TRIBUNAL CANTONAL

COUR DE DROIT ADMINISTRATIF ET PUBLIC

 

Arrêt du 18 février 2014

Composition

M. Eric Brandt, président;  M. Christian-Jacques Golay, assesseur  et M. Claude Bonnard, assesseur ; Mme Leticia Garcia, greffière.

 

Recourants

1.

Virginio ZAMBON et Anne-Lise ZAMBON-CRETEGNY,à Regensdorf, 

 

  

Autorité intimée

 

Municipalité de Reverolle, représentée par Me Pierre-Alexandre SCHLAEPPI, avocat, à Lausanne,  

  

Constructeurs

1.

Jean-Manuel BULLUKIAN et Christine-Anne BULLUKIAN Gruau, à Reverolle, représentée par Me Pierre-Xavier LUCIANI, avocat, à Lausanne, 

 

  

 

Objet

permis de construire           

 

Recours Virginio ZAMBON et Anne-Lise ZAMBON-CRETEGNY c/ décision de la Municipalité de Reverolle

 

Vu les faits suivants

A.                     a) Les bâtiments d’habitation et d'exploitation d'une ancienne entreprise agricole, situés au chemin des Chaux à Reverolle, ont été divisés en trois parcelles distinctes séparant le centre d'exploitation en trois parcelles, à savoir: la parcelle 32, propriété d’Anne-Lise Zambon, née Cretegny, située à l'angle formé par le chemin des Chaux, la parcelle centrale 226, qui était la propriété de Jean-Louis Cretegny, et la parcelle 331, propriété de Jean-Manuel Bullukian et Christine-Anne Bullukian Gruau. Les bâtiments sont classés dans la zone de village par le plan général d'affectation approuvé par le Département des institutions et des relations extérieures le 10 juillet 2007.

b) Jean-Louis Cretegny a déposé le 20 octobre 2010 une demande de permis de construire en vue de réaliser des travaux de transformation sur le bâtiment existant de la parcelle 226, contigu à l'ancienne ferme construite sur la parcelle 32 d'une part, et au hangar agricole existant sur la parcelle 331 d'autre part. Le projet, étudié par le bureau d'architecture Fame Architecture SA, prévoyait au rez-de-chaussée l'aménagement d'un sas d'entrée au nord-est et la démolition partielle d'un couvert existant sur la parcelle 32, mais empiétant sur la parcelle 226. L'entrée donnait sur un séjour avec un nouvel escalier permettant d'accéder au 1er étage qui comprenait deux chambres, une salle de bain et un balcon situé au dessus du sas d'entrée; un escalier donnait accès à l’étage des combles,  prévu d’être aménagés en un grenier, une salle de jeux, un local technique et une buanderie; le grenier et la salle de jeux devaient être éclairés par une ouverture en toiture (velux). Le projet prévoyait en outre deux cheminées en toiture, l'une assurant la circulation d'air de la colonne de chute des sanitaires et l'autre, l’évacuation des gaz des poêles à pellets prévus dans le séjour et la chambre du 1er étage. Le raccordement des canalisations d'évacuation des eaux usées et des eaux claires sur le collecteur public était prévu par un nouveau collecteur longeant la limite de la parcelle 32 et rejoignant directement le chemin des Chaux sur la partie de la parcelle 226 située à l'angle formé par le chemin des Chaux et le chemin des Praz-Communaux.

c) La Municipalité de Reverolle (ci-après : la municipalité) a soumis pour examen le dossier de la demande de permis de construire au bureau d'ingénieurs Henri Piguet Sàrl, qui a formulé différentes remarques. Il a notamment été demandé à l’architecte de compléter le plan du géomètre par l'indication des places de stationnement (deux places pour les habitants et une place visiteur), de mentionner la dérogation requise à la distance à la limite pour la construction du sas d'entrée en façade nord-ouest et d’obtenir l'accord écrit et dûment signé du propriétaire voisin M. Zambon pour la démolition du couvert empiétant sur la limite de propriété.

d) Jean-Louis Cretegny a déposé un nouveau dossier de demande de permis de construire le 10 mars 2011, complété selon les demandes formulées par le bureau d'ingénieurs Henri Piguet Sàrl. Le dossier a fait l'objet d'une enquête publique ouverte du 26 mars au 25 avril 2011. Il a soulevé l'opposition d’Anne-Lise et Virginio Zambon (Cretegny). Les opposants critiquaient le tracé prévu pour les canalisations d'évacuation des eaux claires et des eaux usées au motif qu'il passait sur un réservoir des eaux pluviales (ancienne fosse à purin) construit à cheval sur les parcelles 32 et 226. Les opposants ont aussi formulé différentes remarques sur les plans du dossier de l'enquête publique, en particulier quant au manque de précision sur la partie haute du mur mitoyen et au problème posé par la stabilité du couvert empiétant sur la parcelle 226 et qu’il était prévu de démolir.

e) Une délégation de la municipalité a rencontré séparément les constructeurs et les opposants et un accord a été trouvé pour modifier le tracé des collecteurs afin d'éviter le réservoir d'eaux pluviales. Les opposants ont toutefois indiqué maintenir leur opposition. Par décision du 17 mai 2011, la municipalité a délivré le permis de construire à la condition que le tracé projeté des collecteurs des eaux claires et des eaux usées soit modifié de manière à éviter le réservoir des eaux pluviales; un plan modifié avec le nouveau tracé devant être transmis à la municipalité avant le début des travaux. La municipalité précisait en ce qui concerne le couvert empiétant sur la parcelle 226 que la situation pourrait être réglée par une séance entre les deux parties, une délégation municipale se tenant à disposition pour une conciliation. Les époux Zambon-Cretegny n'ont pas contesté la décision municipale qui est entrée en force.

B.                     a) En date du 7 mai 2012, William Bisatti a adressé un message e-mail à l'adresse du greffe municipal de Reverolle dans les termes suivants:

"(…) je suis en possession d'un acte certifiant la vente ainsi que la cession du permis de construire n° CAMAC 109147 de M. J.-L. Cretegny aux époux Bullukian. Et également une procuration de ces derniers pour l'accès au dossier du permis de construire.

J'ai besoin de consulter ces documents pour connaître la teneur du formulaire 380/1 déposé ainsi que le calcul du bilan thermique.

Je passerai si possible demain matin pour cette consultation.

Je vous avertis également de l'ouverture prochaine du chantier, (le formulaire a déjà été envoyé au bureau Masa.), afin de prévoir au plus vite la tenue de la séance de coordination avant chantier. (…)".

Le message comporte l’adresse suivante de l’expéditeur: "ESPACIO CASA Sàrl" William Bisatti, rue du Moulin 2 à 1128 Reverolle.

b) En date du 26 juin 2012, la municipalité a adressé le pli recommandé suivant à la société Espacio Casa Sàrl:

"(…) En date du 13 juin 2013 la Municipalité a bien reçu votre PV de coordination de chantier du 4 juin 2012 sur place pour l'affaire mentionnée ci-dessus et elle vous en remercie. Toutefois, elle tient à apporter quelques précisions afin d'éviter tout malentendu:

-         2ème et 3ème paragraphe: il ne s'agit pas ici d'une demande de la part de la Municipalité ni d'un dépôt d'autorisation pour les modifications annoncées. La procédure découle des lois en vigueur (LATC, art 103) et il s'agit d'une « demande de permis de construire complémentaire » dont la tâche incombe à la Municipalité de délivrer l'autorisation.

-         6ème paragraphe: comme déjà évoqué lors de la séance sur place, le permis de construire stipule que « un plan modifié, avec le nouveau tracé, doit être transmis à la Municipalité avant le début des travaux ».

Entre autres le mandataire tiendra compte de la servitude ID 2003/002580, fond dominant parcelle 225 en faveur de la Commune de Reverolle qui grève les parcelles 226 / 331 / 332.

Par ailleurs, ce mardi 19 juin 2012, Mme Picard, responsable de la sécurité de nos chantiers et travaillant pour le bureau technique Masa Masotti Associés SA, nous a rendu attentifs au fait que le document intitulé « diagnostic amiante » manque dans le dossier d'enquête.

(c.f. http://www.vd.ch/themes/territoire/constructions/amiante/batiments-prives/).

Il s'agit certainement d'un oubli puisque le dossier avait été déposé au moment de l'entrée en vigueur de cette obligation légale; de plus, du fait que le premier contrôle technique avait eu lieu le 3.12.2010, le bureau technique mandaté à l'époque n'avait pas pu constater ce manque.

