A.                            X.________, née en 1968, a été engagée pour une durée indéterminée au sein de l’Hôpital psychiatrique cantonal de Perreux, plus spécifiquement auprès du centre de psychiatrie gériatrique, en qualité d’infirmière-cheffe d'unité de soins (ci-après : ICUS) à 100 % dès le 25 juillet 2005, puis à 80 % à compter du 1er février 2006. Le 1er janvier 2009, toutes les instances psychiatriques privées et publiques du canton de Neuchâtel se sont regroupées sous la bannière d’un établissement unique dénommé Centre neuchâtelois de psychiatrie (ci-après : CNP). A compter du 1er décembre 2014, la prénommée a été affectée en tant qu’ICUS à 80 % à la direction des soins, au secteur des établissements médico-sociaux (ci-après : EMS), avec pour lieu principal de travail le site du CNP de Perreux à Boudry. Les rapports de travail ont été soumis à la convention collective de travail de droit public, CCT Santé 21.

Pour de cause de maladie, soit en raison d’une polyarthrite rhumatoïde présente depuis 2018 (cf. rapports des 18.09.2019 et 29.03.2020 du médecin traitant généraliste, le Dr A.________), X.________ a été, conformément aux certificats médicaux fournis, en incapacité de travail à 100 % du 18 au 27 mai 2018, à 50 % du 28 au 30 mai 2018, à 100 % du 31 mai au 8 juin 2018, à 50 % du 9 juin au 31 juillet 2018, à 100 % du 16 au 20 mai 2019, du 24 au 26 octobre 2019 et du 1er au 10 novembre 2019, à 50 % du 11 au 24 novembre 2019, à 100 % le 17 janvier 2020 et du 22 janvier au 2 février 2020, à 50 % du 3 au 12 février 2020, à 100 % du 13 février au 31 mai 2020, à 50 % du 1er au 21 juin 2020, à 60 % du 22 au 23 juin 2020 et à 100 % du 24 juin au 31 décembre 2020. Elle a donc repris l’activité d’ICUS à son taux usuel entre le 1er août 2018 et le 15 mai 2019, entre le 21 mai et le 23 octobre 2019, entre le 27 et le 31 octobre 2019, entre le 25 novembre et le 16 janvier 2020, ainsi qu’entre le 18 et le 21 janvier 2020, présentant depuis le 22 janvier 2020 une incapacité de travail sans discontinuer à des taux oscillant entre 50 % et 100 %. En décembre 2019, elle a déposé une demande de prestations AI auprès de l’Office de l’assurance-invalidité du canton de Neuchâtel, qui a requis du CNP qu’il remplisse le « questionnaire pour l’employeur », ce qu’il a fait en date du 13 février 2020.

Faisant suite à la séance d’information au personnel du 6 décembre 2019, la direction générale du CNP l’a informée, par courriel du 16 décembre suivant, de l’état d’avancement du projet de transfert des activités occupationnelles et d’hébergement du CNP, transfert qui s’inscrivait dans la volonté politique du canton de Neuchâtel de promouvoir une vision moderne et communautaire de la psychiatrie et qui résultait de l’engagement pris par le CNP de réorienter une partie de ses activités et, partant, de revoir son organisation, conformément à ses options stratégiques 2015-2022, validées en janvier 2016 par le Grand Conseil. Fort du constat que la notion même d'hébergement en milieu psychiatrique s’inscrivait dans une vision asilaire désormais dépassée, qui contribuait à la marginalisation et à la stigmatisation des résidents, le CNP a donc initié une réorientation visant d’une part la reprise des activités occupationnelles et d’hébergement par des structures partenaires, d’autre part le développement de ses prestations de psychiatrie spécialisée ambulatoire, notamment au travers d’équipes mobiles aptes à fournir des soins psychiatriques auprès de personnes ou de structures hors du CNP. Dans le cadre de ce processus de réorientation, il a fermé le foyer B.________ en 2018 et devait encore fermer les trois EMS et cinq foyers restants, à savoir C1.________, C2.________ et C3.________, respectivement, D1.________, D2.________, D3.________, D4.________ et D5.________. Le personnel était informé que cette réorientation importante induirait, jusqu’en 2021, une réorganisation institutionnelle profonde avec redimensionnement structurel, logistique et administratif, ainsi qu’avec développement de nouvelles prestations. Le calendrier du transfert des activités et, partant, des fermetures des EMS et foyer du CNP, de même que le dispositif d’accompagnement à la transition professionnelle étaient également présentés au personnel. S’agissant de ce dernier point, la direction générale du CNP signalait que le plan social, établi en partenariat avec les services cantonaux ainsi que les commissions et organes compétents et validé par ceux-ci, portait sur trois points principaux, à savoir la recherche et la proposition d’un poste équivalent dans le canton; le versement d’indemnités de départ en cas d’impossibilité de reclassement; la perte du droit aux indemnités si la proposition de poste équivalent était refusée sans motif fondé ou si le collaborateur ne participait pas activement à la démarche. Par courriel du 4 février 2020 à l’ensemble du personnel, la direction générale du CNP a procédé à un point de la situation en lien avec la réorganisation, en lui précisant notamment les différentes mesures d’accompagnement offertes. Elle a en particulier signalé qu’ayant identifié que pour une minorité de collaborateurs la combinaison de plusieurs éléments (âge, absence de formation, manque d’expérience professionnelle au-delà du CNP) réduisait fortement la possibilité de trouver des postes équivalents sur le marché de l’emploi, une décision de suspension de licenciement, respectivement, un décision de recherche de mesures alternatives de soutien (pont AVS, versement d’une partie d’indemnité compensatoires dans le cas où le poste proposé et accepté n’était pas équivalent) avaient été prises. Il s’agissait toutefois de situations exceptionnelles qui ne concernaient que les collaborateurs de plus de 57 ans révolus en 2020, qui travaillaient au CNP depuis plus de 15 ans et qui n’étaient pas au bénéfice d’une formation professionnelle qualifiante.

