A.                               Par ordonnance pénale du 9 septembre 2019 du Ministère public, parquet de Neuchâtel, X.________ a été condamné à une peine privative de liberté de 120 jours pour vol, violation des règles de la circulation routière, conduite malgré une incapacité de conduire et conduite sans être titulaire du permis de conduire requis. Par décision du 6 décembre 2019, l'Office d'exécution des sanctions et de probation (ci-après : OESP) a autorisé l'intéressé à subir sa peine sous le régime particulier du travail d'intérêt général (ci-après : TIG), à raison de 480 heures et l'a enjoint à se présenter à l’entreprise A.________ afin d'y débuter l'accomplissement dudit travail puis de l'y poursuivre. Suite à une absence injustifiée le 16 décembre 2019, cet employeur n'a pas voulu poursuivre sa collaboration si bien que l'intéressé a été convoqué par l'OESP le 20 février 2020 à l’association B.________, brocante et magasin de seconde main, à Z.________. Vu qu'il ne s'est pas présenté au rendez-vous précité, un avertissement formel lui a été adressé par courrier et courriel du 21 février 2020 précisant qu'une dernière chance lui était octroyée et qu'il devait se présenter le mardi 25 février 2020 à 9 heures à la brocante de W.________. Lors de cet entretien, il a été convenu d'un début d'activité le 7 mars 2020. L'intéressé ne s'est présenté chez l'employeur que le 10 mars 2020. Dès le 16 mars 2020, en raison de la pandémie de coronavirus, l'activité a été suspendue. Par courrier du 14 mai 2020 à l'intéressé, l'OESP l'a prié de contacter la brocante à W.________ d'ici au 27 mai 2020, pour reprendre l'exécution de son TIG. L'intéressé ayant indiqué pouvoir reprendre son travail le 8 juin, l'OESP l'a prié de se rendre à cette date à 8h45 à la brocante à W.________. Trouvant porte close ce jour-là, l'intéressé a immédiatement téléphoné à l'OESP et il a été convenu à cette occasion qu'il se présenterait le lendemain de 13h45 à 18h00 ainsi que le vendredi de 8h45 à 12h00. X.________ ne se présentant pas durant ladite semaine, l'OESP, par décision du 17 juin 2020, a révoqué le régime particulier du TIG et lui a ordonné de se présenter le 22 juillet 2020 à l'établissement de détention, afin d'exécuter le solde de sa peine privative de liberté, soit 119 jours, sous le régime ordinaire de la détention ferme. Il a considéré que, persistant dans ses manquements malgré l'avertissement intervenu, l'intéressé ne satisfaisait plus aux conditions d'octroi du régime particulier.

Saisi d'un recours contre ce prononcé, le Département de la justice, de la sécurité et de la culture (ci-après : le département) l'a rejeté par décision du 19 octobre 2020. Il a considéré qu'ayant été averti par courrier du 21 février 2020 des conséquences du manquement aux obligations fixées et persistant à ne pas respecter ces dernières, la décision de révocation était justifiée.

B.                               X.________ interjette recours devant la Cour de droit public du Tribunal cantonal contre la décision du département en concluant à son annulation, sous suite de frais et dépens. Il conteste la valeur de l'avertissement, étant donné qu'aucune voie de recours n'était mentionnée et allègue avoir toujours eu la ferme volonté d'exécuter son TIG, seules des circonstances impondérables l'en empêchant. Concernant le téléphone intervenu avec l'OESP, il mentionne qu'il attendait une convocation écrite et que, ne l'ayant pas reçue, il ne s'est pas présenté à B.________. Il requiert l'audition de deux témoins et le bénéfice de l'assistance judiciaire.

C.                               Le département conclut au rejet du recours, sans formuler d'observations.

L'OESP, dans ses observations, conclut au rejet du recours en relevant que ses collaborateurs sont assermentés et que les notices écrites retraçant les échanges téléphoniques doivent être prises en considération sans qu'il soit nécessaire d'auditionner les collaboratrices, dont une est par ailleurs malheureusement décédée.

C O N S I D E R A N T

en droit

1.                                Interjeté dans les formes et délai légaux, le recours est recevable.

2.                                Depuis le 1er janvier 2018, le TIG n'est plus une peine, mais une modalité d'exécution ordonnée par les autorités d'exécution (art. 79a CP). Elle est possible pour les personnes condamnées à une peine privative de liberté de 6 mois au plus (art. 79a al. 1 let. a CP). En cas d'inexécution, l'autorité d'exécution fait exécuter la peine préalablement prononcée par le juge. Aux termes de l'article 79a al. 6 CP, si, malgré un avertissement, le condamné n'accomplit pas le TIG conformément aux conditions et charges fixées par l'autorité d'exécution ou ne l'accomplit pas dans le délai imparti, la peine privative de liberté est exécutée sous la forme ordinaire ou sous celle de la semi-détention ou la peine pécuniaire ou l'amende est recouvrée.