Tout dossier doit répondre aux lois en vigueur et la chronologie ci-dessous indique clairement que les nouvelles « Directives d'application de la loi sur l'aménagement du territoire et les constructions (LATC art 103a) » du 1er juin 2010 ainsi que l'«Arrêté de mise en vigueur Diagnostic Amiante» du 01.03.2011 auraient dû être respectés. De ce fait il vous incombe de nous le faire parvenir au plus vite.

Chronologie des faits:

-         Entrée en vigueur de l'Arrêté le 01.03.2011

-         Impression des documents par l'architecte le 7.03.2011

-         L'enquête publique de 30 jours était ouverte du 26.03.2011 au 25.04.2011.

Les travaux ayant déjà commencé dans le courant de ce mois, la Municipalité attend les documents suivants, au plus vite, mais au plus tard dans les 30 jours à réception de la présente :

-         le plan des collecteurs EU / EC indiquant le nouveau tracé

-         le dossier « diagnostic amiante » dûment rempli.

Au cas où ces documents ne devraient pas nous parvenir dans les temps, la Municipalité se réserve le droit de prendre toutes les mesures qui s'imposent pour faire respecter les lois les directives en vigueur. (…)".

c) William Bisatti, sous l'enseigne de "Espacio Casa", a répondu dans les termes suivants le 3 juillet 2012 à la municipalité:

"(…) Nous tenons tout d'abord à préciser que notre mandat dans cette affaire se limite pour le moment à l'exécution en qualité d'entreprise générale. Un mandat pour la demande de permis complémentaire ne nous ayant pas encore été signifié.

Nos mandataires, Mme & M. Bullukian ont pour leur part bénéficié du permis de construire que vous avez délivré à M. J.-L. Cretegny lors de l'achat du bien. Il convient donc de demander au bureau Fame Architecture SA, dépositaire de la demande de permis de construire et seul mandataire et interlocuteur avec l'administration au moment des faits, les documents manquants relatifs au diagnostic amiante.

L'autorisation de débuter les travaux nous ayant été délivrée lors de notre séance du 4 juin, les travaux de démolition sont terminés, et il sera très difficile d'établir ce document qui aurait du être demandé en son temps, ou pour le moins avant le début des travaux.

Pour ce qui est du nouveau tracé des canalisations, il n'est pas encore défini si ce dernier sera possible. En effet, lors du contact que nous avons eu avec Mme et M. Genet, il semblerait que la pente de la canalisation des EU les desservant soit trop faible pour que nous puissions nous y raccorder.

Les dénivelés de ces dernières n'ayant pas été relevés après exécution, seule une fouille du terrain qui s'effectuera dans les quinze premiers jours du mois de juillet pourra déterminer la faisabilité.

A ce moment, nous ne manquerons pas de vous tenir au courant de la décision prise et de vous faire parvenir le plan nécessaire dans les délais demandés.(…)".

d) La municipalité a répondu le 12 juillet 2012 dans les termes suivants:

"(…) Comme vous nous l'avez mentionné dans votre lettre du 3 juillet, les travaux de démolition étant terminés, il paraît donc bien difficile d'effectuer un diagnostic amiante à présent. Dans ce cas, le doute profitera à la direction des travaux ainsi qu'à l'employeur des ouvriers quant à la présence de matériaux susceptibles de contenir de l'amiante dans le bâtiment. En effet, même avant l'entrée en vigueur de l'article 103a de la LATC obligeant l'établissement d'un diagnostic amiante pour toute autorisation, le RPAC (règlement de prévention des accidents dus aux chantiers) ainsi que l'OTConst (ordonnance fédérale des travaux dans la construction) prévoyaient déjà d'effectuer des recharges en cas de suspicion d'amiante afin de ne pas exposer des personnes aux fibres en cas de travaux. La responsabilité d'éliminer le doute appartient à la Direction des travaux et à l'employeur des ouvriers exposés.

En ce qui concerne les canalisations, un plan avec les altitudes en msm (mètres sur mer), les points de raccordements des eaux claires et des eaux usées sur les collecteurs communaux, et la mention des pentes devra être soumis à la Municipalité au plus vite, mais au plus tard pour le fin de ce mois.

Ceci, afin de garantir l'évacuation des eaux par gravité et le respect des altitudes du bâtiment. En effet, il serait dommage de devoir pomper des eaux ou de devoir remonter du bâtiment pour des raisons de manque de planification.(…)".

e) En date du 13 novembre 2012, le bureau Masotti signalait à la municipalité de graves manquements sur le chantier conduit par William Bisatti de la société Espacio Casa Sàrl quant à la sécurité des travailleurs, qui pouvaient également concerner les usagers de la parcelle voisine ainsi que les biens des tiers sur le chantier.

C.                     a) Les époux Bullukian, représentés par ESpacio casa Sàrl, ont déposé au mois de juillet 2012 un dossier en vue de l’ouverture d’une enquête complémentaire comportant différentes modifications par rapport au projet autorisé par le permis de construire du 19 mai 2011 (n° 196). Le projet prévoit une modification de l'emplacement des places de stationnement, une extension du sas d'entrée sur une largeur de 4 m., qui le raproche à 0.46 m. de la limite de la parcelle voisine n° 32, l'aménagement de panneaux solaires en toiture et l'élargissement des ouvertures au rez-de-chaussée de la façade sud-est et à l'étage de la façade nord-est, sur le balcon aménagé sur la toiture du sas d'entrée. Les plans du dossier de la demande complémentaire ne mentionnent pas le nom de l’architecte qui a élaboré et signé les plans.

b) La municipalité s'est déterminée le 28 août 2012; elle a constaté que le sas d'entrée ne respectait pas la distance minimum de 3 m. à la limite de propriété voisine (parcelle 32). Elle a relevé que le balcon terrasse surmontant le sas n'était pas conforme à la règle selon laquelle l'ensemble des locaux habitables doit être recouvert d'une toiture à pans. Elle a émis, en outre, une réserve quant aux places de parc prévues hors de la limite des constructions et elle a relevé qu’un diagnostic amiante devait être établi.

D.                     a) Agissant par l’intermédiaire de Espacio Casa Sàrl, les époux Bullukian ont déposé le 29 octobre 2012 un nouveau dossier d'enquête complémentaire prévoyant la construction du hall d'entrée en contiguïté avec la parcelle 32 et remplaçant le balcon sur le sas d'entrée par une toiture en pente, ce qui a pour effet de réduire la hauteur de l'ouverture prévue au 1er étage de la construction. En outre, le projet comporte une modification du tracé des canalisations d'évacuation des eaux claires et des eaux usées. Les eaux claires sont dirigées sur le réservoir d'eau implanté à cheval sur les parcelles 32 et 226 et les eaux usées empruntent la canalisation existante du bâtiment construit sur la parcelle 32. Le nouveau dossier ne comporte pas non plus le nom de l’architecte, auteur et signataire des plans, seule la raison sociale Espacio Casa Sàrl étant mentionnée.

b) Le dossier a fait l'objet d'une enquête publique complémentaire, ouverte du 28 novembre au 27 décembre 2012. Virginio Zambon a formulé différentes questions auprès de la municipalité concernant le dossier de l'enquête complémentaire, questions auxquelles il a été répondu lors d'une séance avec des représentants de la municipalité le lundi 26 novembre 2012. En date du 20 décembre 2012, les époux Anne-Lise et Virginio Zambon-Cretegny ont déposé une opposition portant notamment sur le tracé des canalisations, le sas d'entrée et le mur mitoyen à construire aux niveaux des combles et surcombles. Après avoir transmis l'opposition aux constructeurs, qui ont communiqué leur prise de position, la municipalité a décidé de lever l'opposition  et de délivrer le permis de construire complémentaire n° 196-2 par décision du 4 février 2013.

E.                     a) Virginio et Anne-Lise Zambon-Cretegny ont contesté la décision communale par le dépôt d'un recours auprès de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal (ci-après: le tribunal) le 25 février 2013. Les griefs des recourants concernent le tracé des canalisations d'évacuation des eaux claires et des eaux usées, l'implantation de l'extension du sas d'entrée en ordre contigu avec la parcelle 32 et la conception du mur mitoyen aux niveaux des combles et surcombles. Les époux Virginio et Anne-Lise Zambon-Cretegny ont déposé des écritures complémentaires les 26 mars et 4 avril 2013 et les époux Bullukian se sont déterminés le 4 avril 2013 sur le recours.

b) La municipalité a déposé sa réponse au recours le 8 avril 2103 en concluant au rejet du recours. Les époux Bullukian ont déposé une demande de levée de l'effet suspensif le 22 avril 2013 sur laquelle les époux Zambon-Cretegny se sont déterminés le 27 avril 2013 et la municipalité le 29 avril 2013. Par décision du 10 mai 2013, le tribunal a retiré l'effet suspensif au recours en ce qui concerne les travaux autorisés par le permis de construire n° 196 du 19 mai 2011. La municipalité a déposé des déterminations complémentaires le 19 juin 2013 sur lesquelles les époux Zambon-Cretegny se sont prononcés le 8 juillet 2013.

c) Le tribunal a tenu une audience le 14 août 2013 à Reverolle. Le compte-rendu résumé de l'audience comporte les précisions suivantes:

"(…) Il est procédé à l’examen des divers griefs soulevés par les recourants.

