, le 4 mai 2017, dont il déduit que les règles prétendument violées par les A.X.________ et B.X.________ sont contraires à la Loi fédérale sur le marché intérieur (LMI).

D.                            Le ministère public n’a pas formulé d’observations complémentaires (lettre du 9 juillet 2019). 


 

C O N S I D E R A N T

1.                            Déposé dans les formes et délai légaux, l'appel est recevable.

2.                            a) Aux termes de l’article 398 CPP, la juridiction d’appel jouit d’un plein pouvoir d’examen sur tous les points attaqués du jugement (al. 2). L'appel peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, le déni de justice et le retard injustifié, pour constatation incomplète ou erronée des faits et pour inopportunité (al. 3). La Cour pénale limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décision illégale ou inéquitable (art. 404 al. 2 CPP).

                        b) Selon l'article 399 al. 3 CPP, la partie qui annonce l'appel adresse une déclaration d'appel écrite à la juridiction d'appel dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé. Dans sa déclaration, elle indique si elle entend attaquer le jugement dans son ensemble ou seulement sur certaines parties (let. a), les modifications du jugement de première instance qu'elle demande (let. b) et ses réquisitions de preuves (let. c). L'alinéa 4 de cette disposition indique que quiconque attaque seulement certaines parties du jugement est tenu d'indiquer dans la déclaration d'appel, de manière définitive, sur quelles parties porte l'appel, à savoir notamment la question de la culpabilité, le cas échéant en rapport avec chacun des actes (let. a). Si la déclaration d'appel n'indique pas précisément les parties du jugement de première instance qui sont attaquées, la direction de la procédure de la juridiction d'appel invite la partie à préciser sa déclaration et lui fixe un délai à cet effet (art. 400 al. 1er CPP). 

                        c) En l’espèce, la déclaration d’appel du 1er avril 2019 comporte une étonnante lacune dans sa conclusion n°3, qui s’interrompt en milieu de phrase, sans préciser l’infraction qui doit être abandonnée, au bénéfice de l’appelante. On sait cependant qu’il s’agit d’une infraction « au Règlement » et il est évident que l’appel vise de la sorte les chiffres 5 et 9 du dispositif du jugement attaqué (mentionnés dans la conclusion n°1 de l’appel), soit la sanction de la contravention commise, selon le Tribunal, le 23 septembre 2017. Cet objet doit donc être examiné et le sera plus loin.

                        d) En revanche, la même déclaration d’appel ne s’en prend aucunement à la condamnation de B.X.________ pour instigation à faux témoignage (chiffres 7 et 8 du dispositif du jugement attaqué). La première conclusion de l’appel fait abstraction des chiffres précités du dispositif ; aucune conclusion ne vise la condamnation infligée en vertu de l’article 307 al. 1 CP ; enfin, les brefs développements consacrés à la motivation de l’appel ne se réfèrent qu’à l’illégalité prétendue de la réglementation communale en matière de taxis. Il n’y a donc aucune ambiguïté sur ce point et aucun délai complémentaire ne devait être imparti à l’appelante, en application de l’article 400 al. 1er CPP. Comme souligné par le Tribunal fédéral, « [l]a limitation de l'appel repose sur un souci d'économie du procès et d'allègement de la procédure. Après que l'objet de l'appel a été fixé dans la déclaration d'appel, la portée de celui-ci ne peut plus être élargie » (arrêt du TF du 05.03.2019 [6B_125/2019]). Formellement, l’appelante n’a pas étendu ses conclusions dans sa déclaration d’appel motivée du 27 juin 2019, les reprenant textuellement, y compris la lacune susmentionnée. Il n’y a donc pas matière à irrecevabilité, mais la Cour doit néanmoins constater que la condamnation prononcée pour instigation à faux témoignage est entrée en force, faute d’avoir été attaquée dans les formes et délai.