X.________, par son avocate, a requis des précisions quant à la fermeture du home C3.________, respectivement, concernant les démarches entreprises par le CNP pour lui proposer un poste équivalent (courrier du 03.02.2020). Le CNP lui a répondu en date du 13 février 2020, en lui rappelant les éléments en lien avec le plan social et les mesures d’accompagnement mises en place pour soutenir les collaborateurs dont le poste serait supprimé dans le cadre de la réorganisation du CNP. Il lui a précisé que la date de fermeture du home C3.________ était encore inconnue, puisqu’elle dépendait des démarches effectuées, en collaboration avec le service cantonal de la santé publique, pour trouver des solutions d’accueil aux résidents actuels de l’EMS, mais qu’elle était estimée à septembre-octobre 2020. Le CNP signalait ainsi à la prénommée qu’il lui était difficile d’activer des recherches d’emploi pour un engagement qui devrait se concrétiser à l’automne 2020. A cet égard, il indiquait que les échanges qu’ils avaient eus à ce jour avec elle s’inscrivaient dans un objectif exploratoire visant à définir, en préparation des démarches à initier le moment venu, les contours de la cible professionnelle. Le CNP donnait encore plusieurs exemples des discussions et échanges effectués pour l’heure.

Le 23 juin 2020, dans un courrier intitulé « Droit d’être entendue avant éventuelle résiliation des rapports de travail », le CNP a informé X.________ qu’au vu de son absence maladie courant depuis de nombreux mois, ainsi que pour des questions d’organisation inhérentes au service et conformément à l’article 3.5 CCT Santé 21, il envisageait de résilier le contrat de travail avec effet au 31 octobre 2020. Il invitait la prénommée à un entretien pour en discuter le 6 juillet 2020. Par courriel du 29 juin 2020, cette dernière a fait savoir au CNP qu’« étant toujours dans une période instable de la maladie est [sic] en incapacité de travail », elle ne pourrait pas participer à l’entretien. Elle signalait également souhaiter davantage de soutien, en se référant à l’article 7.7 de la CCT Santé 21. Par le biais de son avocate, X.________ a encore fait savoir au CNP, en date du 14 juillet 2020, que – si elle remplissait effectivement les conditions de l’article 3.5 CCT Santé 21, puisqu’elle avait été et était toujours malade – le congé envisagé relevait du prétexte. En effet, le CNP n’avait rien fait pour la soutenir comme il aurait dû le faire, mais avait simplement laissé couler le délai de six mois lui permettant un licenciement pour cause de maladie, alors que la situation correspondait à une suppression de poste. La prénommée soutenait ainsi qu’en procédant comme il entendait le faire, le CNP s’économisait l’indemnité à laquelle elle aurait droit pour suppression de poste. Par courrier du 11 août 2020, le CNP a proposé une nouvelle date d’entretien à X.________. Il l’a entendue, le 3 septembre 2020, en présence de son avocate.

Par décision du 8 septembre 2020, le CNP a résilié les rapports de service de la prénommée pour le 31 décembre 2020, conformément à l’article 3.5 al. 3 CCT Santé 21. Il a relevé que l’intéressée était en arrêt maladie depuis de nombreux mois, que, selon les indications qu’elle avait elle-même fournies, elle souffrait d’une maladie qui ne se rétablirait pas et qui connaîtrait fréquemment des hauts et des bas, que son état de santé n’était actuellement pas stabilisé et qu’elle ne pouvait donc pas envisager une reprise de son activité professionnelle. Le CNP signalait encore que X.________ avait admis qu’il n’était pour l’heure pas possible de l’intégrer à un processus visant à l’aider à trouver un autre emploi. Aussi, s’il ne remettait nullement en doute sa motivation, il se devait de tenir compte des nécessités du service dans lequel la prénommée travaillait, ainsi que du reste des collaborateurs, de sorte qu’une résiliation des rapports de travail s’imposait. Le CNP estimait encore avoir satisfait à ses obligations d’employeur.