La loi cantonale sur l'exécution des peines et des mesures pour les personnes adultes (LPMPA), du 24 mai 2016, reprend cette possibilité, à la demande de la personne condamnée, d'exécuter une peine privative de liberté sous la forme d'un TIG (art. 43a) et donne la compétence au service pénitentiaire pour délivrer l'autorisation y relative (art. 23 al. 1 let. d) et interrompre le TIG ainsi qu'ordonner l'exécution du solde de la peine privative de liberté (let. f). L'article 103 de la loi, relatif à la procédure, indique que le service pénitentiaire, les services désignés par le Conseil d'Etat et les unités d'organisation qui leur sont subordonnées rendent leur décision dans les formes prévues par la LPJA. Le règlement de la Conférence latine des autorités cantonales compétentes en matière d'exécution des peines et des mesures, relatif à l'exécution des peines sous forme de TIG (règlement sur le TIG), du 30 mars 2017, prévoit que l'autorité dont le condamné dépend peut adresser un avertissement à ce dernier s'il ne respecte pas les conditions inhérentes au TIG ou si, de toute autre manière, il trompe la confiance mise en lui, notamment s'il : a) n’effectue pas le travail dans les délais; b) possède ou consomme des produits stupéfiants; c) ne respecte pas une obligation qui lui a été faite (art. 14). Si, en dépit d'un avertissement formel, le condamné persiste dans son comportement, l'autorité dont il dépend peut révoquer le TIG et ordonner, avec effet immédiat, l'exécution du solde de peine en régime ordinaire ou sous la forme de la semi-détention, s’il en remplit les conditions (art. 15 al. 1).

3.                                a) Le recourant remet en cause la valeur de l'avertissement au motif qu'il ne contient pas de voies de recours. S'il n'est pas exclu, vu l'article 103 LPMPA précité, que l'avertissement doit être rendu sous la forme d'une décision formelle au sens de la LPJA, comportant notamment les voies de recours, une décision qui n'indique pas les voies de recours n'est pas nulle mais, quoi qu'imparfaite, en principe valable. En revanche, le vice ne doit entraîner aucun préjudice pour les parties, ce qui signifie que le recourant ne doit pas être pénalisé sur le plan de la recevabilité de son recours si le vice l'a induit en erreur. L'erreur de l'intéressé n'est cependant admise que dans les limites restreintes du principe de la bonne foi et en tenant compte des circonstances concrètes du cas. Ainsi, le destinataire de la décision doit s'informer des moyens d'attaquer la décision qui les passe sous silence et, après avoir obtenu les renseignements nécessaires, agir en temps utile. Il est notamment abusif de contester près d'une année après l'avoir reçue une décision qui n'indique pas les voies de droit, alors que son contenu et sa portée ne pouvaient pas échapper à son destinataire (arrêt de la CDP du 06.12.2019 [CDP.2019.222] cons. 3a et la référence citée, confirmé par arrêt du TF du 15.07.2020 [2C_86/2020] cons. 5.2).

b) Le courrier du 21 février 2020 de l'OESP prononçant l'avertissement, transmis par courriel du même jour à l'intéressé, donne un droit d'être entendu à ce dernier, soit la faculté de se déterminer par écrit dans un délai de 10 jours. Le recourant n'a ni contesté l'avertissement ni exercé son droit d'être entendu dans le délai précité, ni ne l'a mis en cause dans son recours au département. Ce n'est que dans son recours devant la Cour de céans, soit 9 mois après l'avertissement, qu'il conteste la valeur de ce dernier au motif qu'il ne contiendrait pas les voies de recours. Au vu de la jurisprudence précitée, il est abusif de contester maintenant l'avertissement et ce grief doit être rejeté.

4.                                L'avertissement a été prononcé en raison du fait que l'intéressé ne s'est pas présenté à la brocante auprès de laquelle il devait effectuer le TIG le 20 février 2020 à 9h30. Il n'a jamais contesté qu'il ne s'était ni excusé ni n'avait fourni de justificatif relatif à cette absence. S'il s'est présenté le 25 février 2020, il ne s'est cependant pas rendu sur place comme convenu le 7 mars 2020 pour débuter l'exécution du TIG mais seulement le 10 mars, date à laquelle il n'a effectué que 3h15, alors qu'il était prévu qu'il travaille de 14 à 18 heures. Suite à la suspension du TIG due à la pandémie, il s'est présenté comme convenu à la brocante le lundi matin 8 juin, mais a trouvé porte close, le magasin étant fermé à ce moment-là. Il ressort du dossier qu'il a alors interpellé téléphoniquement l'OESP. La personne jointe a immédiatement pris contact avec la brocante qui a confirmé que le lundi matin était jour de fermeture, mais qui, selon note de journal au dossier du 8 juin 2020, a indiqué qu'il était prévu que l'intéressé vienne le mardi après-midi de 13h45 à 18h00 et le vendredi matin de 8h45 à 12h00. La collaboratrice de l'OESP mentionne avoir rappelé le recourant pour lui confirmer ses horaires en concluant en ces termes : « OK pour lui, pas de souci, il sera là demain comme convenu habituellement ». Le recourant ne s'est pas présenté durant toute la semaine du 8 au 12 juin, date à laquelle il a été informé par courriel que l'exécution du TIG serait révoquée. Or il ressort de la note au journal précitée que l'horaire lui a été rappelé tant par la personne responsable à la brocante que par la collaboratrice de l'office, si bien qu'il ne peut aujourd'hui justifier son absence par le fait qu'il n'a reçu aucune convocation. Lors des appels téléphoniques, lui ont en effet été rappelés les dates et horaires auxquels il devait se présenter. Vu l'avertissement prononcé, vu le fait qu'au lieu de se présenter le 7 mars, il ne s'est présenté que le 10 mars et n'a pas effectué la totalité des heures de travail prévues et le fait qu'il ne s'est pas rendu à la brocante les 9 et 12 juin mais qu'il a attendu le 12 juin pour exiger une convocation, l'OESP pouvait révoquer le régime particulier du TIG sans abuser de son pouvoir d'appréciation.