3.                            Pour que les choses soient claires, il convient de préciser que, sur le fond, l’argumentation de l’appelante, relative au faux témoignage, ne résistait pas à l’examen : il est invraisemblable que C.________ ait admis avoir fait des déclarations fausses, par sentiments de peur et d’énervement (d’ailleurs inexpliqué) contre sa tante (comme déclaré le 11 octobre 2018), alors qu’elle devait bien se douter que cet aveu pouvait lui attirer des ennuis ; il était en outre indiscutablement faux qu’elle ne connaissait pas sa cliente, comme affirmé en premier lieu, et c’est la découverte de ce premier mensonge qui a entraîné des aveux relatifs aux autres contre-vérités ; de surcroît, il eût été parfaitement absurde de convenir, à 21h00, d’une nouvelle course deux heures plus tard pour aller chercher une carte bancaire oubliée (convention alléguée par la prévenue) et, s’il s’était agi plutôt d’un nouvel appel téléphonique, comme prétendu par le témoin, un appel survenu à 23h01 ne pourrait expliquer la présence du taxi vers la place (ddd) dès 22h50 (comme indiqué par la prévenue) ou 22h45 (rapport du 26 mars 2018) ; enfin, la présence d’une cliente est résolument niée par les policiers intervenus et, lorsque le témoin est invité à donner des détails sur l’intervention des policiers, il se déclare certain « qu’il y avait du bleu », alors que la tenue des agents de sécurité est grise. Il y avait donc toutes les raisons de retenir l’aveu de C.________, passé le 25 juin 2018, selon lequel sa tante lui avait demandé de faire des déclarations fausses, pour expliquer la présence de son taxi en ce lieu et à cette heure. Si donc l’appel portait valablement sur la condamnation prononcée de ce chef, il devrait être rejeté dans cette mesure.  

4.                     L’accusation relative au service de taxi porte sur des « infractions de racolage », terme repris des rapports de police. Ce vocabulaire plutôt caractéristique d’une autre forme de prise en charge ne trouve pas d’appui dans la réglementation communale en matière de taxis, laquelle proscrit en revanche le « maraudage », soit le fait de chercher « à provoquer une commande » et de circuler « uniquement à la recherche de clients éventuels » (art. 22 al. 7 de l’Arrêté d’exécution du Règlement sur le service de taxis, du 30 juin 1999 ; plus loin : l’Arrêté sur les taxis). Le témoin D.________ précisait, en audience, que les chauffeurs de taxi de W.________ n’ont pas non plus le droit de marauder et qu’ils sont sanctionnés « lorsqu’ils tournent à proximité des établissements publics ».

                        a) Il convient d’abord d’examiner plus précisément les comportements qualifiés de répréhensibles par la première juge. En ce qui concerne A.X.________, c’est le fait d’attendre dans son taxi, parqué sur la place (aaa), alors qu’aucun client ne l’avait appelé, qui lui a valu une amende. Il aurait « dû se trouver sur sa place de stationnement à V.________ », indique la juge de police. Du rapport de police du 10 mai 2018, en conjonction avec les déclarations du prévenu, il ressort que ce dernier avait son enseigne de taxi éteinte et qu’il ne circulait pas, de sorte qu’il ne se trouvait pas à strictement parler dans la situation qualifiée de « maraudage » selon la disposition précitée. Quant à son déplacement ultérieur jusqu’à la rue (bbb), à proximité d’un autre établissement public, il était décrit dans l’ordonnance pénale administrative du 26 février 2018 mais le prévenu avait fourni à ce sujet une explication, certes pas immédiatement convaincante (la présentation de papiers qu’il serait allé chercher à V.________), sur laquelle la police n’a toutefois pas fourni de commentaire. Quoi qu’il en soit, le fait n’était pas repris dans l’acte d’accusation. C’est donc, en réalité, une interdiction de se parquer, à disposition de la clientèle, qui était sanctionnée, mais le fondement de cette interdiction ne saute pas aux yeux. Le Règlement sur le Service de taxis du 14 juin 1999 (plus loin : le Règlement) définit, outre les conditions requises pour obtenir une autorisation de chauffeur de taxi (art. 3 et 4) et un régime d’octroi de concessions pour l’exploitation d’un service de taxis (art. 5 et 6), les principes applicables au stationnement des taxis sur des places réservées à cet effet (art. 8 à 14). La Direction de la sécurité détermine un nombre, limité, d’emplacements du domaine public réservés au stationnement des taxis, dont l’utilisation est soumise à l’obtention d’un permis (cinq au maximum par concessionnaire). Une commission paritaire organise les rachats et reventes de droits de stationnement. Cette réglementation ne dit rien, cependant, du stationnement ailleurs, sur la voie publique, qu’aux emplacements réservés, tels que mentionnés ci-dessus. Elle ne pourrait le faire valablement, d’ailleurs, puisque c’est la Loi fédérale sur la circulation routière qui régit la question (art. 1er LCR). On soulignera que la place (aaa) est indiscutablement publique, selon l’article 1 al. 2 OCR et la jurisprudence qui s’y rapporte (voir notamment l’arrêt du TF du 21.01.2019 [6B_1131/2018], rappelant que le « facteur déterminant n’est pas de savoir si la surface de la route est en propriété privée ou publique, mais si elle est utilisée pour la circulation générale et si son usage est possible pour un groupe indéterminé de personnes, même si son utilisation est limitée »). Or rien n’indique que le stationnement du prévenu ait été illicite comme tel. En revanche, A.X.________ ne conteste pas qu’il se trouvait à cet endroit en vue d’exercer son activité professionnelle, si l’occasion s’en présentait (c’est à ce titre qu’il estimait être « dans [s]on bon droit »). Il ne respectait donc pas l’article 22 section 2 de l’Arrêté sur les taxis, selon lequel les (chauffeurs de) taxis regagnent, après chaque course, une station officielle s’ils bénéficient d’un droit de stationnement ou, à défaut, « un emplacement privé ».