B.                            X.________ interjette recours devant la Cour de droit public du Tribunal cantonal contre cette décision dont elle demande l’annulation, avec suite de frais et dépens. Principalement, elle conclut à ce qu’il soit constaté, d’une part, que son recours est pourvu de l’effet suspensif, d’autre part, que la résiliation du contrat de travail est abusive, subsidiairement et à titre d’action de droit administratif, à ce que l’intimé soit condamné à lui verser une indemnité équivalente à six mois de salaire, soit 42'000 francs, à titre de licenciement abusif, très subsidiairement et également à titre d’action administrative, à ce que le CNP soit condamné à lui verser une indemnité équivalente à six mois de salaire, soit 42'000 francs, à titre d’indemnité pour suppression de poste. La recourante invoque une violation du droit, y compris l’excès ou l’abus de pouvoir d’appréciation, ainsi que la constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents. Plus spécifiquement, elle fait valoir l’abus de droit en lien avec la fin de son contrat de travail qu’elle qualifie d’abusive. La recourante se plaint d’un comportement contraire à la bonne foi et donc abusif, en ce sens que son employeur aurait usé du prétexte de sa maladie pour la licencier, alors même qu’il n’aurait respecté ni ses obligations en lien avec un licenciement collectif ni celles relatives au reclassement professionnel en cas de maladie. Elle met en évidence le fait que le CNP aurait cherché à attendre la fin du délai de protection de six mois pour pouvoir la licencier sans avoir à s’inquiéter de son reclassement et sans avoir à lui allouer une indemnité pour suppression de poste. La recourante fait part à ce propos de son interrogation quant au fait de savoir si la décision du 8 septembre 2020 ne constituerait pas un cas de suppression de poste déguisée. Elle se demande encore pourquoi l’intimé n’a pas fait usage, afin de régler les modalités de la fin de son contrat de travail, des mesures alternatives qui avaient été énoncées par courriel du 4 février 2020 et qui valaient pour les « cas limites ». Quand bien même elle admet ne pas remplir exactement les critères fixés pour pouvoir bénéficier de ces mesures, elle estime faire partie des « cas limites », de sorte qu’une solution aurait dû être trouvée par ce biais plutôt que de prononcer un licenciement pour cause de maladie.

C.                            Dans ses observations, le CNP conclut, avec suite de frais, au rejet du recours, respectivement, de l’action de droit administratif, dans la mesure de leur recevabilité. Il considère que certaines des conclusions prises par la recourante sont contradictoires, en ce sens que, si la décision du 8 septembre 2020 est annulée, conformément à ce que celle-ci demande, c'est le licenciement lui-même qui l'est. Or, un licenciement inexistant ne saurait conduire au versement d'une indemnité pour licenciement abusif. En substance, l’intimé nie que la résiliation querellée soit abusive et relève qu’au moment où il aurait été temps d'envisager des possibilités de soutien concrètes, la recourante était en incapacité de travail. Comment pouvait-il soutenir son engagement auprès d'une autre institution, alors qu’elle était en incapacité de travail au CNP depuis plus de six mois et qu’au vu de ses propres déclarations, cette incapacité était appelée à durer. L’intimé soutient ainsi que le fait que l’intéressée ne soit pas en état de rechercher un poste qui corresponde à son profil n'est pas à lui reprocher, ni (passé le délai de protection) à mettre à sa charge financière. A ce propos, le CNP considère encore qu’il n'est pas envisageable de mettre la recourante au bénéfice de l'indemnité prévue par la CCT Santé 21 pour suppression de poste, dans la mesure où – si elle n'était pas malade – elle n'y aurait très vraisemblablement pas eu droit. Elle aurait alors (comme la plupart de ses collègues) été reclassée dans une fonction équivalente, au CNP ou auprès de l'un de ses partenaires. En effet, comme relevé par l’intéressée elle-même, elle était au bénéfice d'une grande expérience professionnelle et son profil était de ceux qui sont recherchés sur le marché de l'emploi.

C O N S I D E R A N T

en droit

1.                            Interjeté dans les formes et délai légaux, le recours est recevable.

2.                            Le litige porte tout d'abord sur la résiliation des rapports de travail de la recourante. Cette dernière a toutefois également conclu à l'allocation d'une indemnité équivalente à six mois de salaire, soit 42'000 francs, à titre de licenciement abusif, voire à titre d’indemnité pour suppression de poste. Une telle demande porte sur une prestation pécuniaire découlant des rapports de service et ressortit, selon la jurisprudence de la Cour de céans, à l'action de droit administratif au sens de l'article 58 LPJA. Le litige porte ainsi à la fois sur des questions à résoudre par le biais de la procédure ordinaire de recours d'une part, et par le biais de la procédure d'action, d'autre part.