5.                                Le dossier permettant de juger la cause en l'état, il n'y a pas lieu de donner suite aux réquisitions de preuves du recourant. Comme l'indique l'OESP dans ses observations, ses collaborateurs sont assermentés et la notice retraçant les échanges téléphoniques intervenus le 8 juin 2020 a pleine valeur probante.

6.                                a) Le recourant sollicite l'assistance judiciaire pour cette procédure de recours. Selon la jurisprudence, les conditions d'octroi en sont réalisées si le requérant est indigent, l'assistance d'un avocat est nécessaire ou du moins indiquée et les conclusions du recours ne paraissent pas d'emblée vouées à l'échec (arrêt du TF du 10.07.2018 [9C_437/2018]). Ces mêmes critères sont repris par le droit cantonal neuchâtelois en matière de procédure administrative (art. 117 CPC par renvoi de l'art. 2 al. 2 et art. 4 de la loi sur l'assistance judiciaire (LAJ), du 28.05.2019, entrée en vigueur le 01.07.2019 et art. 3-5 LAJ).

b) En l'espèce, le recourant est au bénéfice de l'aide sociale depuis le 1er avril 2020 (attestations du Service communal de l'aide sociale à Z.________ du 11.08.2020 et du Service de l'aide sociale de V.________ du 11.12.2020), de sorte que la condition de l'indigence est remplie. Sa cause ne paraissant par ailleurs pas d'emblée dénuée de chances de succès et l'assistance d'un mandataire n'étant pas inappropriée, l'assistance judiciaire lui sera accordée et Me C.________ sera désigné comme mandataire d'office. Selon l'article 25 LAJ, à la fin de la procédure, l'avocat désigné dans le cadre de l'assistance judiciaire remet à l'autorité compétente le décompte des frais et honoraires donnant lieu à rémunération, avec indication du temps consacré; à défaut, il est statué d'office.

7.                                Partant, le recours doit être rejeté et les frais, avancés provisoirement par l'Etat, mis à la charge du recourant qui succombe (art. 108 al. 2 LPMPA), qui ne peut par ailleurs prétendre à des dépens (art. 48 al. 1 a contrario LPJA).

Par ces motifs,
la Cour de droit public

1.    Rejette le recours.

2.    Accorde l'assistance judiciaire au recourant pour cette procédure de recours et désigne Me C.________ en qualité d'avocat d'office.

3.    Met les frais et débours de la cause par 880 francs à charge du recourant, montant supporté provisoirement par l’Etat dans le cadre de l’assistance judiciaire.

4.    N'alloue pas de dépens.

Neuchâtel, le 23 février 2021

 

 
Art. 79a103CP
Travail d’intérêt général
 

1 S’il n’y a pas lieu de craindre que le condamné s’enfuie ou commette d’autres infractions, les peines suivantes peuvent, à sa demande, être exécutées sous la forme d’un travail d’intérêt général:

a. une peine privative de liberté de six mois au plus;

b. un solde de peine de six mois au plus après imputation de la détention avant jugement;

c. une peine pécuniaire ou une amende.

2 Une peine privative de liberté de substitution ne peut pas être exécutée sous forme de travail d’intérêt général.

3 Le travail d’intérêt général doit être accompli au profit d’institutions sociales, d’œuvres d’utilité publique ou de personnes dans le besoin. Il n’est pas rémunéré.

4 Quatre heures de travail d’intérêt général correspondent à un jour de peine privative de liberté, à un jour-amende de peine pécuniaire ou à un jour de peine privative de liberté de substitution en cas de contravention.

5 L’autorité d’exécution fixe un délai de deux ans au plus durant lequel le condamné est tenu d’accomplir le travail d’intérêt général. Lorsqu’il s’agit d’une amende, le délai est d’un an au plus.

6 Si, malgré un avertissement, le condamné n’accomplit pas le travail d’intérêt général conformément aux conditions et charges fixées par l’autorité d’exécution ou ne l’accomplit pas dans le délai imparti, la peine privative de liberté est exécutée sous la forme ordinaire ou sous celle de la semi-détention ou la peine pécuniaire ou l’amende est recouvrée.


103 Introduit par le ch. I 1 de la LF du 19 juin 2015 (Réforme du droit des sanctions), en vigueur depuis le 1er janv. 2018 (RO 2016 1249FF 2012 4385).