1) Les canalisations :

Le recourant déclare qu’il n’existe aucune servitude à ce sujet et que les canalisations se trouvant sur sa propriété lui appartiennent. Le recourant a dessiné des plans qu’il expose aux parties et au tribunal. Il précise qu’il a dû faire les travaux de mise en séparatif et indique quel est le tracé de la canalisation des eaux usées qui se raccorde sur la canalisation publique située sous la voie publique.

Il relève que le tracé des eaux claires et usées tel que défini dans les premiers plans d’enquête ne correspond pas à celui de l’enquête complémentaire. Me Schlaeppi indique que le tracé exact n’a pu être établi que lors de l’enquête complémentaire et que les plans ont été corrigés. Le recourant précise que l’hoirie Cretegny (composée de son épouse et de ses deux beaux-frères) n’avait pas voulu, à l’époque, participer au financement de la canalisation réalisée par les époux Genet, raison pour laquelle lui et son épouse ont dû, par la suite, procéder à l’installation d’une autre canalisation. ll confirme que son beau-frère avait créé une salle de bain dans le hangar et que celle-ci était raccordée sur son embranchement pour évacuer les eaux usées vers la canalisation publique. Selon le recourant, l’architecte des constructeurs serait parti du principe que toutes les canalisations se trouvant sur la propriété des constructeurs appartiennent à ces derniers. Le recourant prétend que les époux Genet auraient refusé de laisser les constructeurs se raccorder à leur canalisation. Il déclare refuser d’accorder une servitude aux constructeurs.

M. Bisatti prend la parole. Il indique être passé chez les recourants pour les informer que les travaux de construction allaient commencer. Il précise ne pas avoir parlé avec eux, à cette occasion, du problème des canalisations. M. Bisatti explique être allé ensuite trouver les époux Genet qui lui ont fait remarquer qu’en raison de la pente du terrain un raccordement sur leur canalisation ne serait pas possible.

Les constructeurs déclarent avoir acquis leur bien immobilier avec les servitudes liées à celui-ci. Le recourant fait remarquer que les ¾ d’une ancienne fosse à purin sont sur sa propriété; il précise qu’il utilise cette fosse pour récolter l’eau de pluie qu’il réutilise pour le jardinage.

Me Schlaeppi confirme que le tracé des canalisations a été corrigé sur les nouveaux plans. Il précise que le raccordement effectué par les constructeurs est conforme en tous points au règlement communal. Selon lui, les divers griefs soulevés par les recourants relèvent du droit privé et non du droit public.

Les constructeurs confirment que les travaux suivent leur cours. M. Bisatti déclare s’être branché sur la canalisation qui existait déjà dans la maison des constructeurs.

Le recourant déclare avoir procédé à un relevé des canalisations, qu’il a soumis au chef du bureau technique de la commune de l’époque. Mme Charlton White indique que cette personne est partie à la retraite. La syndique déclare ne pas avoir connaissance de ce document; elle explique que la municipalité est composée d’autres membres.

2) Le mur mitoyen :

Le recourant a également dessiné des plans à ce sujet, qu’il expose aux parties et au tribunal. Il indique que le mur mitoyen n’allait pas jusqu’à la hauteur du faîte dans le niveau des combles car une sorte de treuil ou de pont roulant avait été aménagé sous la poutre faîtière pour transporter le foin d’un endroit à l’autre de la grange. A son avis, le constructeur n’aurait pas rétabli le mur mitoyen sur toute la hauteur et n’aurait reconstruit que la partie se trouvant sur sa parcelle. Il précise que cette situation peut uniquement être constatée depuis sa propriété.

M. Bisatti indique qu’un mur anti-feu doit séparer les deux habitations, ce qui n’avait jamais été fait jusqu’à présent. Il précise avoir construit une cloison anti-feu, qui correspond aux normes ECA et qui devrait aussi assurer une bonne isolation phonique. Le recourant relève toutefois que cette cloison n’offre pas une bonne isolation phonique. M. Bisatti explique que les deux bâtiments des constructeurs et des recourants se trouvent sous une même toiture et une même charpente et que dans de telles situations il très difficile d’obtenir une bonne isolation phonique. Le recourant indique entendre les ouvriers parler entre eux. Les constructeurs déclarent que les combles ne seront pas habitables.

Me Schlaeppi estime que cette problématique de mitoyenneté relève du droit privé.

3) Le hall d’entrée :

Le recourant explique que suite au partage familial, une limite de propriété passe sur l’emplacement du couvert sur lequel s’appuie le hall d’entrée des constructeurs. Il indique que ce couvert n’a jamais été cadastré. Le recourant soulève la problématique de l’ordre contigu et se réfère à l’art. 4 al. 2 du RPGA. Selon lui, si un mur existe en contiguïté, on ne peut construire qu’en hauteur le long du mur, mais qu’on ne pourrait pas prolonger la contiguïté en profondeur. Le président fait part d’une jurisprudence fédérale qui ne limiterait pas la contiguïté en profondeur (ATF 1C_373/2008 du 13 janvier 2009, consid. 2.3.2)

M. Bisatti explique que la municipalité leur a proposé de construire un avant-toit au lieu d’un balcon (non conforme au règlement communal). Mme Charlton White précise que les toits plats sont interdits sur le territoire communal et la commune n’a pas autorisé le balcon projeté par les constructeurs, qui ont choisi une autre option, à savoir la construction d’un avant-toit.

Le recourant déclare que l’architecte des constructeurs lui a soumis au printemps 2012 des plans qui n’étaient pas conformes à ceux déposés lors de l’enquête publique, remarque qui n’a pas été acceptée et qui a donné lieu à une réponse blessante. Il explique que les rapports entre les parties se sont détériorés depuis lors.

Les constructeurs indiquent avoir remis les plans qui leur ont été délivrés par le notaire lors de la signature de l’acte de vente et qu’ils ignoraient que ces plans pouvaient présenter une divergence avec les plans de l’enquête principale.

En ce qui concerne l’effet suspensif, le recourant déclare que les constructeurs ont anticipé, par les travaux déjà réalisés, sur les travaux prévus par la demande complémentaire, ce qui s’explique par le fait que les plans de l’enquête complémentaire comportent des modifications de l’aménagement intérieur qui n’ont pas été signalées graphiquement comme une modification par rapport aux plans de l’enquête principale.

M. Bisatti fait remarquer que le recourant possédait un couvert qui empiétait au nord sur la propriété des constructeurs et que ces derniers ont pris à leur charge les travaux d’alignement de ce couvert, qui ont consisté à couper la toiture et à placer une nouvelle poutre sur le nouvel alignement en retrait de la limite de propriété. Ces travaux ont fait l’objet de la convention du 10 juillet 2012. Ils ont été réalisés et le couvert n’empiète plus sur la propriété des constructeurs.

L’audience est suspendue à 15h20 afin d’aller procéder à l’inspection locale, qui est reprise à 15h30 au croissement des chemins des Chaux et des Praz, en présence des mêmes parties. (…).

Ils visitent la salle de bain aménagée dans le hangar et qui existait déjà lorsque les constructeurs ont acquis le bien immobilier. Le tribunal et les parties entrent dans la pièce donnant sur le jardin des constructeurs. Le recourant fait remarquer que M. Bisatti a demandé à ses ouvriers de connecter la canalisation des constructeurs à celle se trouvant dans leur jardin. M. Bisatti explique qu’il n’a fait qu’ utiliser les canalisations existantes.

Le tribunal et les parties montent visiter les étages supérieurs, puis ils examinent l’avant-toit réalisé par les constructeurs.

Ensuite, le tribunal et les parties se rendent sur la propriété des recourants. Le recourant explique que les eaux de pluie vont dans la fosse et précise que cette récolte d’eau provient uniquement de son toit.

Le président demande aux parties si une médiation serait envisageable. Les recourants expliquent que jusqu’à présent ils ne sont pas parvenus à s’entendre avec les constructeurs, mais qu’ils restent ouverts à des propositions. Les constructeurs expliquent avoir fait des propositions aux recourants afin de trouver une solution hors procédure judiciaire. Le président explique aux parties les principes de la médiation.

