Arrêt du Tribunal Fédéral

Arrêt du 01.07.2020 [2C_554/2020]

 

 

 

A.                            X.________ était employé au sein de la société Y.________ SA depuis le 1er janvier 2015. Le 14 juin 2017, son employeur lui a signifié son licenciement, auquel le prénommé s’est opposé le lendemain. Le 12 février 2018, il a saisi l’Autorité régionale de conciliation du Jura bernois-Seeland d’une requête en conciliation, en prenant notamment les conclusions suivantes :

                        "   […]

     d) Dire et constater que le licenciement dont a fait l’objet X.________ par courrier du 14 juin 2017, par Y.________ SA, par son administrateur et le président de son conseil d’administration, A.________ et B.________ est abusif;

     e) Et par voie de conséquence, condamner Y.________ SA, par son administrateur et le président de son conseil d’administration, A.________ et B.________ à payer à X.________ la somme de CHF 52'980.00, correspondant à six mois de salaire, valant indemnité au sens de l’art. 336a CO;

     f)  Condamner Y.________ SA, par son administrateur et le président de son conseil d’administration, A.________ et B.________ à payer à X.________ la somme de CHF 408.77 à titre de remboursement de la somme déduite de manière injustifiée sur le décompte final de salaire de X.________;

     g) En sus de ce qui précède, condamner Y.________ SA, par son administrateur et le président de son conseil d’administration, A.________ et B.________, à payer à X.________ toutes les heures supplémentaires effectuées depuis le 5 janvier 2015, à ce jour, et dont la calculation est expressément réservée à ce stade;

     h) Condamner Y.________ SA, par son administrateur et le président de son conseil d’administration,  A.________ et B.________ au paiement de tous les frais de la présente procédure, ainsi qu’à l’intégralité des honoraires de la soussignée."

Le 7 mars 2018, devant cette autorité, X.________ et la société Y.________ SA ont passé la convention suivante :

"1.        Y.________ SA s’engage à verser à X.________ jusqu’au 31 mars 2018 les montants suivants :

·         CHF 26'580.00 net

·         CHF 8'860.00 brut

·         CHF 450.00 net (participation aux frais de procédure)

2.         […].

3.         Les frais de la procédure de conciliation par CHF 900.00, sont payés par la partie demanderesse à qui la partie défenderesse rembourse la moitié comme retenu sous chiffre 1.

4.         Les dépens des parties sont compensés.

5.         Avec l’exécution de cette convention, les parties se déclarent départies pour solde de tout compte du contrat de travail."

Par décisions du 13 juin 2019, et après plusieurs échanges de correspondance entre le Service des contributions (ci-après : le service) et X.________, ce dernier s’est vu notifier deux taxations rectificatives définitives pour l’impôt direct cantonal et communal 2018, respectivement l’impôt fédéral direct 2018. Ces taxations tenaient compte d’un revenu total de 90'817 francs et précisaient que "Fr. 5'316 sont considérés fiscalement comme non imposable (tort moral)".

Le 12 juillet 2019, le contribuable a déposé une réclamation contre ces taxations, faisant valoir en substance que le service était en possession de tous les documents lui permettant de reconnaître que la somme octroyée par son ancien employeur de 26'580 francs correspondait à une indemnité au sens de l’article 336a CO, relative à un licenciement abusif et à la réparation du tort moral. En se fondant sur l’article 24 let. g LIFD, le contribuable soutenait que cette indemnité devait être entièrement exonérée de l’impôt sur le revenu, et non uniquement le cinquième retenu arbitrairement par le service.

Par décision du 7 août 2019, le service a rejeté la réclamation formée par le contribuable et a confirmé les décisions de taxations du 13 juin 2019 pour l’impôt cantonal et communal direct 2018 et pour l’impôt fédéral direct 2018. En bref, il a retenu que la convention du 7 mars 2018 ne précisait pas à quel titre la somme de 26'580 francs était versée, que l’intéressé n’avait pas apporté des éléments qui auraient justifié que le versement d’un tel montant constitue exclusivement la réparation d’un tort moral et que, comparant sa situation à celles d’autres affaires jugées, notamment, par le Tribunal fédéral, il a maintenu que la prise en compte d’un montant de 5'316 francs à titre de réparation morale était conforme à la jurisprudence.