                        Le même raisonnement peut être tenu au sujet de B.X.________. Si son lieu de parcage, le 23 septembre 2017, ne ressort pas tout à fait précisément du dossier le rapport simplifié du 2 octobre 2017 et le rapport du 26 mars 2018 mentionnent la « rue sans nom » qui relie la rue (fff) au (hhh), alors que la prévenue se référait à la Place (ddd), tout à proximité de la rue précitée mais inaccessible aux automobiles , rien n’indique que les règles de circulation routière aient été enfreintes et seule la norme de droit communal susmentionnée l’était, indiscutablement vu l’inanité de l’explication liée au témoin C.________ (cf. c. 3 ci-dessus).

                        b) Il reste à dire si la Loi fédérale sur le marché intérieur (LMI) prime, en vertu de l’article 49 Cst, les règles communales précitées, comme le soutiennent les appelants. Auparavant, il convient d’observer que l’activité de chauffeur de taxi est protégée par la liberté économique (art. 27 Cst.) même si elle implique un usage accru du domaine public (voir notamment l’arrêt du TF du 29.08.2011 [2C_116/2011] cons. 7.1, avec référence à l’ATF 121 I 129) ; que les cantons et les communes peuvent réglementer l’usage de leur territoire par les privés, en respectant les droits fondamentaux (ATF 132 I 197 cons. 2,.2) et que la réglementation communale en cause répond à l’exigence d’une base légale (voir l’article 8 de la loi cantonale d’introduction des prescriptions fédérales sur la circulation routière, RSN 761.10, qui charge les communes de fixer « les conditions d’exploitation des entreprises de taxis dans la mesure où ces entreprises empruntent la voie publique »). Pour qu’une restriction à la liberté économique se justifie, il faut encore qu’elle s’appuie sur un intérêt public prépondérant et qu’elle respecte le principe de proportionnalité (art. 36 Cst ; voir notamment, dans le domaine ici considéré, l’arrêt du TF du 17.12.2009 [2C_410/2009] cons. 3.1). La règle d’interdiction du maraudage, posée dans de nombreux règlements communaux relatifs aux taxis, n’a jamais été considérée comme dénuée d’intérêt public, du moins à la connaissance de la Cour de céans (ainsi, dans l’arrêt de la Cour constitutionnelle vaudoise à laquelle les appelants se réfèrent, une telle règle est implicitement reconnue valable, au considérant 3 a ; de même, au considérant 4 d de l’arrêt de la Chambre administrative de la Cour de justice genevoise du 11.04.2017 [A/3485/2016], l’interdiction faite aux chauffeurs de taxis « de circuler dans le dessein de rechercher des clients » n’est pas remise en cause, à l’inverse de la règle posée par le Conseil d’Etat, imposant un retour à la place privée d’origine, qui excède la délégation législative en sa faveur). Effectivement, si l’on admettait que les taxis sillonnent en permanence les rues de la ville parce que leur chauffeur recherche des clients, il en résulterait un engorgement inutile de la circulation (avec ce que cela implique en termes de nuisances sonores et atmosphériques) et tout le système des cases réservées et des têtes de ligne perdrait son sens, à tout le moins dans une agglomération de surface relativement modeste comme W.________. La disposition en question répond donc à un intérêt public et on ne voit pas quelle règle moins contraignante permettrait d’atteindre le même objectif, de sorte que la norme respecte également le principe de proportionnalité. Quant au parcage sur la voie publique, il comporte des inconvénients très comparables, si ce n’est identiques : occupation de places de stationnement en nombre déjà limité ; perturbation du trafic découlant des changements d’emplacement, vu la durée souvent (très) restreinte de l’autorisation de parcage ; contournement des règles sur les places de stationnement réservées. Il faut ainsi constater que l’atteinte à la liberté économique impliquée par la norme de droit communal est admissible.