Le président demande aux parties si les travaux vont de l’avant. Il est expliqué que tous les travaux autorisés par le permis de construire du 19 mai 2011 se poursuivent conformément à sa décision sur effet suspensif. Toutefois, la décision concernant l’effet suspensif devrait être complétée pour préciser que les aménagements intérieurs sont réalisés conformément aux plans de l’enquête complémentaire.

Le président demande aux recourants s’ils maintiennent leur grief sur le hall d’entrée. Les recourants déclarent que s’ils peuvent obtenir une garantie selon laquelle eux aussi pourraient prolonger leur construction en contiguïté, alors ils retireraient ce grief. Le président leur explique que cette garantie ne peut pas leur être donnée.

Le recourant signale encore que des déchets provenant d’une partie de la toiture du hangar, empiétant sur la parcelle des constructeurs, ont été jetés sur sa parcelle. Il précise que ces déchets contiennent de l’amiante, il s’agit d’une toiture ondulée réalisée avec d’anciens matériaux « Eternit » en amiante ciment. Le tribunal et les parties se déplacent vers l’endroit indiqué par le recourant. Il est constaté l’existence de déchets de la toiture ondulée sur la parcelle des recourants. M. Bisatti estime qu’il ne lui incombe pas de procéder à l’évacuation de ces déchets et qu’il avait clairement annoncé qu’il ne s’occuperait pas des questions concernant l’amiante sur le chantier. Le recourant fait remarquer que la convention signée par les parties le 10 juillet 2012 règle ce point.

Le président informe les parties qu’un exemplaire du compte-rendu résumé de l’audience leur sera communiqué et qu’un délai leur sera imparti pour se déterminer sur le contenu de celui-ci et sur la proposition concernant une éventuelle médiation. Le président les informe également qu’elles seront invitées à produire les documents relatifs au relevé des canalisations et aux servitudes.(..)".

d) Les parties ont eu la possibilité de se déterminer sur le compte-rendu résumé de l'audience et le tribunal a pris une nouvelle décision sur effet suspensif le 25 octobre 2013 en retirant l'effet suspensif au recours dans la mesure où il concerne également les travaux faisant l'objet de la décision attaquée, travaux pouvant être réalisés aux risques et périls des constructeurs sur les aspects qui font l'objet du recours.

e) Les recourants Virginio et Anne-Lise Zambon-Cretegny ont encore adressé des courriers complémentaires au tribunal les 31 octobre 2013 et 29 novembre 2013. Le conseil mis en oeuvre par les constructeurs est intervenu auprès du tribunal par lettre du 13 décembre 2013. Il a aussi transmis au tribunal le 20 décembre 2013 une ordonnance de mesures provisionnelles du Tribunal d'arrondissement de la Côte du 16 décembre 2013 interdisant à Anne-Lise Zambon-Cretegny de fermer le transit des eaux usées en provenance des parcelles 226 et 331 de la Commune de Reverolle dans les canalisations sises sur la parcelle 32 et d'obstruer d'une quelconque manière ces canalisations.

Le conseil des époux Bullukian est encore intervenu les 11 et 13 décembre 2013 et il a produit une copie d'une lettre adressée par les époux Zambon le 18 mai 2009 au notaire Jean-Jacques de Luze à Morges concernant l'éventuelle création d'une servitude. Cette correspondance comporte le passage suivant:

"(…) 2 (Création d'une servitude).

Suite à l'évolution de cette vente il n'y a plus de motivation ni de raison légale de créer une servitude. Uniquement pour l'actuelle situation, nous tolérons (à bien plaire) que M. J.-L. Cretegny puisse continuer à déverser ses eaux usées dans notre conduite.

3 (Participation pour les frais de canalisations) (Fr. 6'203.85):

Puisque nous refusons de créer une servitude, nous prenons à notre charge tous les frais concernant ces travaux de canalisations y compris ceux réalisés sur sa propriété. (…)".

Cette correspondance et son annexe ont été transmises aux autres parties.

Considérant en droit

1.                      a) L’art. 89 al. 1 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) reconnaît la qualité pour recourir à quiconque ayant pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou ayant été empêché de le faire (let. a), étant "particulièrement" atteint par la décision attaquée (let. b) et ayant un intérêt digne de protection à l’annulation ou à la modification de celle-ci (let. c). L’art. 75 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 28 octobre 2008 (LPA-VD; RSV 173.36) reconnaît la qualité pour former recours à toute personne physique ou morale ayant pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou ayant été privée de la possibilité de le faire, qui est atteinte par la décision attaquée et qui dispose d'un intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée. Le législateur cantonal n’a pas repris la condition d’une atteinte spéciale ou particulière de l’art. 89 al. 1 let. b LTF. Cette différence rédactionnelle,  avait pour but d’éviter que le tribunal ne procède à un examen de la qualité pour recourir grief par grief (BCG séance du 30 septembre 2008, p. 33).

b) Sous cette réserve, le tribunal peut donc se référer à la jurisprudence fédérale relative à l’art. 89 al. 1 LTF pour définir la qualité pour recourir. Selon la jurisprudence fédérale, le recourant doit se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d'être prise en considération avec l'objet de la contestation. Le voisin direct de la construction ou de l'installation litigieuse a en principe la qualité pour recourir (ATF 121 II 171 consid. 2b p. 174; 115 Ib 508 consid. 5c p. 511). Cette qualité peut être reconnue même en l'absence de voisinage direct, lorsqu'une distance relativement faible sépare l'immeuble du ou des recourants de la construction litigieuse (cf. ATF 121 II 171 consid. 2b p.174 et la jurisprudence citée, où il est fait référence à des distances de 45 m, 70 m ou 120 m). Le critère de la distance n'est pas le seul déterminant; s'il est certain ou très vraisemblable que l'installation ou la construction litigieuse sera à l'origine d’immissions - bruit, poussières, vibrations, lumière, fumée - atteignant spécialement les voisins, même situés à une certaine distance, ces derniers peuvent avoir qualité pour recourir (ATF 136 II 281 consid. 2.3.1 p. 285; 133 II 249 consid. 1.3.1 p. 252, 468 consid. 1 p. 470 ; 125 II 10 consid. 3a p. 15; arrêt 1A.179/1996 du 8 avril 1997 in RDAF 1997 I p. 242). Le voisin doit en outre retirer un avantage pratique de l'annulation ou de la modification de l'arrêt contesté qui permet d'admettre qu'il est touché dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l'intérêt général des autres habitants de la commune (ATF 133 II 249 consid. 1.3.1 p. 252; Message précité, FF 2001 p. 4127; cf. ATF 120 Ib 431 consid. 1 p. 433). Il doit ainsi invoquer des dispositions du droit public des constructions dont l’application est susceptible d'avoir une incidence sur sa situation de fait ou de droit (ATF 137 II 30 consid. 2.2.3 et 2.3. p. 133ss).

Le Tribunal fédéral a précisé que l'intérêt pratique et concret du recourant consiste en ce que le projet de construction ne sera pas réalisé si le grief est admis. Par exemple, un intérêt digne de protection est reconnu au recourant qui fait valoir que l'accès au fonds voisin serait insuffisant dès lors que l'équipement est une condition à l'octroi du permis de construire. Il en va de même pour les griefs concernant la non-conformité à l'affectation de la zone, ou au nombre insuffisant de places de parc ou encore au choix des couleurs et des matériaux de construction (ATF 1C_317/2010 du 15 décembre 2010; 1C_236/2010 du 16 juillet 2010). Un intérêt digne de protection aux propriétaires riverains pour contester l'autorisation d'immerger deux corps-morts situés à 180 m de la rive en raison des restrictions à la vue dont ils jouissaient depuis le lac sur la rive opposée; cette situation suffisait pour considérer qu'ils étaient atteints de manière spéciale et directe et dans une mesure plus sensible que les autres administrés par l’installation litigieuse (ATF 1C_152/2012 du 21 mai 2012 consid. 2.2). Il a également reconnu un intérêt digne de protection aux recourants domiciliés dans le périmètre d'un plan de réaménagement routier de nature à entraîner une augmentation du trafic à l’horizon 2020 dans la rue desservant leur habitation (ATF 1C_417/2011 du 4 juin 2012 consid. 1.2).