3.                            a) Les rapports de travail du personnel du CNP sont régis par la convention collective de travail CCT Santé 21 (art. 9 al. 1 LCNP) dans sa version de droit public valable pour les années 2017 à 2020.

b) Aux termes de l'article 3.2.1 CCT Santé 21, l'employé ou l'employeur peut résilier le contrat de travail moyennant le respect de délai variable en fonction du nombre d'années d'activité accomplies (al. 1). Selon l'article 3.2.2, toute résiliation signifiée par l'employeur doit être précédée d'un entretien (al. 2).

Selon l’article 3.5 CCT Santé 21, en cas de maladie non professionnelle, le contrat de travail peut être résilié après une période de six mois, quel que soit le taux d’absence. Dans ce cas, l’article 6.2 CCT Santé 21– qui prévoit que l’employeur est tenu de conclure une assurance perte de gain en cas de maladie – doit être appliqué (al. 3). En cas de résiliation notifiée avant la période de protection de six mois, le délai de congé est suspendu et ne continue à courir qu’après la fin de cette période (al. 4). Les articles 336 à 336b (résiliation abusive) et 336c et 336d CO (résiliation en temps inopportun) sont applicables à titre de droit supplétif.

Selon l'article 336 al. 1 let. a CO, le congé est abusif lorsqu'il est donné par une partie pour une raison inhérente à la personnalité de l'autre partie, à moins que cette raison n'ait un lien avec le rapport de travail ou ne porte sur un point essentiel un préjudice grave au travail dans l'entreprise. La maladie est une raison inhérente à la personnalité au sens de la disposition précitée. Toutefois, si elle porte atteinte à la capacité de travail, la maladie n'est pas considérée comme une cause abusive de résiliation (ATF 123 III 246 cons. 5, 107 II 169). Ainsi, la résiliation des rapports de travail en raison d'une incapacité prolongée n'est pas abusive, à moins notamment que l'incapacité trouve sa cause dans une violation de ses obligations par l'employeur (arrêt du TF du 04.12.2015 [4A_437/2015] cons. 2.2.2 et les références citées). La résiliation du contrat de travail d’un employé qui a été harcelé sera considérée comme abusive lorsque le mobbing a provoqué chez le travailleur une baisse de rendement ou une période de maladie dont l’employeur se prévaut lors de la résiliation (arrêt du TF du 20.03.2006 [4C.320/2005] cons. 3.2; Dunand, Commentaire du contrat de travail, 2013, n. 30 ad art. 336).

c) L’autorité de nomination dispose d’un large pouvoir d’appréciation pour déterminer si des justes motifs de renvoi existent (ATF 118 Ib 164 cons. 4a). Selon la jurisprudence, l'autorité décide librement, dans les limites de son pouvoir d'appréciation, dont elle devra néanmoins user de façon consciencieuse, si la résiliation est justifiée. L'existence d'un juste motif autorisant le renvoi, immédiat ou non, n'a pas besoin d'être démontrée : il suffit que le licenciement se situe dans les limites du pouvoir appréciateur de l'autorité et apparaisse, au regard des prestations et du comportement de l'employé ainsi que des circonstances personnelles et des exigences de service, comme une mesure soutenable (ATF 108 Ib 209; RJN 2007, p. 209 cons. 2b, 1998, p. 209 cons 3a, 1995, p. 147-148). Selon l'article 33 let. a et d LPJA, la Cour de céans examine uniquement si l'autorité a abusé de son pouvoir d'appréciation ou l'a excédé; elle n'est pas habilitée à contrôler l'opportunité de la décision puisque aucun texte légal applicable aux fonctionnaires de l’Etat ou aux employés d’établissements de droit public dotés de la personnalité juridique ne lui en donne la compétence (RJN 2007, p. 209 cons. 2b et la référence citée). A noter qu’en particulier ni la LCNP ni la CCT Santé 21 n’autorise la Cour de droit public à statuer en opportunité.