B.                            Le 13 septembre 2019, X.________ recourt contre ce prononcé, en concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation et à ce qu’il soit dit et constaté que la somme de 26'580 francs correspond à une indemnité en réparation du tort moral au sens de l’article 336a CO et qu’elle doit être totalement exonérée sur le plan fiscal, en application de l’article 24 let. g LIFD. Il allègue que, mise en parallèle avec sa requête en conciliation du 12 février 2018, la somme de 26'580 francs net (correspondant à 3 mois de salaire) répond à la conclusion e), la somme de 8'860 francs brut répond aux conclusions f) et g) et celle de 450 francs à la conclusion h). Il soutient ainsi que dans la mesure où la convention ne fixe pas une indemnité globale mais décompose les montants reconnus en fonction des conclusions qu’il a prises dans sa requête en conciliation, il est indéniable que le montant de 26'580 francs constitue une indemnité pour tort moral allouée en application de l’article 336a CO, ce qui justifie son exonération sur le plan fiscal.

C.                            Dans ses observations du 30 octobre 2019, le service conclut, sous suite de frais, au rejet du recours car mal fondé et à la confirmation de sa décision sur réclamation, en rappelant sa pratique consistant à retenir une quote-part d’un cinquième de l’indemnité versée au titre de compensation d’un préjudice moral consécutif au licenciement.

L’AFC ne s’est pas déterminée sur le recours.

D.                            Requis par la Cour de droit public, le dossier de l’Autorité régionale de conciliation du Jura bernois-Seeland (JBS 18 212) est versé à la cause.

C O N S I D E R A N T

en droit

1.                            Interjeté dans les formes et délai légaux, le recours est recevable.

2.                            L’objet du litige concerne la qualification de l’indemnité perçue conventionnellement par le contribuable à la fin de ses rapports de travail. De l’avis du recourant, il s’agit d’une indemnité pour tort moral résultant d’un licenciement abusif et fondée sur l’article 336a CO. L’intimé considère, quant à lui, qu’il ne résulte pas de la convention passée par le contribuable et son ancien employeur la qualification de l’indemnité qui a été versée, démontrée d’ailleurs par aucune autre pièce, ce qui ne justifie pas de l’exonérer intégralement sur le plan fiscal, mais uniquement un cinquième du montant, d’après sa pratique.

3.                            L’article 16 al. 1 LIFD prévoit que l’impôt sur le revenu a pour objet tous les revenus du contribuable, qu’ils soient uniques ou périodiques. Sont imposables tous les revenus provenant d’une activité exercée dans le cadre de rapports de travail, qu’elle soit régie par le droit privé ou par le droit public, y compris les revenus accessoires, tels que les indemnités pour prestations spéciales, les commissions, les allocations, les primes pour ancienneté de service, les gratifications, les pourboires, les tantièmes, les avantages appréciables en argent dérivant de participations de collaborateur et les autres avantages appréciables en argent (art. 17 al. 1 LIFD). Sont également imposables les indemnités obtenues lors de la cessation d’une activité ou de la renonciation à l’exercice de celle-ci (art. 23 let. c LIFD). Parmi les revenus exonérés, l’article 24 let. g LIFD énumère les versements à titre de réparation du tort moral.