c) En l'espèce, le recours a été déposé par Anne-Lise et Virginio Zambon-Cretegny. En sa qualité de propriétaire de la parcelle 32, Anne-Lise Zambon est directement touchée par le projet contesté dès lors qu'il s’agit d’une construction contiguë au bâtiment qu’elle possède sur la parcelle 32. Virginio Zambon, occupant avec son épouse l’habitation construite sur la parcelle 32, a également un intérêt digne de protection à contester la décision communale, notamment en raison des inconvénients qui peuvent résulter de la réalisation du projet contesté (places de stationnement, etc.). Le tribunal constate aussi que la plupart des actes de procédure ont été signés à la fois par Anne-Lise Zambon-Cretegny et son mari Virginio Zambon; tel est notamment le cas du recours déposé le 25 février 2013, de l’écriture complémentaire du 26 mars 2013, du mémoire complémentaire du 27 avril 2013, de la lettre adressée au tribunal le 8 juillet 2013, des déterminations sur la proposition de médiation du 31 octobre 2013,  de la lettre des recourants du 4 mars 2013 ainsi que des déterminations sur le compte rendu résumé de l'audience du 8 novembre 2013. On ne peut ainsi reprocher à Virginio Zambon d’agir seul dans le cadre de la procédure de recours relative au permis de construire n° 196-2 délivré le 4 février 2013. Il n’est donc pas nécessaire de déterminer si le pouvoir de représentation de l’époux résultant de l’article 166 CC autoriserait le recourant Virginio Zambon à agir au nom de son épouse car cette disposition ne s'applique en principe pas à la représentation d'un conjoint par l'autre dans une procédure judiciaire.

2.                      a) Le permis de construire complémentaire n° 196-2, délivré le 4 février 2013 par la municipalité, a pour effet d’autoriser une modification du raccordement des canalisations d’évacuation des eaux claires et des eaux usées, tel qu’il était prévu par le premier permis n° 196 délivré le 19 mai 2011. En effet, le plan de situation du premier projet autorisé en 2011 prévoit des canalisations d’évacuation des eaux usées et des eaux claires qui longent la limite nord-est de la parcelle 32 et qui traversent en diagonale la partie de la parcelle 226 qui longe le chemin des Praz-Communaux pour se raccorder sur le collecteur public situé au carrefour formé par la rue de l’Eglise et le chemin des Chaux. Le plan de situation de l’enquête complémentaire montre un raccordement des eaux de pluie du bâtiment ECA 232 sur l’ancienne fosse à purin, constituant ainsi un réservoir d’eau, qui lui-même s’écoule par un collecteur traversant la parcelle 32 jusqu’au raccordement aux canalisations publiques sur le chemin des Chaux. Par ailleurs, le projet prévoit d’utiliser la canalisation des eaux usées du bâtiment ECA 80. Lors de l’audience, le recourant a précisé qu’à l’époque, l’hoirie Cretegny, n’avait pas voulu participer au financement de la canalisation réalisée par les époux Genet, qui traverse les parcelles 331 et 226. C’est pour ce motif que le recourant et son épouse ont dû créer une autre canalisation qui traverse la parcelle 32 pour se raccorder directement sur le collecteur public. Il précise que le raccordement provisoire de la salle de la bain située dans le hangar de la parcelle 331 avait été admis à bien plaire.

Il ressort de ces circonstances que les canalisations d’évacuation des eaux claires et des eaux usées du bâtiment ECA 80, traversant la parcelle 32, semblent avoir été réalisées récemment par les recourants, vraisemblablement pour s’adapter à l’exigence d’une mise en séparatif du bâtiment ou à la suite de l’abandon de l’exploitation agricole. Par ailleurs, il est admis que les constructeurs ne bénéficient d’aucune servitude leur permettant d’utiliser les canalisations des recourants sur la parcelle 32 pour l’évacuation des eaux claires et des eaux usées. La pièce produite par le conseil des constructeurs le 13 décembre 2013 confirme qu’il n’existe aucune servitude permettant aux propriétaires de la parcelle 226 d’utiliser les canalisations réalisées par les recourants sur la parcelle 32. Il ressort au contraire de ce document que les recourants ont dépensé 6'203.85 fr. en frais de construction de leur canalisation, somme qu’ils ont entièrement pris à leur charge en refusant de créer une servitude au profit de la parcelle voisine 226. Il n’y a donc aucune servitude, ni même aucun contrat tacite ou implicite, ni encore aucune autre forme d’accord permettant aux propriétaires de la parcelle 226 d’utiliser les canalisations d’eaux claires et d’eaux usées existantes sur la parcelle 32 des recourants.

b) L’art. 104 al. 3 de la loi vaudoise sur l’aménagement du territoire et les constructions du 4 décembre 1985 (LATC; RSV 700.11) prévoit que la municipalité n'accorde le permis de construire que lorsque le bien-fonds est équipé pour la construction ou qu'il le sera à l'achèvement de la construction et que « les équipements empruntant la propriété d'autrui sont au bénéfice d'un titre juridique ». En cas de doute sur l'ampleur des droits conférés par une servitude, l'autorité doit attendre que cette incertitude touchant un droit privé soit levée avant de délivrer le permis de construire. Ainsi, lorsque le contenu d'une servitude de passage n'est pas facilement déterminable ou lorsque le contrat constitutif de la servitude ne peut pas être interprété de manière sûre, le permis de construire doit être refusé jusqu'à ce que le constructeur puisse suffisamment justifier de son droit de passage, au besoin avec l'aide du juge civil compétent (AC.2012.0242 précité consid. 3a; AC.2012.0163 et AC.2012.0168 du 17 avril 2013 consid. 3a). Cela étant, la municipalité qui accorde un permis de construire peut connaître des questions préjudicielles de droit civil à propos desquelles le juge civil n’a pas encore statué et lorsqu'elle peut y répondre facilement et de manière sûre. En revanche dès qu'il existe un doute sur le contenu ou sur l'étendue des droits civils dont elle a à connaître, elle doit renvoyer les parties à agir devant le juge civil compétent et subordonner l'octroi du permis de construire à la décision de ce dernier (cf. arrêts précités AC.2012.0242 consid. 3a; AC.2012.0163–AC.2012.0168 consid. 3a; AC.2011.0088 du 5 octobre 2012 consid. 2b). Lorsque la municipalité est saisie d'une demande de permis de construire pour un projet qui s'implante sur l'assiette d'une servitude, elle n'a pas à se préoccuper de l'accord du titulaire de la servitude (AC.2011.0231 du 10 janvier 2012 consid. 2a et les références citées).

L'art. 104 al. 3 LATC exige que les équipements empruntant la propriété d'autrui soient au bénéfice d'un titre juridique, afin de créer une situation de droit privé qui soit claire pour l'autorité administrative et permette de prévenir les éventuels conflits ultérieurs. Le droit d'établir une conduite et d'en user peut résulter de la constitution d'une servitude, soit parce que le propriétaire a accepté volontairement de la constituer, soit parce que la servitude a été constituée pour répondre aux obligations légales prévues aux art. 691 et 693 CC (voir arrêt AC.2012.0242 du 22 mars 2013 consid. 3a). La constitution de la servitude nécessite une convention en la forme écrite ou un jugement formateur et devra, du moins lorsqu’elle n’est pas apparente, être inscrite au registre foncier. Il en va toutefois autrement lorsque la servitude de conduite est fondée sur une restriction légale au sens de l’art. 691 CC; dans ce cas, la servitude (apparente ou non), prend naissance sans inscription (art. 691 al. 3 CC; ATF 5C.278/2001 du 13 février 2002 consid. 4c).

c) Il convient donc de déterminer si les recourants peuvent être soumis à une obligation légale de laisser le passage des eaux claires et des eaux usées des constructeurs dans leurs canalisations.

aa) Aux termes de l'art. 691 al. 1 CC, le propriétaire est tenu, contre réparation intégrale et préalable du dommage, de permettre l'établissement, à travers son fonds, d'aqueducs, de drains, tuyaux de gaz et autres, ainsi que de conduites électriques aériennes ou souterraines; il n'y est toutefois obligé que s'il est impossible d'exécuter ces ouvrages autrement ou sans frais excessifs. Cette disposition introduit une restriction légale de la propriété foncière, imposant à un propriétaire de supporter, à certaines conditions, que des conduites traversent son fonds (PAUL-HENRI STEINAUER, Les droits réels, tome II, 3e éd. 2002, n. 1847; HEINZ REY, Basler Kommentar, ZGB II, 3e éd. 2007, n. 1 ad art. 691 CC). Le propriétaire qui veut établir la conduite dispose ainsi, de par la loi, d'une créance propter rem lui permettant d'exiger de tout propriétaire actuel du fonds voisin la constitution d'une servitude de conduite, par voie amiable ou par jugement. La convention ou le jugement sont tous deux constitutifs; il n'est donc pas nécessaire que la servitude soit inscrite au registre foncier, mais l'inscription est possible à la requête de l'ayant droit (art. 691 al. 3 CC; ATF 5C.278/2001 du 13 février 2002 consid. 4c; ARTHUR MEYER-HAYOZ, Berner Kommentar, n. 75 ad art. 691 CC).