                        Comme rappelé par la jurisprudence, l’article « 1 al. 1 LMI garantit à toute personne ayant son siège ou son établissement en Suisse l'accès libre et non discriminatoire au marché, afin qu'elle puisse exercer une activité lucrative sur tout le territoire suisse. Par activité lucrative au sens de cette loi, on entend toute activité non régalienne ayant pour but un gain (art. 1 al. 3 LMI). Selon l'art. 2 al. 1 LMI, toute personne a le droit d'offrir des marchandises, des services et des prestations de travail sur tout le territoire suisse pour autant que l'exercice de l'activité lucrative en question soit licite dans le canton ou la commune où elle a son siège ou son établissement. Des restrictions sont possibles aux conditions de l'art. 3 LMI. Toutefois, l'équivalence des réglementations cantonales et communales sur l'accès au marché est présumée (ATF 141 II 280 cons. 5.1 et les références citées p. 284). La LMI vise ainsi à éliminer les restrictions à l'accès au marché mises en place par les cantons et les communes » (arrêt du TF du 16.09.2019 [2C_284/2019] cons. 4.1). Dans l’arrêt vaudois auquel se réfèrent les appelants, la Cour cite notamment une recommandation de la Commission de la concurrence, du 27 février 2012, affirmant le droit pour un service de taxi venant d’une autre localité de prendre en charge un nouveau client sur la course de retour, pour autant que la destination de celui-ci se trouve hors de la commune en question, et elle annule une disposition réglementaire qui ne précisait pas cette possibilité offerte aux conducteurs externes. En l’espèce, le contrôle de la Cour de céans se limite à examiner la validité de la disposition enfreinte par les appelants (et non de l’article 7 du Règlement, très comparable à la disposition lausannoise précitée). Or celle-ci n’est pas discriminatoire dans sa teneur, dès lors que tous les chauffeurs de taxi doivent regagner, après chaque course, soit une « station officielle », soit un emplacement privé. Certes, il est probable qu’un chauffeur extérieur à la commune doive parcourir un plus long trajet jusqu’à un emplacement privé, mais rien ne lui interdit de s’en procurer un sur le territoire communal et il n’y a donc pas de distinction juridique entre les uns et les autres, de ce point de vue. L’article 3 LMI est donc respecté, lui aussi, de sorte que la condamnation des appelants, de ce chef, résiste à la critique.

5.                     Les appelants ne contestent pas, de manière indépendante, la quotité des peines qui leur ont été infligées. La Cour n’est ainsi pas tenue de revoir cette question (cf. arrêt du TF du 09.01.2015 [6B_419/2014] cons. 2.3) et il apparaît d’ailleurs que la première juge a fait un usage correct de son pouvoir d’appréciation en réduisant de moitié l’amende requise contre A.X.________, vu l’abandon d’une des deux charges à son encontre, et de plus de deux tiers celle infligée à B.X.________, pour le même motif.

6.                     Il résulte de ce qui précède que l’appel doit être intégralement rejeté, aux frais de ses auteurs.

Par ces motifs,
la Cour pénale décide

Vu les articles 7 et 29 du Règlement sur le Service de taxis, 22 de son Arrêté d’exécution, 44 CPN, 399 al. 3, 426 et 428 CPP,

1.    Constate que les chiffres 7 et 8 du jugement de première instance n’ont pas été valablement attaqués et qu’ils sont en force.

2.    Rejette l'appel.

3.    Les frais de la procédure d'appel, arrêtés à 1’200 francs, sont mis à la charge des appelants.

4.    Le présent jugement est notifié à A.X.________ et B.X.________, par Me F.________, au ministère public, parquet général (MP.2018.1365-PGA et MP.2018.1384-PGA) et au Tribunal de police du Littoral et du Val-de-Travers, à Neuchâtel (POL.2018.508).