Le droit cantonal connaît une réglementation semblable puisque l’article 9 LCdir (RSN 631.0) correspond à l’article 16 al. 1 LIFD (excepté l’ajout "[] en espèces ou en nature et quelle qu’en soit l’origine"), l’article 20 al. 1 LCdir à l’article 17 al. 1 LIFD, l’article 26 let. c LCdir à l’article 23 let. c LIFD et l’article 27 let. g LCdir à l’article 24 let. g LIFD. Selon la jurisprudence constante de la Cour de droit public, les règles cantonales doivent être interprétées en fonction du droit fédéral, non seulement lorsqu’elles ont la même teneur que celui-ci (RJN 1986, p. 165), mais également en raison de l’entrée en vigueur de la LHID au 1er janvier 1993 (arrêt de la CDP du 05.09.2011 [CDP.2010.362] cons. 3).

4.                            a) Aux termes de l’article 336a CO, la partie qui résilie abusivement le contrat de travail doit verser à l’autre une indemnité (al. 1). Celle-ci est fixée par le juge, compte tenu de toutes les circonstances; toutefois, elle ne peut dépasser le montant correspondant à six mois de salaire du travailleur. Sont réservés les dommages-intérêts qui pourraient être dus à un autre titre (al. 2). L’indemnité a une double finalité, à la fois punitive et réparatrice. Le juge doit la fixer en équité (art. 4 CC), en tenant compte de toutes les circonstances, dont en particulier les effets économiques du licenciement (arrêt du TF du 25.07.2018 [4A_485/2017] cons. 4.1). Étant due même si la victime ne subit ou ne prouve aucun dommage, elle ne correspond pas à des dommages-intérêts au sens classique; elle revêt un caractère sui generis, qui l’apparente à une peine conventionnelle. En droit des assurances sociales, n’étant pas de nature salariale, l’indemnité prévue par l’article 336a al. 2 et 3 CO ne fait pas partie du salaire déterminant au sens de l’article 5 al. 2 LAVS et ne donne dès lors pas lieu à perception des cotisations sociales (Wyler/Heinzer, Droit du travail, 4e éd., 2019, p. 830 et les références citées). Selon la doctrine, l’indemnité de l’article 336a CO couvre en principe tout le tort moral subi par le travailleur licencié, avec pour conséquence qu’un licenciement abusif n’est pas susceptible de donner droit à une indemnité additionnelle fondée sur l’article 49 CO, à moins que le travailleur ait subi une atteinte à sa personnalité qui se distingue nettement de celle qui résulte déjà d’un congé abusif (Wyler/Heinzer, op. cit., p. 832 et les références citées).

b) L’article 24 let. g LIFD fait suite à la jurisprudence du Tribunal fédéral qui, sous l’empire de l’ancien arrêté fédéral (AIFD), avait renoncé à traiter les prestations en réparation du tort moral comme un revenu du travail et à les traiter fiscalement comme tel (Archives de droit fiscal 56, p. 61 ss; RDAF 1989 II 56; Noël, in : Commentaire romand de l’impôt fédéral direct, 2e éd., 2017, n. 51 ad art. 24 LIFD). Selon la doctrine, les indemnités de l’employeur versées à la suite d’un congé abusif (art. 336a CO) ou d’un congé injustifié (art. 337c CO) doivent être considérées comme des versements destinés à la réparation du tort moral et doivent dès lors être exonérées (Noël, in : Commentaire romand de l’impôt fédéral direct, op. cit., n. 52 ad art. 24 LIFD et les références citées). Dans un jugement du 22 mai 2007, le Tribunal fiscal s’était écarté de la doctrine majoritaire en considérant "que l’indemnité versée en application des articles 336a et 337c CO constituait en principe un revenu imposable, sous réserve […] d’une part relevant du tort moral (exonérée) ou de la compensation de frais dûment établie (qui ne constituent pas un revenu)". Dans un premier temps, le Tribunal administratif avait laissé ouverte la question de savoir si la position du Tribunal fiscal devait être privilégiée ou si l’avis de la doctrine majoritaire devait l’emporter (RJN 2009, p. 302). Ultérieurement, il a tranché en faveur de l’exonération d’une indemnité qui peut être qualifiée d’indemnité pour licenciement abusif au sens de l’article 336a CO. Néanmoins, il convenait, de cas en cas, de vérifier que l’indemnité que le contribuable qualifiait comme telle trouvait bien son fondement dans l’article 336a CO et que les parties n’avaient pas, aux fins d’éviter le prélèvement de cotisations sociales et l’imposition des montants concernés, indiqué de manière complaisante une telle qualification alors que tout indice d’abus fait défaut (arrêt de la CDP du 05.09.2011 [CDP.2010.362] cons. 4c et les références citées).