4.                            a) En l’espèce, il n’est pas contesté que la recourante a connu une période prolongée d’incapacité de travail qui a débuté le 18 mai 2018 et qui a été interrompue par plusieurs reprises d’activité de durées plus ou moins longues, oscillant entre plusieurs mois et quelques jours. De même, il n’est pas remis en cause que, depuis le 22 janvier 2020, elle se trouve en incapacité de travail sans discontinuer à des taux variant entre 50 % et 100 %. Les dates des différentes périodes et les pourcentages d’incapacité, attestées par certificat médical, ne sont pas non plus remises en question. La recourante admet d’ailleurs que, compte tenu de la durée de sa maladie, elle n’était – au moment où la décision querellée a été rendue, le 8 septembre 2020 – plus protégée par la période de six mois durant laquelle un contrat de travail ne peut pas être résilié. Elle reconnaît également qu’en tant que tel une résiliation pour cause de maladie n’était pas abusive dans son cas. Elle soutient en revanche qu’il y a abus de droit en ce que l’intimé a usé du prétexte de sa maladie pour la licencier, de sorte que la question d’une suppression de poste déguisée se posait. La recourante ne soutient pas et a fortiori ne démontre pas que son incapacité de travail trouverait sa cause dans une violation de ses obligations par l'employeur. A noter à ce propos que son médecin généraliste traitant, qui a attesté de différentes périodes d’incapacité de travail, pose à titre de diagnostic une polyarthrite rhumatoïde présente depuis 2018. L’intéressée allègue toutefois que le CNP n’aurait respecté ni ses obligations en lien avec un licenciement collectif ni celles relatives au reclassement professionnel en cas de maladie.

Force est de constater, déjà à ce stade, que la résiliation n'est pas abusive au sens précité (cf. cons. 3c ci-avant). Il apparaît en effet que l'incapacité de travail de longue durée en cause, plus précisément l’absence totale ou partielle pour cause de maladie non professionnelle de plus de six mois sur laquelle s’est fondée l’intimé pour prononcer le licenciement, ne résulte pas d'une violation des obligations de l'employeur. En d’autres termes, l’incapacité de travail n’est, ici, consécutive ni à des actes de mobbing, ni au non-respect par l’employeur de mesures visant à protéger la santé et/ou l’intégrité personnelle des collaborateurs.

b) Ceci étant, il y a lieu de convenir que – si l’engagement pris par le CNP de réorienter une partie de ses activités, ainsi que de revoir son organisation, conformément aux options stratégiques 2015-2022 validées par le Grand Conseil, impliquait en particulier un redimensionnement structurel, logistique et administratif et, partant, un contexte de licenciement collectif et de suppressions de postes – cette situation ne pouvait avoir pour conséquence d’empêcher l’intimé de faire usage, pendant le temps que durerait cette profonde réorganisation institutionnelle, des différentes dispositions du chapitre 3 de la CCT Santé 21, relatives à la fin des rapports de travail. En effet, il convient d’admettre qu’y compris dans une telle conjoncture, un employeur doit pouvoir, notamment, en cas de violation des obligations incombant à l’employé, ainsi qu’en cas de justes motifs résilier les relations de service. Admettre le contraire signifierait que, dès qu’une réorganisation ou une restructuration d’une institution met en péril l’emploi d’un certain nombre de collaborateurs, l’employeur ne pourrait plus procéder à des résiliations en dehors du cadre du licenciement collectif. Or, on ne saurait considérer que les auteurs de la CCT Santé 21 aient voulu exclure, dans un tel contexte, toutes possibilités de résiliation autre que la suppression de poste, alors même que les motifs et les conditions de licenciement prévus par la convention seraient réunis. Il faut dès lors convenir que, même dans une situation de licenciement collectif avec suppressions de postes et plan social, l’employeur, soit ici le CNP, doit pouvoir, conformément à l’article 3.5 al. 3 CCT Santé 21, résilier le contrat de travail notamment en cas de maladie non professionnelle impliquant une absence depuis plus de six mois, et ce indépendamment du taux d’incapacité. En d’autres termes, le fait que la résiliation des rapports de service pour cause de maladie soit, en l’occurrence, intervenue dans un contexte de profonde réorganisation institutionnelle, ne signifie pas encore que la décision entreprise constituerait un cas de suppression de poste déguisée.

Tout d’abord, il convient de rappeler que la recourante a, elle-même, admis que la période de protection de six mois, avant le prononcé de la résiliation litigieuse, a été respectée. L’intimé a de plus considéré que cette absence perturbait le bon fonctionnement du service, ce qui ne peut être remis en cause – l’intéressée ne tente d’ailleurs pas de le faire – par le seul fait que le secteur des EMS auquel elle a été affectée, dès le 1er décembre 2014, était destiné à cesser ses activités, à tout le moins telles qu’il les avait connues jusque-là, à moyen-court terme. On ne peut en effet exclure que tant que ce secteur continuerait à offrir des prestations, par le biais d’activités occupationnelles et d’hébergement en faveur des résidents des EMS du CNP, l’absence de longue durée de la recourante pouvait impacter l’organisation inhérentes du service et, partant, ses collègues. Elle ne le conteste pas. D’ailleurs, comme exposé ci-avant, un tel motif fondé sur l'absence de l’intéressée pour cause de maladie de longue durée n’est pas en soi abusif. A noter à ce sujet que le droit public, qui ne connaissait précédemment pas la notion de congé en temps inopportun, soit renvoie à l'article 336c CO, soit établit des listes mentionnant des périodes pendant lesquelles le licenciement est donné en temps inopportun, soit accorder une protection importante aux employés, notamment un droit au salaire étendu en cas de maladie (Rosello, Les influences du droit privé du travail sur le droit de la fonction publique, collection CERT, 2016, p. 295 no 608). Une fois le droit au salaire écoulé, les employeurs publics sont en principe libres de résilier les rapports de service de l'employé même si celui-ci est encore malade ou accidenté (Rosello, op. cit., p. 298 no 613). Au vu du texte clair de l’article 3.5 CCT Santé 21, il apparaît que c’est la deuxième possibilité qui a été privilégiée et adoptée les auteurs de la convention, avec néanmoins un renvoi à l’article 336c CO à titre de droit supplétif.