Neuchâtel, le 23 janvier 2020

 

Art. 307 CP
Faux témoignage, faux rapport, fausse traduction en justice
 

1 Celui qui, étant témoin, expert, traducteur ou interprète en justice, aura fait une déposition fausse sur les faits de la cause, fourni un constat ou un rapport faux, ou fait une traduction fausse sera puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire.

2 Si le déclarant a prêté serment ou s’il a promis solennellement de dire la vérité, la peine la peine sera une peine privative de liberté de six mois à cinq ans.1

3 La peine sera une peine pécuniaire si2 la fausse déclaration a trait à des faits qui ne peuvent exercer aucune influence sur la décision du juge.


1 Nouvelle teneur de la peine selon le ch. II 1 de la LF du 19 juin 2015 (Réforme du droit des sanctions), en vigueur depuis le 1er janv. 2018 (RO 2016 1249; FF 2012 4385).
2 Nouvelle teneur de la peine selon le ch. II 1 de la LF du 19 juin 2015 (Réforme du droit des sanctions), en vigueur depuis le 1er janv. 2018 (RO 2016 1249; FF 2012 4385).

 

Art. 399 CPP
Annonce et déclaration d’appel
 

1 La partie annonce l’appel au tribunal de première instance par écrit ou oralement pour mention au procès-verbal dans le délai de dix jours à compter de la communication du jugement.

2 Lorsque le jugement motivé est rédigé, le tribunal de première instance transmet l’annonce et le dossier à la juridiction d’appel.

3 La partie qui annonce l’appel adresse une déclaration d’appel écrite à la juridiction d’appel dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé. Dans sa déclaration, elle indique:

a. si elle entend attaquer le jugement dans son ensemble ou seulement sur certaines parties;

b. les modifications du jugement de première instance qu’elle demande;

c. ses réquisitions de preuves.

4 Quiconque attaque seulement certaines parties du jugement est tenu d’indiquer dans la déclaration d’appel, de manière définitive, sur quelles parties porte l’appel, à savoir:

a. la question de la culpabilité, le cas échéant en rapport avec chacun des actes;

b. la quotité de la peine;

c. les mesures qui ont été ordonnées;

d. les prétentions civiles ou certaines d’entre elles;

e. les conséquences accessoires du jugement;

f. les frais, les indemnités et la réparation du tort moral;

g. les décisions judiciaires ultérieures.

 

Art. 400 CPP
Examen préalable
 

1 Si la déclaration d’appel n’indique pas précisément les parties du jugement de première instance qui sont attaquées, la direction de la procédure de la juridiction d’appel invite la partie à préciser sa déclaration et lui fixe un délai à cet effet.

2 La direction de la procédure transmet sans délai une copie de la déclaration d’appel aux autres parties.

3 Dans les 20 jours à compter de la réception de la déclaration d’appel, ces parties peuvent, par écrit:

a. présenter une demande de non-entrée en matière; la demande doit être motivée;

b. déclarer un appel joint.

 

Art.31LMI
Restrictions à la liberté d’accès au marché
 

1 La liberté d’accès au marché ne peut être refusée à des offreurs externes. Les restrictions doivent prendre la forme de charges ou de conditions et ne sont autorisées que si elles:

a. s’appliquent de la même façon aux offreurs locaux;

b. sont indispensables à la préservation d’intérêts publics prépondérants;

c. répondent au principe de la proportionnalité.

2 Les restrictions ne répondent pas au principe de la proportionnalité lorsque:

a. une protection suffisante des intérêts publics prépondérants peut être obtenue au moyen des dispositions applicables au lieu de provenance;

b. les attestations de sécurité ou certificats déjà produits par l’offreur au lieu de provenance sont suffisants;

c. le siège ou l’établissement au lieu de destination est exigé comme préalable à l’autorisation d’exercer une activité lucrative;

d. une protection suffisante des intérêts publics prépondérants peut être garantie par l’activité que l’offreur a exercée au lieu de provenance.

3 Les restrictions visées à l’al. 1 ne doivent en aucun cas constituer une barrière déguisée à l’accès au marché destinée à favoriser les intérêts économiques locaux.

4 Les décisions relatives aux restrictions doivent faire l’objet d’une procédure simple, rapide et gratuite.


1 Nouvelle teneur selon le ch. I de la LF du 16 déc. 2005, en vigueur depuis le 1er juil. 2006 (RO 2006 2363 2366; FF 2005 421).