c) Selon un principe consacré, il incombe à l’autorité fiscale de démontrer l’existence d’éléments créant ou augmentant la charge fiscale, tandis que le contribuable supporte le fardeau de la preuve des éléments qui réduisent ou éteignent son obligation fiscale. Il appartient ainsi au contribuable d’apporter les éléments permettant de retenir que le montant litigieux trouve son fondement dans un abus de l’employeur au sens de l’article 336a CO ou correspond à la réparation d’un tort moral (ATF 133 II 153 cons. 4.3; arrêt de la CDP du 05.09.2011 [CDP.2010.362] cons. 4c et les références citées).

5.                            a) A titre préliminaire, on relève que les versements dont l’imposition est litigieuse ne résultent pas de l’exécution d’une décision judiciaire, mais d’une convention passée entre X.________ et son ancien employeur devant une autorité judiciaire. On rappelle à cet égard que pour apprécier la forme et les clauses d’un contrat, il y a lieu de rechercher la réelle et commune intention des parties, sans s’arrêter aux expressions ou dénominations dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO). Il incombe donc au juge d’établir, dans un premier temps, la volonté réelle des parties, le cas échéant empiriquement, sur la base d’indices. S’il ne parvient pas à déterminer cette volonté réelle, ou s’il constate qu’une partie n’a pas compris la volonté réelle manifestée par l’autre, le juge recherchera quel sens les parties pouvaient et devaient donner, selon les règles de la bonne foi, à leurs manifestations de volonté réciproques (application du principe de la confiance; ATF 127 III 444 cons. 1b). Il n’y a cependant pas lieu de s’écarter du sens littéral lorsqu’il n’y a pas de raisons sérieuses de penser qu’il ne correspond pas à la volonté des parties (ATF 129 III 118 cons. 2.5). Lorsqu’elle est établie, la réelle et commune intention des parties ne laisse plus de place à l’interprétation selon le principe de la confiance (ATF 128 III 265 cons. 3a).

b) En l’occurrence, il ressort de la requête en conciliation déposée par X.________ devant l’Autorité régionale de conciliation du Jura bernois-Seeland, le 12 février 2018, – dont les faits n’ont pas été contestés par Y.________ SA qui a expressément renoncé au dépôt d’un "procédé écrit", se réservant le droit de faire une proposition transactionnelle lors de l’audience de conciliation (courrier du 22.02.2018) – que celui-là a été engagé par celle-ci à compter du 1er janvier 2015. Après avoir bénéficié en 2015 et 2016 d’une prime exceptionnelle à titre de récompense pour les objectifs atteints et avoir reçu, le 31 mars 2017, un certificat de travail intermédiaire, aux termes duquel son employeur se déclarait entièrement satisfait de ses prestations, le recourant a été abruptement congédié le 14 juin 2017, avec effet au 31 août 2017, aux motifs que ses compétences étaient en inadéquation avec les attentes du poste. A relever que – fait non contesté par Y.________ SA – la lettre de licenciement était signée par une personne qui n’assumait aucune fonction dirigeante au sein de l’entreprise, selon l’extrait du registre du commerce, et qui ne pouvait dès lors pas engager valablement l’employeur par sa signature. Les motifs justifiant le licenciement étaient par ailleurs totalement discordants avec le contenu du certificat de travail intermédiaire établi, le 31 mars 2017, par l’un des administrateurs avec signature individuelle de l’employeur.