Ceci étant, on relèvera encore que le médecin généraliste traitant a indiqué que, nonobstant le traitement par injections de méthotrexate, la polyarthrite rhumatoïde dont souffrait sa patiente engendrait une importante fatigue, des douleurs articulaires et une difficulté à mobiliser ses articulations. Certes, ce praticien a signalé qu’il pensait que le poste d’ICUS au sein du site de Perreux était adapté, du point de vue physique, car peu exigeant et permettant une adaptation de l’environnement aux limitations fonctionnelles de l’intéressée, tout en précisant qu’un poste physiquement plus exigeant, telle qu’infirmière en psychiatrie « à l’étage », présenterait un risque élevé d’incapacité de travail (cf. rapport du 18.09.2019 du Dr A.________). La recourante a toutefois confirmé, tant par courriel du 29 juin 2020 que lors de l’entretien du 3 septembre suivant, être toujours dans une phase instable de la maladie et en totale incapacité de travail. Elle a de plus précisé, lors dudit entretien, respectivement, souffrir d’une pathologie non traitable, dont elle ne guérira pas et qui impliquera constamment des hauts et des bas, ne pas savoir aujourd’hui quelle activité elle pourra envisager entreprendre, ni à compter de quand et à quel pourcentage, ne pas présenter un état de santé lui permettant actuellement d’intégrer le dispositif d'accompagnement mis en place par le biais du plan social, ainsi que n’avoir procédé à aucune recherches en vue de trouver un poste équivalent, et ce en raison de son état de santé. Elle a également signalé avoir déposé une demande de prestations AI en décembre 2019 et craindre le « trou » entre la fin du versement des indemnités d'assurance perte de gain maladie et les versements de l’assurance-invalidité. Au regard de ces éléments, on ne saurait admettre que l’intimé a abusé de son pouvoir d'appréciation en déduisant de la longue absence de sa collaboratrice non seulement qu'elle n’intégrerait pas son poste de travail dans un avenir proche et que la bonne marche du service était menacée, la recourante occupant un poste d’infirmière-cheffe d'unité de soins, mais également que, dans le cadre du plan social et de ses mesures d’accompagnement, sa candidature ne pouvait être soutenue auprès d’autres institutions, puisqu’elle présentait une incapacité de travail depuis plus de six mois et que cette incapacité étant, aux dires même de l’intéressée, appelée à durer encore, elle n’était pour l’heure pas employable. Dans ces circonstances, et en l’absence d’une remise en cause de l'incapacité de travail, on ne saurait pas non plus reprocher au CNP de ne pas avoir désigné un médecin pour examiner sa collaboratrice, celle-ci ne soutenant d’ailleurs pas qu’il aurait dû être procédé à un tel examen.

c) Par conséquent et au vu de ce qui précède, il apparaît que c’est sans abus ni excès de son pouvoir d’appréciation que l’intimé a mis fin aux rapports de service de la recourante. Rien au dossier ne permet d’ailleurs de retenir que, si l’intéressée n’avait pas présenté une incapacité de travail de longue durée et pour une période encore indéterminée, qui plus est en lien avec un état de santé non stabilisé, la réorganisation du CNP aurait, dans les faits, conduit à une suppression de poste, faute notamment de reclassement dans l’institution, de transfert ou de mutation dans une institution soumise à la CCT Santé 21 ou encore de toutes autres mesures utiles. Il n’y a en effet aucune raison de remettre en cause l’appréciation de l’employeur, d’ailleurs non contesté par la recourante, selon laquelle bénéficiant d'une grande expérience professionnelle et d’un profil recherché sur le marché de l’emploi, elle aurait en l’absence d’incapacité de travail de longue durée – comme la plupart de ses collègues – été reclassée dans une fonction équivalente, au CNP ou auprès de l'un de ses partenaires. Dans ces conditions, on ne saurait suivre la recourante lorsqu’elle soutient que la résiliation prononcée par l’intimé pour cause de maladie constituerait une suppression de poste déguisée.