bb) Les conditions légales permettant au propriétaire d'obtenir du voisin la constitution d'une servitude de conduite sont les suivantes: le propriétaire du fonds dominant ne doit pas se trouver dans un cas où il pourrait demander l'expropriation (art. 691 al. 2 CC); le propriétaire du fonds grevé n'est tenu de permettre l'établissement de la conduite à travers son fonds que s'il est impossible d'exécuter l'ouvrage autrement ou sans frais excessifs et il a en outre le droit d'obtenir la réparation intégrale du dommage qu'il subit (art. 691 al. 1 CC). Pour juger si les coûts sont excessifs, il ne suffit pas d'examiner la valeur de la conduite. Il faut comparer la charge qu'entraînera la constitution de la servitude pour le propriétaire contraint de permettre le passage de la conduite sur son fonds et le bénéfice que le propriétaire du fonds dominant en tirera. A défaut d'accord entre les parties, l'autorité saisie du litige doit par conséquent procéder à une pesée des intérêts des parties en présence pour décider si le propriétaire doit tolérer le passage des conduites sur son fonds ou s'il paraît plus équitable d'imposer une autre solution au propriétaire qui requiert l'établissement de la conduite (ATF 136 III 269 consid. 5.1 et les références doctrinales citées).

cc) En l’espèce, la condition particulière fixée à l’art. 691 al. 1 CC relatif à l’impossibilité d’équiper autrement le fond ou de l’équiper avec un coup excessif n’est manifestement pas remplie. En effet, la première demande de permis de construire qui a fait l’objet du permis 196 délivré en 2011 prévoyait un autre tracé pour les canalisations d’évacuation des eaux claires et usées, en longeant la limite de la parcelle 32 et en traversant ensuite la parcelle 226 pour se raccorder sur les canalisations publiques existantes au carrefour formé par le chemin des Chaux et la rue de l’Eglise. Un autre tracé est donc possible. Son coût apparaît au surplus admissible puisque la demande de permis de construire prévoit une estimation du coût des travaux de transformation à 200'000 fr., comprenant la création de nouvelles canalisations de raccordement sur la seule parcelle 226. En tous les cas, l’évacuation des eaux claires et des eaux usées par une canalisation selon le tracé projeté et autorisé par le permis 196 n’est ni impossible ni excessivement coûteuse et les recourants ne sauraient donc être astreints à l’obligation de tolérer le déversement des eaux usées et des eaux claires sur leurs propres canalisations, prévue par l’art. 691 al. 1 CC.

La jurisprudence citée par les constructeurs (ATF 97 II 371) n’est pas pertinente sur ce point puisqu’elle concerne essentiellement les frais de déplacement d’une conduite souterraine qui n’a pas fait l’objet d’une servitude inscrite au registre foncier. Le tribunal a certes jugé que le propriétaire qui s’opposait au passage d’une canalisation d’évacuation des eaux usées sur sa parcelle pouvait commettre un abus de droit (AC.2012.0242 du 22 mars 2013), mais la situation de fait jugée dans cette affaire n’est pas comparable: l’affaire concernait une canalisation existante, réalisée en 1953 sur le fond voisin par les constructeurs, canalisation dont l’existence avait été admise en 1990, par les propriétaires du fond concerné, ils étaient ainsi tenus de tolérer l’existence de cette conduite en application de l’art. 191 CC (voir AC.2012.0242 du 22 mars 2013 consid. 3). Or, en l’espèce, les constructeurs n’ont jamais construit ni participé au financement d’une canalisation sur la parcelle 32, dont l’usage a seulement été toléré à titre provisoire et à bien plaire pour le frère de la recourante.

d) Les constructeurs ne bénéficient d’aucun titre juridique leur permettant d’utiliser les canalisations des recourants sur la parcelle 32. Il en résulte que la condition de l’art. 104 al. 3 LATC selon laquelle l’équipement empruntant la propriété d’autrui doit être au bénéfice d’un titre juridique n’est pas remplie, de sorte que le terrain ne peut être considéré comme équipé (voir notamment arrêt AC.2012.0388 confirmant que les conduites d’évacuation des eaux doivent être au bénéfice d’un titre juridique pour que le bien-fonds puisse être considéré comme équipé). Or, l’équipement du bien-fonds pour la construction est une des conditions de base essentielle à l’octroi du permis de construire (art. 22 al 2 let. b de la loi fédérale sur l’aménagement et du territoire du 22 juin 1979; LAT; RS 700). L’obligation de raccorder les eaux usées à une canalisation publique aboutissant à une station centrale d’épuration résulte d’une obligation prévue par la loi fédérale sur la protection des eaux du 24 janvier 1991 (LEaux; RS 814.20), qui prévoit que les eaux polluées produites dans le périmètre des égouts publics doivent être déversées dans les égouts (art. 11 al. 1 LEaux) et traitées (art. 7 al. 1 LEaux). Le permis de construire ne respecte pas l’exigence particulière de l’art. 22 al. 2 let. b LAT, ni celle de l’art. 104 al. 3 LATC et doit donc être annulé.

3.                      Les recourants considèrent que le projet contesté ne respecterait pas les prescriptions de la réglementation communale concernant l’ordre contigu par l’extension en ordre contigu du sas d’entrée au nord-ouest du bâtiment existant.

a) Les parcelles 226 et 32 sont comprises dans la zone village du plan général d'affectation de la commune de Reverolle, approuvé par le département compétent le 10 juillet 2007 (PGA). L’art. 4 du règlement général sur l’aménagement du territoire et les constructions du 10 juillet 2007 (ci-après: RPGA) régit dans les termes suivants l’ordre des constructions :

"(…) art. 4.2 Ordre des constructions

Dans la zone village et dans la zone d’utilité publique, les bâtiments peuvent être édifiés soit en ordre contigu, soit en ordre non contigu. L’ordre contigu n’est toutefois admis que dans les cas suivants :

- lorsqu’il est existant

- lorsque le propriétaire voisin a déjà construit sur la limite commune

- lorsque les propriétaires des biens-fonds où il s’exerce sont d’accord avec ce mode d’implantation.

Dans les autres zones, l’ordre non contigu est de règle."

b) Dans son ouvrage sur les "distances, coefficients et volumétrie des constructions en droit vaudois", Jean-Luc Marti donne la définition suivante de l'ordre contigu : "L'ordre contigu est caractérisé par l'implantation d'immeubles adjacents séparés par une limite de propriété et un mur mitoyen. En outre, pour les communes ou villes qui sont en possession d'un plan fixant les limites des constructions, les bâtiments construits en ordre contigu doivent respecter la limite fixée par ledit plan. Il faut toutefois relever que si toutes les communes ne disposent pas d'un tel plan, en revanche toutes sont régies, en principe, par des alignements déterminés par la distance mesurée à partir de l'axe de la voie publique. L'implantation des bâtiments construits en ordre contigu est déterminée dès lors plus ou moins précisément, d'une part, par une limite de propriété à laquelle l'une des façades au moins du bâtiment doit obligatoirement être édifiée, d'autre part, par un alignement ou une limite des constructions" (Jean-Luc Marti, Distances, coefficients et volumétrie des constructions en droit vaudois, thèse Lausanne 1988 p. 41).