Après s’être immédiatement opposé à son licenciement et avoir entretenu un long échange de correspondances avec son employeur, le recourant a saisi l’Autorité régionale de conciliation du Jura bernois-Seeland d’une requête tendant à la constatation du caractère abusif de son licenciement, au versement par Y.________ SA de 52'980 francs (6 mois de salaire) valant indemnité au sens de l’article 336a CO, au remboursement de la somme de 408.77 francs déduite de manière injustifiée de son dernier salaire pour des heures de travail prétendument non effectuées, ainsi qu’au paiement des heures supplémentaires accomplies depuis son engagement en 2015. Le 7 mars 2018, lors de l’audience devant l’autorité de conciliation, les parties ont transigé leur litige par une convention, par laquelle Y.________ SA s’engageait à verser au recourant trois montants distincts, à savoir "CHF 26'580 net", "CHF 8'860 brut" et "CHF 450 francs net (participation aux frais de procédure)".

c) Certes, cette transaction a été passée sans reconnaissance expresse de responsabilité de la part de l’employeur. Cela étant, comme l’a déjà jugé la Cour de céans, lorsqu’il s’agit d’apprécier une absence de reconnaissance de responsabilité, l’autorité fiscale ne saurait s’arrêter aux dénominations employées par les parties à un litige, que ce soit en faveur de l’imposition ou plutôt de l’exonération. Car, il est notoire que dans le cadre de ce type de transaction, l’employeur ne souhaite pas reconnaître sa responsabilité en rapport avec un licenciement abusif. Il est tout aussi évident qu’un employeur n’accepte pas de verser une indemnité – qui correspondait en l’occurrence à trois salaires mensuels – lorsqu’il estime avoir satisfait complètement à ses obligations. Si une transaction peut être le fruit d’un calcul d’intérêts, par la comparaison des coûts et inconvénients d’un procès par rapport au montant qu’accepterait la partie adverse, il n’en demeure pas moins qu’un employeur certain de ne pas être condamné pour un abus ne verserait vraisemblablement pas un tel montant pour solde de tout compte, même en se dédouanant en quelque sorte par la clause d’exclusion de responsabilité (arrêt du 05.09.2011 précité, cons. 5).

d) En l’espèce, devant l’autorité de conciliation, le recourant a conclu au versement d’une indemnité pour licenciement abusif au sens de l’article 336a CO (CHF 52'980 correspondant à 6 mois de salaire), au remboursement d’une somme déduite à tort de son dernier salaire pour des heures prétendument non effectuées (CHF 408.77), et au paiement des heures supplémentaires accomplies depuis son engagement, prétention qu’il a chiffrée à l’audience de conciliation (CHF 33'000 francs). Il est indiscutable que, sous réserve de la somme de 450 francs dont la nature est précisée dans la convention (participation aux frais de procédure), les deux autres montants que l’employeur s’est engagé à verser à son ancien collaborateur se rattachaient nécessairement aux prétentions élevées par celui-ci. Partant du principe que l’ordre dans lequel ces montants étaient reconnus faisait écho à celui des conclusions de la requête en conciliation, il y a lieu de retenir que la somme de "CHF 26'580 net" (représentant 3 mois de salaire brut [CHF 8’860]) correspond à la prétention d’une indemnité au sens de l’article 336a CO, qui est exonérée de l’impôt sur le revenu, et que la somme de "CHF 8'860 brut" (représentant 1 mois de salaire) correspond à la prétention tendant au remboursement d’une retenue sur salaire et au paiement d’heures supplémentaires accomplies. Cette présomption est renforcée par le fait qu’aucune charge sociale (dont le taux équivaut à environ 6.225 %) n’a été prélevée sur le versement de 26'580 francs, alors qu’elles l’ont été sur le montant de 8'860 francs (CHF 551.55), comme en témoigne le certificat de salaire établi par l’employeur le 18 janvier 2019. Ainsi, il y a lieu de considérer comme suffisamment vraisemblable que le versement de 26'580 francs constituait une indemnité pour licenciement abusif au sens de l’article 336a CO, qui doit par conséquent être exonérée de l’impôt sur le revenu conformément aux articles 24 let. g LIFD et 27 let. g LCdir.