Les conditions d’une résiliation pour le motif invoqué par l’employeur sont réalisées, de sorte que celui-ci pouvait valablement mettre un terme aux rapports de service pour cette raison, sans qu’on puisse lui reprocher une suppression de poste déguisée au seul motif que le licenciement prenait place dans un contexte de profonde réorganisation institutionnelle, en lien avec la mise en place d’un plan social. Dans la mesure où il n’est pas contestable que la résiliation en cause est intervenue pour cause de maladie et non en raison d’une suppression de poste dans le cadre d’un licenciement collectif, il n’y a pas lieu d’examiner si l’intimé a observé ses obligations résultant tout particulièrement du règlement applicable en cas de licenciement collectif de la CCT Santé 21, pas plus qu’il n’est utile de regarder si la recourante a quant à elle respecté les devoirs incombant aux employés dans ce genre de situation, ni d’ailleurs si elle entre dans ce qu’elle nomme « cas limites ». On relèvera simplement sur ce dernier point que l’intéressée a expressément admis ne pas en remplir « exactement » les critères fixés, à savoir être âgée de 57 ans révolus en 2020 et ne pas bénéficier d’une formation professionnelle qualifiante, la seule condition qu’elle remplit étant celle de travailler au CNP depuis plus de 15 ans. Egalement pour ce motif de conformité de la résiliation pour cause de maladie et, partant, d’exclusion dans le cas d’espèce d’une résiliation pour suppression de poste dans le cadre d’un licenciement collectif, il n’apparaît pas nécessaire d’examiner le grief de violation du principe de l’égalité de traitement, indirectement invoquée par la recourante. Tout au plus signalera-t-on que celle-ci développe à ce sujet une argumentation non étayée; elle ne prétend pas et a fortiori ne démontre pas que ses collègues d’ores et déjà reclassés dans une fonction équivalente ou ayant eu des entretiens avec des institutions partenaires, voire des propositions, se trouvaient dans une situation semblable à la sienne, en particulier auraient présenté une incapacité de travail aussi longue. Or, l’égalité de traitement (art. 8 Cst. féd.) impose à l’Etat et à l’administration non seulement de traiter de manière semblable des situations semblables, mais également de traiter de manière différenciée des situations différenciées.

S’agissant de l’article 7.7 CCT Santé 21, invoqué par l’intéressée, qui traite du reclassement du personnel en cas de problèmes de santé, on soulignera qu’il concerne les employés empêchés de poursuivre leur activité professionnelle de façon définitive, pour cause de problèmes de santé. Or, force est de constater au vu de ce qui précède que non seulement l’état de santé de la recourante n’est pas stabilisé, mais que de plus son médecin généraliste traitant considère l’activité d’ICUS comme adaptée et à même de maintenir sa capacité de travail. Force est dès lors de convenir qu’il n’est nullement établi à satisfaction de droit, bien au contraire, que la recourante serait empêchée de manière définitive de poursuivre une activité d’ICUS.

d) Par conséquent et au vu de ce qui précède, c’est à bon droit et sans abus ni excès de son pouvoir d’appréciation que l’intimé a mis fin aux rapports de service de l’intéressée. La date du 31 décembre 2020, qui respecte le préavis de trois mois de l’article 3.2.1 CCT Santé 21 et n’est pas contestée, est en outre conforme au droit. La décision attaquée n’est donc pas critiquable.

5.                            Enfin, l’intéressée conclut à l’octroi d'une indemnité équivalente à six mois de salaire, soit 42'000 francs, à titre de licenciement abusif, voire à titre d’indemnité pour suppression de poste. Une telle demande ressortit en principe à l'action de droit administratif au sens de l'article 58 LPJA. Elle porte en effet sur une prestation pécuniaire découlant des rapports de service (art. 58 let. a LPJA).

Les prétentions de l’intéressée, à supposer recevables, doivent d'emblée être rejetées sans autres mesures d'instruction ni échanges d'écritures. Pour les motifs figurant ci-dessus, on ne saurait considérer que le licenciement est abusif, ou encore que le comportement reproché au CNP serait constitutif d’une suppression de poste déguisée, qui aurait justifié l’octroi d’une indemnité.

6.                            a) Compte tenu de ce qui précède, la décision querellée doit être confirmée, respectivement, le recours et l’action de droit administratif doivent être rejetés, dans la mesure de leur recevabilité. Le dossier permettant de juger la cause en l’état, il n’y a pas lieu de donner suite aux réquisitions de la recourante tendant à son interrogatoire et à l’audition de témoins. Le présent arrêt rend par ailleurs sans objet la conclusion de l’intéressée quant à l’effet suspensif.

b) Selon la pratique de la Cour de céans en matière de litiges relatifs aux rapports de service, il n’est pas perçu de frais lorsque la valeur litigieuse n’excède pas 30'000 francs. Ceci vaut tant pour les procédures de recours que de l’action de droit administratif (cf. notamment arrêt de la Cour de droit public du 03.03.2016 [CDP.2015.300] cons. 7b et la référence citée).