De son côté, la jurisprudence du tribunal a précisé que l'ordre contigu se caractérise usuellement par l'implantation sur un même alignement, ou en retrait de celui-ci, de bâtiments adjacents élevés en limite de propriété et séparés par des murs mitoyens ou aveugles, avec une profondeur maximum fixée pour ces derniers, au-delà de laquelle une distance à la limite de propriété doit être respectée pour les façades non contiguës (arrêts AC.2007.0090 du 26 novembre 2007; AC.2007.0006 du 12 septembre 2007; AC.2004.0104 du 8 décembre 2004; AC.1992.0234 du 7 avril 1994 et AC.1990.7581 du 1er juin 1992, publié à la RDAF 1992, p. 485). Par ailleurs, une ancienne jurisprudence de la Commission cantonale de recours en matière de construction (ci-après: commission de recours), précisait que l'ordre contigu est en général prescrit en vue de créer des rues proprement dites dont toutes les maisons sont contiguës (RDAF 1945 p. 198). C'est pourquoi la construction des bâtiments en ordre contigu n'est en principe admise que le long des voies publiques, de sorte que la longueur maximum des murs mitoyens qui détermine la profondeur des constructions, doit être calculée à partir de l'alignement (RDAF 1970 p. 273). En outre, lorsque le règlement communal ne prévoit pas de règle dans l'ordre contigu pour fixer sur quelle profondeur vont s'ériger les constructions dès l'alignement, il y a lieu d'appliquer par analogie les dispositions de l'ordre non contigu relatives aux distances entre bâtiments et limite de propriété (RDAF 1965 p. 158).

c) L’art. 4.2 RPGA ne prévoit pas de règle pour fixer la profondeur maximum des murs mitoyens. En appliquant une disposition du plan de quartier "Au Revelin" sur le territoire de la Commune de Grandson concernant la contiguïté, le tribunal a été confronté à une situation comparable où la règle communale ne précisait pas la profondeur du mur mitoyen en mentionnant seulement que: "là où elle est prévue par le plan, la contiguïté des constructions est obligatoire. La contiguïté peut également être réalisée par des garages hors-sol." Dans cette affaire, le tribunal a considéré que la contiguïté n’avait pas vraiment pour but de créer une rue le long de laquelle les immeubles seraient construits en ordre contigu. Le plan de quartier prévoyait la contiguïté seulement à l’intérieur du périmètre d’implantation pour relier deux constructions ensemble dans un but d’intégration visant à créer un ensemble architectural homogène. Or, l’un des éléments essentiels caractérisant l’ordre contigu était la profondeur du mur mitoyen, ou du mur séparant les deux bâtiments. Une jurisprudence de l’ancienne Commission de recours précisait que la profondeur du mur mitoyen devait être égale à la distance de la limite de propriété en l’absence de disposition communale fixant une telle profondeur (voir arrêt précité RDAF 1965 p. 158). Le tribunal s’est toutefois écarté de cette jurisprudence en relevant que dans certaines zones de village, les distances entre bâtiment et limite de propriété étaient réduites à 3 m, soit une profondeur insuffisante pour la viabilité d’une construction contiguë. Une profondeur de 6 m. ne correspondait pas non plus à la profondeur habituelle d’une maison d’habitation contiguë, qui varie entre 8 et 12 m. (voir arrêt AC.2007.0190 du 27 juin 2008).

Pour combler la lacune de la réglementation communale sur l’ordre contigu concernant la profondeur des murs mitoyens, le tribunal a estimé qu’il convenait d’examiner dans chaque situation particulière les caractéristiques propres du cas et les objectifs recherchés par la contiguïté, en tenant compte de l’ensemble des circonstances. Ainsi, dans la situation où la contiguïté est existante, la profondeur du mur mitoyen ou contigu devrait en principe être limitée à celle du mur contigu des bâtiments existants afin que la contiguïté ne puisse être créée sur un espace non contigu par un prolongement excessif du mur mitoyen. Le tribunal a ainsi posé le principe selon lequel en l’absence d’une règle fixée par la réglementation communale sur la profondeur des murs mitoyens ou contigus, une nouvelle contiguïté ne pouvait pas être créée sur un espace aménagé selon les règles de l’ordre non contigu.

Dans l’affaire du plan de quartier "Au Revelin" à Grandson, le tribunal était en présence d’une construction principale construite en contiguïté avec le garage de la parcelle voisine, sur une profondeur de 6 m. Le projet contesté prévoyait d’augmenter la profondeur du mur contigu de 6 m. à 10 m. par la construction d’un imposant mur en béton en limite de propriété dans un espace qui était utilisé comme jardin par le propriétaire voisin. Or, en prolongeant de 4 m la profondeur du mur contigu, le projet avait pour effet de créer une contiguïté de fait sur un espace où la villa des voisins avait été construite en respectant la distance de 6 m. à la limite de propriété. Cette situation avait pour effet de créer une contiguïté par un prolongement excessif du mur mitoyen dans une situation de non contiguïté et sans l’accord express du voisin, permettant ainsi la création d’une façade pignon aveugle en limite de propriété relativement imposante, sur un espace qui assurait le prolongement extérieur du logement. Le permis de construire a donc été annulé pour le motif que la nouvelle contiguïté dépassait la profondeur du mur mitoyen existant (arrêt AC.2007.0190 du 27 juin 2008, consid. 1).

Toutefois, par arrêt un du 13 janvier 2009, le Tribunal fédéral a estimé que la solution retenue par le tribunal était clairement contraire au droit pour les motifs suivants: la construction projetée était située dans un périmètre d’implantation d’un plan de quartier qui prévoyait un ordre contigu obligatoire. Or, la profondeur admissible du mur mitoyen ou contigu était déterminée par les limites du périmètre d’implantation du plan de quartier et le règlement communal n’empêchait donc pas une extension de la contiguïté le long de la limite de propriété à l’intérieur du périmètre en cause. (voir ATF 1C_373/2008 du 13 janvier 2009 consid. 2.3.2).

En l’espèce, la règle communale concernant la contiguïté ne comporte pas de disposition sur la profondeur des murs mitoyens. Toutefois, comme dans l’affaire du plan de quartier "Au Revelin" de Grandson, la réglementation fixe une limite des constructions entourant au nord, à l’ouest et au sud les bâtiments construits sur les parcelles 32, 226 et 331. Cette limite de construction, dans ce secteur particulier de la zone de village, présente les mêmes caractéristiques qu’un périmètre d’implantation des constructions d’un plan de quartier. Or, en suivant le raisonnement et la solution juridique du Tribunal fédéral dans l’arrêt précité, on doit admettre que la contiguïté peut être autorisée jusqu’en limite du périmètre d’implantation, c'est-à-dire jusqu’à la limite des constructions longeant le chemin des Chaux. Dès lors que l’extension de l’ordre contigu sur la partie nord-ouest du bâtiment ECA 232 (parcelle 226) reste à l’intérieur de la limite des constructions, l’extension de l’ordre contigu est admissible et doit être autorisée comme étant conforme à la réglementation communale selon l’interprétation qui résulte de la jurisprudence fédérale précitée. C’est donc à juste titre que la municipalité a autorisé l’extension du hall d’entrée en limite de propriété sur une profondeur de 2 m. La décision communale doit donc être confirmée sur ce point.

4.                      Les recourants reprochent aux constructeurs de n’avoir pas rétabli le mur mitoyen dans l’espace des combles et surcombles.

a) Le projet qui a fait l’objet du premier permis de construire en 2011 laissait le volume des surcombles inhabitable; les plans du dossier de la demande de permis de construire (coupe AA) portaient l’indication suivante: "à construire: mur de séparation entre les combles voisins". Le projet modifié par l’enquête complémentaire prévoit d’aménager un local technique avec deux velux dans le volume des surcombles. Le local technique comporte une chaudière à gaz ainsi qu’un chauffe-eau de 500 litres. Le plan des surcombles ne mentionne pas la composition du mur mitoyen ou du mur contigu séparant les bâtiments des parcelles 32 126. Il semble que seul des panneaux auraient été installés dans l’espace ouvert qui reliait les combles des deux constructions contiguës. En tous les cas, les plans et les coupes ne comportent aucune indication à ce sujet.

b) Selon l'art. 108 al. 2 LATC, le règlement cantonal détermine pour les différents modes de construction et catégories de travaux, les plans et les pièces à produire avec la demande de permis de construire. L'art. 69 du règlement d'application du 19 septembre 1986 de la loi sur l'aménagement du territoire et les constructions (RLATC; RSV 700.11.1) prévoit que le dossier de la demande de permis de construire doit comprendre notamment les plans à l'échelle du 1:100 ou du 1:50 des sous-sols, rez-de-chaussée, étages et combles avec destination de tous les locaux et l'indication des mesures de prévention contre les incendies (ch. 2) ainsi que les coupes nécessaires à la compréhension du projet comprenant les profils du terrain naturel et aménagé (ch. 3). Pour les transformations, agrandissements et surélévations d'immeubles, les plans doivent en outre comporter les indications suivantes :

"- Etat ancien : teinte grise

- Démolition : teinte jaune

- Ouvrage projeté : teinte rouge." (art. 69 ch. 9 RATC)."