6.                            a) Il découle des considérants qui précèdent que le recours doit être admis et que la décision entreprise, ainsi que les taxations rectificatives définitives du 13 juin 2019 relatives à l’impôt cantonal et communal 2018 et à l’impôt fédéral direct 2018 doivent être annulées.

b) Vu l’issue du litige, il est statué sans frais, l’Etat n’en payant pas (art. 47 al. 2 LPJA). Obtenant gain de cause, le recourant, qui est représenté par un mandataire, a droit à une indemnité de dépens. Celle-ci doit être fixée en fonction du temps nécessaire à la cause, de sa nature, de son importance, de sa difficulté, du résultat obtenu ainsi que de la responsabilité encourue par le représentant (art. 58 al. 2 LTFrais, par renvoi de l’article 67 LTFrais; RSN 164.1). Me C.________ n’ayant pas déposé un état de ses honoraires et frais, les dépens seront fixés sur la base du dossier (art. 64 al. 2 LTFrais). L’activité déployée par celle-ci peut être évaluée à quelque 3 heures compte tenu du fait qu’elle représentait déjà le contribuable en procédure de réclamation. Eu égard au tarif appliqué par la Cour de droit public, de l’ordre de 280 francs de l’heure (CHF 840), des débours à raison de 10% des honoraires (CHF 84) et de la TVA de 7.7 % (CHF 71.15), l’indemnité de dépens sera fixée à 995.15 francs, tout compris.

Par ces motifs,
la Cour de droit public

1.    Admet le recours.

2.    Annule la décision sur réclamation du Service des contributions du 7 août 2019, ainsi que les taxations rectificatives définitives du 13 juin 2018 au sens des considérants.

3.    Statue sans frais et ordonne la restitution au recourant de son avance de frais de 1'320 francs.

4.    Alloue au recourant une indemnité de dépens de 995.15 francs à charge de l’intimé.

Neuchâtel, le 28 mai 2020

 

Art. 336a1CO
Sanction
 

1 La partie qui résilie abusivement le contrat doit verser à l’autre une indemnité.

2 L’indemnité est fixée par le juge, compte tenu de toutes les circonstances; toutefois, elle ne peut dépasser le montant correspondant à six mois de salaire du travailleur. Sont réservés les dommages-intérêts qui pourraient être dus à un autre titre.

3 En cas de congé abusif au sens de l’art. 336, al. 2, let. c, l’indemnité ne peut s’élever au maximum qu’au montant correspondant à deux mois de salaire du travailleur.2


1 Nouvelle teneur selon le ch. I de la LF du 18 mars 1988, en vigueur depuis le 1er janv. 1989 (RO 1988 1472; FF 1984 II 574).
2 Introduit par le ch. I de la LF du 17 déc. 1993, en vigueur depuis le 1er mai 1994 (RO 1994 804; FF 1993 I 757).

Art. 16 LIFD
 

1 L’impôt sur le revenu a pour objet tous les revenus du contribuable, qu’ils soient uniques ou périodiques.

2 Sont aussi considérés comme revenu les prestations en nature de tout genre dont bénéficie le contribuable, notamment la pension et le logement, ainsi que les produits et marchandises qu’il prélève dans son exploitation et qui sont destinés à sa consommation personnelle; ces prestations sont estimées à leur valeur marchande.