S’agissant du recours, la valeur litigieuse porte, à tout le moins, sur plusieurs mois de salaires, à mesure que la recourante conclut à l’annulation de la décision du 8 septembre 2020, par laquelle les rapports de service ont été résiliés au 31 décembre suivant, et, partant, indirectement à la poursuite desdits rapports (arrêt du TF du 13.05.2015 [8C_286/2014] cons. 1); elle dépasse donc largement 30'000 francs, de sorte qu’il y a lieu de percevoir des frais de 880 francs à charge de la recourante, compte tenu du sort du recours (art. 47 LTFrais en lien avec l’art. 47 al. 1 LPJA). S’agissant du deuxième objet de la procédure (action de droit administratif), la valeur litigieuse excède également 30'000 francs puisqu’elle porte sur l’allocation d’une indemnité de 42'000 francs, à titre soit de licenciement abusif, soit de suppression de poste. Ainsi, au vu du sort de la cause et de la mise à contribution à cet égard de la Cour de céans, les frais de procédure pour l’action seront fixés à 440 francs et mis à la charge de l’intéressée (art. 12 al. 3 LTFrais par renvoi de l’art. 51 LTFrais et en lien avec l‘art. 60 al. 3 LPJA). Par ailleurs, cette dernière n’a pas droit à une allocation de dépens (art. 48 LPJA a contrario et art. 60 al. 2 LPJA qui y renvoie).

Par ces motifs,
la Cour de droit public

1.    Rejette le recours.

2.    Rejette la demande d’action de droit administratif, dans la mesure où elle est recevable.

3.    Déclare la conclusion relative à l’effet suspensif sans objet.

4.    Met à la charge de X.________ les frais de la procédure par 1’320 francs, montant partiellement compensé par son avance.

5.    N’alloue pas de dépens.

Neuchâtel, le 8 décembre 2020

 

Art. 3361CC
Protection contre les congés
Résiliation abusive
Principe
 

1 Le congé est abusif lorsqu’il est donné par une partie:

a. pour une raison inhérente à la personnalité de l’autre partie, à moins que cette raison n’ait un lien avec le rapport de travail ou ne porte sur un point essentiel un préjudice grave au travail dans l’entreprise;

b. en raison de l’exercice par l’autre partie d’un droit constitutionnel, à moins que l’exercice de ce droit ne viole une obligation résultant du contrat de travail ou ne porte sur un point essentiel un préjudice grave au travail dans l’entreprise;

c. seulement afin d’empêcher la naissance de prétentions juridiques de l’autre partie, résultant du contrat de travail;

d. parce que l’autre partie fait valoir de bonne foi des prétentions résultant du contrat de travail;

e.2 parce que l’autre partie accomplit un service obligatoire, militaire ou dans la protection civile, ou un service civil, en vertu de la législation fédérale, ou parce qu’elle accomplit une obligation légale lui incombant sans qu’elle ait demandé de l’assumer.

2 Est également abusif le congé donné par l’employeur:

a. en raison de l’appartenance ou de la non-appartenance du travailleur à une organisation de travailleurs ou en raison de l’exercice conforme au droit d’une activité syndicale;

b. pendant que le travailleur, représentant élu des travailleurs, est membre d’une commission d’entreprise ou d’une institution liée à l’entreprise et que l’employeur ne peut prouver qu’il avait un motif justifié de résiliation.

c.3 sans respecter la procédure de consultation prévue pour les licenciements collectifs (art. 335f).

3 Dans les cas prévus à l’al. 2, let. b, la protection du représentant des travailleurs dont le mandat a pris fin en raison d’un transfert des rapports de travail (art. 333) est maintenue jusqu’au moment où ce mandat aurait expiré si le transfert n’avait pas eu lieu.4


1 Nouvelle teneur selon le ch. I de la LF du 18 mars 1988, en vigueur depuis le 1er janv. 1989 (RO 1988 1472; FF 1984 II 574).
2 Nouvelle teneur selon l’annexe ch. 3 de la LF du 6 oct. 1995 sur le service civil, en vigueur depuis le 1er oct. 1996 (RO 1996 1445; FF 1994 III 1597).
3 Introduite par le ch. I de la LF du 17 déc. 1993, en vigueur depuis le 1er mai 1994 (RO 1994 804; FF 1993 I 757).
4 Introduit par le ch. I de la LF du 17 déc. 1993, en vigueur depuis le 1er mai 1994 (RO 1994 804; FF 1993 I 757).