L'art. 3 al. 1 de la loi sur la prévention des incendies et des dangers résultant d'éléments naturels du 27 mai 1970 (LPIEN; RSV 963.11) délègue au Conseil d'Etat la compétence d'édicter les prescriptions d'exécution pour la construction, la transformation, l'entretien et l'exploitation des bâtiments, ouvrages et installations de tout genre (let. a) ainsi que pour les mesures générales et spéciales de préventions (let. b). Il peut notamment déclarer applicables avec force de loi les normes techniques admises par les autorités fédérales, la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accident ou des organisations professionnelles. L'art. 1er du règlement concernant les prescriptions sur la prévention des incendies du 14 septembre 2005 (RPPI; RSV 963.11.2) prévoit que les normes de protection incendie (26.03.2003) de l'Association des établissements cantonaux d'assurance contre les incendies (AEAI) sont applicables dans le canton de Vaud (ch. 1), de même que les directives de la même association (ch. 2), en particulier celles concernant les distances de sécurité et les compartiments coupe-feu.

c) Il ressort de la norme protection incendie de l’AEIA du 26 mars 2003 que les bâtiments contigus doivent faire l’objet d’une séparation par un compartiment coupe feu (art. 32 et suivants). En outre, la directive de protection incendie concernant les installations thermiques de l’AEIA du 26 mars 2003 fixe des exigences particulières concernant les parois situées derrière les appareils de chauffage (ch. 4.1.12 de la directive). Or, dans le cas d’espèce, les plans de la demande complémentaire de permis de construire ne permettent pas de vérifier si ces exigences sont respectées. Il manque en particulier une coupe sur le mur mitoyen qui permet d’en définir les caractéristiques. Les plans ne comprennent aucune indication sur les mesures de protection requises en matière de lutte contre les incendies pour les constructions contiguës et les installations thermiques, la nature des matériaux utilisés pour la séparation des bâtiments dans le volume des combles et surcombles n’est en outre pas indiquée. Cette situation ne permet pas non plus de vérifier comment les constructeurs envisagent de construire l’isolation phonique entre les deux bâtiments de manière à répondre aux exigences prévues par les art. 32 à 35 de l’ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986 (OPB; RS 814.41). Les plans de la demande de permis de construire devraient en effet comporter les indications nécessaires sur la composition de l’élément de séparation entre les constructions, conformément aux conditions des art. 33 al. 2 et 34 al. 1 let. c OPB. En l’occurrence, on ignore en particulier si l’on est en présence de deux murs contigus séparés par une isolation ou d’un seul mur mitoyen.  Or, la jurisprudence a précisé que les plans de la demande de permis de construire doivent comporter, en cas de contiguïté, le relevé du mur contigu du propriétaire voisin avec l'indication des matériaux utilisés sur son fonds (arrêt AC.1999.0206 du 23 mai 2001 consid. .2), les plans et coupes doivent indiquer aussi la nature des éléments prévus pour assurer l'isolation phonique entre les deux bâtiments ainsi que les mesures de lutte contre l'incendie conformes aux directives de l'AEAI (arrêt AC.2000.0044 du 26 octobre 2000 consid. 3).

En l’espèce, les plans des différents étages du projet, de même que les coupes sur les murs contigus ou mitoyens ne sont pas conformes à la jurisprudence précitée ni d’ailleurs à l’art. 69 ch. 2, 3 et 9 RLATC et ne respectent pas non plus l'exigence de l’art. 34 OPB concernant la composition du mur de séparation intérieur entre les deux logements (exigence qui est reprise par l’art. 69 ch. 11 let.c RLATC). Le permis de construire doit aussi être annulé pour ce motif et il appartient donc aux constructeurs de produire un nouveau dossier conforme à ces exigences.

5.                      a) Il résulte des explications qui précèdent que le recours doit être admis et la décision attaquée annulée. Il appartiendra aux constructeurs de déposer un nouveau dossier de demande de permis de construire conforme aux considérants du présent arrêt en ce qui concerne la production d’un titre juridique pour le passage des canalisations d’évacuation des eaux usées et des eaux claires sur la parcelle 32 ou sur un autre bien fonds dont ils ne sont pas propriétaires ou alors de présenter  un nouveau tracé de ces canalisations sur la parcelle 226. Le dossier devra également comporter le détail de la composition du mur mitoyen ou contigu séparant le bâtiment de la parcelle 226 de celui des recourants construit sur la parcelle 32, avec l’indication des mesures de prévention d’incendie au niveau des combles et surcombles et la composition des matériaux utilisés pour assurer une isolation phonique conforme aux art. 32 à 35 OPB.

b) Comme un nouveau dossier de demande de permis complémentaire doit être déposé, il appartiendra encore aux constructeurs de produire le diagnostic amiante requis à plusieurs reprises à juste titre par la municipalité. En effet, les matériaux composant le couvert empiétant sur la parcelle 226 sont devenus partie intégrante du fonds en application de l’art. 671 al. 1 CC, et donc les constructeurs sont donc devenus propriétaires de la partie de la toiture en « Eternit » ondulé du couvert empiétant sur la parcelle 226 par l’acquisition de ce bien fonds. Ils sont par conséquent responsables, par l’intermédiaire de leur mandataire, de la manière dont ces matériaux sont traités ou ont été traités. Or, l’inspection locale a permis de constater que les constructeurs ont entreposé les déchets de la toiture en « Eternit » sur la parcelle voisine  n° 32 propriété des recourants. Ils sont donc tenus d’entreprendre les démarches nécessaires au traitement et à l’élimination de ces matériaux et de produire à cet effet le diagnostic amiante prévu par l’art. 103a LATC. Il appartiendra ensuite à la municipalité de statuer à nouveau sur la demande de permis de construire en fonction de ces éléments nouveaux. Les modifications qui en résultent étant toutefois de peu d’importance, elles pourront être dispensées de l’enquête publique au sens de l’art. 111 LATC, mais la nouvelle décision municipale sur le permis de construire devra toutefois être notifiée aux opposants qui sont intervenus lors de l’enquête complémentaire avec l’indication des voies et délais de recours.

c) Le tribunal doit encore statuer sur les frais et dépens (art. 91 LPA-VD applicable par renvoi de l'art. 99 LPA-VD). Les frais et dépens sont en principe supportés par la partie qui succombe (art. 49 al. 1 et 55 al. 2 LPA-VD). Lorsque la procédure met en présence, outre le recourant et l'autorité intimée, une ou plusieurs autres parties dont les intérêts sont opposés à ceux du recourant, c'est en principe à cette partie adverse déboutée, à l'exclusion de la collectivité publique dont la décision est annulée ou modifiée, d'assumer les frais et dépens (RDAF 1994 p. 324 ainsi que les arrêts AC.2008.0104 du 15 juin 2009 consid. 11 et AC.2007.0301 du 27 novembre 2008 consid. 13; pour les exceptions voir les arrêts AC.2010.0272 du 28 octobre 2011 consid. 8 et AC.2007.0081 du 16 juin 2008 consid. 5).

En l’espèce, les conditions d’une telle exception ne sont pas remplies de sorte que les frais de justice doivent être mis à la charge des constructeurs solidairement entre eux. Cette solution se justifie par le fait que les constructeurs sollicitent l’intervention de l’autorité dans le but d’un propre avantage économique leur permettant de mettre en valeur et de construire sur leur bien-fonds. Il leur incombe donc au premier chef d’entreprendre toutes les démarches nécessaires pour s’assurer de la conformité de leur projet à la réglementation communale et cantonale. Toutefois, pour tenir compte équitablement du fait que l’un des griefs des recourants a été écarté, l’émolument de justice sera réduit à 1'500 francs. Il n’y a en outre pas lieu d’allouer des dépens aux recourants qui n’ont pas consulté un homme de loi.


 

Par ces motifs
 la Cour de droit administratif et public
du Tribunal cantonal
arrête:

 

 

I.                       Le recours est admis

II.                      La décision de la Municipalité de Reverolle du 4 février 2013 délivrant le permis de construire complémentaire n° 196-2 et levant l’opposition des recourants Virginio et Anne-Lise Zambon-Cretegny est annulée, le dossier étant retourné à la municipalité pour compléter l’instruction dans le sens des considérants et statuer à nouveau.

III.                    Un émolument de justice de 1'500 (mille cinq cents) francs est mis à la charge des constructeurs Christine-Anne et Jean-Manuel Bullukian solidairement entre eux.

IV.                    Il n’est pas alloué de dépens.

Lausanne, le 18 février 2014

Le président:                                                                                             La greffière:

 

Le présent arrêt est communiqué aux destinataires de l'avis d'envoi ci-joint.

Il peut faire l'objet, dans les trente jours suivant sa notification, d'un recours au Tribunal fédéral. Le recours en matière de droit public s'exerce aux conditions des articles 82 ss de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF - RS 173.110), le recours constitutionnel subsidiaire à celles des articles 113 ss LTF. Le mémoire de recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signé. Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l’acte attaqué viole le droit. Les pièces invoquées comme moyens de preuve doivent être jointes au mémoire, pour autant qu’elles soient en mains de la partie; il en va de même de la décision attaquée.