3 Les gains en capital réalisés lors de l’aliénation d’éléments de la fortune privée ne sont pas imposables.

Art. 24 LIFD
 

Sont exonérés de l’impôt:

a. les dévolutions de fortune ensuite d’une succession, d’un legs, d’une donation ou de la liquidation du régime matrimonial;

b. les versements provenant d’assurances de capitaux privées susceptibles de rachat, à l’exception des polices de libre-passage. L’art. 20, al. 1, let. a, est réservé;

c. les prestations en capital versées par l’employeur ou une institution de prévoyance professionnelle lors d’un changement d’emploi, à condition que le bénéficiaire les réinvestisse dans le délai d’un an dans une institution de prévoyance professionnelle ou les utilise pour acquérir une police de libre-passage;

d. les subsides provenant de fonds publics ou privés;

e. les prestations versées en exécution d’une obligation fondée sur le droit de la famille, à l’exception des pensions alimentaires et des contributions d’entretien mentionnées à l’art. 23, let. f;

f.1 la solde du service militaire et l’indemnité de fonction pour service de protection civile, ainsi que l’argent de poche des personnes astreintes au service civil;

f bis.2 la solde des sapeurs-pompiers de milice, jusqu’à concurrence d’un montant annuel de 5000 francs, pour les activités liées à l’accomplissement de leurs tâches essentielles (exercices, services de piquet, cours, inspections et interventions, notamment pour le sauvetage, la lutte contre le feu, la lutte contre les sinistres en général et la lutte contre les sinistres causés par les éléments naturels); les indemnités supplémentaires forfaitaires pour les cadres, les indemnités supplémentaires de fonction, les indemnités pour les travaux administratifs et les indemnités pour les prestations fournies volontairement ne sont pas exonérées;

g. les versements à titre de réparation du tort moral;

h. les revenus perçus en vertu de la législation fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité;

i.3 les gains provenant des jeux de casino exploités dans les maisons de jeu et autorisés par la loi fédérale du 29 septembre 2017 sur les jeux d’argents (LJAr)4, pour autant que ces gains ne soient pas issus d’une activité lucrative indépendante;

ibis.5 les gains unitaires jusqu’à concurrence d’un montant d’un million de francs provenant de la participation à un jeu de grande envergure autorisé par la LJAr et de la participation en ligne à des jeux de casino autorisés par la LJAr;

iter.6 les gains provenant d’un jeu de petite envergure autorisé par la LJAr;

j.7 les gains unitaires jusqu’à concurrence de 1000 francs provenant d’un jeu d’adresse ou d’une loterie destinés à promouvoir les ventes qui ne sont pas soumis à la LJAr selon l’art. 1, al. 2, let. d et e de cette loi.


1 Nouvelle teneur selon l’annexe ch. 7 de la LF du 6 oct. 1995 sur le service civil, en vigueur depuis le 1er oct. 1996 (RO 1996 1445; FF 1994 III 1597).
2 Introduite par le ch. I 1 de la LF du 17 juin 2011 sur l’exonération de la solde allouée pour le service du feu, en vigueur depuis le 1er janv. 2013 (RO 2012 489; FF 2010 2595).
3 Introduite par l’annexe ch. 2 de la LF du 18 déc. 1998 sur les maisons de jeu (RO 2000 677; FF 1997 III 137). Nouvelle teneur selon l’annexe ch. II 5 de la LF du 29 sept. 2017 sur les jeux d’argent, en vigueur depuis le 1er janv. 2019 (RO 2018 5103; FF 2015 7627).
4 RS 935.51
5 Introduite par l’annexe ch. II 5 de la LF du 29 sept. 2017 sur les jeux d’argent, en vigueur depuis le 1er janv. 2019 (RO 2018 5103; FF 2015 7627).
6 Introduite par l’annexe ch. II 5 de la LF du 29 sept. 2017 sur les jeux d’argent, en vigueur depuis le 1er janv. 2019 (RO 2018 5103; FF 2015 7627).
7 Introduite le ch. I 1 de la LF du 15 juin 2012 sur les simplifications de l’imposition des gains faits dans les loteries (RO 2012 5977; FF 2011 6035 6059). Nouvelle teneur selon l’annexe ch. II 5 de la LF du 29 sept. 2017 sur les jeux d’argent, en vigueur depuis le 1er janv. 2019 (RO 2018 5103; FF 2015 7627).